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3.3 Conclusion sur la cible acétylcholinestérase

4.2.2 Résultats des tests in vivo

Efficacité des dérivés de l’amitraze

Nous avons vu que l’amitraze est une molécule particulièrement efficace dans le traitement anti-varroa. La collaboration avec Vétopharma a apporté l’occasion de tester in vivo les quatre dérivés de l’amitraze (Figure 55).

Figure 55. Structures et poids moléculaires (g.mol-1) de l’amitraze et de ses quatre impuretés. Sont également mentionnés les pourcentages de formes protonées présentes à pH= 7,4 estimés par l’application MarvinSketch© (ChemAxon).

Un premier test à la concentration unique de 0,1 µg par abeille a été effectué. Le choix d’une concentration unique a été fait afin d’économiser le matériel biologique, et la concentration a été choisie en fonction de la dose efficace de l’amitraze. Ce premier test (Figure 56 A) a permis de montrer une efficacité significative du DMPF équivalente à celle de l’amitraze. En revanche,

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les trois autres impuretés n’ont pas montré d’effet sur le varroa. Aucune mortalité des abeilles n’a été observé à 24 heures lors de ces tests.

Figure 56. Mortalité des varroas à 24 heures (± écart-type) A : test à dose unique (n=3) B : test de l’amitraze et du DMPF en gamme de concentrations (n=5). * Différence significative selon test post-hoc de Tukey (p-value < 0,01).

Suite aux résultats du premier test, le DMPF, ainsi que l’amitraze pour servir de point de comparaison, ont été testé in vivo suivant une gamme allant de 1 à 0,0001 µg par abeille (Figure 56 B). L’analyse statistique montre une efficacité anti-varroa comparable entre l’amitraze et le DMPF. Les deux molécules sont efficaces jusqu’à 0,01 µg par abeille, et n’ont plus d’effet sur la survie des varroas à partir de 0,001 µg par abeille.

Dans le cadre de notre étude, nous nous sommes focalisés sur le DMPF, et non sur l’amitraze, car son poids moléculaire est plus faible, et nous avons déjà mentionné dans le Chapitre 3 le biais dans l’estimation des interactions des molécules de grand poids moléculaire par le logiciel GOLD. De plus, l’activité du DMPF est équivalente à celle de l’amitraze, et le DPMF correspond donc au fragment portant les caractéristiques nécessaires pour l’interaction avec le récepteur à l’octopamine du varroa, et la structure du DMPF est proche de celle de l’octopamine.

Une étude par docking a été réalisée afin de poser des hypothèses sur l’origine de la sélectivité du DMPF envers le varroa.

Les prédictions de positions du DMPF dans le modèle du varroa ont été faites avec le logiciel GOLD, avec deux contraintes de distances définies : entre l’azote N9 du ligand et l’oxygène OD1 de Asp34 ; 3,5 Å entre l’azote N11 du ligand et l’azote ND2 de l’Asn11. Ces contraintes ont été imposées dans le but de favoriser la formation de la liaison hydrogène entre le ligand et l’acide aspartique. Les résidus Asn11 et Asp34 ont été définis comme flexibles, en activant la librairie de rotamères proposée par le logiciel. Les résultats du docking ont été visualisés dans le logiciel PyMOL, qui permet de calculer les distance inter-atomiques.

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Les deux poses représentatives de notre étude de docking sont visibles sur la Figure 57 et la Figure 58.

Figure 57. Solution 1 du docking du DMPF (en vert) dans le modèle du récepteur à l’octopamine du varroa. Les pointillés noirs indiquent les liaisons hydrogènes potentielles.

Figure 58. Solution 2 du docking du DMPF (en vert) dans le modèle du récepteur à l’octopamine du varroa. Les pointillés noirs indiquent les liaisons hydrogènes potentielles.

Dans la première solution de docking (Figure 57), nous avons pu observer deux liaisons hydrogènes potentielles, la première entre l’azote N11 du ligand l’Asn11, une deuxième avec l’azote N9 du ligand et la Tyr213.

