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Régulation de l’activité des neurones dopaminergiques

La régulation de l’activité des neurones dopaminergiques de la VTA est très complexe.

Elle met non seulement en jeu de nombreuses structures mais également une grande variété de neurotransmetteurs et neuropeptides. Néanmoins, si l’on se place d’un point de vue anatomique, cette régulation peut se scinder en trois catégories : (pour revues : Kalivas, 1993 ; Marinelli, 2006)

- Des régulations intrinsèques à la VTA : elles consistent en de courtes boucles de rétrocontrôles des neurones dopaminergiques, impliquant notamment la libération somatodendritique locale de dopamine (autorégulation) ou la libération de GABA par les interneurones GABAergiques de la VTA. Ces régulations intrinsèques sont notamment capables de moduler la capacité des neurones dopaminergiques à produire des potentiels d’action spontanés en changeant la polarisation de leur membrane.

- Des régulations issues des structures innervées par les neurones dopaminergiques : ce sont souvent des boucles de rétrocontrôle longues régulées par la libération axonale terminale de dopamine. Elles impliquent notamment le PFC ou le NAc. Elles mettent en jeux différents types de neurotransmission, les plus courantes étant glutamatergiques et GABAergiques.

- Des régulations issues de régions non directement influencées par la libération

axonale de dopamine : ces afférences correspondent à des réponses hautement intégrées et polysynaptiques issues de tout le système nerveux central.

Vu la variété et la complexité de ces régulations, plus que l’élaboration d’un catalogue qui ne pourrait être exhaustif, j’ai choisi d’en détailler quelques exemples :

- Régulations intrinsèques : la libération somatodendritique de dopamine. Elle entraîne un rétrocontrôle sur les neurones dopaminergiques de deux façons, selon la localisation et le type de récepteur dopaminergique impliqué. Les récepteurs D2/D3 sont présents en forte densité dans le mésencéphale ventral (Bouthenet et al., 1987 ; Wamsley et al., 1989 ; Sesack, 1994). Des études lésionnelles ont montré que la majorité d’entre eux sont localisés sur les

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neurones dopaminergiques (Bouthenet et al., 1987 ; Chen et al., 1991 ; Black et al., 1992 ), ce que confirme l’expression de l’ARNm codant le récepteur D2 (Meador-Woodruff et al., 1991 ; Mansour, 1992 ; Haber et al., 1995). Ils constituent ainsi des autorécepteurs dopaminergiques dont l’activation, par la libération somatodendritique de dopamine, réduit l’activité des neurones dopaminergiques. Cette réduction d’activité serait due à une activation de conductances potassium, et plus précisément des canaux potassiques de la rectification retardée (GIRK) (White et al., 1984 ; Lacey et al., 1987 ; Davila et al., 2003), conduisant à l’hyperpolarisation de la cellule dopaminergique (pour revue : Kalivas, 1993). Dans la VTA, les récepteurs dopaminergiques D1 sont quant à eux localisés sur des terminaisons axonales, notamment sur des entrées glutamatergiques et GABAergiques issues du cerveau antérieur (Cameron et al., 1993 ; Kalivas et al, 1995 ; Lu et al., 1997). En effet, les neurones de la VTA et de la substance noire n’expriment pas l’ARNm codant le récepteur D1 alors que la protéine est présente dans ces régions (Mansour et al., 1992). La stimulation de ces récepteurs par la dopamine somatodendritique entraîne ainsi une augmentation de la libération de neurotransmetteurs autres que la dopamine, qui vont alors moduler l’activité des neurones dopaminergiques (pour revues : Kalivas, 1993 ; Adell et Artigas, 2004).

- Régulations intrinsèques et extrinsèques : le cas du GABA. Le GABA est responsable de la majorité des inhibitions synaptiques des neurones dopaminergiques. Il provient soit d’une population d’interneurones GABAergiques intrinsèques à la VTA (Bayer et Pickel, 1991 ; Omelchenko et al., 2009b), soit d’entrées GABAergiques extrinsèques, dont le complexe striatal et le pallidum ventral. (Smith et Bolam, 1990 ; Von Krosigk et al., 1992 ; Groenewegen et al., 1993 ; Kalivas, 1993 ; Marinelli et al., 2006).

