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Le plasmide Ti d’Agrobacterium fabrum C58 : analyse fonctionnelle d’ARN régulateurs

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Academic year: 2022

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Texte intégral

(1)

UNIVERSITÉ

on 1

N°d'ordre NNT: 2017LYSE1160

THESE de DOCTORAT DE L'UNIVERSITE DE LYON

Opérée au sein de

l'Université Claude Bernard Lyon 1 Ecole Doctorale ED341

(Evolution Ecosystèmes Microbiologie Modélisation}

Spécialité de doctorat : Microorganismes, interactions, infections

Soutenue publiquement le 18/10/2017, par

(Benjamin Diel)

Le plasmide Ti d' A

gr

ohacterium fàhrum C58 analyse fonctionnelle d' ARN régulateurs

Devant le jury composé de

WISNIEWSKI-D YÉ, Florence

FAURE, Denis FILLOUX, Alain SOUTOURINA, Olga LACOUR, Stéphan

Professeur Université Lyon 1

Directeur de recherches CNRS Professeur lmperial College London Professeur Université Paris-Sud

Maître de conférences Université Grenoble Alpes

Présidente

Rapporteur Rapporteur Rapportrice Examinateur

(2)
(3)

Liste des abréviations

Nt nucleotide

ADN Acide desoxyribonucleique

ADNc ADN complementaire

ARN Acide ribonucleique

ARNm ARN messager

ARNr ARN ribosomial

ARNt ARN de transfert

ARNnc ARN non codant

sRNA small RNA (petit ARN)

UTR untranslated region

CDS coding sequence

RBS ribosome binding site

GFP green fluorescent protein

LPG levure leptone glucose (ou YPG pour yeast peptone glucose)

PCR polymerase chain reaction

RACE-PCR rapid amplification of cDNA ends PCR RT-qPCR reverse transcription quantitative PCR

RNAseq RNA sequencing

OC8HSL 3-oxo-octanoylhomoserine lactone

UFC unité formant colonies

ORF open reading frame (cadre ouvert de lecture)

° degré Celsius

(4)
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Table des matières

Avant propos...1

I. Interaction entre chromosomes et plasmides bactériens...3

I.1 Généralités sur les plasmides...3

I.1.1 Défnition...3

I.1.2 Fonctions...4

I.2 Réplication et transmission des plasmides...5

I.2.1 Réplication...5

I.2.2 Transmission verticale...5

I.2.3 Transmission horizontale...6

I.3 Écologie des plasmides...8

I.4 Le dialogue entre plasmide et chromosome...9

I.4.1 Régulateurs chromosomiques avec des cibles plasmidiques...9

I.4.2 Régulateurs plasmidiques avec des cibles chromosomiques...10

II. Le plasmide Ti...12

II.1 Caractéristiques...12

II.1.1 Généralités...12

II.1.2 Taxinomie des plasmides Ti et d’Agrobacterium...13

II.1.3 Le génome d’A. fabrum C58...14

II.2 Pathogénie...17

II.2.1 Symptômes et hôtes...17

II.2.2 Le cycle infectieux...19

II.2.2.1 Reconnaissance de la plante hôte...19

II.2.2.2 Atachement aux cellules végétales...22

II.2.2.3 Induction des gènes de virulence, transfert et expression de l’ADN-T...25

II.2.3 Le transfert conjugatif du pTiC58 et sa régulation...26

II.3 Avantages et inconvénients du plasmide Ti pour A. fabrum...29

(6)

III. Caractérisation fonctionnelle des ARN régulateurs...30

III.1 La régulation par les ARN...30

III.1.1 Généralités...30

III.1.2 Mécanismes moléculaires de régulation en trans...31

III.1.2.1 Régulation par interaction avec les protéines...31

III.1.2.2 Régulation par interaction avec les ARNm...32

III.1.2.2.a Contrôle de l’initiation de la traduction...32

III.1.2.2.b Modulation de la stabilité des ARNm...33

III.1.2.2.c Implication de la protéine chaperon Hfq...34

III.1.2.2.d Régulation des opérons...34

III.1.2.3 Le cas des gènes d’ARN régulateurs présents en multicopies...36

III.1.2.4 Exemples d’ARN trans régulateurs plasmidiques...36

III.2 Méthodologie pour l’analyse fonctionnelle des ARN régulateurs...37

III.2.1 Identifcation d’ARN régulateurs potentiels...37

III.2.2 Détermination des cibles et du mécanisme de régulation...38

III.2.3 Décryptage de la fonction physiologique...40

III.2.3.1 Phénotypes et mécanismes d’action associés...40

III.2.3.2 Conditions d’expression des ARN régulateurs...41

IV. Résultats...42

IV.1 Contexte scientifque...42

IV.2 RNA1111, un nouveau régulateur de la virulence...43

IV.2.1 I.2.1 Présentation des travaux...43

IV.2.2 Contribution personnelle...44

IV.2.3 Article 1 :::: Small RNA deep-sequencing analyses reveal a new regulator of virulence in Agrobacterium fabrum C58...44

IV.2.4 Données supplémentaires à l’article...55

IV.2.5 Addenda :::: RNA1111, impact localisé ou global :::?...56

IV.2.6 Conclusion...57

IV.3 QfsR, un régulateur d'opérons chromosomiques d'origine plasmidique..58

IV.3.1 Présentation des travaux...58

IV.3.2 Contribution personnelle...59

(7)

IV.3.3 Te novel regulatory sRNA QfsR is involved in the Ti plasmid-

chromosomal crosstalk by controlling stability of chromosomal polycistronic

mRNAs (version provisoire de publication)...60

IV.3.4 Annexes article...88

IV.3.5 Addenda...106

IV.3.5.1 Infuence in-planta de QfsR sur le transfert conjugatif du pTi...106

IV.3.5.2 Infuence de QfsR dans le maintien au sein de la tumeur...108

IV.3.5.3 Étude de deux homologues structuraux de QfsR...110

V. Discussion et perspectives...112

V.1 Stratégie de caractérisation fonctionnelle des ARN régulateur...112

V.1.1 Prédiction des cibles...112

V.1.2 Validation des cibles et détection de l’interaction ARN/ARN...114

V.1.3 Caractérisation phénotypique...114

V.2 Rôle des ARN régulateurs RNA1111 et QfsR chez A. fabrum C58...115

V.2.1 La régulation des étapes clés de l’interaction avec la plante...116

V.2.2 La régulation du transfert conjugatif du plasmide Ti...120

V.2.3 Une possible régulation du transfert conjugatif du plasmide At...121

V.3 Structure fonction évolution des ARN régulateurs...121

V.3.1 Evolution et structure...121

V.3.2 Fonction et structure...122

V.3.3 Fonction et évolution...123

Références...124

(8)

Liste des fgures et tableaux

Manuscrit

Figure 1 :::: Représentation schématique du génome d’A. fabrum C58...16

Figure 2 :::: Tumeurs végétales provoquées par la galle du collet...18

Figure 3 :::: Visualisation des protéines fagellaires homologues de A. fabrum C58 sur le

modèle d’assemblage fagellaire de E. coli K-12 MG1655...20

Figure 4 :::: Signaux et régulateurs responsables de la transition de l’état motile à sessile

d’A. fabrum... 24

Figure 5 :::: Étapes de la virulence et du transfert conjugatif du plasmide Ti chez

A. fabrum C 58... 28

Figure 6 :::: Mécanismes d’action des ARN trans régulateurs...33

Figure 7 :::: Régulation de l’expression des gènes opéroniques par les ARN trans

régulateurs... 35

Figure 8 :::: Comparaison de la capacité de former des tumeurs par des souches

dépourvues de RNA1111 chez diférentes plantes...55

Figure 9 :::: Diagramme de double projection (Biplot) des variations d’intensité de chaque

répliqua technique... 57

Figure 10 :::: Fréquences de transfert conjugatif du plasmide Ti d’A. fabrum C58 in-planta

selon diférentes quantités de QfsR... 107

Figure 11 :::: Indice de compétitivité au sein de tumeurs de plants de tomates pour les

souches dont la quantité de QfsR est modifée...108

Figure 12 :::: Comparaison de la localisation génomique, des séquences et des structures

secondaires des « QfsR-like » de R. etli CFN 42 et S. meliloti 1021 avec celle

d’A. fabrum C58. P109... 109

Figure 13 :::: Implication des ARN régulateurs RNA1111 et QfsR dans l’interaction entre

