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IV. Résultats et discussions

3. Résultats de l’entretien avec V.D

L’entretien avec Madame D. a duré environ quarante minutes et a eu lieu dans notre classe. Lorsque nous lui avons proposé de s’installer pour commencer l’entretien elle s’est spontanément mise à côté de nous et non en face, ce qui souligne peut-être une certaine proximité. L’entretien a parfois été complexe du fait d’un quiproquo persistant tout au long de l’entretien. En effet, V.D a souvent compris les questions autour du travail en équipe au niveau des élèves, en d’autres termes sur la pédagogie coopérative et non sur le travail en équipe des enseignants.

Le malentendu a commencé dès le début de l’entretien comme le souligne cette phrase qui nous donne tout de même des indications sur la façon dont V.D perçoit le travail collectif : « Très positif la plupart du temps, oui. En général on essaye d'appliquer ce qu'on applique avec nos élèves (…) On essaye d'être bienveillants entre nous, on s'apporte des choses, on s'aide, on essaye toujours d'être constructif dans les remarques que l'on se fait les uns envers les autres, on essaye je dis bien. » Pour madame D. le travail collectif apparaît nécessaire « Pour moi la collaboration c'est essentiel, pour moi c'est hyper important, évidemment c'est

un facteur extrêmement important parce qu'une personne extérieure elle a une vue extérieure. », voire évidente lorsque certaines disciplines sont organisées conjointement : « T’as plein d’intervenants extérieurs avec qui il faut que tu dialogues forcément, avant et après pour savoir ce que tu leur fais faire, comment tu leur fais faire, les résultats, faut l’accompagner parce que t’as une pédagogie, faut lui laisser une certaine liberté [ à l’intervenant extérieur, ndlr ] mais faut que ce soit toujours toi le référent, faut que ce soit toujours toi qui encadre tout et qui sache ce que tu leurs fais faire, la compétence que tu veux leur faire acquérir et où tu veux aller.» Au-delà de permettre au professeur des écoles d’avoir un œil extérieur, la collaboration serait un moyen de partager des compétences spécifiques dans certains domaines : « Si elle est dans un objectif bienveillant, elle va construire quelque chose avec toi, elle va t’apporter un œil différent, elle va penser à des choses auxquelles t’as pas forcément pensé et puis même elle a des compétences que t’as pas forcément toi euh je pense justement aux intervenants de sport… » Au travers de ses dires, V.D pose tout de même les conditions du travail en équipe, à savoir la bienveillance, qui est d’ailleurs répété à plusieurs reprises.

En ce qui concerne les partenaires avec lesquels l’enseignante est amenée à travailler collectivement, elle cite à plusieurs reprises les intervenants sportifs : « Bah tu as les personnes qui interviennent pour le sport aussi. », « J'ai énormément parlé avec les maîtres- nageurs. ». Dans le cadre d’un projet collaboratif innovant réalisé pour l’université l’année passée, Madame D. évoque également ses autres collègues. Dans le cas plus spécifique d’un élève BEP, les partenaires sont plus nombreux : « Avec son AVS, on discute régulièrement euh avec le papa lors des ESS, on essaye… on essaye de discuter, avec la directrice forcément, avec les autres [ enseignants, ndlr ]… ». D’ailleurs les temps consacrés au travail collectif en dehors des ESS sont : « des moments volés de cours, de mail le soir, de téléphone le matin, de quand on arrive le matin, de sept heures à huit heures trente, le midi de midi à quatorze heures comme là on est en train de faire, le soir quand j'avais le temps. ». Ce sont donc des moments informels pour certains et différents outils de communication sont utilisés.

En évoquant le travail collectif en dehors des instances de concertation de l’école, les réponses de l’interviewée sont ambivalentes. Elle affirme dans un premier temps : « Moi je compte pas mes heures, je fonctionne pas dans la logique de me dire on a des heures obligatoires de réunions et de choses à faire en dehors de notre classe, moi j'ai pas fonctionné comme ça parce que si je commence à fonctionner comme ça je vais tomber en dépression ». On comprend ici que V.D. exprime clairement travailler en dehors des heures de réunion et ne même pas réfléchir en fonction des heures allouées. Plus tard dans la discussion, la réponse est quelque peu différente lorsqu’on lui demande si elle a déjà eu l’occasion de rencontrer les

personnes présentes à l’ESS en dehors de celle-ci : « Non c’est extrêmement chronophage……… J’avoue que j’ai trois enfants, je ne compte pas mes heures mais il y a un moment où malheureusement mes heures je les fais chez moi avec mes enfants à côté c’est à dire que je travaille mais que je suis chez moi donc au niveau présence je peux pas dire : aujourd’hui on va faire une réunion à telle heure à tel endroit pour en parler non. On fait ça dans le cadre des ESS, après effectivement on peut en parler par mail, j’en parle énormément d’ailleurs de B. et de la classe avec A.V par mail, par téléphone, on s’appelle énormément mais c’est quand j’ai le temps… ». Nous comprenons ici que la rencontre des partenaires en dehors des ESS nécessite un temps trop important pour Madame D. qui n’est pas compatible avec sa vie familiale. Dès le début de l’entretien les freins sont soulevés. Ils se résument presque à ces propos, elle explique elle-même : « Mais à part ça, je n'ai pas d'autres freins ». Quelques autres propos peuvent tout de être mis en lien avec cette question comme la communication pouvant être compliquée à certains moments : « On reste des humains et parfois certaines réflexions si on est un peu fatigués, un peu mal lunés bah on peut moins bien le prendre qu'un autre jour où on était bien luné. La façon dont on parle des fois c'est important et on se rend pas compte, voilà. » ou encore la configuration des locaux qui ne permet pas nécessairement d’accueillir un grand nombre d’enfants.

En ce qui concerne l’impact du travail collectif des enseignants sur la réussite des élèves, l’enseignante donne un avis positif : « Oui effectivement ça va aider les élèves à progresser et à acquérir la compétence ». Dans le cas spécifique de l’élève autiste dans sa classe, elle affirme même que l’intervention de plusieurs partenaires auprès de lui a été bénéfique puisqu’il a pu voir différentes personnes et leurs divers points de vue. Toutefois, le travail collectif n’est pas forcément pertinent pour tous les élèves au départ. Elle donne l’exemple d’un élève qui supportait mal de devoir changer de référent. Il s’agit ici d’une modalité spécifique de travail en équipe qu’est le décloisonnement où les professeurs de primaire changent de classe.

Le travail collectif apparaît cependant nécessaire pour l’enseignante dans le cadre d’un élève BEP, elle explique : « Euh je peux absolument pas porter sa scolarité à moi toute seule, donc ça c’est vraiment la scolarité collaborative par excellence celle de B. c’est vraiment, on le porte à plusieurs. On est tous à l’encadrer, M. [autre enseignante de l’école ndlr ]qui l’encadre beaucoup aussi…… On sert tous à quelque chose avec lui, on est tous… On n’est pas… On travaille en commun, on travaille en commun pour lui ». Ainsi, nous comprenons que plusieurs personnes interviennent directement auprès de l’élève et que cela semble indispensable pour l’enseignante. Elle explique travailler en commun voire en collaboration avec les différentes personnes encadrant l’élève. Ce travail a notamment permis lors des ESS de mettre en place différents outils en classe tels que des pictogrammes, une horloge etc…

d’un commun accord avec les différents partenaires présents aux ESS : « On décide ensemble avec les infirmières avec tout le monde des outils qui peuvent être mis en place pour aider B. à progresser ».