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Le récit comme médiation identitaire face aux incommunications

En avril 2014, la presse et le monde littéraire français s’agitent. Milan Kundera, qui en 2012 avait été introduit, de son vivant, dans la prestigieuse bibliothèque de La Pléiade, en deux tomes, qu’il signait du titre énigmatique « Œuvre » au singulier, publie un nouveau roman, alors que l’on pensait sa carrière d’écrivain achevée par cette dernière édition. Les nombreuses critiques littéraires74 du roman La fête de l’insignifiance75 témoignent d’une consécration de cet écrivain au sein du champ littéraire français et une reconnaissance de son statut d’auteur-phare, représentant de l’activité littéraire française contemporaine. Néanmoins, un premier critère peut heurter le lecteur français : il ne sera pas le lecteur premier de ce nouveau roman kundérien. Non que celui-ci ait été rédigé dans la langue natale de l’auteur, le tchèque, et qu’il nécessite une traduction avant que de pouvoir être présenté au lecteur français, mais parce que ce roman a été, en avant-première mondiale, édité en italien en 201376 et a donc nécessité une traduction dans cette langue à partir du texte rédigé en français.

On le sait que depuis quelques temps, de crainte qu’une ou deux voix discordantes ne se manifestent chez ces incorrigibles français, Milan Kundera préfère publier ses livres d’abord à l’étranger ; c’est ainsi que La fête de

l’insignifiance est paru en Italie en « Prima edizione mondiale » comme

l’indique fièrement le bandeau d’Adelphi ! Précaution inutile car là-bas comme ici, l’accueil fut et sera kunderolâtre.77

La critique de Pierre Assouline pour La République des livres retranscrit cette farce kundérienne. En effet, depuis 1979 et Le livre du Rire et de l’oubli, Kundera, naturalisé français en 1981 par Fr. Mitterrand, avait habitué les lecteurs français à la première lecture de ses œuvres. Ce choix de lectorat avait également débouché sur un changement de style face à un « retour à l’écriture »78 complexe après l’exil de Tchécoslovaquie. En outre, Kundera avait dû « batailler »79 pour être reconnu comme un auteur français au sein du champ littéraire français. Toutefois, une fois consacré au sein du champ, l’auteur semble refuser cette « consécration ».

74 Voir par exemple l’article du 31 avril 2014 du Télérama signé par Nathalie Crom et qui s’ouvre sur la phrase « Il est de retour », ou l’article du Figaro du 19 avril 2014 signé par Marc Fumaroli « Le grand retour de Milan Kundera » où l’académicien revient sur l’édition italienne de ce roman.

75 KUNDERA, Milan, La fête de l’insignifiance, NRF, Gallimard, Paris, 2014.

76 KUNDERA, Milan, La Festa dell’insignificanza, Adelphi, Milan, 2013.

77 ASSOULINE, Pierre, « Caprice d’Echenoz, insignifiance du Kundera », La République des livres, 10 avril 2014.

78 KUNDERA, Milan, « Œuvres et araignées », Testaments Trahis, Œuvre, t.2, Bibliothèque de la Pléiade, Gallimard, Paris, 2011, p. 819.

26 Pierre Assouline fait reposer ce choix d’une édition en italien par le refus de l’auteur de subir les critiques françaises. Ainsi, depuis 198580 Kundera décline tout entretien littéraire puisque, selon lui, les journalistes déforment ses propos et sont enclins à détacher une phrase de son contexte. En outre, après 2008 et l’éclosion dans les médias français et tchèques de l’ « affaire Kundera »81, l’auteur semble se plonger dans un silence que d’aucuns jugent « coupable ». Face à cette disparition de la voix de l’auteur au sein du champ littéraire français se met en place, ce que Pierre Assouline nomme une « kunderolâtrie », c’est-à-dire que l’auteur aurait atteint un tel niveau de consécration qu’il serait soumis à une réception kitsch, que lui-même condamne82. Le public de réception ne lirait plus les œuvres de Kundera, mais les achèterait parce qu’elles sont « du Kundera »83. Le nom de l’auteur aurait acquis une telle dimension symbolique qu’il faudrait avoir lu le dernier Kundera pour connaître les actualités littéraires françaises.