A. fabrum C58 et la plante :::?... 116

Figure 14 :::: ARNm cibles des ARN régulateurs RNA1111 et QfsR...117

(9)

Liste des fgures et tableaux

Article (chapitre V.2.3)

RNA1111: Small RNA Deep-Sequencing Analyses Reveal a New Regulator of Virulence in Agrobacterium fabrum C58

Fig. 1 :::: Distribution of the 1,108 small transcripts among the Agrobacterium

fabrum C58 genome according to sRNA categories...46

Fig. 2 :::: Comparison between the diferent RNA-seq identifcations of sRNAs

and sRNAs prediction in Agrobacterium fabrum C58...47 Fig. 3 :::: Tests of virulence on tomatoes for rna1111 mutants...49

Fig. 4 :::: Regions of interaction between predicted target mRNAs and

RNA1111...50

Table 1 :::: Validation of novel sRNAs by rapid amplifcation of cDNA ends-

polymerase chain reaction (RACE-PCR)...48

(10)

Liste des fgures et tableaux

Article (chapitre V.3.3)

Te novel regulatory sRNA QfsR is involved in the Ti plasmid-chromosomal crosstalk by controlling stability of

chromosomal polycistronic mRNAs

Fig. 1 :::: Conservation of QfsR and of its mRNA targets...64

Fig. 2 :::: Regions of interaction between predicted target mRNAs and QfsR...66

Fig. 3 :::: Verifcation of QfsR–mRNA interactions in a heterologous reporter assay...68

Fig. 4 :::: Motility indexes of chemotaxis assays...70

Fig. 5 :::: Qantifcation of Ti plasmid conjugative transfer frequencies and quorum sensing signals, according to the QfsR concentration...73

Fig. 6 :::: Expression of QfsR mRNA targets...75

Fig. S1 :::: Genetic organization of the qfsR locus from the Ti plasmid and predicted secondary structure of the transcribed sRNA...87

Fig. S2 :::: Direct QfsR control of its mRNA targets is Hfq-dependent...88

Fig. S3 :::: Tests of virulence on tomatoes for qfsR mutants...89

Table 1 :::: Tests of virulence on tomatoes for qfsR mutants...71

Table S1 :::: Tests of virulence on tomatoes for qfsR mutants...90

Table S2 :::: Tests of virulence on tomatoes for qfsR mutants...102

Table S3 :::: Tests of virulence on tomatoes for qfsR mutants...103

(11)
(12)

Les plasmides sont des éléments génétiques égoïstes tributaires de leur hôte dont ils utilisent la machinerie cellulaire pour assurer leur réplication. Ils portent néanmoins des fonctions bénéfiques à la cellule, aussi ils ne peuvent être qualifiés de parasites stricts. L’interaction plasmide-hôte est façonnée par un compromis évolutif entre les coûts et les bénéfices apportés par chacun des deux partenaires. Ce compromis se traduit par la présence d’une grande variété de fonctions accessoires et de stratégies de maintien pour les plasmides et d’une fine régulation de ces dernières. De plus il est établi que les plasmides influencent l’expression des gènes de leur hôte et inversement :::: il existe donc un dialogue entre le plasmide et son hôte. Ce dialogue passe par l’intermédiaire de régulateurs qui, contrairement à ceux associés aux fonctions des plasmides, ont été très peu décris à ce jour.

Ces régulateurs peuvent agir à diférents niveaux :::: transcriptionnellement, post- transcriptionnellement, traductionnellement et post‐traductionnellement. A ce jour plusieurs régulateurs transcriptionnels ont été décrits. Cependant il existe également des régulateurs post- transcriptionnels dont les ARN régulateurs. Leur évolution est décrite comme rapide, particulièrement pour les ARN dits trans régulateurs qui sont de petite taille et généralement capables de réguler plusieurs cibles. Leur action passe par une interaction imparfaite avec leurs ARN messagers cibles et ne nécessitent donc pas le recrutement de la machinerie de traduction cellulaire. Leur production et leur dégradation sont ainsi rapides et économiques pour la cellule.

Ainsi, des modélisations suggèrent une implication majeure de ces ARN régulateurs dans la régulation cellulaire en réponse à un changement environnemental et plusieurs exemples soutiennent ces prédictions. Or c’est ce qu’apporte généralement un plasmide lors de son acquisition :::: de nouvelles fonctions permetant à la cellule de s’adapter à des changements environnementaux.

Le plasmide Ti (pour Tumor inducing) est un plasmide transitoire chez les populations d’Agrobacterium fabrum1, une alpha-protéobactérie. Lorsqu’il est présent, A. fabrum devient phytopathogène et est alors responsable de la galle du collet, maladie touchant de nombreuses plantes d'intérêt agronomique. Le cycle infectieux du couple formé par A. fabrum et le pTi débute par le transfert d’un fragment d’ADN du pTi dans le génome de la plante. Ce fragment va s’exprimer et aboutir d’une part à la production d’hormones de plantes, responsables de la formation de tumeurs colonisées par les bactéries, et d'autre part à la production de petites molécules (opines) qui servent de nutriment à A. fabrum. Certaines de ces opines induisent également la synthèse de la molécule signal du quorum sensing. Cete molécule de type

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N-acyl-homoserine lactone (AHL) est à l’origine de la dissémination par transfert conjugatif du pTi vers des bactéries non pathogènes.

De précédents travaux nous ont permis d’identifier de nombreux petits transcrits qui sont des ARN régulateurs potentiels chez A. fabrum C58, souche possédant un pTi. Aussi nous nous sommes demandé si certains d’entre eux pouvaient être impliqués dans le dialogue entre le pTi et la cellule hôte. Lors de mon travail de thèse, j’ai cherché à répondre à cete question en caractérisant deux ARN régulateurs présents sur le pTi.

Ce manuscrit est ainsi organisé en trois parties ::::

Une première, bibliographique, dans laquelle sont présentés i) les plasmides bactériens dans le cadre de l’interaction avec leur hôte, ii) le plasmide Ti, et iii) les ARN trans régulateurs. Une seconde où sont présentés les résultats obtenus au cours de ces travaux de thèse selon deux chapitres. Le premier concerne la caractérisation de RNA1111, un ARN trans régulateur contrôlant des gènes du pTi associés à la virulence et le second la caractérisation de QfsR, un ARN trans régulateur régulant la dissémination du pTi et des gènes chromosomiques d’A. fabrum C58. Enfin, une dernière partie de discussion abordant les apports et les perspectives résultant de ces travaux.

1 :::: Anciennement Agrobacterium tumefaciens

(14)
(15)

I. Interaction entre chromosomes et plasmides bactériens

Chez les bactéries, le chromosome porte les informations génétiques essentielles à la cellule [1], [2]. En plus de ce chromosome, certaines bactéries peuvent acquérir d’autres molécules d’ADN : les plasmides. Ces derniers sont capables de se répliquer et de contrôler leur nombre de copies indépendamment du chromosome. Ils peuvent également se transférer verticalement à la descendance mais aussi horizontalement entre individus ou espèces [3]. Ils sont dépendant de l’hôte puisqu’ils utilisent la machinerie cellulaire pour se répliquer, mais aussi transcrire et traduire leurs gènes. Ces plasmides portent généralement des fonctions bénéfiques pour l’hôte.

Selon le bénéfice et le coût énergétique qu’ils représentent pour leur hôte, les plasmides sont maintenus ou non au sein d’une population bactérienne. Afin de maximiser ce rapport l’expression de leurs fonctions bénéfiques tout comme celles de leurs transmission verticale et horizontale sont finement contrôlées. Ces régulations dépendent à la fois du plasmide lui-même mais également du chromosome. Pour autant ces régulations ne sont pas à sens unique puisque le plasmide peut influencer l’expression des gènes de son hôte [4]–[6]. Il existe donc un dialogue entre les deux partenaires, mais les acteurs sont encore très peu étudiés.

