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Réponse immunitaire face aux AAVr

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Chapitre 2 : La thérapie génique

2. Thérapies géniques basées sur l’utilisation d’AAV pour les maladies du système

2.2. Les virus adéno-associés recombinants (AAVr)

2.2.3. Réponse immunitaire face aux AAVr

Les AAV ont l’avantage d’être faiblement immunogène (Bessis et al., 2004). Cependant une réponse immunitaire peut se mettre en place à la suite d’injection d’AAVr.

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Introduction

L’organisme développe surtout une réponse immunitaire humorale contre la capside empêchant toute ré-administration d’AAV avec un sérotype similaire.

Lors d’une infection virale, deux types de réponses immunitaires se mettent en place. Immédiatement après l’infection, la réponse immunitaire innée, non spécifique, permet la sécrétion de cytokines inflammatoires et de chimiokines au site d’infection ou d’injection dans le cas d’une TG. Ensuite, la réponse immunitaire adaptative se met en place. De manière très simplifiée : dans les ganglions lymphatiques, les lymphocytes T cytotoxiques (CD8+) vont être activés suite à la présentation d’antigènes (peptides) par les cellules présentatrices d’antigènes (APC) ainsi que les cellules dendritiques, via le complexe majeur d’histocompatibilité de classe I (MHC-I). Le MHC-I, exprimé à la surface de l’ensemble des cellules nucléées, présente des peptides issus de protéine du non soi d’origine cytotoxiques. Les cellules T CD8+ migrent ensuite vers le lieu d’infection et détruisent les cellules présentant les mêmes peptides sur leur MHC-I. On parle de réponse immunitaire adaptative cellulaire. En parallèle, les protéines du non soi extracellulaires seront phagocytées par les APC et présentées aux lymphocytes T helper (CD4+) via le MHC-II. L’activation des cellules T helper entraine l’activation des lymphocytes B qui produiront alors des anticorps neutralisants contre cette protéine du non soi. On parle alors de réponse immunitaire adaptative humorale.

Les AAV étant décrits comme non pathogènes, initialement peu d’attention avait été portée aux réponses immunitaires suite à l’administration d’AAVr. Au cours d’un essai clinique pour l’hémophilie B avec l’injection d’AAV2 codant pour le facteur IX, une réponse immunitaire a été observée et étudiée (Manno et al., 2006). L’injection d’AAV ne semble pas déclencher de réponse immunitaire innée dans l’organisme (ou très légèrement) (Bessis et

al., 2004). En effet, sur l’ensemble des essais cliniques de TG utilisant des AAVr aucune

réaction sévère due à la réponse immunitaire innée n’a été observée. En revanche une réponse immunitaire adaptative contre le transgène ou la capside peut se mettre en place, conduisant à la destruction des cellules exprimant le transgène et à la production d’anticorps neutralisants. Ces réponses inhibent donc l’expression du transgène et l’efficacité de la TG à long terme. Différents paramètres influent la sévérité de cette réponse : le tissu ciblé, la dose de vecteur et le sérotype d’AAV utilisé, le transgène et son niveau d’expression, etc.

2.2.3.1. Réponse immunitaire adaptative contre le transgène

La réponse immunitaire contre le transgène varie en fonction des protocoles expérimentaux (quantité de transgène, cinétique d’expression, voie d’administration) ainsi

Figure 37 : Réponse immunitaire adaptative contre la capside des AAV.

La population humaine est largement pré-immunisée contre les AAV, certains sérotypes plus particulièrement (AAV2 et AAV5). Cette pré-immunisation limite l’efficacité de transduction des cellules cellules par les AAVr ainsi que l’efficacité de l’approche thérapeutique. (A) Suite à une infection, les AAV sauvages peuvent être phagocytés par les APC, le peptide (antigène) est alors présenté par le MHC-II aux lymphocytes T helper (CD4+) conduisant à l’activation des lymphocytes B et à la production d’anticorps neutralisants contre la capside viral (réponse immunitaire adaptative humorale). (B) En parallèle si l’AAV infecte l’APC (cellule dendritique par exemple), des peptides de la capside seront présentés aux lymphocytes T cytotoxiques (CD8+) via le MHC-I. Ces cellules T CD8+ seront alors capables de détruire les cellules présentant des peptides similaires via leur MHC-I avec la production de molécules cytotoxiques. Cette réponse immunitaire adaptative cellulaire est beaucoup plus rare que la réponse humorale, en raison de la faible transduction des APC par les AAV. Lors d’une administration d’AAV pour une approche de TG, les anticorps préexistants pourront donc neutraliser les particules virales circulantes dans l’organisme et les lymphocytes T cytotoxiques pourront détruire les cellules transduites.

