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PARTIE 1–Résistance au déracinement Introduction

Introduction

1. Éléments théoriques

Le système racinaire des plantes assure deux fonctions essentielles : l'acquisition et le stockage de ressources et l'ancrage de la plante dans le sol (Fitter, 1987). La seconde fonction est particulièrement importante dans des milieux où les conditions environnementales sont difficiles (vent, mouvements de sol, ruissellement concentré par exemple). Afin de résister aux contraintes environnementales, la plante doit transmettre les forces extérieures dans le sol via sa tige puis ses racines (Figure 15). Les caractéristiques du système racinaire, telles que son architecture ou la morphologie de ses racines, sont donc déterminantes dans l'ancrage des plantes à leur substrat. Cependant, l'enracinement des plantes dépend de mécanismes complexes combinant de nombreux autres facteurs, dont trois principaux peuvent être retenus (Figure 16) :

- les caractéristiques du système racinaire (ex. Ennos, 1993; Stokes et al., 1996; Nicoll et al., 2006)

- les propriétés du sol (ex. Ennos, 1990; Dupuy et al., 2005a) - l'orientation et l'intensité de la contrainte (Ennos, 1993).

En outre, dans le sol, les contraintes mécaniques agissent également sur le développement des racines et influencent donc indirectement l'ancrage des plantes.

Figure 15 : Transmission de la contrainte

appliquée à la plante dans le sol via le système racinaire (D'après Ennos, 1993).

1. Force appliquée à la plante 2. Force transmise aux racines 3. Force dissipée dans le sol

i. Le système racinaire

Il n'y a pas de système racinaire "idéal" qui assurerait le meilleur enracinement possible dans le sol. Pour résister au déracinement, la plante doit transférer la force à laquelle elle est soumise dans le sol via ses racines. L'efficacité du système racinaire dépend donc du type de contrainte. Ennos (1993) décrit ainsi les systèmes fasciculés et pivotants comme les mieux adaptés pour résister à des contraintes verticales et horizontales respectivement. De nombreuses études, portant à la fois sur du matériel vivant (ex. Crook & Ennos, 1996; Karrenberg et al., 2003; Schutten et al., 2005; Stokes et al., 2007), des modèles physiques (Stokes et al., 1996; Mickovski et al., 2007) et des modèles numériques (Dupuy et al., 2005a), ont permis de relier des caractéristiques des racines des plantes à leur puissance d'enracinement. Ainsi, la biomasse racinaire, la longueur et le nombre de racines, les patrons de ramifications sont autant de traits influençant de manière significative l'ancrage des plantes. Cependant, la plupart des études portant sur l'ancrage des plantes n'ont considéré qu'une seule ou quelques espèces simultanément. Les traits décrits ne sont malheureusement pas toujours pertinents pour comparer plusieurs espèces, notamment parce qu'ils sont liés à la taille de la plante (ex. relation allométrique entre la taille d'un individu et sa biomasse racinaire ou le nombre de ses racines).

ii. Les propriétés du sol

De manière assez intuitive, plus un sol est meuble et moins le système racinaire sera efficace pour ancrer la plante à son substrat. Schutten et al. (2005) ont ainsi montré que, chez des plantes aquatiques, la puissance d'ancrage était proportionnelle au produit de la taille du système racinaire et de la cohésion du sol. Cependant, la relation cohésion du sol/ancrage n'est pas aussi simple car le sol intervient également indirectement en influençant la morphologie des racines. Un sol meuble va par exemple faciliter la croissance des racines et donc augmenter la puissance d'enracinement de la plante. Humidité, porosité ou ressources du sol sont donc autant de facteurs pouvant influencer l'architecture et la morphologie du système racinaire des plantes (Fitter & Stickland, 1991; Taub & Goldberg, 1996; Hodge, 2004). L'hétérogénéité locale des caractéristiques du sol pèse aussi sur le développement racinaire. Une "poche" de nutriments (Coutts & Philipson, 1976; Robinson, 1994) ou la présence d'obstacles (Quine et al., 1991), tels que des pierres ou de grosses racines, vont favoriser ou contraindre la croissance des racines dans une zone déterminée du sol et provoquer une asymétrie du système racinaire (Coutts et al., 1999 – Figure 16). D'autre part, les nutriments du sol influencent également la morphologie des racines. Par exemple, de faibles concentrations en phosphates favorisent la production de radicelles et la mycorhization (Díaz et al., 1993) formant un chevelu racinaire plus dense, et la croissance de nombreuses petites racines latérales au dépend de la croissance des racines primaires (López-Bucio et al., 2003).

PARTIE 1–Résistance au déracinement Introduction

iii. Les contraintes mécaniques

Les contraintes mécaniques appliquées aux plantes peuvent être très variables, aussi bien en termes d'intensité, de direction (verticale ou horizontale), de fréquence que de sens (contrainte unidirectionnelle, comme le sens d'un vent dominant, ou non). Cette variabilité a des conséquences sur la résistance des plantes au déracinement. En effet, pour un système racinaire donné, la puissance d'enracinement peut être variable selon que l'on considère une force de traction verticale ou horizontale (Ennos, 1993 et voir paragraphe i). D'autre part, les stress mécaniques exercés par l'environnement peuvent entraîner des modifications de l'architecture, de la morphologie et des propriétés biomécaniques des racines (Read & Stokes, 2003). Ainsi, les plantes stressées produisent souvent plus de racines (Chiatante et al., 2003; Goodman & Ennos, 1997; Scippa et al., 2006) et celles-ci sont souvent plus épaisses et plus rigides que celles de plantes non stressées (Goodman & Ennos 2001; Niklas, 1998). D'autre part, dans le cas de contraintes unidirectionnelles, une asymétrie du système racinaire, caractérisée par plus de racines dans le sens de la contrainte, est un phénomène couramment décrit (Coutts et al., 1999; Chiatante et al., 2003; Di Iorio et al., 2005; Tamasi et al., 2005 – Figure 16). Ces adaptations, qui apparaissent dès les premiers stades de développement des plantes (ex. Scippa et al., 2005), permettent d'augmenter la stabilité et la survie des plantes (Stokes et al., 1997; Mickovski & Ennos, 2003; Burylo & Grassein, soumis).

Figure 16 : L'ancrage des plantes, un processus multifactoriel. Les caractéristiques du système racinaire, combinées aux propriétés du sol et à celles de la contrainte, influencent la puissance d'enracinement des plantes. Le sol et la contrainte ont également un impact indirect en modifiant le développement des racines (Burylo, inédit).

CARACTÉRISTIQUES DU SYSTÈME RACINAIRE Architecture Taille Morphologie Propriétés biomécaniques PUISSANCE D'ENRACINEMENT