I.1 Généralités sur les plasmides I.1.1 Défnition

Les plasmides bactériens sont des molécules d’ADN double brin sur-enroulés négativement [7].

Ils se présentent généralement sous forme circulaire mais des formes linéaires ont été décrites chez de nombreux genres bactériens [8]–[10].

Leur taille s’étend de 2kb à plus de 600kb [3] et leur nombre de copies par cellule varie de quelques exemplaires à plus de 100 [11], [12]. La taille et le nombre de copies d’un plasmide sont corrélés négativement de sorte que les plasmides de grandes taille sont limités à quelques copies par cellule là où les plus petits sont présents en un nombre élevé. Par comparaison aux chromosomes, les molécules d’ADN plasmidiques ne portent pas de gènes essentiels à la survie de l’hôte, sont généralement plus riches en bases AT [13] et ont un biais d’usage du code génétique diférent [14]. Néanmoins certaines molécules extrachromosomiques, disposant pourtant de mécanismes de réplication et de répartition de type plasmidique, ne possèdent pas

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les autres caractéristiques des plasmides. Elles possèdent une composition nucléotidique [15], [16] ainsi qu’un biais d’usage du code génétique similaire à ceux du chromosome [14]. Elles sont généralement de taille importante (> 200 kb), portent des gènes essentiels à la survie de l’hôte et ne se transfèrent pas horizontalement. Initialement qualifiés de « chromosome secondaire » ou de « megaplasmide », ces éléments ont vraisemblablement été acquis par transferts horizontaux, suggérant qu’ils sont le résultat d’une domestication d’anciens plasmides [17], [18]. Face à ces discordances le terme de chromide a été proposé afin de les distinguer à la fois des chromosomes et des plasmides [19].

I.1.2 Fonctions

Les plasmides, au sens strict du terme, codent des fonctions non essentielles pour leur cellule hôte. Il est possible de séparer ces fonctions selon deux catégories :::: i) une première où sont regroupées les fonctions directement impliquées dans la prolifération du plasmide, soit les fonctions liées aux mécanismes de réplication et de transmission et ii) une seconde catégorie, beaucoup plus diverse, où sont réunies les fonctions permetant d’élargir la niche écologique de l’hôte. Parmi celles-ci on peut citer le fait de conférer une résistance face à certains stress comme une résistance à des antibiotiques [20], aux métaux lourds ou aux anions toxiques [21], [22] ou encore une amélioration de la capacité de réparation de l’ADN [23]. Ces fonctions sont également susceptibles d’augmenter la polyvalence métabolique de l’hôte en permetant par exemple la production d’antibiotiques ou de bactériocines mais aussi le catabolisme de nouvelles sources de carbone ou d’azote [24]. Enfin ces fonctions peuvent permetre un important changement du mode de vie de l’hôte en conférant à la cellule bactérienne des capacités symbiotiques ou pathogéniques avec, la production de toxines, la mise en place de mécanismes de colonisation ou de résistance au système immunitaire de l’hôte infecté. De plus, nous pouvons citer ici le mécanisme plus particulier du transfert interrègne d’ADN permis par les plasmides Ti ou Ri associés au genre Agrobacterium [25], cf. chapitre II).

(17)

I.2 Réplication et transmission des plasmides I.2.1 Réplication

La réplication des plasmides, comme celle des chromosomes, est divisée en trois étapes, l’initiation, l’élongation et la terminaison. L’initiation de cete réplication comprend les étapes précédant le recrutement de l’ADN polymérase. Le fonctionnement de l’ADN polymérase nécessite la présence d’une amorce qui peut être générée selon diférents mécanismes d’initiation. Chez les plasmides, soit les brins d’ADN sont deshybridés au site d’origine de réplication (oriV) puis une amorce ARN est synthétisée (réplication thêta et réplication par déplacement de brin) [26], [27]:::; soit un des brins d’ADN est clivé au niveau du site oriV, générant une extrémité 3’-OH qui servira d’amorce (réplication en cercle roulant) [28]. L’élongation est assurée jusqu’à la terminaison de la réplication par un complexe enzymatique nommé réplisome.

C’est l’ADN polymérase de type III, ou parfois de type I lors des étapes précoces de réplication, qui combinée à d’autres protéines forme le réplisome.

I.2.2 Transmission verticale

Lors de la division cellulaire, les plasmides doivent se transmetre aux deux cellules filles en au moins un exemplaire. Cete contrainte nécessite un partitionnement plasmidique qui peut être passif ou actif.

Les plasmides à haut nombre de copies (c’est-à-dire supérieur à 20) utilisent généralement le partitionnement passif. Ce dernier s’appuie sur une distribution aléatoire du plasmide à la descendance. Le succès de cete transmission est corrélé au nombre de copies du plasmide [29].

En efet les modèles suggèrent que lorsqu’une cellule mère contient plus de 20 copies de plasmide, la probabilité de la non transmission du plasmide à la cellule fille est très faible (< 10-6) [25]. Cependant la présence de multiples copies d’un plasmide n’est pas sans poser de problème.

Elle favorise la survenue de recombinaisons entre les plasmides, amenant à la formation de multimères. Ces derniers diminuent le nombre de plasmides pouvant se répartir aux cellules filles et favorisent ainsi l’échec de la transmission verticale. Les plasmides à haut nombre de copies disposent d’un mécanisme de résolution des multimères. Il consiste en un site de reconnaissance situé sur le plasmide auquel se fixe un complexe protéique de recombinaison capable de convertir

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les multimères en monomères. Ce complexe de recombinaison peut être codé soit par le plasmide lui-même, soit par le chromosome et détourné aux fins du plasmide [29].

Les plasmides à faible nombre de copies ne peuvent employer la partition passive. Ils utilisent à la place un mécanisme actif proche de la mitose cellulaire [30]. Ce mécanisme implique trois éléments, généralement codés en opéron :::: un site « centromérique » constitué d’une suite de séquences d’ADN répétées (parS) et deux protéines, l’une CBP (pour centromere binding protein) capable de se fixer à parS, et l’autre une NTPase (Nucleoside-triphosphatase). De multiples protéines CBP vont se fixer au site centromérique formant ainsi le complexe de partition qui, à son tour, va recruter la NTPase. En fonction des systèmes, la NTPase va tirer, pousser ou tracter le plasmide à l’aide de filaments, respectivement de type actine, tubuline ou WACA (Walker A type cytoskeletal ATPase) [31], [32].

Si ce partitionnement actif venait à échouer, un système de secours, dit système de mort programmée, peut intervenir. Ce système consiste en deux composants codés par le plasmide : une toxine relativement stable et une antitoxine instable. Dans le cas d’une cellule fille n’ayant pas hérité du plasmide, l’antitoxine sera dégradée rapidement et sera donc non-fonctionnelle alors que la toxine demeurera active ce qui aboutira à la mort cellulaire [33]. Selon le même principe, des systèmes de restriction-modification peuvent remplir un rôle similaire chez les plasmides [34]. Ils sont composés d’une enzyme de restriction stable couplée à une méthyltransférase instable. L’enzyme de restriction coupe l’ADN double brin, excepté s’il est méthylé en des motifs spécifiques. Dès lors, en absence du plasmide, la méthyltransférase sera dégradée avant d’avoir méthylé l’ensemble de l’ADN. L’enzyme de restriction réalisera alors de multiples coupures, menant à la mort cellulaire [35], [36].

I.2.3 Transmission horizontale

Les plasmides peuvent être transférés horizontalement, par transformation naturelle, par l’intermédiaire de vésicules ou bien par transduction lors de l’intervention d’un phage [37]–[39].

Ces mécanismes passifs échappent au contrôle du plasmide et sont peu fréquents. C’est un autre mécanisme, la conjugaison, qui est responsable de l’essentiel des transferts horizontaux de plasmides [40]. On parle dès lors de transfert conjugatif, un mécanisme actif dont les déterminant sont portés et contrôlés par le plasmide lui-même [41].

