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Chapitre I – Pressions et impacts sur les rivières en milieu (péri-) urbain

I.4. Réglementation sur l’évaluation de la qualité des masses d’eau

Les premières politiques européennes dans le domaine de l’eau commencent dans les années 1970 avec la création au niveau international de conventions comme celle d’Oslo (1974) et de Paris (1978) qui ont pour objectif la protection des mers au niveau Est Atlantique (OSPAR). Quelques années plus tard, la Directive Cadre Européenne sur l’Eau (DCE, 2000/60 ; transposée en droit français le 21/04/2004) a mis en place différents objectifs. Ces derniers sont : (i) une gestion de la ressource en eau par bassin versant, (ii) l’atteinte du « bon état » pour chaque masse d’eau, (iii) l’établissement d’un calendrier, (iv) l’analyse économique de cette gestion et (v) la consultation des usagers. La DCE définit « un cadre pour la gestion et la protection des eaux par bassin hydrographique ». Cette directive a été complétée par des directives filles portant par exemple sur la qualité des eaux souterraines (2014/80/UE) ou encore la mise en place de Normes de Qualité Environnementale (NQE) à respecter (2013/39/UE ; 2008/105/CE). Il existe également des directives en lien avec celle portant sur les masses d’eaux continentales comme celle sur les inondations (2007/60/CE) et celle sur la Stratégie du Milieu Marin (2008/56/CE). L’objectif principal était pour les Etats membres d’atteindre le bon état de toutes les masses d’eau (e.g. rivières, lacs, eaux souterraines, plans d’eau) d’ici à 2015. Cependant, des dérogations ont été établies pour des cours d’eau fortement impactés, reportant ainsi l’atteinte des objectifs pour

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2027 (dernière échéance). Aujourd’hui, l’état d’une masse d’eau est évalué par rapport à la directive fille cadre sur l’eau 2008/32/CE, modifiant celle de 2000/60/CE, qui fixe par exemple les NQE et l’arrêté du 25 janvier 2010 revu en 2015 (Arrêtés du 27/07/2015 et du 07/08/2015) qui donne les typologies et fréquences de prélèvements pour les masses d’eaux.

Les objectifs s’inscrivent sur des cycles de 6 ans qui commencent par un état des lieux de la qualité des masses d’eaux, suivi de programmes de surveillance (Figure 4). Une révision des Schéma Directeur d’Aménagement et de Gestion des Eaux (SDAGE) définit ensuite plus précisément des programmes de mesures au niveau français. Chaque réseau hydrographique ou district est découpé en unités homogènes comme le bassin versant [BV, défini comme un territoire drainé par un cours d’eau et ses affluents, recevant les eaux de ruissellement et délimité par la ligne de partage des eaux (Foucault, 2010) par exemple. La gestion des masses d’eaux qui sont présentes au sein de ces unités est assurée par le Schéma d’Aménagement et de Gestion des Eaux (SAGE) dans lequel est décliné le SDAGE.

Figure 4. Cycles de l'élaboration du SDAGE (site internet Gest'Eau, 14/08/16).

L’état d’une masse d’eau est défini par les états écologique et chimique (voir schéma récapitulatif, Figure 5). L’état chimique d’une masse d’eau est soit bon soit mauvais selon des Normes de Qualité Environnementale (NQE) établies pour 45 substances métalliques et organiques. Les NQE sont généralement divisées en deux : l’une dite NQE-MA (Moyenne Annuelle) qui sert à représenter les pollutions diffuses relatives à une toxicité chronique et l’autre

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appelée NQE-CMA (Concentration Maximale Admissible) qui prend en compte des pollutions ponctuelles relatives à une toxicité aigüe. L’état chimique est déclaré mauvais dès lors que la NQE-MA d’au moins une substance est dépassée. Pour que l’état soit bon, il faut respecter les deux seuils MA et CMA. D’autre part selon une communication personnelle au sein de l’AEAP et le rapport du SDAGE 2016-2021, l’état chimique peut être exprimé désormais avec ou sans les substances ubiquistes comme les HAPs qui déclassent très souvent les masses d’eau et pour qui la politique de l’eau n’a pas d’impact significatif.

Figure 5. Schéma simplifié relatif à l’Evaluation de l'état d'une masse d'eau.

De façon simplifiée, l’état écologique est défini selon l’état le plus déclassant entre la biologie et la physico-chimie.