Cette anecdote retranscrit nombre de questions qui viennent marquer la réception des auteurs allophones au sein du champ littéraire français. En effet, la première question que soulève celle-ci est celle d’un attachement de l’œuvre littéraire au contexte de réception : un livre écrit en français doit-il être premièrement publié en français ? Quelles sont les raisons qui poussent un écrivain à choisir son lieu d’édition ? La réception paradoxale de ce dernier roman pose la question de l’attachement d’une œuvre d’art à son contexte de réception : peut-on détacher l’œuvre de son contexte d’édition, quelle est l’influence de ce « lectorat premier » sur le message lui-même ? En outre, cette anecdote semble révéler l’importance de la figure de l’auteur sur la réception de son œuvre, en effet le mouvement de « kundolâtrie » semble évoquer

80 « Milan Kundera, lui, refuse depuis 1985 de rencontrer les journalistes qu'il traite de faussaires! «Maudit soit l'écrivain qui le premier permit à un journaliste de reproduire librement ses propos !», lance Kundera, ajoutant : «Pourtant, j'aime beaucoup le dialogue (forme littéraire majeure) et j'ai été heureux de plusieurs entretiens réfléchis, composés, rédigés de concert avec moi. » ROYER, Jean, « De l’entretien. », Études françaises, n°223, 1986, p. 120.

81 DUPUIS, Jérôme, « Enquête à Prague sur l’affaire Kundera », L’express, 20 octobre 2008,

http://www.lexpress.fr/culture/livre/enquete-a-prague-sur-l-affaire-kundera_620357.html, consulté le 11 mars 2017.

82 Voir à ce propos sa critique de la kafkalogie in KUNDERA, Milan, « L’ombre castratrice de Saint Garta », Les

testaments trahis, op.cit., pp. 771-779.

83 « La force du nom, capital dans toute « montée en singularité ». Car bien mieux qu’une série, toujours ouverte et contestable, de qualificatifs, les noms propres constituent un résumé particulièrement parlant de l’état de grandeur supérieure auquel ont accédé les rares références en lesquelles se reconnaît une communauté littéraire. Cela est d’autant plus vrai que le prénom a disparu (« Flaubert » n’a plus besoin d’être précédé d’un « Gustave », alors qu’il vaut mieux préciser « Georges Ohnet »), et que le nom est précédé de l’article indéfini : « un » Montaigne, « un » Baudelaire, « un » Proust, « un » Kafka. L’association paradoxale du nom propre (forme excellence du « défini », au sens de ce qui est particularisé) et de l’article indéfini opère la transmutation du nom propre en nom commun, signalant le basculement paradoxal de la personne, […] en un modèle « commun » […] au sens où il peut se prétendre à devenir une référence « commune » à ses pairs. » HEINICH, Nathalie, Être

27 le fait qu’il est impossible de détacher l’œuvre de son créateur et de l’identité de celui-ci. De cette importance de l’identité de l’auteur sur la réception de son œuvre découle une suite de questions. L’auteur peut-il contrôler la réception de son œuvre ? Comment peut-il transmettre un message sans que celui-ci ne soit affecté par des facteurs qu’il juge extérieurs à sa création ? Finalement, l’ensemble de ces questionnements semble se résumer sur la possibilité qu’a un écrivain allophone de s’intégrer au champ littéraire français. L’auteur peut-il se détacher d’une conception territoriale de son identité et de sa création ou est-il constamment marqué par l’ « ère du soupçon » quant à son origine et la « vérité » de son œuvre d’art ?

1. La réception d’auteurs exiliques : un problème de communication.

Cette thèse de doctorat s’intéresse à la relation que tissent les auteurs exiliques avec le public de réception choisi par ceux-ci. Cet exemple montre qu’au-delà d’une réception reposant sur des critères quantitatifs, les enjeux de la communication littéraire reposent également sur des aspects qualitatifs. Afin d’éclairer notre propos, nous avançons premièrement la spécificité de notre considération du discours littéraire. L’expression « discours littéraire » n’est pas neutre84, en effet, nous proposons dans ce travail de recherche d’accepter d’entendre les œuvres littéraires comme étant des formes particulières de communication : c’est-à-dire comme étant des « conversations » adressées85 à un lecteur au travers d’une forme retardée. L’énonciation n’est alors jamais directe et le récepteur est souvent anonyme, parfois idéalisé au travers de la figure du « lecteur idéal », et la réponse du lecteur est relayée par la voix des critiques littéraires et de la scène médiatique. Si l’énonciation est adressée, elle est également prise dans le jeu du champ littéraire dans lequel elle s’inscrit. La littérature ne peut pas « tout dire »86, mais est en partie prise dans les règles d’énonciation du champ. Il faudra s’intéresser à la façon dont la singularité de la voix de ces auteurs se relie avec les autres discours qui peuplent le champ