(19)

Le prérequis indispensable à un transfert conjugatif est l’association intime entre les surfaces membranaires des cellules donneuse et réceptrice [42]. Cete association est assurée par la mise en place d’un système de sécrétion de type IV (T4SS) chez le donneur [43]. Ce système de sécrétion est généralement composé de trois éléments :::: i) un pili ou des adhésines situés à la surface cellulaire permetant le contact entre cellules :::; ii) un canal de transport traversant les enveloppes cellulaires, le complexe protéique mpf (mating pore formation) et iii) une protéine servant d’intermédiaire entre le substrat et l’entrée cytoplasmique du mpf, la T4CP (Type IV coupling protein). Le transfert d’un plasmide se déroule de la sorte. Tout d’abord un complexe protéique, le relaxosome, se forme au niveau de l’origine de transfert du plasmide (oriT). Puis ce relaxosome sépare une portion d’ADN double brin en simple brin. La relaxase, une protéine du relaxosome, se fixe alors à l’ADN simple brin et le clive au niveau d’un site spécifique, nic, localisé au sein de l’oriT. Le relaxosome interagit avec le complexe T4CP ce qui déclenche le transfert de la relaxase et du brin d’ADN linéarisé auquel elle est associée à travers le mpf. Enfin, le transfert à la cellule réceptrice terminé, l’ADN plasmidique est recircularisé puis, chez la cellule donneuse comme chez la réceptrice, le simple brin d’ADN est répliqué [44]. Ce mécanisme de conjugaison peut ainsi être vu comme le couplage d’un système de réplication en cercle roulant avec un système de sécrétion de type IV (T4SS) [45].

Ce transfert conjugatif est finement régulé. Il est conditionné par de nombreux facteurs comme le stade de croissance [46], la température [47], mais aussi le pH, l’osmolarité, la concentration en oxygène et la disponibilité des nutriments [48]. De plus l’activaton du transfert est souvent dépendante de la densité cellulaire [49]–[51]. Le mécanisme associé à la détermination de cete densité est le quorum sensing, une difusion de molécule auto-inductrices dont la concentration est corrélée à la densité cellulaire [52], [53].

Cependant, tous les plasmides ne sont pas capables de se transférer par conjugaison. En efet, environ la moitié des plasmides possèdent un système de conjugaison incomplet [3]. On qualifie ces derniers de non-conjugatifs par opposition à ceux capables de se transférer. Ces plasmides non-conjugatifs peuvent néanmoins être transférés par l’intermédiaire du mécanisme de conjugaison d’un autre plasmide [54], [55]. Pour cela, le plasmide doit au minimum posséder une origine de transfert oriT. La majorité des plasmides non-conjugatifs possèdent une telle origine, ils sont alors dits mobilisables [54].

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I.3 Écologie des plasmides

Les bactéries colonisent majoritairement des surfaces tel les particules du sol, les racines de plantes, la peau ou encore les interfaces air-eau [56]. Ces environnements sont hétérogènes dans le temps et l’espace, tout particulièrement le sol. Les bactéries sont donc soumises à de nombreuses variations de leur environnement [57]. Dans ces conditions, les plasmides constituent un riche réservoir de fonctions qui permetent aux bactéries de répondre à ces variations [58], [59]. L’avantage sélectif que les plasmides confèrent aux bactéries dépend donc des conditions environnementales auxquelles elles sont confrontées [60]. Suivant la balance entre le coût énergétique et le bénéfice qu’apporte un plasmide à son hôte, le plasmide pourra ainsi disparaître, se maintenir ou se propager.

Pour cela, les fonctions de transfert vertical et horizontal des plasmides sont requises [61], [62].

La transmission verticale est plus pertinente dans le cadre de la stabilisation à long terme des plasmides alors que le transfert conjugatif est un élément clé pour la propagation du plasmide au sein de la population notamment en l’absence de division cellulaire [63]. En ce sens, il peut être associé à un mode de vie égoïste du plasmide. Dans un environnement variable, le transfert conjugatif permet à un plasmide d’accéder à une large gamme d’hôtes et donc d’empêcher la disparition du plasmide et même de favoriser sa prolifération [64]. La prolifération du plasmide par conjugaison nécessite la présence de la cellule donneuse et de cellules réceptrices. Diférentes fonctions sociales des plasmides vont favoriser la présence de cellules réceptrices. Par exemple la dégradation d’antibiotiques ou encore la production de bactériocines qui, en bénéficiant à l’entourage de l’hôte, vont assurer la présence de cellules candidates à l’acquisition du plasmide.

Les biofilms sont également un environnement favorable aux transferts horizontaux. La densité cellulaire y est importante, ce qui facilite le rapprochement entre cellules donneuses et réceptrices, et ils sont le lieu d’une forte mixité d’espèces, ce qui représente autant de nouvelles opportunités de dissémination pour les plasmides [65]–[67]. En outre les plasmides conjugatifs expriment des facteurs qui induisent les cellules planctoniques à former des biofilms [2], [68].

Néanmoins, la conjugaison engendre un important coût énergétique pour l’hôte. Pour limiter ce coût elle est finement régulée, notamment par la densité cellulaire [69]. L’expression du système conjugatif est transitoire vraisemblablement parce que si la conjugaison est eficace la plupart des cellules environnantes vont être porteuses du plasmide in fine [41]. Enfin, certains plasmides adoptent un comportement de « tricheur » à l’image des plasmides non-conjugatifs mais

(21)

mobilisables (cf. I.2.3). Cete stratégie permet de faire porter à d’autres plasmides les conséquences de la dépense énergétique associée transfert [54], [55], [59].

I.4 Le dialogue entre plasmide et chromosome

Il a été montré expérimentalement que l’expression de certains gènes chromosomiques est modifiée lorsqu’un plasmide est présent et que cete modification difère selon le plasmide considéré [5], [70]. De plus l’expression des gènes d’un plasmide change selon l’hôte auquel ce dernier est associé [6]. Il existe ainsi un dialogue étendu entre plasmides et chromosomes. A l’exception d’un cas d’ARN régulateur, l’ensemble des régulateurs décrits comme impliqué dans ce dialogue sont de nature protéique. Parmi eux de nombreux régulateurs chromosomiques responsables de la régulation de cibles plasmidiques ont été étudiés. Les exemples inverses sont en revanche peu nombreux [4]–[6].

I.4.1 Régulateurs chromosomiques avec des cibles plasmidiques

De nombreux régulateurs chromosomiques sont connus pour influencer des gènes plasmidiques.

Ils agissent généralement en tant que répresseur ou modulateur et participent ainsi à une fine régulation des fonctions plasmidiques. De la sorte ces régulateurs favorisent indirectement le maintien des plasmides en diminuant le coût énergétique que ces derniers représentent [71].

Les protéines de la famille H-NS (pour histone-like nucleoid structuring protein), sont des régulateurs globaux de l’expression génique agissant généralement comme des répresseurs. Leur action dépend des variations de conditions environnementales telles le pH, la température, la pression osmotique ou encore la phase de croissance [72], [73]. La protéine H-NS se présente sous la forme d’un multimère qui reconnaît un motif spécifique de l’ADN de 10pb [74]. Elle est capable d’interagir simultanément avec plusieurs de ces motifs ce qui lui permet de former un pont de liaison entre diférentes portions de l’ADN et ainsi d’en modifier la topologie [75]. Dans un second temps H-NS interagit avec les régions d’ADN riches en AT adjacentes aux motifs auxquelles elle s’est fixée. Cete interaction empêche alors la transcription des gènes en bloquant l’ouverture du complexe enzymatique de l’ARN polymérase [76]. Cete interaction préférentielle aux séquences riches en AT permet à H-NS de réprimer l'expression d'ADN dont la composition en bases est diférente de celle du chromosome, notamment de l’ADN plasmidique qui est

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généralement plus riche en AT [77]. Enfin H-NS peut également former des hétérocomplexes, notamment avec la protéine Hha qui favorise la répression des gènes associés aux transferts horizontaux, tels ceux de la conjugaison plasmidique [47], [78].

