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I. Interaction entre chromosomes et plasmides bactériens

I.2 Réplication et transmission des plasmides

La réplication des plasmides, comme celle des chromosomes, est divisée en trois étapes, l’initiation, l’élongation et la terminaison. L’initiation de cete réplication comprend les étapes précédant le recrutement de l’ADN polymérase. Le fonctionnement de l’ADN polymérase nécessite la présence d’une amorce qui peut être générée selon diférents mécanismes d’initiation. Chez les plasmides, soit les brins d’ADN sont deshybridés au site d’origine de réplication (oriV) puis une amorce ARN est synthétisée (réplication thêta et réplication par déplacement de brin) [26], [27]:::; soit un des brins d’ADN est clivé au niveau du site oriV, générant une extrémité 3’-OH qui servira d’amorce (réplication en cercle roulant) [28]. L’élongation est assurée jusqu’à la terminaison de la réplication par un complexe enzymatique nommé réplisome.

C’est l’ADN polymérase de type III, ou parfois de type I lors des étapes précoces de réplication, qui combinée à d’autres protéines forme le réplisome.

I.2.2 Transmission verticale

Lors de la division cellulaire, les plasmides doivent se transmetre aux deux cellules filles en au moins un exemplaire. Cete contrainte nécessite un partitionnement plasmidique qui peut être passif ou actif.

Les plasmides à haut nombre de copies (c’est-à-dire supérieur à 20) utilisent généralement le partitionnement passif. Ce dernier s’appuie sur une distribution aléatoire du plasmide à la descendance. Le succès de cete transmission est corrélé au nombre de copies du plasmide [29].

En efet les modèles suggèrent que lorsqu’une cellule mère contient plus de 20 copies de plasmide, la probabilité de la non transmission du plasmide à la cellule fille est très faible (< 10-6) [25]. Cependant la présence de multiples copies d’un plasmide n’est pas sans poser de problème.

Elle favorise la survenue de recombinaisons entre les plasmides, amenant à la formation de multimères. Ces derniers diminuent le nombre de plasmides pouvant se répartir aux cellules filles et favorisent ainsi l’échec de la transmission verticale. Les plasmides à haut nombre de copies disposent d’un mécanisme de résolution des multimères. Il consiste en un site de reconnaissance situé sur le plasmide auquel se fixe un complexe protéique de recombinaison capable de convertir

les multimères en monomères. Ce complexe de recombinaison peut être codé soit par le plasmide lui-même, soit par le chromosome et détourné aux fins du plasmide [29].

Les plasmides à faible nombre de copies ne peuvent employer la partition passive. Ils utilisent à la place un mécanisme actif proche de la mitose cellulaire [30]. Ce mécanisme implique trois éléments, généralement codés en opéron :::: un site « centromérique » constitué d’une suite de séquences d’ADN répétées (parS) et deux protéines, l’une CBP (pour centromere binding protein) capable de se fixer à parS, et l’autre une NTPase (Nucleoside-triphosphatase). De multiples protéines CBP vont se fixer au site centromérique formant ainsi le complexe de partition qui, à son tour, va recruter la NTPase. En fonction des systèmes, la NTPase va tirer, pousser ou tracter le plasmide à l’aide de filaments, respectivement de type actine, tubuline ou WACA (Walker A type cytoskeletal ATPase) [31], [32].

Si ce partitionnement actif venait à échouer, un système de secours, dit système de mort programmée, peut intervenir. Ce système consiste en deux composants codés par le plasmide : une toxine relativement stable et une antitoxine instable. Dans le cas d’une cellule fille n’ayant pas hérité du plasmide, l’antitoxine sera dégradée rapidement et sera donc non-fonctionnelle alors que la toxine demeurera active ce qui aboutira à la mort cellulaire [33]. Selon le même principe, des systèmes de restriction-modification peuvent remplir un rôle similaire chez les plasmides [34]. Ils sont composés d’une enzyme de restriction stable couplée à une méthyltransférase instable. L’enzyme de restriction coupe l’ADN double brin, excepté s’il est méthylé en des motifs spécifiques. Dès lors, en absence du plasmide, la méthyltransférase sera dégradée avant d’avoir méthylé l’ensemble de l’ADN. L’enzyme de restriction réalisera alors de multiples coupures, menant à la mort cellulaire [35], [36].

I.2.3 Transmission horizontale

Les plasmides peuvent être transférés horizontalement, par transformation naturelle, par l’intermédiaire de vésicules ou bien par transduction lors de l’intervention d’un phage [37]–[39].

Ces mécanismes passifs échappent au contrôle du plasmide et sont peu fréquents. C’est un autre mécanisme, la conjugaison, qui est responsable de l’essentiel des transferts horizontaux de plasmides [40]. On parle dès lors de transfert conjugatif, un mécanisme actif dont les déterminant sont portés et contrôlés par le plasmide lui-même [41].

Le prérequis indispensable à un transfert conjugatif est l’association intime entre les surfaces membranaires des cellules donneuse et réceptrice [42]. Cete association est assurée par la mise en place d’un système de sécrétion de type IV (T4SS) chez le donneur [43]. Ce système de sécrétion est généralement composé de trois éléments :::: i) un pili ou des adhésines situés à la surface cellulaire permetant le contact entre cellules :::; ii) un canal de transport traversant les enveloppes cellulaires, le complexe protéique mpf (mating pore formation) et iii) une protéine servant d’intermédiaire entre le substrat et l’entrée cytoplasmique du mpf, la T4CP (Type IV coupling protein). Le transfert d’un plasmide se déroule de la sorte. Tout d’abord un complexe protéique, le relaxosome, se forme au niveau de l’origine de transfert du plasmide (oriT). Puis ce relaxosome sépare une portion d’ADN double brin en simple brin. La relaxase, une protéine du relaxosome, se fixe alors à l’ADN simple brin et le clive au niveau d’un site spécifique, nic, localisé au sein de l’oriT. Le relaxosome interagit avec le complexe T4CP ce qui déclenche le transfert de la relaxase et du brin d’ADN linéarisé auquel elle est associée à travers le mpf. Enfin, le transfert à la cellule réceptrice terminé, l’ADN plasmidique est recircularisé puis, chez la cellule donneuse comme chez la réceptrice, le simple brin d’ADN est répliqué [44]. Ce mécanisme de conjugaison peut ainsi être vu comme le couplage d’un système de réplication en cercle roulant avec un système de sécrétion de type IV (T4SS) [45].

Ce transfert conjugatif est finement régulé. Il est conditionné par de nombreux facteurs comme le stade de croissance [46], la température [47], mais aussi le pH, l’osmolarité, la concentration en oxygène et la disponibilité des nutriments [48]. De plus l’activaton du transfert est souvent dépendante de la densité cellulaire [49]–[51]. Le mécanisme associé à la détermination de cete densité est le quorum sensing, une difusion de molécule auto-inductrices dont la concentration est corrélée à la densité cellulaire [52], [53].

Cependant, tous les plasmides ne sont pas capables de se transférer par conjugaison. En efet, environ la moitié des plasmides possèdent un système de conjugaison incomplet [3]. On qualifie ces derniers de non-conjugatifs par opposition à ceux capables de se transférer. Ces plasmides non-conjugatifs peuvent néanmoins être transférés par l’intermédiaire du mécanisme de conjugaison d’un autre plasmide [54], [55]. Pour cela, le plasmide doit au minimum posséder une origine de transfert oriT. La majorité des plasmides non-conjugatifs possèdent une telle origine, ils sont alors dits mobilisables [54].