84 Nous y reviendrons dans la suite de cette introduction, nous prions au lecteur d’accepter pour le moment ce postulat théorique qui sera précisé par la suite.

85 « Le texte est un discours fixé par l’écriture. Ce qui est fixé par l’écriture, c’est donc un discours qu’on aurait pu dire, certes, mais précisément qu’on écrit parce qu’on ne le dit pas. La fixation par l’écriture survient à la place même de la parole, c’est-à-dire à la place où la parole aurait pu naître. » RICŒUR, Paul, Du texte à l’action, Point, Seuil, Paris, 1986, p. 154.

86 ROUSSIN, Philippe, « Tout dire ou le gouvernement de la langue », Communications, vol. 99, no. 2, 2016, pp. 69-93.

28 littéraire. Notre conception du discours littéraire est alors récursive87, c’est-à-dire qu’elle prend en compte le fait que l’énonciation littéraire n’apparaît jamais ex nihilo, mais est toujours reliée à l’état du champ dans lequel elle s’inscrit qui influence et est influencé par l’émergence de ces nouvelles énonciations.

Afin de saisir l’enjeu d’une communication littéraire, il faut, selon nous, définir l’horizon d’une communication réussie : aussi deux facteurs peuvent venir couronner sa réussite : le premier peut être considéré comme reposant sur un facteur commercial – l’œuvre littéraire a réussi sa communication lorsqu’elle s’est vendue et a été lue par le public – le second, repose quant à lui sur un aspect « anthropologique » : la communication est un succès lorsque l’œuvre littéraire suscite sa compréhension, entendue comme la transmission du message porté par les œuvres avec le moins possible de malentendus, par le public de réception. Comme on le voit, la communication littéraire est prise dans un rapport dual et semble retranscrire les hésitations de la définition même de la communication qui repose sur la duplicité que peut recouvrir le terme « partage »88. En effet, il peut être défini comme la diffusion d’un message : plus celui-ci est répandu plus il aura réussi sa communication, toutefois, le second versant de l’acte communicationnel repose sur un partage compris dans le sens de la compréhension. Ainsi deux actes communicationnels sont à prendre en compte au sein de notre étude : la façon dont l’auteur réussit la « publicité »89 de son œuvre, mais également la façon dont celui-ci influe sur la compréhension de son œuvre. Nous pensons que si ces deux actes représentent deux mouvements communicationnels, ils ne peuvent être détachés et sont pris dans une constante réciprocité90.

87 « Les émergences rétroagissent sur les conditions et instruments de leur formation, et, par-là, entretiennent la pérennité du système. La rétroaction est le retour d’un effet sur les conditions qui l’ont produit. » MORIN, Edgar,

La complexité humaine, Champs L’essentiel, Flammarion, Paris, 1994, p. 282-283.

88 « Toute l’ambigüité du triomphe de la communication vient de là : le sens idéal, échanger, partager et se comprendre, a été récupéré, et pillé, par la communication technique, puis par la communication fonctionnelle. » WOLTON, Dominique, Penser la communication, Flammarion, Paris, 1997, p. 16. De cette ambigüité sémantique, D. Wolton démarque deux conceptions de la communication celle « normative » et celle qu’il nomme « fonctionnelle » Ibid, p. 17.

89 WRONA, Adeline, L’écrivain comme marque, PUPS, Paris, 2017.

90 « Communication renvoyant simultanément à sa dimension normative […] et à sa dimension fonctionnelle […]. Et c’est d’ailleurs cette ambivalence qui permet une critique de la communication. » WOLTON, Dominique,

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Quatre paradigmes : du partage-diffusion et du partage-compréhension.

