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Chapitre 4 Comparaisons expérimentales

4.1. Fractions de phases dans les poudres atomisées d’alliage Al-Ni

4.1.1. Résultats expérimentaux

Des poudres d’alliage Al-Ni riches en aluminium ont été produites par atomisation par gaz par la société Ceram Ltd. Les différentes compositions nominales fournies sont détaillées Tableau (8). D’après le diagramme de phases tracé Figure 70, les compositions inférieures à 57,27 % pds Al (74,46 % at. Al) correspondent à des alliages dont la solidification débute par la formation de phase AlNi ; les alliages de composition supérieure à 57,27 % pds Al forment la phase Al3Ni2 en solide primaire. Les compositions observées sont repérées sur la Figure 70 par des traits discontinus magenta (w0 < 57,27 % pds Al) et rouges

(w0 > 57,27 % pds Al).

Les particules produites ont ensuite été tamisées en différents intervalles de taille, listés Tableau (9). Tableau 8. Compositions nominales.

Compositions % atomique Al % poids Al 60 40,81 68,5 49,99 72,5 54,79 75 57,97 77,5 61,29 78,75 63,10 80 64,78

Tableau 9. Intervalles de taille des particules. Diamètre des particules (µm)

Minimum Maximum 0 38 38 53 53 75 75 106 106 150 150 212

ESRF : European Synchrotron Radiation Facility ILL : Institut Laue-Langevin

Figure 70. Diagramme de phase Al-Ni (calculé avec la base de données PBIN de ThermoCalc[30,31]) et compositions analysées (en traits discontinus).

Les particules ont été analysées par diffraction de neutrons. L’analyse du spectre de diffraction permet de déterminer les phases présentes et l’intensité des pics donne une information sur la quantité respective de chacune. La Figure (71)[6] schématise le procédé expérimental.

Les Figures (72) et (73) résument les fractions de phases mesurées, respectivement pour les alliages de composition inférieure et supérieure à 57,27 % pds Al. La précision absolue sur les fractions massiques de phases ainsi mesurées peut être estimée aux environs de 0,5 %. Les résultats ainsi obtenus présentent un bon accord avec les mesures provenant d’autres procédés (par exemple, l’analyse d’images en microscopie électronique[59]). Les prédictions de la loi des leviers et du modèle de Gulliver-Scheil sont également repérées sur les Figures (72) et (73).

Les principaux résultats qui nous intéressent ici sont : (i) l’absence totale de phase AlNi dans toutes les poudres observées et (ii) une variation significative des fractions de phase en fonction de la composition et (iii) de la taille des particules. La présence de phases métastables dans les gouttes de plus petit diamètre (<50 µm) a également été mise en évidence, et sera discutée dans la section 4.2.1.

Pour les compositions inférieures à 57,27 % pds Al, Figure (72), la phase primaire AlNi est absente, quelles que soient les tailles ou compositions. Cette phase est donc intégralement consommée par la transformation péritectique AlNi→Al3Ni2. Dans le chapitre précédent, cette phase subsistait pour les plus petites gouttes (R=10 µm, section 3.3.2) ; la transformation péritectique est donc vraisemblablement plus active que celle prédite avec les paramètres de la simulation de référence (Tableaux (5) et (6), section 3.2).

Pour tout le spectre de composition étudié, Figures (72) et (73), en considérant que tout le solide AlNi est systématiquement transformé en Al3Ni2, le changement de quantité relative de chacune des phases s’explique assez simplement en regard du diagramme d’équilibre tracé Figure (70), sur lequel les compositions nominales sont repérées en traits discontinus.

L’alliage Ni - 40,81 % pds Al est composé uniquement de phase Al3Ni2. L’hypothèse la plus vraisemblable pour expliquer cela est la solidification complète avant que la formation de phase Al3Ni ne débute. La solidification de la particule est complète avant d’atteindre la température de germination eutectique, et aucune phase eutectique Al n’est mesurée.

Pour les autres alliages observés, la transformation eutectique a lieu en fin de solidification, comme en atteste la présence de phase Al. Il se conçoit assez aisément que pour l’alliage le moins riche en élément Al, le solide primaire Al3Ni2 se formera en plus grande quantité car l’intervalle de température de formation de cette phase est plus important. Ainsi, plus la concentration de l’alliage en aluminium augmente, plus il reste de phase liquide aux instants de germinations péritectique puis eutectique, et plus les phases Al3Ni et Al sont présentes en fin de solidification. Cela apparaît sur les Figures (72) et (73), où la quantité de Al3Ni2 diminue avec la composition, alors que les fractions de phases Al3Ni et Al augmentent.

