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I.2.1. Équation de la diffusion

Le cadre de cette thèse est celui de l’étude de la diffusion de la lumière dans une vapeur atomique froide. De ce fait, nous sommes amenés à considérer le cas de la diffusion multiple. Comme les atomes sont de taille bien plus petite que la longueur d’onde de la lumière, nous sommes dans le régime de la diffusion Rayleigh. Compte tenu du très grand nombre de diffuseurs, nous la supposons isotrope. Dans le régime où L ≫ ℓsc, il est possible de montrer que la propagation

∂U(r, t)

∂t = Ddiff∇

2U(r, t), (I.2.1)

où U(r, t) est la densité d’énergie radiative. Ddiff est le coefficient de diffusion donné par :

Ddiff =

vtrsc

3 , (I.2.2)

avec vtr = tscsc est la vitesse de transport, prenant en compte le temps que l’onde passe au niveau

d’un diffuseur et le temps de propagation entre deux diffusions. Le coefficient de diffusion Ddiff

a déjà été mesuré dans une vapeur atomique froide [Labeyrie 2003]. Il a notamment été montré que, proche de la résonance, tsc = Γ−1 et que la vitesse de transport de l’onde est cinq ordres

de grandeur plus petite que la vitesse de propagation de la lumière dans le vide.

Un exemple de comportement diffusif est l’étude de la conductance radiative. Par analogie avec la loi d’Ohm en électronique, on peut montrer qu’en régime stationnaire l’intensité transmise, proportionnelle à la conductance radiative, évolue comme L−1. Cette dépendance en l’inverse

de la taille du milieu est une caractéristique du régime diffusif. Nous trouvons ici une analogie avec le modèle de Drude, décrivant le mouvement des électrons dans un conducteur.

L’équation de la diffusion pour étudier le transport de la lumière dans un milieu désordonné est une approximation d’un modèle plus général pour simuler cette propagation en présence d’absorption et de diffusion. Il repose sur l’équation de transfert radiatif (ETR), introduite initialement en astrophysique pour décrire le rayonnement dans les milieux interstellaires et en physique nucléaire pour modéliser la propagation des neutrons dans les réacteurs [Chan- drasekhar 1960,Case 1967]. C’est une équation intégro-différentielle portant sur la luminance

L(r, u, t), qui est par définition le flux d’énergie lumineuse traversant un élément de surface

dS centré en r dans un angle solide élémentaire dΩ centré dans la direction u dans une bande spectrale dω à l’instant t. La luminance s’exprime donc en W·m−2·sr−1·Hz−1. Dans un milieu

absorbant et diffusant, on montre que l’ETR est donnée par : 1 c ∂L(r, u, t) ∂t + u·∇L(r, u, t) = −  1 abs + 1 sc  L(r, u, t) + 1 sc 1 Z dΩ ′p(u·u)L(r, u, t). (I.2.3) Le membre de gauche représente la dérivée dans le temps et dans l’espace de la luminance. Le premier terme du membre de droite représente les pertes d’énergie dues à la diffusion et l’absorption. Le dernier peut s’apparenter à un terme source. Il prend en compte l’énergie radiative venant de la direction uétant ré-émise après diffusion dans la direction u, avec une

certaine probabilité p(u·u), appelée fonction de phase.

Le calcul de la luminance est plus précis que celui du vecteur de Poynting. Ce dernier modélise la puissance transportée par l’onde lumineuse mais ne comprend qu’une intégration sur toutes les directions de l’espace. Au contraire, l’ETR tient compte des changements de direction lors d’événements de diffusion. Précisons que les effets d’interférences sont absents de la description basée sur l’ETR. Il faut pour cela résoudre directement les équations de Maxwell pour la situation considérée.

I.2.2. Ordre de grandeur et exemple dans un gaz d’atomes froids

Nous avons vu que le régime de diffusion multiple est défini comme L ≫ ℓsc, équivalent à dire

probe beam cold atoms 0 t PM 0 t (a) Sonde Atomes froids 0 10 20 30 0 10 20 30 40 50 (b) Optical Thickness τ0 / τnat 0 50 100 150 0.1 1.0 (1) (2) (3) (a) Diffuse Transmission t/τnat (b) (c) b0= 34 b0= 19

Figure I.2.1 – Expériences de mesures de la décroissance de la transmission diffuse à travers un nuage d’atomes froids. (a) Principe de la mesure. Une impulsion laser est envoyée à travers un nuage d’atomes froids de taille supérieure à celle du laser. Le signal de la transmission diffuse est mesuré avec un photomultiplicateur (PM) après coupure de l’impulsion laser. (b) - (c) Courbes expérimentales montrant la décroissance exponentielle de la transmission diffuse, dont la constante de temps augmente quand l’épaisseur optique à résonance augmente, et son comportement quadratique en fonction de b0. Toutes les courbes sont issues de [Labeyrie 2003].

diffusion peut être grand. Nous allons maintenant établir le lien entre nombre d’évènements de diffusion et épaisseur optique. Pour cela, adoptons une image de type marche aléatoire suggérée par l’équation de diffusion rencontrée plus haut. Le nombre de diffusion Ndiff s’obtient par le

rapport entre le temps total ttot passé par l’onde dans le milieu et le temps passé au niveau

d’un diffuseur tsc :

Ndiff =

ttot

tsc

. (I.2.4)

Pour une marche aléatoire, le temps total passé dans le milieu est donné par :

ttot =

L2

Ddiff

, (I.2.5)

le coefficient de diffusion Ddiff étant obtenu par (I.2.2). En mettant tout en commun, nous

faisons apparaître l’épaisseur optique (I.1.15) :

Ndiff= ttot tsc ∝ L2 sc2 = b2. (I.2.6)

Le nombre de diffusion est donc proportionnel au carré de l’épaisseur optique. Au final, la seule mesure de b, aisément accessible, donne immédiatement un ordre de grandeur du nombre d’évènements de diffusion subis.

Intuitivement, plus b est grand, donc plus le nombre d’événements de diffusion est grand, plus la longueur du chemin optique de l’onde, ou du photon, dans le milieu va être importante. En d’autres termes, l’onde va rester plus longtemps dans le milieu. Le temps passé par l’onde dans l’échantillon peut être obtenu en mesurant la décroissance temporelle de l’intensité diffuse

lorsque le milieu a été illuminé par un laser. Cette expérience a été réalisé dans notre groupe sur un nuage d’atomes froids [Labeyrie 2003]. Un photomultiplicateur collecte la fluorescence émise par le nuage, après l’avoir éclairé par de courtes impulsions laser accordé proche de la résonance, voir figure I.2.1(a). Il a été montré que le signal temporel décroit exponentiellement aux temps longs devant Γ−1 et que la constante de temps extraite des mesures croit comme

b2, figure I.2.1(b)-(c). Par ailleurs, elle ne dépend que de b(δ), l’épaisseur optique à la fré-

quence du laser, et non pas de b0. Ces résultats montrent effectivement que l’onde reste plus

longtemps dans le milieu quand le nombre de diffusion augmente. Mentionnons enfin que des corrections interférentielles du transport, non prises en compte dans l’équation de diffusion, ont été mesurées en mettant en évidence le cône de rétrodiffusion cohérente sur le nuage d’atomes froids [Labeyrie 1999].