L’état biologique est décrit selon 5 différentes classes d’état et porte sur des indices biologiques tels que l’Indice Biologique Global Normalisé (IBGN), l’Indice Poisson Rivière (IPR), l’Indice Biologique Macrophytique en Rivière (IBMR) et l’Indice Biologique Diatomées (IBD). D’ici peu, de nouveaux indices plus compatibles avec la DCE seront intégrés comme l’indice

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invertébrés multimétrique (I2M2) et l’indice poisson rivière + (IPR+). Ces indices DCE compatibles sont calculés d’après le principe de l’écart à la référence ; ils intègrent entre autre l’abondance et la diversité, et surtout prennent en compte l’ensemble des pressions s’exerçant sur le cours d’eau. Le calcul de l’état est défini par le Système d’Evaluation de l’Etat Ecologique (SEEE) qui comporte différentes classes d’états : Très Bon, Bon, Moyen, Médiocre, Mauvais. Pour effectuer le classement, il y a une comparaison entre le centile 90% (i.e. seuil en dessous duquel se situent 90 % des valeurs mesurées) et les limites de classe. Pour la biologie, cet écart à la référence est calculé d’après une moyenne des indices sur 3 ans pour le cycle 2016-2021 (2 ans sur le cycle précédant, 2010-2015).

L’état physico-chimique repose sur les paramètres physico-chimiques de l’eau (oxygène dissous, température, nutriments) et se fait par l’intermédiaire du centile 90 de chaque élément, défini précédemment. Ils sont considérés comme explicatifs des conditions biologiques et reflètent le fonctionnement d’un écosystème. Il est à noter que dans le cas du dioxygène dissous, la comparaison des limites de classes se fait avec le centile 10 %. L’état écologique repose également sur les concentrations moyennes annuelles de substances spécifiques (Tableau 6) non synthétiques (As, Cu, Cr, Zn) et synthétiques (e.g. chlortoluron, oxadiazon, 2,4-D, 2,4-MCPA) dont l’état est mauvais si la valeur est supérieure à la NQE-MA.

Enfin, il est à noter que les NQE de l’état chimique sont fixées par l’Europe tandis que celles de l’état écologique sont fixées par les états membres. Cependant, des exercices d’intercalibrations européens garantissent que même si les indices changent d’un état à un autre, les évaluations sont comparables.

L’état hydromorphologique ne sert qu’à caractériser le très bon état d’une masse d’eau mais n’est pas pris en compte dans le calcul de l’état général. Toutefois, l’hydromorphologie est un levier important pour atteindre le bon état et dépend de la morphologie, du régime hydrologique et de la continuité du cours d’eau. A l’heure actuelle, cet état est évalué grâce à un outil de Système d’Information Géographique, le SYRAH-CE (SYstème Relationnel d’Audit de l’Hydromorphologie des Cours d’Eau), en attendant les valeurs seuils « cadres ». Il existe aussi une évaluation situationnelle avec protocole CARHYCE (CARactérisation HYdromorphologique des Cours d’Eaux).

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Tableau 6. NQE-MA des polluants spécifiques non-synthétiques et synthétiques de l'état écologique (Arrêté du 27/07/2015) dans les eaux douces de surface du bassin Artois Picardie. Ces normes sont applicables depuis le 22 décembre 2015.

NQE-MA (µg L-1) As 0,83 Cr 3,4 Cu 1 Zn 7,8 Chlortoluron 0,1 Oxadiazon 0,09 2,4-D 2,2 2,4 MCPA 0,5 Métazachlore 0,019 Aminotriazole 0,08 AMPA 452 Glyphosate 28 Diflufenicanil 0,01 Cyprodinil 0,026 Imidaclopride 0,2 Iprodione 0,35 Azoxystrotine 0,95 Phosphate de tributyle 82 Chlorprophame 4

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I.5. Conclusions

Bien que tous les aspects liés au fonctionnement des cours d’eau n’aient pas été détaillés au cours de ce chapitre, cette synthèse met cependant en évidence la complexité des écosystèmes aquatiques continentaux soumis à de nombreuses pressions, qu’elles soient naturelles ou anthropiques. En ce qui concerne la suite de ce manuscrit, les deux points clés qui ressortent sont tout d’abord le fait que les évolutions en milieu aquatique peuvent être rapides, importantes et ce même à l’échelle de la journée. Ces variations nycthémérales peuvent selon certaines études être plus importantes que celles relevées à l’échelle de la saison. Cela remet donc en cause de nombreuses études basées sur un nombre très restreint d’échantillons et impliquera une stratégie d’échantillonnage adaptée dans la mesure du possible  il existe en effet des limitations importantes concernant le prélèvement et l’analytique  à ce que l’on veut observer dans La Marque Rivière. Le deuxième point clé concerne les pressions exercées sur le cours d’eau qui s’ajoutent aux mécanismes intrinsèques de la masse d’eau. La déconvolution du signal pour faire ressortir les principaux paramètres forçants est complexe et c’est dans cette optique que nous avons choisi de considérer plusieurs traceurs pour tenter d’expliquer le plus précisément possible nos résultats. C’est donc tout l’enjeu du second chapitre que de mettre en place une stratégie d’étude pertinente de La Marque Rivière au niveau de la ville de Villeneuve d’Ascq, secteur où cette rivière reçoit non seulement les eaux d’une station de traitement d’eaux usées (STEU) d’une capacité maximale de 170 000 équivalents habitants (EH) mais également les eaux d’un bassin d’orage qui draine en grande partie les eaux pluviales de la ville.

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