D’autres régulateurs ont des cibles plasmidiques spécifiques. On peut citer par exemple le régulateur de transition de phase ArbB de Bacillus anthracis. Il est responsable de la répression des gènes pagA, lef, et cya du plasmide XO1. Les produits de ces gènes sont associés à la production de toxines. Bien que non démontré expérimentalement, la présence de motifs reconnus par la protéine ArbB au niveau des promoteurs de ces gènes semble indiquer que cete régulation est directe [79]. Chez Escherichia coli CpxR et ArcA sont deux régulateurs chromosomiques qui influencent l’opéron tra, dont les produits de synthèse sont responsables du transfert conjugatif du plasmide F. CpxR est le régulateur de réponse du système à deux composants CpxA/CpxR (pour conjugative plasmid expression). Il est activé en réponse aux stress de l’enveloppe cellulaire et réprime indirectement l’opéron tra sans que son mécanisme d’action soit connu [80]. ArcA (anciennement SfrA) est le régulateur de réponse du système à deux composants ArcB/ArcA. En conditions anaérobiques, ArcA induit l’expression de l’opéron tra.

Pour cela il interagit directement avec le promoteur de l’opéron tra. ArcA est ainsi capable d’augmenter le taux de transfert conjugatif du plasmide F [81].

Chez Agrobacterium, deux régulateurs chromosomiques sont décrits pour influencer l’expression des gènes du plasmide Ti, ChvI et ChvE. ChvI est le régulateur de réponse du système à deux composants ChvG/ChvI. Il est induit en réponse à un pH acide et assure alors l’expression basale de certains gènes de la virulence portés par le pTi dont le régulateur majeur VirG du système à deux composants VirA/VirG, vraisemblablement en interagissant directement avec leurs régions promotrices [82], [83] (cf. II.2.2.3). ChvE est une protéine de liaison au sucre. Le complexe ChvE-sucre est capable d’interagir avec VirA. En se fixant, ChvE induit un changement de conformation de VirA, induisant l’augmentation de l’afinité de ce dernier pour les composés phénoliques [84] (cf. II.2.2.3).

I.4.2 Régulateurs plasmidiques avec des cibles chromosomiques

Un petit nombre de régulateurs plasmidiques ont été décrits comme capables d’influencer l’expression des gènes chromosomiques. Par exemple chez le genre Bacillus, le plasmide XO1 de B. anthracis 7702 code le régulateur protéique AtxA qui induit ou réprime indirectement la

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transcription de plusieurs gènes chromosomiques. Parmi ces gènes, certains sont impliqués dans la synthèse d’acides aminés tels les gènes ilv et aro, d’autres dans le transport d’acides aminés, avec les ABC transporteurs Opp et App et enfin certains sont liés au catabolisme de l’acétoïne [85]. Chez B. subtilis JH642, le plasmide pTA1060 porte le système de contrôle du quorum sensing Rap-Phr, où Phr est responsable de la synthèse du peptide signal et Rap est une aspartyl phosphate phosphatase. Rap (Rap60) contrôle indirectement Spo0A, le régulateur transcriptionnel chromosomique responsable de la sporulation. Pour cela Rap inactive Spo0F, l’activateur de Spo0A, en le déphosphorylant et inactive également KinA, l’histidine kinase responsable de la phosphorylation de Spo0F. Rap régule aussi directement ComA, le régulateur transcriptionnel du quorum sensing contrôlant la compétence. Ici le mécanisme d’action de Rap est diférent. Rap forme un complexe avec ComA et l’ADN ce qui inhibe l’activité transcriptionnelle de ce dernier. Rap régule ainsi la sporulation, le cannibalisme, la formation de biofilm ou encore la compétence génétique de B. subtilis JH642 [86]. D’autres plasmides portent des systèmes Rap-Phr, notamment le plasmide XO1 de B. subtilis JH642, dont la protéine Rap (BXA0205) est également capable de déphosphoryler Spo0F. La modification de l’expression de cete protéine Rap (surexpression ou suppression) inhibe la sporulation [87]. Et enfin le plasmide BS32 de B. subtilis NCIB3610 où Rap régule également Spo0F et ComA [88].

Le plasmide EAF présent chez des souches d’E. coli porte le locus perABC, responsable de l’induction de LEE1, le régulateur majeur de l’opéron chromosomique lee (locus of enterocyte efacement) associé à la virulence. L’opéron LEE est le déterminant de l’histophatologie intestinale nommé ataching-and-efacing. Il code les composants d’un système de sécrétion de type III, les efecteurs associés et des adhésines. PerA (BfpT) active son propre promoteur ce qui aboutit à la synthèse de PerC (BfpW) qui va alors directement induire LEE1 [89]. Un autre exemple existe chez le genre Chlamydia avec le plasmide L2 de C. trachomatis L2/434/Bu. PL2 code le régulateur transcriptionnel Pgp4 qui est décrit pour influencer la transcription d’une trentaine de gènes chromosomiques dont la plupart sont associés à des protéines hypothétiques. Qelques-uns de ces gènes ont été identifiés. Il est possible de citer glgA, qui est impliqué dans la synthèse de glycogène ainsi que aroC et fliI, associés respectivement à la synthèse d’acides aminés et au moteur flagellaire. Il n’a cependant pas été déterminé si le mécanisme d’action de Pgp4 était direct ou indirect [90], [91]. Il existe également des homologues de H-NS et de Hha codés à partir de plasmides [47], [92]. Ces homologues sont décrits pour apporter une fonction furtive au plasmide qui réprimerait ainsi ses propres gènes pour lui permetre d’être transféré dans la cellule hôte sans en influencer la valeur sélective [93]. Leur fonction semble néanmoins plus complexe puisqu’ils modifient l’expression des gènes chromosomiques comme plasmidiques [94].

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Il existe également un exemple d’ARN régulateur plasmidique capable d’influencer l’expression de gènes chromosomiques. Chez le plasmide PCP1 de Yersinia pestis 201, l’ARN régulateur HmsA induit indirectement les gènes chromosomiques associés à la synthèse d’exopolysaccharides [95], [96] (cf. III.1.2.4).

II. Le plasmide Ti

II.1 Caractéristiques II.1.1 Généralités

Les plasmides Ti (pour Tumor inducing) sont des plasmides circulaires d’environ 200 kb capables de transmission verticale et horizontale. Ils sont maintenus à une ou quelques copies par cellule via leur système de réplication et de partition de type RepABC [11], [97]. Chez les plasmides Ti ce système comporte trois gènes principaux organisés en opéron qui codent RepA et RepB, impliquées dans la partition du plasmide et RepC, responsable de l’initiation de la réplication.

RepA est une ATPase de type WACA (Walker A type cytoskeletal ATPase) et RepB une protéine CBP (pour centromere binding protein) se fixant au site centromérique de partitionnement parS [98] (cf. I.2.2). L’origine de réplication oriV semble située dans le gène repC tandis que le site parS est localisé entre les gènes repA et repB [97]. Les plasmides Ti sont capables de se transférer par conjugaison grâce à un système de sécrétion de type IV, Tra-Trb. Ils sont transmissibles à de nombreuses Rhizobiaceae et plus particulièrement au genre Agrobacterium [99], [100], des bactéries communes du sol et de la rhizosphère [101], [102].

Les plasmides Ti codent un mécanisme de virulence particulier, les agrobactéries qui portent ce plasmide se voient alors dotées d’un pouvoir phytopathogène. Elles sont alors l’agent responsable de la galle du collet, une maladie se caractérisant par la formation de tumeurs à la base de la tige des plantes [103]. Cete maladie est le résultat de la transformation de cellules végétales par l’ADN-T, une portion du plasmide Ti. Pour cela Agrobacterium utilise un deuxième système de sécrétion de type IV, le système Vir, qui est porté par le pTi. Une fois transféré, l’ADN-T est intégré dans le génome de la cellule végétale [104], les gènes portés par l’ADN-T s’expriment

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alors chez la plante et permetent la synthèse de phytohormones et de métabolites appelés opines [105]–[107]. Les phytohormones sont responsables de la multiplication anarchique des cellules végétales amenant à la formation de tumeurs [108]. Les opines remplissent deux fonctions.

Premièrement, elles servent de sources de carbone et d’azote aux populations d’agrobactéries possédant le plasmide Ti [109]. Deuxièmement, elles sont le signal déclencheur de la communication cellulaire, ou quorum sensing, qui contrôle le transfert conjugatif du plasmide Ti [110].

