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Résultats sur des données réelles, comparaison avec d’autres classifications

Présentons deux résultats majeurs de la méthode JADE+BPSS : la séparation de source en aveugle permet d’obtenir une estimation correcte aussi bien dans la dimension spectrale que spatiale ; néanmoins, cette estimation n’est plus très bonne si la proportion de spectres dans la classe diminue dans l’image.

6.2.1 Résultats

Le premier résultat majeur est présenté en détail dans l’article (221) (voir annexes 14 page 221). Présentons, ici les conditions de l’algorithme et quelques figures importantes.

L’image hyperspectrale utilisée est l’observation ORB0041_1.CUB en facteur de radiance, sans cor-rection de l’effet géométrique. L’image a été réduite aux 300 premières lignes qui se concentrent sur la

zone de la calotte permanente sud. Notons cette image ORB0041_1.CUT. Il s’agit de la calotte

perma-nente de CO2(voir section 7.3.2 page 141) et d’une partie des “South Polar Layered Deposits” (SPLD)

composés de glace d’eau (voir section 7.3.3.3 page 146). La méthode suivie est décrite au chapitre 6.1.

L’étape No 1 a permis d’estimer 7 sources pour 98,58% de la variance globale. Suivent les étapes No 2 et 3.

L’étape No 4 de BPSS s’est effectuée en supposant 3 sources indépendantes.

L’étape No 5 de mise à l’échelle s’est faite avec les 3 spectres de références utilisés par Wavanglet (voir section 4.1.1 page 78).

Enfin, l’étape No 6 a nécessité une renormalisation pour éliminer les effets géométriques.

Tout d’abord, dans la dimensionnalité spectrale, les sources estimées renormalisées peuvent être comparées à des spectres de référence. La figure 6.1 représente les trois sources ainsi que leurs spectres

de référence associés. La correspondance spectroscopique est très correcte, pour la glace d’eau et de CO2,

sauf dans les régions spectrales où les absorptions atmosphériques perturbent les signatures de surface. En effet, les spectres de référence des glaces ne comportent pas de contribution atmosphérique tandis que les spectres de source en comportent (voir équation 5.8). Le spectre de référence de poussière contient la contribution atmosphérique, la correspondance avec la source est d’autant meilleure.

Le niveau de reconstruction spectrale avec ces trois sources est estimé grâce au SNR spectral (voir figure 6.1 - graphe (d)). Ce rapport est relativement bas pour la bande à 3 microns, présente partout et variant globalement peu. C’est une région spectrale où l’hypothèse d’indépendance spectrale est fausse. Le SNR est aussi bas vers 4 microns et plus, à cause d’une source supplémentaire, non prise en compte, qui est l’émission thermique des sols. Les régions spectrales des bandes d’absorptions atmosphériques sont aussi significativement moins bien reconstruites car l’hypothèse No 5 d’altitude constante (voir section 5.1 page 92), nécessaire pour la “linéarisation”, n’est pas valide.

Dans la dimensionnalité spatiale, les lignes de la matrice de mélange sont représentées sous forme d’image (voir figure 6.2). La détection est tout à fait correcte pour les données non normalisées bien qu’un gradient sur l’image soit présent sur les trois images. La renormalisation par la somme permet bien de résoudre ce problème.

Comparons les résultats avec ceux obtenus avec des rapports de bandes utilisés par Langevin et al. (172). Ces rapports sont détaillés aux équations 2.4 page 40, pour la glace d’eau, et aux équations 2.6

page 40 pour la glace de CO2 . L’étude de la figure 6.3, permet de conclure que les deux séparations

de sources sont similaires en terme de détection. En revanche, elles ne sont pas équivalentes en terme d’abondances relatives : les niveaux d’abondances relatifs ne sont pas respectés sur la calotte

perma-nente de CO2, où l’abondance d’eau est plus élevé pour la méthode des rapports de bande par rapport à

“JADE+BPSS”

Cette exception est probablement due aux effets non-linéaires de recouvrement des bandes d’eau et de

CO2. En effet, les premières inversions de Douté et al. montrent que l’abondance de glace d’eau sur la

calotte permanente de CO2est de 0,06 % en masse au maximum, alors que l’abondance de glace d’eau

sur les SPLD est de 75% en masse (64). La méthode des rapports de bandes surestime donc la quantité

d’eau en présence de glace de CO2, en comparaison de la quantité d’eau sans glace de CO2.

