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PARTIE I : Génération de surface par usinage : influence sur le comportement

5. Modélisation de l’effet de la rugosité sur le comportement en fatigue

5.4. Résultats

Pour chaque éprouvette, le coefficient de concentration de contraintes local Kt

caractérisant l’état de surface a été calculé à partir de relevés de profils comme décrit au § 5.2.3. Les valeurs obtenues ont alors été utilisées dans l’équation (15) pour déterminer la limite de fatigue de chaque type d’éprouvette. Pour les durées de vie limitées, le nombre de cycles à rupture est calculé par

p i

f N N

N = + (20)

Où Ni est déterminé via Eq. (19) et Np est estimé par le calcul itératif en utilisant les

équations (18).

5.4.1. Eprouvettes « laboratoire »

Pour le premier lot d’éprouvettes (cf.3.2.) constitué essentiellement d’éprouvettes dont les surfaces ont été réalisées à l’étau-limeur, les résultats sont comparés aux résultats expérimentaux sur la Figure 4. Nous pouvons constater que la modélisation permet de décrire correctement l’ensemble de la courbe de Wolher pour des états de surface aux rugosités très différentes. En particulier, la prédiction est tout à faite cohérente avec les résultats expérimentaux pour les éprouvettes générées par balayage UGV avec une fraise boule. La modélisation choisie est donc capable de rendre compte du fait que cette dernière catégorie d’éprouvette présente une bien meilleure résistance à la fatigue que les éprouvettes UL22 et UL21 alors que sa rugosité Ra est plus élevée (11µm comparé à 7µm pour les UL2X).

Les résultats de limite de fatigue et de durée de vie limitée concernant les éprouvettes UT sont présentés Figure 12. L’erreur la plus importante est observée pour les éprouvettes UT11 et provient principalement de la limite de fatigue (environ 10%). Dans ce cas, les limites de la modélisation sont peut-être atteintes. En effet, pour de telles éprouvettes dont la direction des stries d’usinage est parallèle à l’axe de chargement, Kt est très faible. De plus, pour ces

éprouvettes UT11, les contraintes résiduelles de compression sont particulièrement élevées (cf. Tableau 2). L’hypothèse considérant que l’effet de la texture de surface (au sens de la rugosité) est prédominant comparé aux effets des autres paramètres de surface, peut ne pas être valide dans ce cas et peut conduire à sous estimer la limite de fatigue.

200 220 240 260 280 300 320 340 360 380 400

1,0E+04 1,0E+05 1,0E+06 1,0E+07

Nf (cycles) M a x im a l S tr e ss ( M P a ) UT21 model UT21 UT11 model UT11 UT22 model UT22

Figure 12 : Durées de vie en fatigue calculées et expérimentales pour les éprouvettes UT

Il convient de noter pour finir que la qualité des prédictions de limite de fatigue par la modélisation proposée dans cette étude se retrouve également dans le cas d’éprouvettes de flexion rotative et de traction compression [Suraratchaï 2006]. En outre, la comparaison avec les autres approches présentées dans la littérature (de type Peterson, Neuber ou Murakami, cf §5.1.) montre que les prédictions associées à notre modèle donnent toujours des estimations de limite de fatigue plus proches des résultats expérimentaux [Suraratchaï 2006].

5.4.2. Eprouvettes « industrielles » - Validation

Si les résultats du modèle basé sur l’utilisation d’un Kt local calculé par analyse éléments finis

d’une topographie de surface mesurée puis filtrée rend bien compte des résultats expérimentaux pour des éprouvettes dont la surface est générée par étau-limeur et pour deux cas d’usinage grande vitesse (« balayage » et « référence » de la Figure 4), il est nécessaire d’établir la validité de cette approche dans un plus grand nombre de cas plus « industriels » pour lesquels la génération de surface ne conduit pas à un schéma aussi simplifié de stries parallèles. Dans ce but, la méthode a été appliquée à un grand nombre d’éprouvettes et de données de fatigue fourni par Airbus, tout en restant dans le cadre d’essais de flexion quatre points (réalisés directement par Airbus). La surface en tension des éprouvettes a été réalisée par fraisage en bout à grande vitesse selon les conditions présentées au §3.2. (cf. Tableau 3 et Tableau 4) représentatives de configurations d’usinage utilisées en production.