L’alliage Ni - 40,81 % pds Al constitue une exception, car la solidification étant complète avant d’atteindre la température de germination péritectique de Al3Ni, les gouttes sont intégralement composées de phase Al3Ni2 à l’équilibre pour la composition nominale. A température ambiante et à l’équilibre thermodynamique complet, la loi des leviers, prévoit la présence exclusive de phase Al3Ni2.

Figure 72.Variation des fractions massique de phases AlNi, Al3Ni2, Al3Ni et Al en fonction du diamètre des particules, pour des alliages Al-Ni de composition (a) 40,81 %, (b) 49,99 % et (c) 54,79 % poids d’aluminium (respectivement 60 %, 68,5 % et 72,5 % atomiques d’aluminium).

Figure 73.Variation des fractions massiques de phases Al3Ni2, Al3Ni et Al en fonction du diamètre des particules, pour des alliages Al-Ni de composition (a) 57,97 %, (b) 61,29 %, (c) 63,10 % et (d) 64,78 % poids d’aluminium (respectivement 75 %, 77,5 %, 78,75 % et 80 % atomiques d’aluminium).

La loi des leviers suppose une diffusion infinie dans toutes les phases, et donc dans la phase Al3Ni, au sein de laquelle les gradients de composition sont nuls. Ainsi, pour les compositions supérieures à 40,81 % pds Al, Figures (72b), (c) et (73), les prédictions de la loi des leviers surestiment systématiquement la cinétique de transformation péritectique de Al3Ni2 en Al3Ni. La fraction de phase primaire Al3Ni2 en fin de solidification est sous estimée (les prédictions sont même nulles sur la Figure (73)), et la quantité de phase Al3Ni est largement surestimée (jusqu’à 100 % pour l’alliage à composition stœchiométrique Ni-75% at. Al, i.e. Ni-57,97% pds Al). En se rapprochant de la composition d’équilibre eutectique, la loi des leviers prévoit tout de même une augmentation de phase eutectique Al et une diminution de Al3Ni.

D’autre part, le modèle de Gulliver-Scheil considère une diffusion nulle dans les phases solides, et donc aucune transformation péritectique de solide primaire Al3Ni2 en Al3Ni. Les cinétiques de transformations péritectiques AlNi→Al3Ni2 et Al3Ni2→Al3Ni sont cette fois ci sous-estimées. La quantité de phase AlNi est ainsi surestimée, et la quantité prédite de phase péritectique Al3Ni est sous-estimée. Le modèle de Gulliver- Scheil semble cependant rendre compte plus justement de l’influence de la composition sur la fraction de phases que la loi des leviers, à l’exception de la transformation complète AlNi→Al3Ni2.

Pour les alliages dont la phase primaire est AlNi, Figure (72), la variation des fractions de phase en fonction de la taille de goutte est assez limitée, hormis pour l’alliage Ni - 54,79 % pds Al, pour lequel un changement apparaît pour les particules les plus petites. Pour les alliages dont la phase primaire est Al3Ni2, l’effet de la taille des particules apparaît plus clairement à la lecture de la Figure (73). Selon la composition nominale de l’alliage, l’influence de la taille est plus ou moins importante. Le comportement de l’alliage s’inverse progressivement lorsque la composition passe de 57,97 à 64,78 % pds Al. Pour l’alliage Ni-57,97% pds Al (Figure 73a), le comportement est celui qui apparaît sur la Figure (72c), pour l’alliage à 64,79 % pds Al : les fractions de phases primaire Al3Ni2 et eutectique Al diminuent avec la taille, alors que la quantité de phase Al3Ni (péritectique et eutectique) augmente. En augmentant la composition de l’alliage, ces variations s’atténuent, Figure (73b), et s’inversent progressivement, Figure (73c) et (d). Ainsi, pour l’alliage Ni-64,78% pds Al, les phases primaire Al3Ni2 et eutectique Al augmentent avec la taille, et la quantité de phase Al3Ni diminue.

Les variations de fractions de phases avec la taille des particules sont dues aux cinétiques concurrentes de diffusion chimique et de refroidissement. En revanche, il est difficile d’expliquer a priori le changement de comportement des alliages avec la composition nominale. Une comparaison avec des résultats de simulations est proposée maintenant afin d’interpréter ces comportements.