Les entrées GABAergiques issues du complexe striatal sont souvent qualifiées de

« boucles GABAergiques longues ». Elles peuvent être directes, provenant du NAc, ou indirectes, via le pallidum ventral. En réponse à la libération terminale de dopamine dans le NAc, ces boucles inhibitrices libèrent du GABA directement en regard des neurones dopaminergiques du mésencéphale ventral (Yim et Mogenson, 1980b ; Grace et Bunney, 1985 ; Klitenick et al., 1992). Elles jouent un rôle important dans différentes situations, dont l’inhibition de l’activité des neurones dopaminergiques suite à l’administration de psychostimulants (Bunney et Aghajanian, 1976 ; Einhorn et al., 1988). L’hémitranssection de ces boucles longues n’affecte cependant pas l’activité basale des neurones dopaminergiques de la substance noire et de la VTA (Einhorn et al., 1988 ; Pucak et Grace, 1994). Toutefois, comme le maintien de la fonctionnalité de ces boucles sous anesthésie reste controversé, il reste difficile de statuer sur leur rôle phasique ou tonique.

L’inhibition directe des neurones dopaminergiques de la VTA par le GABA peut se faire via les récepteurs GABAA ou GABAB (Johnson et North, 1992). Les entrées synaptiques sur ces 2 récepteurs semblent avoir des origines neuroanatomiques distinctes (Figure 5). Elles proviendraient des interneurones GABAergiques locaux pour les entrées sur les récepteurs GABAA et des projections extrinsèques sur la VTA pour les entrées sur les récepteurs GABAB

(Johnson et North, 1992 ; Klitenick et al., 1992 ; Sugita et al., 1992). Comme le soulignent plusieurs auteurs (pour revues : Kalivas et al., 1993 ; Marinelli et al., 2006), l’activation de ces récepteurs entraîne une inhibition des neurones dopaminergiques avec un décours temporel différent.

Si la stimulation systémique des récepteurs GABAA augmente l’activité des neurones dopaminergiques (Waszczak et al., 1980), cet effet est indirect et une activation des récepteurs GABAA portés par les neurones dopaminergiques induit quant à elle une inhibition rapide des neurones dopaminergiques. En effet, l’application péricellulaire de l’agoniste muscimol hyperpolarise la cellule (Waszczak et al., 1980), alors que celle d’antagonistes, comme la bicucculine ou la picrotoxine, augmente la fréquence de décharge et l’activité en bouffées de potentiels d’action (Johnson et North 1992 ; Sugita et al., 1992 ; Paladini et al., 1999). La rapidité de ces effets est au moins pour partie expliquée par la nature ionotrope des récepteurs GABAA (Seabrook et al., 1990 ; Johnson and North, 1992).

En contraste, l’activation des récepteurs GABAB localisés sur les neurones dopaminergiques du mésencéphale conduit à une inhibition sur une échelle temporelle plus longue. L’administration intra-VTA de l’agoniste baclofène réduit la fréquence de décharge et l’activité en bouffée de potentiels d’actions des neurones dopaminergiques, mais normalise également leur rythme d’activité (Erhardt et al., 2002). A l’opposé, l’application d’antagoniste augmente l’activité en bouffée de potentiels d’action et prévient les effets d’une application subséquente d’agoniste (Chen et al., 2005). La lenteur relative de la mise en place de l’inhibition associée à l’activation des récepteurs GABAB est pour partie due au fait que ces récepteurs sont métabotropiques. Des études sur tranche ont montré que des agonistes des récepteurs GABAB modulent l’activité des neurones dopaminergiques du mésencéphale en activant des protéines Gi/Go. Le dimère %$ dissocié de sa protéine hetérotrimérique lie ainsi les canaux GIRK, ce qui a pour conséquence leur ouverture et la sortie de potassium, conduisant à l’hyperpolarisation la cellule et par la suite à l’inhibition de l’activité neuronale (Cruz et al., 2004). On remarquera que les mécanismes qui mènent à cette inhibition médiée par les récepteurs GABAB sont similaires à ceux induits par l’activation des autorécepteurs dopaminergiques D2.

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interneurone GABAergique

! GABAA

GABAA

GABAB

!

Afférences

GABAergiques Afférences

GABAergiques

neurone dopaminergique

Figure 5: Schéma du système GABAergique de l'aire tegmentale ventrale. Cette illustration est réalisée d'après la figure 10 d'une publication de Klitenick et collaborateurs de 1992.

III) Sous-divisions fonctionnelles de l’aire tegmentale ventrale : aire tegmentale antérieure versus aire tegmentale postérieure

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