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Dans la deuxième solution de docking (Figure 58), deux liaisons hydrogènes se forment également, mais cette fois en impliquant les résidus Asn11 et Asp34. Le DMPF est décalé d’environ 2 Å par rapport à la première solution. Dans cette deuxième solution, le décalage empêche la formation de la liaison hydrogène avec la Tyr213, mais favorise une interaction de π-stacking avec la Phe113.

Il est intéressant de constater que dans la première solution, le DMPF interagit avec le résidu Asn11 du récepteur du varroa, alors que ce résidu est substitué par une sérine chez l’abeille (Ser122). Dans la deuxième solution, la Phe113 du varroa est substitué chez l’abeille par une leucine (Leu241), qui ne peut pas participer dans des interactions de π-stacking. Les deux solutions de docking sélectionnées permettent donc de proposer des hypothèses sur la sélectivité du DMPF vis-à-vis du récepteur à l’octopamine du varroa par rapport à celui de l’abeille.

La modélisation par homologie de séquences du récepteur à l’octopamine du varroa et de l’abeille nous a permis d’avancer deux hypothèses pour expliquer la sélectivité du DMPF. Dans l’état actuel des connaissances sur de ces deux récepteurs, il n’est pas possible de choisir parmi ces deux hypothèses. Les différences observées sont cependant prometteuses pour le développement de nouvelles molécules sélectives du récepteur du varroa.

Similarité de structure

Pour les raisons mentionnées auparavant, le criblage de la chimiothèque du CERMN, par similarité de structure, s’est fondé sur les structures du DMPF et de l'octopamine. Le logiciel Pipeline Pilot 9.5 a été utilisé pour ce criblage, avec le coefficient de Jaccard/Tanimoto pour évaluer la similarité. Trois fingerprints ont été utilisés : ECFP4, FCFP4 et MDLKey. Parmi les molécules ressorties de ces criblages, celles ayant au minimum un cycle aromatique et un centre basique ont été sélectionnées, afin de se rapprocher des groupements présents dans nos deux composés de référence, i.e. l’octopamine et le DMPF. Treize molécules ont ainsi été testées in

vivo en criblage, c’est-à-dire avec une seule concentration et une cagette par molécule (voir

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Figure 59. Structure de trois des molécules sélectionnées lors du criblage par similarité de structure. Sont mentionnés les poids moléculaires et les pourcentages de formes protonées présentes à pH= 7,4 estimés par l’application MarvinSketch© (ChemAxon).

Parmi les treize molécules, les trois présentées sur la Figure 59 ont montré un effet sur le varroa. L’efficacité anti-varroa de ces trois molécules a été testée, cette fois en cinq réplicats à deux concentrations. Les résultats sont présentés dans le Tableau 14.

Tableau 14. Résultats des tests in vivo après correction de Abbott. Mortalité moyenne (±écart-type) à 24 heures. Solvant : DMSO 30%.

Mortalité a Abeille Varroa SR5870 (n=5) 10 µg 0 % 15 % (± 0,86) 1 µg 0 % 15 % (± 1,17) SR5874 (n=5) 10 µg 0 % 0 % (± 1,30) 1 µg 0 % 0 % (± 0,70) SR3190 (n=5) 10 µg 0 % 94 % (± 0,77) * 1 µg 0 % 26 % (± 3,91) Témoin solvant (n=5) 0 % 0 % (± 0,84) Témoin positif (n=2) 0 % 100 %

a pourcentage de mortalité après correction d’Abbott (± écart-type)

* différence significative par rapport au témoin solvant (test post-hoc de Tukey, p-value < 0,01)

Les trois molécules n’entraînent pas de mortalité chez l’abeille. Le composé SR5874 ne montre finalement aucune efficacité, et le composé SR5870 présente une faible efficacité, qui n’est pas statistiquement significative. Le SR3190 entraîne 94 % de mortalité des varroas suite au dépôt de 10 µg par abeille, mais n’est plus efficace à 1 µg par abeille.

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