Les résultats, en terme de quantité relative, sont tout à fait compatibles avec les données d’inversion sur quelques spectres (64), notamment dans deux régions particulières (voir fig. 6.4) : (i) la petite zone

linéaire à gauche de l’image avec une présence de CO2 et d’eau (bleu clair) ; (ii) la partie de la calotte

permanente de CO2appauvrie en impuretés de glace d’eau (marron).

6.2.2 Dépendance du nombre de pixels dans la classe

Malgré ces résultats très encourageants, d’autres études sur plusieurs images de la calotte permanente

sud montrent que ces résultats ne sont pas robustes (voir figure 6.5). Les estimations du spectre de CO2

et de poussière sont correctes. En revanche, l’estimation du spectre de la glace d’eau est mauvaise pour l’observation ORB0030_0, et dans une moindre mesure pour l’observation ORB0041_1.

Cepen-1 2 3 4 0 0.32 0.64 0.96 Wavelength (µm) Reference Estimated

(a) Glace de H2O

1 2 3 4 0 0.26 0.52 0.78 Wavelength (µm) Reference Estimated (b) Glace de CO2 1 2 3 4 0 0.17 0.34 0.51 Wavelength (µm) Reference Estimated (c) Poussières 1 2 3 4 16 31 46 Wavelength (µm) (d) Erreur spectrale

FIG. 6.1 – Sources estimées pour l’observation ORB0041_1.CUT comparées aux spectres de références

de glace d’eau, glace de CO2et de poussières (graphes (a) à (c)). Le graphe (d) représente la qualité de

la reconstruction spectrale ou SNR spectral (en dB) en noir et un spectre de transmission atmosphérique en pointillé.

(a) H2O (b) CO2 (c) Poussière

(d) H2O (e) CO2 (f) Poussière

FIG. 6.2 – Matrice de mélange pour l’observation ORB0041_1.CUT sans renormalisation (graphes (a) à

(a) H2O (JADE+BPSS) (b) CO2 (JADE+BPSS)

(c) H20 (Ratio IAS) (d) CO2 (Ratio IAS)

FIG. 6.3 – Comparaison cartes d’estimations d’abondances de glace d’eau et de CO2pour l’observation

ORB0041_1.CUT. En haut : la méthode JADE+BPSS décrite dans cette section. En bas : la méthode des

rapports de bande, pour la glace d’eau (voir équation 2.4) et de CO2(voir équation 2.6).

FIG. 6.4 – Classes de l’image ORB0041_1.CUT d’après Douté et al. (64). En vert la glace de CO2, en

marron la glace de CO2 ayant le minimum d’impuretés en glace d’eau (0,02 % en masse), en violet la

glace d’eau, en bleu clair la glace d’eau ayant des impuretés de CO2. La classification manuelle associée

(a) ORB0030-0 (b) ORB0030-0 (c) ORB0030-0

(d) ORB0041-1 (e) ORB0041-1 (f) ORB0041-1

(g) ORB0061-1 (h) ORB0061-1 (i) ORB0061-1

(j) ORB0103-1 (k) ORB0103-1 (l) ORB0103-1

FIG. 6.5 – Sources identifiées aux trois composants : glace d’eau (a,d,g,j), glace de CO2 (b,e,h,k) et

poussière (c,f,i,l). Test sur des images hyperspectrales OMEGA complètes.

dant, l’image ORB0041_1 a un niveau de bruit faible et pourtant l’estimation de la source est incorrecte. L’explication résiderait plutôt dans le nombre relatif de spectres dans la classe. Le tableau 6.1 compile les

proportions de l’image contenant de la glace d’eau et de la glace de CO2. Clairement, ces deux images

ont les fractions de pixels les plus faibles d’H2O (20,53% et 21,84%).

Si cette interprétation est correcte, il existe un seuil en terme de fraction d’image couverte par la glace d’eau pour pouvoir estimer son spectre convenablement. Ce seuil est d’environ 22% de l’image. En ce

qui concerne la glace de CO2, l’estimation est correcte même à 15,50%. Cette dissymétrie est due

vrai-semblablement aux hypothèses d’indépendance spectrale. En effet, la corrélation entre les spectres de

référence de poussière et de glace de CO2est de 0,15 tandis que la corrélation entre les spectres de

ré-férence de poussière et de glace de H2O est de à 0,31, à cause de la bande d’hydratation minérale à 3

microns (voir équation 5.14 page 102). Il est donc plus difficile d’estimer un spectre d’eau que de CO2.

