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Chapitre I : Revue de littérature

1.5 Les réponses métaboliques suite à la digestion gastro-intestinale

1.5.2 La réponse insulinémique

L‘insuline, parfois appelée « hormone de stockage », est le principal facteur protéique contrôlant le métabolisme de l‘organisme. Elle est surtout connue pour son effet régulateur de la glycémie qui sera développé ici, mais elle a aussi un effet sur l‘homéostasie du potassium, la croissance et la différenciation cellulaire, etc. Seules de petites molécules monomériques (monosaccharides, acides gras à longue chaîne, AA de conformation lévogyre, corps cétoniques) peuvent affecter la sécrétion d‘insuline, le glucose étant le plus puissant stimulant de cette sécrétion. L‘augmentation de ce glucide (> 5 mM) agit sur les

cellules β des îlots de Langerhans et stimule la sécrétion de l‘insuline (phase absorptive), alors que sa baisse inhibe la sécrétion (phase post-absorptive) (Newgard and Matschinsky, 2010). La sécrétion de l‘insuline est maximale avec 10 mM de glucose (Newgard and Matschinsky 2010). Cette sécrétion active la captation du glucose plasmatique par les cellules du muscle, les adipocytes et les cellules du foie, la concentration de glucose tend alors à rejoindre celle avant le repas. Les récepteurs à l‘insuline des différentes cellules sont sensibles à l‘hormone, mais peuvent devenir moins sensibles ou insensibles chez certains sujets, obèses ou diabétiques de type-2, respectivement.

La consommation d‘aliments riches en fibres a été associée à des effets bénéfiques pour des sujets résistants à l‘insuline (Jenkins et al., 2000). Ces effets ont été attribués à l‘augmentation de la viscosité de la matrice alimentaire par l‘ajout de fibres solubles. L‘augmentation de viscosité interfère avec l‘activité enzymatique, la vidange gastrique et le transport du glucose à l‘épithélium intestinal pour son absorption (Karhunen et al., 2008). À dose équivalente, il a été démontré qu‘une consommation d‘amidon induisait une sécrétion d‘insuline plus faible que celle suivant une consommation de glucose (Karhunen et al., 2008). Des fibres insolubles issues de produits céréaliers, présentes dans des diètes de faible indice glycémique, ont aussi diminué la sécrétion d‘insuline car elles ne sont pas digérées par les enzymes digestives humaines mais sont hydrolysées par les bactéries coliques (Jenkins and Jenkins, 1985).

Les protéines stimulent la sécrétion d‘insuline et ce différemment selon leur source. Les protéines laitières apportées par la consommation de fromage cottage produisent une plus forte sécrétion d‘insuline comparé aux réponses suivant la consommation de poisson (cabillaud) ou de végétaux (isolat de protéines de soya) (von Post-Skagegard et al., 2006). De plus, les protéines de lactosérum stimulent plus fortement la sécrétion d‘insuline que les caséines (Nilsson et al., 2007). Ce comportement a été expliqué par une digestion plus lente et un retard d‘apparition des AA dans le plasma pour les caséines (Dangin et al., 2001). La nature des AA est aussi importante. Les BCAA (Leu, Ile, Val), ainsi que Ala, Glu, et Lys, ont été montrés comme molécules stimulant la sécrétion de l‘insuline en présence de glucose (2.5 à 5 mM) (Floyd et al., 1966; Nilsson et al., 2004; Karhunen et al., 2008).

a) b)

Seule la Leu stimulerait cette sécrétion même en absence de glucose (Karhunen et al., 2008).

Les lipides influencent aussi la sécrétion d‘insuline. L‘augmentation de la concentration plasmatique d‘acides gras stimulerait la sécrétion d‘insuline à court terme (Newgard and Matschinsky, 2010). Après un jeûne, la présence d‘acides gras non-estérifiés serait nécessaire pour que le glucose stimule la sécrétion d‘insuline (Stein et al., 1996). La sécrétion d‘insuline est plus importante lors de la perfusion d‘acides gras à longues chaînes que lors de la perfusion d‘acides gras saturés à moyenne chaîne chez des rats (Stein et al., 1997).