II.1.2 Taxinomie des plasmides Ti et d’Agrobacterium

Il existe diférents plasmides Ti et leur classification repose actuellement sur le type d’opines produit à partir de leur ADN-T. A ce jour une vingtaine d’opines diférentes ont été identifiées [111]. Des groupes ont été définis sur la base de l’opine la plus abondamment produite. Il existe ainsi des plasmides Ti de type octopine, nopaline, agropine, succinamopine, chrysopine/succinamopine et chrysopine/nopaline [112], [113]. Les plasmides les plus étudiés et les mieux connus sont les plasmides Ti à nopaline ou octopine. Cete classification est cependant imparfaite en raison de la structure mosaïque des plasmides Ti [114]. Hormis les gènes codant le système Vir ou ceux associés au transfert conjugatif, de nombreuses régions sont variables chez les plasmides Ti [115], [116]. Or le classement selon le type d’opines se base uniquement sur une fraction du plasmide Ti. Aussi même si des plasmides Ti partagent les mêmes gènes liés à la synthèse ou à l’utilisation d’opines le reste de leurs séquences peut être très diférent.

Longtemps le potentiel pathogénique lié à la présence et au type de plasmide Ti a été utilisé comme critère pour la classification des agrobactéries. Ainsi les bactéries induisant la galle du collet ont initialement été regroupées sous le nom d’espèce A. tumefaciens. Celles dont le spectre d’hôte était plus réduit se sont vu atribuer un nom spécifique tel A. larrymoorei (galle du figuier), A. rubi (galle du framboisier) ou A. vitis (galle de la vigne) et les souches non pathogéniques ont été regroupées sous le nom d’espèce A. radiobacter [117]. Comme le caractère pathogénique d’Agrobacterium dépend du plasmide Ti, élément mobile chez les Rhizobiaceae, cete classification a dû être reconsidérée [118] :::: une même souche pouvant être ou non porteuse d’un plasmide Ti.

De plus il est à noter que si une même cellule d’Agrobacterium ne peut héberger qu’un seul type de plasmide Ti à la fois, le même type de plasmide Ti peut être retrouvé chez diférentes agrobactéries. De surcroît un même fond génétique peut être associé à diférents plasmides Ti

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[118]. Néanmoins il semble exister une association préférentielle entre certaines souches d’Agrobacterium et certains plasmides Ti, mais les déterminants pouvant expliquer cete association ne sont pas encore connus [119].

Actuellement, le genre Agrobacterium est caractérisé indépendamment de son contenu en plasmide Ti. Il est défini par la présence d’un chromide linéaire et du gène codant la protélomérase associée, telA [120]. Sur cete base, nous retrouvons au sein du genre Agrobacterium les espèces A. larrymoorei et A. rubi mais pas A. vitis qui a récemment été reclassée comme Allorhizobium vitis. Qant à A. tumefaciens, elle a laissé place à un complexe d’espèces génomiques (A. tumefaciens G1 à G9 et G13 à G14) qui sont diférentiées par des analyses de polymorphisme d’ADN et de phylogénie moléculaire [101], [121], [122]. Depuis, un nom latin binomial a été atribué à certaines de ces espèces génomiques. Par exemple le groupe génomique G8 ou anciennement Agrobacterium tumefaciens G8 a été rebaptisé Agrobacterium fabrum, espèce à laquelle appartient la souche de référence C58 [119], [123].

II.1.3 Le génome d’A. fabrum C58

Le génome d’A. fabrum C58 se compose de quatre réplicons : un chromosome circulaire de 2,8 Mb, un chromide linéaire de 2 Mb et deux plasmides :::: le plasmide At de 542 kb, pAtC58, et le plasmide Ti de 214 kb nommé pTiC58 (figure 1). Les proportions en bases GC de ces réplicons sont respectivement de 59,4 %, 59,3 %, 57,3 % et 56,7 % [116], [124]. Le chromide porte des marqueurs auxotrophiques tandis que les plasmides ne portent aucun gène essentiel [125], [126].

Les fonctions du pAtC58 sont peu définies, il porte néanmoins des gènes responsables du catabolisme de composés du sol et de molécules signal et est également décrit comme capable de moduler la virulence [127]–[130]. Mis à part le chromosome circulaire, ces trois autres réplicons ont un système de réplication/partition de type RepABC et ils possèdent des gènes associés au transfert conjugatif [97], [131]. Le système conjugatif du pAtC58 comprend les gènes tra, qui codent le relaxosome et la protéine T4CP, ainsi que les gènes avhB (pour Agrobacterium virulence homologue virB) qui codent le pili et le mpf [132] (figure 1). Des gènes tra ont également été identifiés sur le chromide linéaire mais leur fonction reste encore à déterminer [132], [133] (figure 1).

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Le pTiC58 est un plasmide de type nopaline. Comme l’ensemble des plasmides Ti, il possède deux systèmes de sécrétion de type IV. Le premier est le système Vir qui détermine le pouvoir pathogène du plasmide Ti en étant responsable du transfert de l’ADN-T. Il est composé des gènes vir, organisés en six opérons virA, virB, virC, virD, virE et virG, ainsi que de l’ADN-T, ces deux éléments étant respectivement groupés en deux clusters voisins chez le pTiC58 (figure 1). Les gènes vir codent l’ensemble du mécanisme de transfert de l’ADN-T de la cellule bactérienne vers la cellule végétale, à savoir le relaxosome et le système de sécrétion de type IV comprenant le pili, le canal de transport mpf ainsi que la protéine T4CP permetant l’interaction entre le substrat et mpf [134]. Le deuxième système de sécrétion de type IV est le système Tra-Trb associé au transfert conjugatif du pTi. Il est composé des gènes tra et trb qui sont regroupés dans des régions opposées sur le plasmide (figure 1). Les gènes tra sont organisés en deux opérons traAFBH et traCDG et codent le relaxosome ainsi que la protéine T4CP (TraG) [135]. Les gènes trb sont regroupés au sein de l’opéron traI-trbBCDEJKLFGHI et codent le pili et le mpf [134].

Le fonctionnement du système de virulence et du transfert conjugatif du plasmide Ti impliquent l’utilisation d’opines : la nopaline et les agrocinopines A et B. Elles sont produites par les cellules des tumeurs végétales formées suite à l’intégration dans le génome végétal de l’ADN-T. La nopaline est un condensé d’arginine et d’alpha-ketoglutarate et représente une source de carbone et d’azote. L’agrocinopine A est un phosphodiester de saccharose et de L-arabinose et sert à la fois de source de carbone et de molécule signal du transfert conjugatif. Elle semble être la seule agrocinopine produite dans les tumeurs de pTiC58, l’agrocinopine B étant probablement un produit de la dégradation de l’agrocinopine A [136]. Les gènes responsables de la synthèse de ces opines sont localisés sur l’ADN-T, avec le gène nos pour la nopaline et le gène acs pour les agrocinopines A et B [137], [138]. Le transport et le catabolisme de ces opines est assurée par l’opéron noc pour la nopaline, situé sur le plasmide Ti entre l’ADN-T et l’opéron trb, et par l’opéron accABCDEFG pour les agrocinopine A et B, situé entre la région vir et la région tra (figure 1). Ces opérons sont induits en présence de leurs opines correspondantes et ce par l’intermédiaire de leurs régulateurs respectifs, à savoir NocR, l’activateur de l’opéron noc, et AccR, le répresseur de l’opéron acc. En absence d’agrocinopine, AccR réprime l’opéron acc en se fixant sur la région promotrice de cet opéron. En présence d’agrocinopine, AccR forme un complexe AccR-agrocinopine. Sa conformation est ainsi modifiée et il n’est plus capable d’interaction avec son site de fixation à l’ADN. La répression de l’opéron acc est donc levée [139].

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Figure 1 : Représentation schématique du génome d’A. fabrum C58.

Les quatre réplicons sont présentés avec leur échelles respectives indiquées entre parenthèses. Le contour noir représente l’échelle en base. Les deux bandes grises extérieures indiquent le sens de transcription des gènes. Les localisations de certains gènes (ou groupes de gènes) d’intérêt sont indiquées en couleurs. Cete représentation a été réalisée à l’aide du logiciel DNA ploter [140].

