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L’objet de ce travail de thèse est d’étudier la variabilité des courants-jets dans un modèle idéalisé, afin de comprendre l’impact des ondes de Rossby sur la persistance des différents modes de variabilité. De nombreuses études ont pu mettre en évidence que la persistance des mode de déplacement méridien du jet est accrue par un mécanisme de rétroaction po-sitive des ondes de Rossby sur l’écoulement moyen, faisant de ce mode le mode de varia-bilité privilégié des courants-jets. Dans un premier temps, nous allons présenter plusieurs mécanismes expliquant cette prédominance du mode de déplacement, puis dans un second temps nous décrirons les effets de différentes conséquences du changement climatique sur cette variabilité.

5.1.1 Mécanismes dynamiques influençant la variabilité

Sous certaines conditions, la propagation des ondes de Rossby peut être analysée avec les outils de l’optique géométrique. On peut en effet associer à l’atmosphère un indice de réfraction n qui dépend à la fois de l’écoulement moyen, via le vent zonal moyen, et des ca-ractéristiques de l’onde de Rossby. On montre ainsi que si les ondes ont un nombre d’onde suffisamment faible (on parle d’ondes planétaires), elles ont alors tendance à se réfléchir sur les flancs du jet (cf. section2.1). De telles réflexions tendent à réduire la persistance des principaux modes de variabilité du courant-jet. En effet, si la propagation d’un onde plané-taire participe au déplacement du jet en provoquant une convergence de flux de quantité de mouvement sur l’un de ses flancs et une divergence sur l’autre, sa réflexion va provoquer une inversion du signe de cette convergence, ce qui va ramener le jet à sa position initiale. Un résultat similaire est obtenu pour une accélération/décélération du jet. Ces ondes plané-taires participent donc à un mécanisme de rétroaction négative sur la persistance des modes de variabilité du jet dont l’échelle de temps de 5 jours est inférieure à celle de la rétroaction positive classique. Ce mécanisme permet de répondre à une interrogation soulevée par plu-sieurs études qui avaient mis en évidence sans l’interpréter l’impact les ondes planétaires sur la persistance des principales EOF (Lorenz and Hartmann,2003;Simpson et al.,2013). La présence de réflexions et leur effet sur la variabilité du jet de l’hémisphère Sud ont aussi été observés dans la réanalyse ERA-Interim, rejoignant ainsi l’étude similaire réalisée pour la NAO (Abatzoglou and Magnusdottir,2004).

On peut, à partir du résultat précédent, définir deux échelles de temps de rétroaction : la rétroaction à court terme dont l’échelle de temps est de 5 jours et la rétroaction à longterme dont l’échelle caractéristique est de 15 jours. Outre le mécanisme précédemment étudié, une autre rétroaction à court terme a été mise en évidence pour le mode de pulsation uni-quement (cf. section 3.1). Il s’agit d’une rétroaction négative qui implique les ondes de plus petite échelle, donc avec un nombre d’onde plus grand, appelées ondes synoptiques. Son mécanisme se base sur des considérations énergétiques. Si on prend l’exemple d’une phase d’accélération du jet, l’augmentation des gradients méridiens de vent zonal vont provoquer un transfert plus efficace de l’énergie des ondes de Rossby synoptiques au jet moyen (conversion barotrope) et accentuer cette accélération. Mais le taux de génération d’onde (conversion barocline) restant inchangé, l’intensité des ondes va décroître et pas-ser en dessous de la moyenne climatologique. Les ondes ne peuvent alors plus maintenir l’accélération du jet qu’elles ont induite, ce qui va provoquer une décélération du jet. Ce mécanisme n’intervient que dans le cas du mode de pulsation car un déplacement du jet ne change pas les gradients méridiens et donc la conversion barotrope. La réanalyse confirme une fois de plus la présence de ce mécanisme pour des courants-jets plus réalistes, mais son influence semble moins grande que dans le cas du modèle idéalisé du fait de la présence d’autres rétroactions.

