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F IGURE 2.25: Schéma simplifié du dispositif GDSTTS

3.1. Résultats expérimentaux versus modélisation numérique

Dans certains cas, l’expérimentation permet de mettre en évidence les mécanismes locaux responsables des désordres observables à l’échelle macroscopique. Néanmoins, il s’avère nécessaire d’élaborer des méthodes et des outils d’évaluation et de prédiction fiables. Les modèles sont d’une grande importance pour prédire le comportement mécanique des matériaux sous les actions, souvent couplées, de conditions thermiques, hydriques ou chimiques. Il est donc primordial de contribuer au développement de modèles implantés dans les outils numériques souvent complexes pour l’expérimentateur néophyte.

3.1.1. Capillarité entre grains

Pour les sols granulaires non saturés, l’étude des phénomènes liés à la capillarité demeure une thématique de recherche suscitant de vives discussions (Hueckel et al. (2019)). Si l’expérimentateur est confronté à la difficulté de mettre en évidence les phénomènes liés à la capillarité sur tout le domaine hydrique (de la saturation à l’état hygroscopique), les « numériciens » font face à la problématique de n’avoir aucun résultat de référence pour alimenter leurs modèles micromécaniques. Dès lors, des hypothèses sont faites pour satisfaire des concepts admis par la communauté scientifique. Dans le cas du phénomène d’effondrement d’origine purement capillaire, outre la limitation du domaine de teneur en eau liée au développement des essais à l’échelle locale, les résultats obtenus dans le cadre de la thèse d’El Korchi (2017) vont être confrontés à des simulations numériques sur le logiciel de minimisation d’énergie « Surface Evolver » grâce aux travaux de collaboration en cours avec L’IRSTEA d’Aix Marseille et de l’Université de Grenoble Alpes (Miot et al. (2019)). Dans un premier temps, il s’agira de reproduire fidèlement les résultats obtenus à l’échelle locale lors des essais d’imbibition sur les triplets et quadruplets capillaires. Dans un second temps, les expériences menées à l’échelle macroscopique seront modélisées numériquement dans l’objectif de simuler le phénomène d’effondrement capillaire observé sur des billes de verre. Un défi important dans ce projet sera d’identifier correctement les variations de la tension superficielle et de l’angle de mouillage ainsi que de prendre en compte les effets de la gravité pour les essais à l’échelle locale.

3.1.2. Cimentation à l’interface pâte / granulat

Pour la durabilité et le vieillissement des bétons, il s’agit également d’enrichir les modèles implémentés dans des codes de calcul existants (LMGC90 ou Xper). Néanmoins, il s’avère qu’il existe plusieurs points bloquants à franchir :

- le premier est le constat que les expériences en laboratoire sont, par nature, imparfaites contrairement aux expériences numériques,

- le deuxième est la possibilité de mesurer directement les paramètres introduits dans les codes de calcul qui ne sont pas toujours des paramètres matériaux,

- le troisième est la capacité de mettre en évidence les phénomènes et de quantifier les paramètres indicateurs d’une dégradation.

Pour illustrer ces différents points, quelques études préliminaires portant sur le comportement mécanique des bétons avec prise en compte des propriétés interfaciales ont été réalisées dans le cadre des thèses de Jébli (2016), Salah (en cours) et Lhonneur (en cours) en collaboration avec l’IMT d’Alès et l’IRSN de Cadarache. Ces études ont été menées sur les modèles de zones cohésives développés dans le code de calcul LMGC90 (Dubois et al. (2011)). Il ne s’agit pas ici de décrire intégralement le code de calcul utilisé mais de faire un état non exhaustif des difficultés de communication entre l’expérimentation et le calcul numérique.

Concernant le premier point, les conditions initiales et les conditions aux limites sont des facteurs prépondérants dans les résultats finaux, ce qui oblige l’expérimentateur à réduire autant que possible les incertitudes de mesure et d’adapter le plus souvent les protocoles expérimentaux. Lhonneur (2019) a mis en évidence sur les essais de traction directe sur une pâte de ciment à l’échelle locale, dans la partie réversible des essais, que l’origine des dispersions des résultats expérimentaux peut être imputable à divers facteurs :

- une dispersion des caractéristiques mécaniques de la pâte de ciment due au fait que la taille caractéristique de l’échelle locale est faible devant celle d’un Volume Élémentaire Représentatif (VER) pour la fissuration,