L‘insuline étant une hormone peptidique, ses effets passent par sa fixation sur des récepteurs spécifiques des membranes plasmatiques des cellules cibles, déclenchant des changements dans les voies protéiques de transport membranaire et dans les voies enzymatiques cellulaires. L‘insuline est composée de quatre domaines (A, B, C, D) représentés à la figure 1.11.

Figure 1.11. Représentation schématique de la conformation tridimensionnelle de la molécule du peptide insuline a) et b) : domaine A en rouge, domaine B en jaune a) et b) ; domaine C en bleu, domaine D en vert b) (Saltiel and Pessin, 2007).

Le domaine C, appelé C-peptide, est perdu lorsque l‘insuline est sécrétée du pancréas et les domaines A et B se plissent et se lient par des ponts disulfures. Les récepteurs de l‘insuline (IR 1, 2, 3, 4) sont des récepteurs tyrosine-kinase (RTKs) sous forme de dimères, composés de deux sous-unités extracellulaires α (sites de liaison) et deux sous-unités transmembranaires β (domaines tyrosine kinase). Ces derniers changent de conformation et sont phosphorylés quand les sous-unités α sont liées. Les tyrosine kinases phosphorylent plusieurs substrats dans la cellule et activent des voies métaboliques (en surface cellulaire, dans les vésicules intracellulaires ou dans le cytoplasme).

Parmi les substrats du récepteur d‘insuline, les protéines sont les mieux caractérisées, en particulier les protéines contenant des domaines SH2 (Src homology 2), c‘est-à-dire une centaine de protéines humaines impliquées dans la communication cellulaire. Par exemple, la sous-unité régulatrice p85 de la kinase-1A-PI3 (phosphatidylinositol-3-kinase = PI3K) entre dans la voie de phosphorylation d‘autres protéines. Elle crée des sites de reconnaissance pour des protéines contenant des domaines spécifiques (DH) au transport du glucose dans les cellules musculaires et les cellules adipeuses par translocation des récepteurs GLUT-4 du cytoplasme au plasma (signal 1 sur la figure 1.12). La voie métabolique PI3-kinase n‘est pas la seule nécessaire au transport du glucose par GLUT-4 en présence d‘insuline. Par exemple, dans les adopicytes différenciés, la voie CAP-Cbl (protéine associée au Cbl-Cbl) est nécessaire pour la translocation du glucose (Saltiel and Pessin, 2007).

Figure 1.12. Schéma des voies de signalisation impliquant mTOR dans la régulation de la synthèse des protéines (Wang and Proud, 2006).

L‘insuline a aussi un rôle majeur dans le métabolisme protéique, à la fois dans les réactions d‘anabolisme et de catabolisme. En absence d‘insuline, des pertes de poids et l‘absence de croissance du corps ont été observées (Saltiel and Pessin, 2007). La voie métabolique impliquée ici agirait sur la stimulation de la traduction des ARNm en protéines. Ce contrôle de la traduction des ARNm passerait par la voie de signalisation basée sur la protéine kinase Ser/Thr mammalian target of rapamycine (mTOR, cible de la rapamycine chez les mammifères). Lors de la traduction, cette voie de mTOR intervient dans les étapes d‘initiation et d‘élongation. Dans les cellules musculaires et les cellules adipeuses, la présence d‘insuline activerait la voie PI3-kinase(PI3K)/protéines kinase B (PKB) qui induirait la phosphorylation de TSC2 (pour tuberous sclerosis complex 2) du complexe TSC1/TSC2 (figure 1.12). Cette phosphorylation inhiberait le rôle d‘activateur de protéine du complexe (via une activité GPTase) et mTOR serait activé comme le montre la figure 1.12 (Wang and Proud, 2006). Une autre voie indépendante de l‘insuline activerait la voie

mTOR. Les BCAA, et en particulier la Leu, activeraient la voie de signalisation mTOR/p70 S6 kinase et inhiberait la voie PI3K (Tremblay and Marette, 2001) (figure 1.12).

La sécrétion d‘insuline est aussi contrôlée hormonalement, notamment par le peptide insulinotrope glucodépendant (GIP) sécrété par les cellules du tractus GI après l‘ingestion d‘un repas (Meier et al., 2002).

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