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Régulation de l'activité cambiale et de la différenciation des cellules du xylème

3. Régulation de la formation du bois

3.1. Régulation de l'activité cambiale et de la différenciation des cellules du xylème

l'activité méristématique continue du cambium. Il a été montré, chez Arabidopsis, qu’à l’instar des méristèmes apicaux caulinaires et racinaires, le maintien et la prolifération du cambium sont contrôlés par une voie de signalisation impliquant des peptides, leur récepteur et un facteur de transcription (Fisher and Turner, 2007; Hirakawa et al., 2008; Etchells and

29 Turner, 2010). Le peptide TDIF est produit dans le phloème à partir des protéines CLE41/CLE44. Il est perçu par le récepteur kinase TDR/PXY (TDIF RECEPTOR/PHLOEM INTERCALATED WITH XYLEM) produit dans le cambium. Cette perception va induire une voie de signalisation impliquant le FT de type WUSCHEL HOMEOBOX RELATED,

AtWOX4 (Figure 11). Ce processus inhibe la différenciation des cellules cambiales et

participe à maintenir leur caractère pluripotent. La mutation de AtWOX4 entraine une réduction de l'activité cambiale, ce qui indique que ce FT est également requis pour la prolifération des cellules cambiales. Un autre gène de la même famille, AtWOX14 semble occuper une fonction similaire (Etchells et al., 2013). En parallèle, la différenciation des cellules cambiales en cellules du xylème est assurée par l'activation de protéines de type GSK3 (glycogen synthase kinase 3 familly), dont BIN2 (BRASSINOSTEROID INSENSITIVE 2), qui inactivent le facteur de transcription BES1, impliqué dans la différenciation du xylème (Figure 11) (Fukuda, 2016). Récemment, les orthologues fonctionnels des gènes AtPXY et AtCLE41, ont été caractérisés chez le peuplier (Etchells et al., 2015). Les auteurs ont montré que la surexpression ectopique de ces gènes entraine une désorganisation des tissus conducteurs et une réduction de croissance. Cependant la surexpression plus spécifique de CLE41 dans le phloème et de PXY dans le cambium entraine une forte augmentation de la croissance primaire et secondaire.

Figure 11: Voie de signalisation TDIF/PXY regulant le maintient du cambium. Adapaté de Fukuda, 2016.

Chez Arabidopsis, des partenaires potentiels interagissant avec TDR/PXY ont été identifiés : les récepteurs kinases (RLKs) ERECTA (ER) et ER-LIKE1 ainsi que leur ligands EPFL4 et EPFL6 (Uchida et al., 2013). Deux autres RLKs, MORE LATERAL GROWTH1 (MOL1) et

30 REDUCED IN LATERAL GROWTH1 (RUL1), semblent être des régulateurs négatifs de l'activité cambiale et pourraient agir en amont de TDR/PXY-WOX4. MOL1 agirait en tant que répresseur et RUL1 comme activateur de la croissance secondaire (Agusti et al., 2011).

Toujours chez la plante modèle Arabidopsis, un autre FT de type KNOX classe I, BREVIPEDICELLUS (BP)/ KNAT1, est impliqué dans la différenciation du xylème. Des plantes surexprimant ce gène montrent une inactivation du dépôt de lignine, tandis que les mutants pour ce gène montrent une lignification ectopique (Mele et al., 2003). Chez le peuplier, un orthologue de ce gène, ARBORKNOX2 (PtARK2), est exprimé dans les meristèmes, dont le cambium. D'autre part, lorsque ce gène est surexprimé, une expansion de la zone cambiale est associée à une inhibition de la production de nouvelles assises cellulaires dans le xylème et le phloème, ainsi qu'une régulation négative des gènes reliés à la synthèse de paroi (Du et al., 2009). Ces observations indiquent qu'ARK2 participe au maintien de l'activité cambiale, bien que la régulation qu'il exerce sur les gènes de biosynthèse de la paroi, ait parfois conduit à le considérer uniquement comme un régulateur de la formation de la paroi (Hussey et al., 2013).