À long terme, on retrouve pour le mode de déplacement la rétroaction positive décrite dans la littérature. Le mécanisme sous-jacent de cette rétroaction a été analysé et se révèle co-hérent avec un type de mécanismes appelés baroclines. Ces mécanismes se basent sur le fait que lors d’un déplacement du jet, la zone de baroclinie maximale (source des ondes de Rossby) se décale de façon concomitante et entretient le décalage du jet (Robinson,

2000;Blanco-Fuentes and Zurita-Gotor,2011). Ce type de mécanismes s’oppose aux

sans variation de la source. Une approche plus quantitative a été développée afin d’évaluer les parts barocline et barotrope de la rétroaction observée et le résultat obtenu montre que le mécanisme barocline domine très largement dans ce modèle puisqu’il représente quasiment 100% de la rétroaction. A contrario, la même étude faite dans la réanalyse ERA-Interim montre que la rétroaction observée est la somme d’une contribution barotrope et barocline, toutes deux positives et de contributions assez proches, ce qui confirme l’importance de ces deux types de mécanismes (Barnes and Thompson,2014;Zurita-Gotor et al.,2014).

5.1.2 Variabilité et changement climatique

Certaines études ont montré un probable déplacement vers le pôle du courant-jet dans les scénarios de changement climatique, surtout dans l’hémisphère Sud (Chang et al., 2012;

Harvey et al., 2014). Or ce déplacement méridien pourrait avoir un effet sur la nature du

mode de variabilité dominant (Barnes and Hartmann, 2011). Cette hypothèse a été testée et donne la même évolution que dans la littérature : pour un forçage proche des Tropiques, le mode dominant est le mode de déplacement méridien, mais au fur et à mesure que le forçage est décalé vers le pôle, ce mode perd de plus en plus d’importance au détriment du mode de pulsation d’amplitude. Cependant, ce phénomène n’est pas dû à une diminution de la rétroaction positive du mode de déplacement comme le proposaitBarnes and Hartmann

(2011), celle-ci restant constante dans notre modèle. L’évolution observée s’explique ici par une intensification de la rétroaction négative à court terme. Ceci n’invalide pas les résultats trouvés dans les autres modèles, mais met en lumière que les rétroactions à court terme peuvent influencer la réponse de la variabilité du jet à un changement du forçage. Un autre effet important du réchauffement climatique, observé de façon robuste dans de nombreux modèle, est une variation du gradient méridien de temprérature ou de façon équivalente du gradient vertical de vent zonal (baroclinie). Cette évolution est différente pour les hautes couches, où ce gradient augmente du fait du réchaufement des Tropiques, et dans les basses couches de la troposphère, où il est réduit, en tout cas dans l’hémisphère Nordà cause de l’Amplification Arctique. Si l’effet de ce changement sur la position du jet est plutôt bien compris (Butler et al., 2010; Harvey et al., 2014), son impact sur sa variabilité est encore mal connu. L’effet de la baroclinie a ainsi été étudiée dans le modèle, dont la structure permet de distinguer une baroclinie de basse et de haute couche. Si la baroclinie de haute couche ne semble pas affecter la variabilité du jet, une augmentation de la baroclinie de basse couche provoque une diminution de la persistance du principal mode de variabilité (mode de déplacement), mais cette fois ci sans déplacement important du jet (cf. section 4.3). Cette diminution de la persitance est associée à l’apparition d’un nouveau mode de variabilité prédominant caractérisé par une propagation du jet vers le pôle, le "poleward propagation". Cette étude met aussi en évidence que l’Amplification Artique, en diminuant la barocline du jet, risque de renforcer la persistance du NAM et de la NAO, ce qui risque d’influencer grandement le climat des régions européenne et ouest-américaine.

Enfin, l’évolution de la persistance du mode de déplacement a aussi été analysée en faisant varier l’intensité de la friction au niveau du sol. Si ce paramètre n’est pas directement influencé par le réchauffement climatique, il reste un terme difficile à évaluer et pouvant varier beaucoup d’un modèle à l’autre. Il est donc important de povoir caractériser son

impact afin de pouvoir comparer ces modèles. Une variation de la friction dans le modèle idéalisé montre que le mode de déplacement reste le principal mode de variabilité et sa persistance reste inchangée. Ceci est due à une intensification de la rétroaction à long terme qui augmente quand l’intensité du frottement augmente, conformément à d’autres études

(Chen and Plumb,2009;Zurita-Gotor,2014), et vient contre-balancer l’effet d’atténuation

plus forte causée par la friction.