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La VTA est connue pour être une structure clé impliquée dans les mécanismes de récompense. Chez les rongeurs, de nombreuses drogues comme les opiacés (Bozarth et Wise, 1981 ; Welzl et al., 1989 ; Devine et Wise, 1994), la cocaïne (David et al., 2004), ou l’alcool (Gatto et al., 1994) induisent ainsi un effet renforçant quand elles sont directement injectées dans la VTA. Mais l’effet comportemental de drogues appliquées dans la VTA est en fait plus complexe. Une 1ère étude d’Arnt et Scheel-Krüger en 1979 avait déjà montré que l’administration de modulateurs du système GABAergique dans différentes parties de la VTA provoquait des réponses locomotrices différentes. Ce n’est qu’à partir des années 2000 que de nombreux travaux ont montré une hétérogénéité fonctionnelle de la VTA. Cette région peut ainsi, en parallèle à ses sous-divisions morphologiques, se subdiviser en une VTA dite antérieure ou rostrale (aVTA) et une VTA dite postérieure ou caudale (pVTA). Cette distinction s’est faite sur des bases comportementales s’appuyant notamment sur le paradigme de préférence de place conditionnée et sur l’autoadministration intracérébrale de drogues.

Ainsi, la cocaïne (Rodd et al., 2005 ; Lee et al., 2007), la nicotine (Ikemoto et al., 2006), les cannabinoïdes (Zangen et al., 2006), les opioïdes comme l’endomorphine 1 (Zangen et al., 2002), un peptide agoniste endogène des récepteurs &, mais aussi l’éthanol (Rodd-Henricks et al., 2000 ; Ding et al., 2009a) ou l’un de ses métabolites, l’acétaldéhyde (Rodd-Henricks et al., 2002), s’autoadministrent dans la pVTA mais pas ou peu dans l’aVTA. De la même façon, les opiacés (Shabat-Simon et al., 2008) ou les cannabinoïdes (Zangen et al., 2006) n’entraînent une préférence de place que lorsqu’ils sont injectés dans la pVTA mais pas dans l’aVTA. Ces études montrent l’existence d’une hétérogénéité fonctionnelle antéropostérieure au sein de la VTA, la pVTA étant impliquée dans l’effet récompensant des drogues.

En parallèle à ces études sur les substances addictives, d’autres travaux confirment l’hétérogénéité fonctionnelle de la VTA. Ainsi, l’implication de nombreux systèmes de neurotransmission comme les systèmes dopaminergique (Ikemoto et al., 2002, 2006 ; Rodd et al., 2005, 2007, 2008 ; Ding et al., 2009b), sérotonergique (Rodd-Henricks et al., 2003 ; Rodd et al., 2005, 2007, 2008 ; Liu et al., 2006 ; Ding et al., 2009a) GABAergique (Ikemoto et al.,1997, 1998 ; Lee et al., 2007 ; Ding et al., 2009b) mais aussi cholinergique (Ikemoto et al., 2002) ou glutamatergique (Carlezon et al., 2000 ; Ikemoto, 2004 ; Shabat-Simon et al., 2008) ont été explorés. Des molécules comme le carbachol, un agoniste cholinergique (Ikemoto et

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al., 2002, 2006), la néostigmine, un inhibiteurs de choline estérase (Ikemoto et al., 2002), mais aussi le CPBG (1-(m-chlorophényl)-biguanide), un agoniste 5-HT3 (Rodd et al., 2007), ou encore le NMDA (N-méthyl-D-aspartate) (Ikemoto, 2004) s’autoadministrent là encore dans la pVTA mais pas dans l’aVTA.

Finalement, une dernière série d’études utilisant la surexpression par vecteurs viraux de différentes protéines dans l’aVTA ou la pVTA semble importante à mentionner. Ces études sont intéressantes parce qu’elles suggèrent que ces deux sous-régions de la VTA ne médieraient pas simplement les propriétés récompensantes d’une substance mais plus largement les réponses à des stimulus émotionnels. Ainsi les surexpressions de la sous-unité GluR1 du récepteur AMPA (Carlezon et al., 2000), de la phospholipase C$ (PLC$) impliquée dans les cascades intracellulaires activées par les facteurs neurotrophiques (Bolaños et al., 2003) ou du facteur de transcription CREB (Olson et al., 2005) modulent de façons opposées les propriétés récompensantes des drogues ainsi que certains paramètres émotionnels selon que leurs surexpression a lieu dans l’aVTA ou la pVTA. Quand GluR1, PLC$ ou CREB sont surexprimés dans l’aVTA, les propriétés récompensantes de la morphine mesurées grâce au paradigme de préférence de place sont augmentées, alors que la même dose de morphine devient aversive quand ces molécules sont surexprimées dans la pVTA (Carlezon et al., 2000 ; Bolaños et al., 2003 ; Olson et al., 2005). Des résultats semblables s’observent avec la cocaïne pour CREB (Olson et al., 2005) et avec le sucrose pour la PLC$, même si dans ce dernier cas le sucrose ne devient pas aversif après surexpression dans la pVTA (Bolaños et al., 2003). Ces données sont renforcées par le fait qu’une surexpression de mCREB, un dominant négatif de CREB qui agit comme antagoniste, entraîne dans l’aVTA et la pVTA des conséquences opposées à celles d’une surexpression de CREB (Olson et al., 2005). Carlos Bolaños et collaborateurs montrent que cette différence aVTA/pVTA ne se limite pas à l’effet de molécules récompensantes. En effet, la surexpression de la PLC$ dans l’aVTA augmente l’anxiété, alors que la surexpression de cette molécule dans la pVTA diminue la latence d’immobilité dans le test de la nage forcée et augmente la sensibilité nociceptive.

Il reste à noter que la seule étude qui définit la limite entre aVTA et pVTA est celle de Valerie Olson (Olson et al., 2005). Pour ce faire, elle a injecté à différents niveaux antéropostérieurs de la VTA des vecteurs viraux permettant la surexpression de CREB ou de mCREB. Elle a ensuite testé l’effet d’injections systémiques de cocaïne dans un paradigme de préférence de place conditionnée. Elle a ainsi montré un point d’inflexion entre les effets récompensants et aversifs de la morphine. Ce point se situe à environ -5,5 mm du bregma et correspond neuroanatomiquement à l’apparition de l’IP (Figure 6).

Distance par rapport au bregma (en mm)

4,95 5,15 5,35 5,50 5,60 5,70 5,85 6,10 1250

750

250

-250

-750

-1250

CREB

CREB mCREB

Post test - pré test (s)

- 5,80

- 5,30

Graphique illustrant les effets différentiels de la cocaïne après surexpression de CREB ou de mCREB dans l'aire tegmentale ventrale antérieure ou postérieure. Illustration réalisée d'après la figure 10 de l'article de Olson et collaborateurs de 2002.

Les animaux ont reçu des injections d' HSV-CREBGFP ou d'HSV-mCREBGFP à divers niveaux de l'axe antéro-postérieur de l'aire tegmentale ventrale et ont été testés dans un paradigme de préférence de place conditionnée à la cocaïne. Les scores de préférence de place sont donnés en fonction du niveau d'injection des particules virales et révèlent un point d'inflexion à -5,5 mm par rapport au bregma. Ce point correspond à la limite entre aire tegmentale ventrale antérieure et aire tegmentale ventrale postérieure.

Figure 6 :

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