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Introduction

que de la présence ou non d’une protéine codée par l’allèle muté chez les patients. On pourra donc observer une gamme de réponses allant d’une absence de réponse à la destruction des cellules exprimant le transgène (réponse cellulaire) et à la neutralisation de la protéine thérapeutique par les anticorps (réponse humorale) (Choudhury et al., 2017). Chez les patients, si la mutation entraine une absence totale de protéine la réponse immunitaire risque d’être forte, la protéine thérapeutique étant reconnue comme du non soi. Au contraire si, malgré la mutation, les cellules produisent une protéine stable, la protéine thérapeutique sera reconnue comme du soi. Les réponses adaptatives cellulaire et humorale contre le transgène dépendent donc de la protéine thérapeutique et de sa présence dans la cellule et sont généralement limitées. En effet, les AAV transduisent très peu les APC, ils sont par exemple capables de transduire les cellules dendritiques (CD) immatures mais pas les CD matures (Choudhury et al., 2017). De plus, il est peu probable que les cellules dendritiques immatures transduites par l’AAV soient présentent en grand nombre au niveau du site d’injection du vecteur. Ainsi les lymphocytes T CD8+ ne sont pas ou très peu activés dans les ganglions lymphatiques n’entrainant pas de réponse cellulaire cytotoxique majeure contre les cellules exprimant le transgène. En parallèle si la protéine thérapeutique est une protéine sécrétée dans l’espace extracellulaire, elle pourra être phagocytée par les APC conduisant à l’activation des lymphocytes B et à la production d’anticorps neutralisants. En revanche une protéine non secrétée ne devrait pas entrainer de réponse adaptative humorale.

2.2.3.2. Réponse immunitaire adaptative contre la capside

L’inconvénient majeur des AAV est la présence d’une séropositivité chez la plupart des individus, impliquant une immunité humorale préexistante forte ainsi qu’une immunité cellulaire (Figure 37) (Lykken et al., 2018). Cependant, en fonction du sérotype d’AAV la prévalence d’infection latente varie grandement : plus de 90% des adultes sont naturellement séropositifs pour l’AAV2 alors que 14% le sont pour l’AAV9. L’immunité préexistante se traduit par la production naturelle d’anticorps neutralisants ces AAV, empêchant donc la transduction efficace des cellules lors d’une TG (Figure 37A). Elle se traduit aussi par la présence de lymphocytes T cytotoxiques contre ces AAV préexistants, entrainant la destruction des cellules transduites (Figure 37B). Cette réponse cellulaire est cependant minime en comparaison à la réponse humorale puisque les APC sont peu transduites (Lykken et al., 2018). Une réponse immunitaire cellulaire contre une protéine de la capside a cependant été observée au cours d’un essai clinique pour l’hémophilie B

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Introduction

entrainant la destruction des hépatocytes transduits (Manno et al., 2006). Bien que rare, cette réponse adaptative cellulaire (dépendante de la dose injectée) présente un risque pour les patients puisqu’elle stimule la production de médiateurs inflammatoires et de molécules cytotoxiques. Enfin, la réponse immunitaire contre la capside (qu’il y ait une immunité préexistante ou non) prévient toute nouvelle administration d’AAVr de sérotype similaire.

Pour des TG du système nerveux, le risque de développer une réponse immunitaire dépend grandement de la méthode d’injection. En effet, le CNS étant un environnement très protégé, des injections IP n’induiront pas de réponse immunitaire. En revanche des réactions immunitaires peuvent être particulièrement attendues à la suite d’injections IV mais également avec des injections IT, le LCR étant riche en anticorps (Lykken et al., 2018). La réponse contre le transgène peut être évaluée chez les mammifères de grande taille mais la réponse contre la capside est très difficilement prévisible. Les modèles souris servent de preuve de concept pour l’efficacité d’une TG.

2.2.3.3. Stratégies contre la mise en place d’une réponse immunitaire

Dans le but de limiter la réponse immunitaire mise en place à la suite d’une administration de vecteur, il est fortement conseillé de tester la séropositivité des patients avant le traitement (Colella et al., 2018). En fonction de la stratégie thérapeutique et de la dose de vecteur un traitement immunosuppressif peut être envisagé, immédiatement à la suite de l’injection ou plus tard, en cas de détection de réponse immunitaire. Cependant ces approches immunosuppressives sont des traitements lourds pour les patients et peuvent donc affecter la qualité de vie. Des approches permettant d’éviter le développement d’une réponse immunitaire sont donc idéales. Pour cela le choix de sérotype et la modification des capsides des vecteurs pour masquer les antigènes de la capside (paragraphe 2.2.2.1.2) sont particulièrement pertinents. Une autre approche est l’utilisation de promoteur spécifique en amont du gène thérapeutique ou encore l’utilisation de microARN tissu-spécifiques pour éviter par exemple l’expression du transgène dans les cellules dendritiques (Majowicz et al.,

2013).

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