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II.2 Pathogénie

II.2.1 Symptômes et hôtes

Associée au pTi, Agrobacterium provoque la maladie de la galle du collet. Il s’agit d’une excroissance tumorale au niveau du collet de la plante, c’est à dire la zone de transition entre le système racinaire et la tige feuillée. Les tumeurs se développent au sein du cambium, une couche de cellules méristématiques à partir desquelles se diférencient le xylème et le phloème.

L’expansion des tumeurs va ainsi perturber la formation des structures transportant la sève brute et la sève élaborée et conduire à une déficience nutritive [141]. Les tumeurs sont généralement constituées de tissu non organisé mais peuvent se diférencier en racines ou en rejets. Ces variations dépendent de la plante hôte, du type de tissu infecté ou du couple pTi / Agrobacterium (figure 2).

Chaque couple pTi / Agrobacterium a une gamme d’hôtes plus ou moins large [142]. Cete gamme est déterminée par chacun des deux partenaires, bien que le pTi en soit le principal déterminant [143], [144]. Globalement, la galle du collet touche un vaste panel de plante notamment des angiospermes, avec de nombreuses dicotylédones et quelques monocotylédones [145]–[147], ainsi que des gymnospermes [148]–[150]. La souche A. fabrum C58 et son pTi a initialement été isolée du merisier (Prunus avium) et expérimentalement est décrite pour infecter une large gamme d’hôtes. Notamment des membres de la famille des Apocynaceae, Balsaminaceae, Brassicaceae, Crassulaceae, Rosaceae, Rutaceae ou encore des Solanaceae [151], [152]. En conditions de laboratoire la capacité du pTi de transférer de l’ADN à un hôte a été détournée pour modifier génétiquement de nombreux organismes. Des plantes naturellement résistantes ont ainsi pu être transformées [153] tout comme des champignons, incluant levures [154], ascomycètes [155] et basidiomycètes [156], ou même des cellules humaines [157].

Excepté chez les jeunes plantes, la maladie de la galle du collet n’est généralement pas fatale. La plante est cependant afaiblie et sa croissance perturbée, ce qui peut significativement réduire le rendement des cultures [158]–[161]. Les principales pertes ont lieu en pépinière. C’est notamment le cas dans les pays méditerranéens où la galle du collet est considérée comme la principale maladie bactérienne des arbres fruitiers ainsi cultivés [162]. Au-delà des conséquences directes de la galle du collet, le développement anarchique des cellules tumorales peut laisser

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apparaître des blessures qui forment des points d’entrée pour d'autres agents pathogènes ou pour des parasites tels que les insectes foreurs [163].

Figure 2 : Tumeurs végétales provoquées par la galle du collet.

Après l’inoculation d’A. fabrum C58 au niveau du collet de diférentes plantes, les tumeurs végétales formées sont observées. Les cultures sont réalisées en chambres climatiques et observées au niveau du collet (A) d’un plant de tomate (Solanum lycopersicum variété Marmande), 3 semaines post-infection pour (B) d’un plant de Kalanchoe daigremontiana, 2 mois après infection, (C) d’un plant de Kalanchoe tubiflora, 2 mois après infection et (D) d’un plant de tabac (Nicotiana tabacum burley) 6 à 8 semaines post-infection.

Suivant le même mode opératoire, A. fabrum C58 a également été inoculé au niveau des feuilles. Les observations ont été faites 2 mois après infection pour une feuille (E) d’un plant de Kalanchoe daigremontiana, et (F) d’un plant de Kalanchoe tubiflora.

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II.2.2 Le cycle infectieux

II.2.2.1 Reconnaissance de la plante hôte

La première étape du cycle infectieux est de parvenir au contact de la plante hôte ce qui nécessite le déplacement et l’orientation de la bactérie. Le déplacement d’Agrobacterium se fait par nage à l’aide de 4 à 6 flagelles polaires [164]. La biosynthèse de ces flagelles est assurée par les gènes fla, flb, flg, flh et fli et leur rotation par les gènes mot, tous situés au sein d’un large cluster de 40 gènes (Atu0542 à Atu0582) à l’exception de fliF (Atu0523) [116], [124], [165], [166]. La majorité de ces gènes flagellaires sont regroupés en quatre opérons dont les produits de synthèse sont associés :::: i) au crochet et au filament flagellaire pour l’opéron flgEKL-flaF-flbT-flgD-fliQ-flhA-fliR, ii) au domaine de liaison périplasmique pour l’opéron Atu0559-flgF-fliI-Atu0556-flgBC-fliE-flgGAI-Atu0549-flgH-fliL et iii) au moteur flagellaire pour les opérons motA-fliMNG-flhB-Atu0565 et Atu0568-motB-Atu0570-motD-Atu0572 [167], [168].

Enfin il existe également quatre gènes codant les flagellines :::: flaA pour la flagelline majoritaire, flaB, flaC et flaD [166] (figure 3).

L’orientation du déplacement d’Agrobacterium est régie par le chimiotactisme. La perception des molécules signal du chimiotactisme est assurée par une vingtaine de MCP diférentes (methyl-accepting chemotaxis proteins) dont les gènes sont répartis sur tous les réplicons d’A. fabrum C58 [116], [124]. La cascade de réponse associée à ces MCP comprend les gènes chromosomiques cheA, cheR, cheB, cheY1 et cheY2 de l’opéron che, codant respectivement une kinase senseur, une méthyltransférase, une méthylestérase, une phosphatase et un régulateur de réponse [169]. Par analogie aux mécanismes décrits chez E. coli et Sinorhizobium meliloti un modèle de signalisation a été proposé pour les agrobactéries. De manière simplifiée, lorsqu’une molécule signal se fixe à une MCP, CheA s’autophosphoryle puis active CheY2 par phosphorylation. CheY2-P se fixe aux protéines du moteur flagellaire FliM et FliN ce qui induit un changement du sens de rotation du flagelle. La cellule fait ainsi une culbute et change donc de direction de nage [170], [171]. Par la suite CheY2-P est désactivée par CheA qui transfère son groupement phosphate à CheY1 [169]. Lorsque la concentration du chimioatractant augmente, la capacité des MCP à activer l’autophosphorylation de CheA diminue, il n’y a alors plus de changement de direction dans le déplacement de la cellule. Ce mécanisme est dû au fait que l’état de méthylation des MCP module leur capacité à activer CheA, les MCP méthylées étant plus eficaces que les non méthylées [172]. Leur méthylation est assurée par CheR et leur

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Figure 3 : Visualisation des protéines flagellaires homologues de A. fabrum C58 sur le modèle d’assemblage flagellaire de E. coli K-12 MG1655.

Cete représentation est tirée de la base de donnée KEGG [173]. Lorsqu’une protéine d’A. fabrum C58 est décrite comme homologue à une d’E. coli, elle est surlignée en couleur ou en gris. Dans le cas contraire la case reste blanche. Les couleurs surlignant les protéines indiquent l’opéron à partir duquel elles sont traduites. Les protéines surlignées en gris sont celles dont les gènes ne sont pas organisés en opérons. Il est à noter que les organisations opéroniques ne sont pas conservées entre A. fabrum et E. coli.

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déméthylation par CheB [174], [175]. Or lorsque CheA est activée par les MCP elle phosphoryle également CheB qui, sous cete forme, est plus eficiente pour déméthyler les MCP [176]. Ainsi lorsque la concentration en chimioatractant s’élève, la quantité de CheB-P augmente. CheB-P va alors déméthyler les MCP plus eficacement que CheR ne les méthyles ce qui va diminuer capacité des MCP à activer CheA. La bactérie fera alors moins de culbutes et aura plus de chance de nager en direction de la source du chimioatractant.