Image Eau (%) CO2(%) ORB0030_0 20,53 17,48 ORB0041_1 21,84 16,76 ORB0041_1.CUT 63,48 48,72 ORB0061_1 24,30 10,00 ORB0103_1 41,09 15,50

TAB. 6.1 – Proportion relative des spectres contenant de la glace d’eau et de CO2en utilisant l’algorithme

supervisé Wavanglet. L’image ORB0041_1.CUT correspond aux 300 premières lignes telle qu’utilisée à la section précédente et dans l’article (voir annexes 14 page 221).

6.3 Conclusion et perspectives

J’ai fait le choix durant ma thèse, de me focaliser sur les méthodes de séparation de sources en aveugle car elles ont des objectifs multiples dans l’analyse des images hyperspectrales :

– Exploration des images sans a priori : l’extraction de spectres représentatifs de certaines portions similaires de l’image (unité de terrain) est un problème essentiel dans l’analyse des images hyper-spectrales. Chaque méthode permettant cette extraction influence les résultats par leurs hypothèses. Il est donc essentiel de bien connaître les hypothèses pour interpréter correctement les résultats. La méthodologie développée au cours de cette thèse (voir section 6.1) comporte des hypothèses simples mais explicites : elles peuvent donc être discutées. La méthode JADE+BPSS permet d’ex-traire des informations en cohérence avec une étude indépendante utilisant une inversion d’un modèle de transfert radiatif. Cette approche est considérée comme un moyen de rationaliser la découverte et l’identification des terrains martiens.

– Détermination de la représentation de surface : la représentation de surface n’est pas un paramètre qui peut être contraint dans une inversion massive sur tous les spectres d’une image. Éventuel-lement, l’inversion de certains spectres de référence peut donner des indications sur le mode de mélange des corps. Pour confirmer ces résultats, il serait pertinent de faire des études statistiques sur toute la population des spectres d’un même type de terrain martien. Pour l’instant, les moda-lités d’une telle analyse restent à déterminer, mais il est probable que la méthode BPSS permette d’extraire les spectres des zones en mélange géographique subpixel. Cette méthode pourrait aussi permettre de déterminer la distribution statistique des spectres associée à chaque zone, en cas de mélange intime à l’intérieur de la zone.

– Détermination des effets d’angles à la surface : les effets bidirectionnels à la surface sont de deux natures différentes : géométrique et de réflectance bidirectionnelle. Les effets géométriques sont simplement dus à la pente locale qui est différente pour tous les spectres d’une image hyperspec-trale. Les effets de réflectance bidirectionnelles sont dus au transfert radiatif dans les matériaux granulaires. Pour l’instant, les modalités d’une éventuelle séparation des deux effets angulaires restent à déterminer.

Toutes les approches précédentes concernent la surface. Cependant, il est possible d’exploiter les ap-proches de séparation de sources, dans un modèle plus complexe mêlant surface et atmosphère, pour extraire à la fois des signaux du sol et des signaux atmosphériques. Par exemple, il serait intéressant d’extraire la contribution de la diffusion atmosphérique par les aérosols avec ce type de méthode.

La difficulté majeure de l’approche de séparation de source en aveugle est l’estimation du nombre de sources. En effet, ni les estimateurs basés sur la décroissance des valeurs propres de l’ACP, ni les méthodes itératives ne sont robustes. Estimer correctement le nombre de sources est un problème ouvert actuellement.

Chapitre

7

Le cycle saisonnier martien

Première évidence de l’asymétrie de la calotte permanente sud (désaxée par rapport au pôle géogra-phique) en 1784 par W. Herschel (115).

Les première et seconde sections présentent respectivement une introduction historique du cycle sai-sonnier martien (voir section 7.1) et le paradigme actuel communément accepté par la communauté des planétologues (voir section 7.2). Enfin, la dernière section insiste sur les incomplétudes, les questionne-ments et les améliorations que nous pouvons apporter à ce paradigme (voir section 7.3).