Les essais de fatigue ont été réalisés pour deux cas de chargement correspondant à une sollicitation maximale de 320MPa et 300MPa, pour un rapport de charge 0,1. Après les essais, le profil de surface d’une éprouvette de chaque catégorie a été relevé et le Kt local a

ensuite été calculé. Cette valeur de Kt a ensuite été considérée identique pour chaque

éprouvette d’une même catégorie. Les Figure 13 et Figure 14 présentent les durées de vie en fatigue prédites et expérimentales respectivement pour des essais avec une contrainte maximale de 320 et 300 MPa. Le modèle donne manifestement des résultats satisfaisants pour les différents types d’éprouvette. La dispersion observée pour les faibles valeurs de Kt

peut résulter d’une part, du plus grand nombre d’éprouvettes ayant un faible Kt testées,

conduisant ainsi à une dispersion des résultats expérimentaux plus importante, d’autre part du fait que la mesure du Kt n’ayant pas été effectuée sur chaque éprouvette mais une seule,

la valeur utilisée dans le modèle n’est pas forcément représentative pour l’ensemble du lot. Ainsi, des modifications de la topographie de surface, même pour des éprouvettes réputées identiques, par exemple dues à l’usure d’outil, ne sont pas prises en compte ou au contraire le sont à mauvais escient.

En conclusion, l’approche développée sur des cas simples d’usinage par étau-limeur, apparaît également pertinente dans le cas de fraisage industriel UGV.

0,00E+00 5,00E+04 1,00E+05 1,50E+05 2,00E+05 2,50E+05 1,000 1,100 1,200 1,300 1,400 Kt N f (c y cl es ) Experimental results Maximal stress 320MPa Predicted results Maximal stress 320 MPa

Figure 13 : Durées de vie en fatigue prédites et expérimentales en fonction du Kt local – Contrainte maximale 320MPa

0,00E+00 5,00E+04 1,00E+05 1,50E+05 2,00E+05 2,50E+05 3,00E+05 1,000 1,100 1,200 1,300 1,400 Kt N f (c y cl es ) Experimental results Maximal stress 300MPa Predicted results Maximal stress 300MPa

Figure 14 : Durées de vie en fatigue prédites et expérimentales en fonction du Kt local – Contrainte maximale 300MPa

5.5. Conclusion

Pour l’alliage d’aluminium étudié et pour les procédés d’usinage qui ont été investigués, l’influence de l’état de surface usinée sur le comportement en fatigue est due principalement à l’effet de la rugosité. Pour modéliser cet effet, l’approche choisie est de caractériser la topographie de surface d’un point de vue mécanique sans employer les paramètres de rugosité géométriques habituellement utilisés pour la décrire : un coefficient de concentration de contraintes local Kt est calculé par éléments finis à partir de mesures de

profils de surface filtrées. Ce coefficient de concentration de contraintes local est ensuite intégré dans deux modèles de fatigue différents pour prédire la limite de fatigue et la durée de vie en fatigue. Outre ce Kt local, ces modèles de fatigue ne requièrent que des données de

base sur la propagation en fatigue et une courbe de Wöhler de référence. L’approche complète (mesure de la topographie de surface, détermination de Kt, prédiction de fatigue)

fournit un moyen fiable de prédire la résistance en fatigue dans un contexte industriel lorsque les paramètres d’usinage sont modifiés, sans qu’il soit nécessaire de refaire des essais pour qualifier ces nouveaux paramètres d’usinage. Ainsi, la méthode développée peut très facilement être utilisée en tant qu’outil de contrôle permettant de vérifier qu’une surface produite est en accord avec les objectifs de fatigue : il suffit de mesurer des profils de surface à l’aide de rugosimètres classiques (comme cela est déjà fait actuellement pour caractériser les habituels Ra, Rt,..) et d’y associer un filtrage et un calcul éléments finis (quasiment instantané) qui fournit le Kt. Un calcul itératif de quelques minutes permet ensuite d’y

associer une courbe de Wöhler.