Les principaux chimioatractants sont les composés phénoliques qui portent un groupement hydroxyméthyle en position 2 et les monomères de sucre tels le glucose ou le galactose [177], [178]. L’atractivité des composés phénoliques dépend de la nature de leur groupement en position 4, il y a ainsi des chimioatractants dits forts comme l’acétosyringone ou faibles comme l’acide férulique et l’acide vanillique [179]. Deux systèmes de perception interagissant avec le système Che-FliM sont présents chez A. fabrum C58. L’un est codé par des gènes chromosomiques et l’autre par des gènes du plasmide Ti. Le système chromosomique a une afinité modérée pour les composés phénoliques. Le senseur chromosomique des composés phénoliques n’est pas identifié tandis que les sucres sont perçus par l’intermédiaire de la protéine ChvE sans que la manière dont elle s’articule avec Che-FliM soit bien connue [179], [180]. C’est le senseur VirA du système à deux composants VirA/VirG du plasmide Ti qui est responsable de la forte atractivité d’A. fabrum C58 pour les composés phénoliques. VirA possède une haute sensibilité pour les composés phénoliques (<10-8 M pour l’acétosyringone) [179]. Cete sensibilité est augmentée en présence de monomères du sucre via l’action du senseur ChvE [178]. Lorsque ChvE fixe un monomère de sucre, le complexe ChvE-sucre interagit avec VirA. La conformation de VirA change alors et sa sensibilité aux composés phénoliques augmente [84]. Le mécanisme d’action détaillé de VirA n’est pas connu. VirA forme un homodimère transmembranaire similaire aux MCP, il est ainsi suggéré que VirA puisse directement détecter les composés phénoliques via un domaine de liaison cytoplasmique [181]. Il est également suggéré que VirA puisse directement activer le système Che-FliM. En efet le domaine régulateur de CheY2, appartenant au système Che-FliM, est similaire à celui de l’activateur transcriptionnel VirG et VirA est décrit pour interagir directement avec CheY2 [182]. VirA aurait donc à la fois un rôle de senseur en détectant directement les composés phénoliques et indirectement les sucres (via ChvE) et un rôle de régulateur du système Che-FliM via une interaction directe avec CheY2 [182].

L’ensemble de ces mécanismes associés à la motilité sont sous le contrôle des activateurs majeurs VisR-VisN (Vital for swimming). Ensemble, vraisemblablement en formant un hétéromultimère, ils régulent l’expression des gènes associés à la formation des flagelles et au chimiotactisme [164].

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Ce contrôle est indirect, en efet VisRN agit principalement en activant l'expression d'un autre facteur de transcription appelé Rem (Regulator of exponential growth motility), un régulateur de réponse à deux composants sans kinase partenaire identifiée. C’est Rem qui semble activer directement la transcription des gènes flagellaires [183].

II.2.2.2 Atachement aux cellules végétales

Au contact de la plante Agrobacterium va s’atacher aux cellules végétales. D’abord de façon réversible, puis irréversible jusqu’à former un biofilm, c’est-à-dire un agrégat de cellules bactériennes atachées à une surface et enrobé d’une matrice polymérique [184]. Agrobacterium interagit avec la cellule végétale par un seul pôle de ses pôles [164], [185]. Le mécanisme par lequel elle détecte les surfaces afin d’enclencher l’adhésion n’est pas connu. Il est suggéré que des pili et la rotation des flagelles soient impliqués [186], [187]. Chez Agrobacterium, l’adhésion réversible est assurée par des pili de type IVb [187]. Les gènes impliqués sont l’opéron ctpABCDEFGHI et pilA, présent respectivement sur le chromosome et le chromide [187].

L’adhésion irréversible est permise par un polysaccharide extracellulaire, le polysaccharide unipolaire (ou UPP pour unipolar polysaccharide) [188]. Sa synthèse est assurée par les produits des gènes upp [186], [189]. La matrice polymérique du biofilm d’Agrobacterium est composée d’exopolysaccharides et aucune protéine ni aucun ADN n’y ont été détectés à ce jour. Les exopolysaccharides produits par Agrobacterium sont le polysaccharide unipolaire (UPP), la cellulose, le β-1,2-glucane cyclique, le β-1,3-glucane cyclique ou curdlan, le lipopolysaccharide de la membrane externe (LPS) et le succinoglycane. L’UPP et la cellulose sont impliqués dans la formation du biofilm chez Agrobacterium. La biosynthèse de la cellulose est permise par les gènes des opérons celABCG et celDE, localisés sur le chromide linéaire [190]. Les autres exopolysaccharides n’ont pas été décrits comme impliqués dans la formation du biofilm chez Agrobacterium. Le β-1,2-glucane semble impliqué dans l’osmorégulation de la cellule et le curdlan dans la protection d’Agrobacterium lorsqu’elle est présente dans le sol [190]–[192]. Qant au succinoglycane, l’exopolysaccharide majeur chez Agrobacterium, son rôle est encore indéfini. Sa biosynthèse est assurée par les gènes exo situés sur le chromide avec les opérons exoTHKLAMONP, exoWVUX, exoQFY et exoB. Chez S. meliloti le succinoglycane est décrit comme participant à l’agrégation cellulaire, il est ainsi possible qu’il remplisse un rôle similaire chez Agrobacterium [193]. La voie de synthèse du succinoglycane pourrait également être reliée à celle de l’UPP. En efet le gène exoY, similaire à uppE, gène essentiel à la biosynthèse d’UPP, peut

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influencer la quantité de biofilm formé [189]. De façon surprenant la synthèse d’UPP n’est pas nécessaire à la virulence d’Agrobacterium. En efet sa synthèse n’est pas modifiée par la présence ou l’absence du plasmide Ti et une agrobactérie dont les gènes upp ont été supprimés demeure virulente [194]. Il semble donc qu’un deuxième mécanisme de fixation de la bactérie aux cellules végétales soit impliqué lors du transfert de l'ADN-T [192].

Le passage de l’état motile à l’état sessile est favorisé par diférentes conditions comme une faible concentration en phosphore, en oxygène ou un faible pH. La concentration en phosphore est détectée par l’intermédiaire du système à deux composants PhoR/PhoB [189], celle en oxygène via les régulateurs de la dénitrification FnrN et SinR [195], [196] et enfin le pH est détecté par ExoR [197], [198] (figure 4). Les régulateurs majeurs de cete transition sont VisR -VisN, qui régulent l’atachement et la formation de biofilm de manière inverse à la motilité et ce indépendamment de Rem. VisR-VisN agissent via une modulation de la quantité de di-guanosine monophosphate cyclique (di-GMPc). Le di-GMPc est synthétisé par les diguanylate cyclases (DGC) et dégradé par des phosphodiesterases (PDE). Une augmentation locale de sa concentration réprime la motilité, notamment en diminuant l’expression des gènes associés aux flagelles et au chimiotactisme, et favorise l’atachement et la formation de biofilm en induisant la synthèse d’UPP et de cellulose. Remarquablement, cete même augmentation de di -GMPc réprime la synthèse de succinoglycane [183]. Chez A. fabrum 33 protéines synthétisant ou dégradant le di-GMPc sont prédites, notamment les diguanylate cyclases DgcA, DgcB DgcC, régulées par VisRN [183]. Lorsque le pH est acide, ExoR est également impliqué dans la transition de l’état motile à sessile. ExoR est le répresseur du système à deux composants ChvG/ChvI. La régulation par ExoR passe majoritairement voire exclusivement par ChvG/ChvI. En condition acide ExoR est dégradé et la répression de ChvG/ChvI est levée [198]. Dans ces conditions ChvG/ChvI réprime la motilité en diminuant la synthèse des flagelles et le chimiotactisme tout en favorisant la synthèse de succinoglycane. Étrangement ChvG/CvhI diminue également l’expression des gènes ctpA et ctpB associés aux pili de type IVb (adhésion réversible) ainsi que la formation de biofilm [198]. L’action de ChvG/CvhI semble également dépendre, au moins en partie, de l’action de DGC notamment PleD (ou CelR) ainsi que d’autres DGC non caractérisées qu’il réprimerait [183], [198].

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Figure 4 : Signaux et régulateurs responsables de la transition de l’état motile à sessile d’A. fabrum. Cete figure est issue de E. Heindl et. al [164]. Les traits pleins indiquent une régulation positive ou négative directe. Les traits en pointillé indiquent une régulation indirecte ou dont les mécanismes moléculaires n’ont pas été déterminés. La membrane cytoplasmique est en noir et la membrane externe en rouge.

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