Certaines hormones telles que les cytokinines, l'auxine, les gibbérellines et l'éthylène sont considérées comme nécessaires dans la régulation de l'activité cambiale (Didi et al., 2015). Les études fonctionnelles conduites chez Arabidopsis et le peuplier, suggèrent que la voie de signalisation des cytokinines régule à la fois le maintien et la prolifération du cambium (Mahonen et al., 2006; Matsumoto-Kitano et al., 2008; Nieminen et al., 2008; Hejátko et al., 2009). L'analyse de peupliers surexprimant un gène encodant une enzyme de biosynthèse de l'éthylène (PtACO1) et un mutant d'Arabidopsis pour le gène encodant le récepteur de l'éthylène (AtETR1), ont montré que cette hormone végétale stimule l'activité cambiale ainsi que la différenciation des cellules du xylème (Love et al., 2009). Il a été proposé que l'éthylène participe à la régulation de l'activité cambiale via les voies de signalisation à l'auxine, puisque les gènes reliés à la biosynthèse de l'éthylène sont induits par l'auxine dans la tige du peuplier (Nilsson et al., 2008). Chez le peuplier, la stimulation de l'activité cambiale par l'application d'auxine et d'acide gibbérellique, est en faveur de l'hypothèse d'un rôle clé de ces hormones dans le contrôle de la formation du bois (Björklund et al., 2007).

Un nombre croissant d'études associent l'auxine à la formation du xylème. Chez

31 cambium, puis au maintien de celui-ci (Donner et al., 2009; Ohashi-Ito et al., 2010). De plus, la formation des faisceaux vasculaires est induite par un pic d'auxine dans le procambium, généré par un transport polarisé assuré par le transporteur PINFORMED 1 (AtPIN1) (Donner et al., 2009). Chez le peuplier, la surexpression d'une version mutée du gène PtIAA3, qui entraine une plus faible sensibilité à l'auxine, est associée à une réduction importante de l'activité cambiale et de la croissance secondaire (Nilsson et al., 2008). La surexpression d'une version stabilisée de la protéine EgIAA4 d'E. grandis chez Arabidopsis, entraine un retard de la lignification des fibres interfasciculaires et des faisceaux vasculaires (Yu et al., 2014). Ces observations montrent que l'auxine exercerait un rôle à la fois dans le contrôle de l'activité cambiale et dans la différenciation des cellules du xylème. Cependant, les voies de signalisation impliquées sont encore mal connues.

En aval des voies de signalisation de ces hormones, différents FT sont impliqués dans la différenciation du système vasculaire. Le FT de type HD-ZIP de classe III, ATHB8, est requis pour le développement du procambium et la différenciation des tissus vasculaires chez

Arabidopsis. Son expression est induite par le FT de type ARF (Auxin Response Factor),

MONOPTEROS (MP), suite à la perception de l'auxine (Donner et al., 2009). En plus de ce gène, quatre autres FT du même type ont été reliés à la différenciation du xylème : PHB/ATHB14, PHV/ATHB9, REV/IFL1 et CNA/ATHB15 (Baima et al., 2001; Ilegems et al., 2010). La caractérisation fonctionnelle des orthologues de certains de ces gènes chez le peuplier, comme ATHB8 (PtHB7), ATHB15 (POPCORONA) et REV/IFL (POPREVOLUTA), a confirmé leur implication dans la formation du cambium et la différenciation des tissus vasculaires chez les arbres (Du et al., 2011; Robischon et al., 2011; Zhu et al., 2013). Ceci suggère que ce mécanisme observé chez les plantes herbacées, serait conservé chez les arbres. Le FT de type GARP, KANADI 1 (AtKAN1), exprimé dans le phloème, a un rôle antagoniste aux FT de type HD-ZIP de classe III dans la régulation de la différenciation des cellules du xylème, en réponse à l'auxine (Izhaki and Bowman, 2007; Ilegems et al., 2010). L'intervention de ces FT HD-ZIP et GARP, n'est pas réduite à la formation du xylème, mais plus généralement à l'activité méristématique et l'organisation des organes (Schuetz et al., 2013). En plus de la régulation par l'auxine, les FT HD-ZIP classe III subissent des régulations post-transcriptionnelles par les micro ARN (miARN) 165 et 166. Dans le modèle généralement admis, les FT de type HD-ZIP activent l'expression des transporteurs d'auxine PIN dans le cambium, ce qui induit un pic d'auxine dans la zone cambiale et active la prolifération du cambium ainsi que la différenciation de nouvelles assises cellulaires dans le

32 xylème. Les FT de type KAN et les miARN exprimés dans le phloème vont réguler négativement le transport d'auxine et l'expression des FT HD-ZIP, dans la zone cambiale coté phloème, dans le but de favoriser la différenciation d'assises cellulaires du phloème (Ilegems et al., 2010).

Lors de leur différenciation, les cellules du xylème vont subir une série de modifications morphologiques. Une des étapes majeures dans ce processus est le dépôt d'une épaisse paroi secondaire qui constituera ensuite le bois.