- une dispersion des caractéristiques mécaniques de la colle servant à lier les fixations en acier à l’éprouvette, - une dispersion de la géométrie des zones réellement collées, - une dispersion du positionnement des fixations sur l’éprouvette. A partir d’une campagne de simulations numériques en déformations planes (2D) par des essais de traction avec un tirage aléatoire des positions de fixations en supposant que le collage des cales est parfait, les résultats montrent que la seule influence d’un défaut de positionnement des fixations peut entraîner des variations conséquentes sur les réponses mécaniques. Aussi, pour obtenir, à partir de ces essais de traction directe, une estimation des propriétés élastiques moyennes de la pâte de ciment à l’échelle locale avec une précision à moins de 2%, il faut effectuer une moyenne sur au moins dix essais avec le dispositif expérimental utilisé. Concernant le deuxième point, Malachanne et al. (2018) ainsi que Salah et al. (2019) ont réalisé des simulations numériques pour identifier les paramètres d'un modèle de zone cohésive pour l'interface pâte de ciment/granulat pour un essai de traction directe pour le premier et un essai de cisaillement direct pour le second. Le modèle de zone cohésive développé dans le code de calcul LMGC90 (Dubois et al. (2011)), est basé sur une loi cohésive (Halphen & Nguyen (1974), Frémond (1982, 1985 et 1987), Raous et al. (1999), Brettelle et al. (2001), Talon & Curnier (2003) et Raous (2011)), dont les paramètres sont les suivants : - Öã et ÖE sont respectivement les rigidités normale et tangentielle de l’interface, - ¢Å§Ï est la contrainte maximale du domaine élastique, - | est l’énergie dissipée à la rupture, - «´≠ê est le coefficient de frottement résiduel (post-rupture),

- m = 1 − ò est l'intensité d'adhérence entre les deux corps en contact qui est fonction du paramètre d’endommagement ò (ò = 0, aucun endommagement et ò = 1, rupture de la liaison). La Figure 3.1 présente de façon schématique les lois cohésives utilisées selon Malachanne et al. (2018) et Salah et al. (2019). a) b) Figure 3.1 – Schématisation des lois cohésives utilisées a) pour la traction directe (¢ã - mode I) et b) pour le cisaillement direct avec confinement ¢ãE - mode II) selon Salah et al. (2019).

Parmi ces paramètres, les dispositifs expérimentaux à l’échelle locale permettent de déterminer la contrainte maximale (¢Å§Ï) dans les essais de traction directe et de cisaillement direct ainsi que le coefficient de frottement résiduel («´≠ê) dans la mesure où les essais de cisaillement direct avec confinement sont poursuivis au-delà de la rupture. En effet, comme nous l’avons vu dans le §2.3, les modules élastiques (z), correspondant aux rigidités (Öã et ÖE), déterminés à partir des résultats expérimentaux ne s’attachent pas à l’interface mais à un composite constitué d’un grain, de l’interface et d’une pâte de ciment. Ensuite, les courbes expérimentales ne révèlent aucun endommagement au cours des chargements où l’on constate un comportement élastique fragile. Néanmoins, il semble nécessaire de procéder à la vérification de ce point par des essais cycliques de charge/décharge pour !" #" !"$%& 0 Elasticity Rupture Damage Fracture energy ;<" #"$%& <" !" #" !"$%& 0 Elasticity Rupture Damage 8" 9:;<#= Friction #"$%& Fracture energy B8"

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confirmer un comportement parfaitement élastique. Si, à l’inverse, on observe de l’endommagement, on sera en mesure de déterminer l’évolution du paramètre ò. Enfin, l’énergie dissipée à la rupture | étant tributaire de toutes ces vérifications, il serait intéressant de réaliser les essais expérimentaux en contrôlant la vitesse de chargement au lieu de la vitesse de déplacement de la traverse … mais le réglage de la machine d’essai utilisée (Mechanical Testing System) permettant de paramétrer cette condition est fastidieux puisqu’il faut calibrer le PID (Proportionnel, Intégrale et Dérivée).

Concernant le troisième point, il s’agit d’être en mesure de modéliser les évolutions des propriétés mécaniques et de transport au cours de chaque dégradation. Dans ce cadre, la principale difficulté reste de déterminer les cinétiques de dégradation dans chaque phase d’autant plus si l’on souhaite prendre en compte le fait que les interfaces pâte de ciment / granulats dans un volume élémentaire représentatif ont une cinétique de dégradation différente de celle de la pâte de ciment pure du fait de sa plus forte porosité et de sa composition chimique spécifique. Actuellement, les problématiques de la modélisation du processus de lixiviation des bétons est étudiée dans la thèse de Salah (en cours) en collaboration avec l’IMT d’Alès et la modélisation du processus de réaction sulfatique interne est abordée dans la thèse de Lhonneur (en cours) en collaboration avec l’IRSN de Cadarache. Ce travail devient de fait plus complexe lorsque, expérimentalement, on arrive à mettre en évidence que le développement de la pathologie n’est pas forcément homogène au sein de l’interface, d’une part, et au sein d’un échantillon macroscopique, d’autre part, comme il apparaît être le cas pour la RSI.