Comme le montre l’exemple type de Kundera, la réussite du partage conçu comme diffusion de l’œuvre, qui atteint un degré élevé dans le cas de cet écrivain, ne constitue pas forcément une réussite du partage-compréhension. Nous pensons que son refus d’édition directe en langue française démontre le fait que la communication littéraire ne dépend pas uniquement de facteurs commerciaux et qu’elle repose également sur un accord sur le sens de l’œuvre. Si le cas Kundera expose cette situation paradoxale d’une réception-diffusion réussie alors que la réception-compréhension n’est pas effectuée, le cas d’Eugène Ionesco91 ou d’Emil Cioran92 peuvent également venir confirmer ce premier paradigme.

Toutefois, nous avons choisi d’élargir notre corpus et de ne pas le maintenir au traitement des stratégies communicationnelles de ces auteurs consacrés pleinement au sein du champ français, si bien qu’ils ont parfois fait oublier leur statut d’étranger. Dans certains cas, nous nous intéresserons à la façon dont une réussite du partage-diffusion est réalisée par les auteurs de notre corpus avant que celui-ci ne s’étiole au fil du temps. Le parcours au sein du champ littéraire de Christine Arnothy semble, à notre avis, exemplaire de ce paradigme. En 1954, son ouvrage J’ai quinze ans et je ne veux pas mourir93, relatant le siège de Budapest et son exil vers la France, reçoit le « Grand Prix de la Vérité » ce qui lui assure une réception auprès du public français. Après cela, l’auteure poursuit une carrière prolifique dans le champ littéraire français, mais le succès semble plus confidentiel et elle s’éteint en 2015 dans un quasi-anonymat. Ce succès suivi par l’altération de la réussite du partage-diffusion génère plusieurs questions sur le succès que peut rencontrer la figure de l’auteur allophone dans le champ littéraire français. Le cas d’Arnothy94 semble poser la question d’un maintien de ce partage-diffusion, une fois que le contexte historique n’éclaire plus le territoire d’origine des auteurs. La réussite du partage-diffusion est-elle liée aux intérêts historiques et médiatiques du public de réception ?

91 Voir à ce sujet la réception complexe de l’œuvre Rhinocéros, nous revenons sur la problématique d’un accord sémantique sur cette œuvre au début de notre seconde partie, voir p.289

92 Voir à ce sujet la difficulté qu’a cet auteur à adresser sa conception du rire alors qu’il est, par certains, classer comme « professeur de désespoir ». HUSTON, Nancy, Professeurs de désespoir, Actes Sud, Paris, 2004.

93 ARNOTHY, Christine, J’ai quinze ans et je ne veux pas mourir, Fayard, Paris, 1955.

94 Nous plaçons dans ce second paradigme les œuvres de V. Tanase qui connaît un fort intérêt après l’éclosion en 1981 de « l’Affaire Tanase » ou encore celles de V. Gheorghiu qui connaît un succès après la publication et l’adaptation cinématographique de son roman La vingt-cinquième heure, ou encore les œuvres de V. Horia qui est destiné à recevoir le prix Goncourt en 1961 et perd peu à peu son audience après la campagne de diffamation dont il est victime dans ces années.

30 Profitant de ce climax d’attention, comment l’auteur peut-il générer une relation avec le public de réception afin de réussir à consolider un partage-compréhension afin de permettre un partage-diffusion une fois l’actualité médiatique dépassée ?

Une troisième catégorie de relation peut être détachée du corpus que nous avons sélectionné : il s’agit des auteurs disposant d’une réception plus intime au sein du champ littéraire français. Ils parviennent à se faire éditer, mais ont plus de mal à acquérir une large diffusion au sein du champ. Le cas de Dumitru Tsepeneag semble pouvoir éclairer cette position : en effet, il dispose d’une œuvre riche – quinze œuvres éditées en France – cependant il n’a pas réussi à acquérir la position d’ « auteur français » au sein du champ littéraire. Bien souvent considéré comme un médiateur culturel, ses réflexions sur le positionnement et les échecs qu’ils rencontrent95, nous permettent d’affiner notre analyse. En effet dans ce cas, il ne semble pas que ce soit un problème de partage-diffusion initial qui empêche son positionnement, ses romans étant majoritairement édités par P.O.L. Nous faisons l’hypothèse que c’est en fonction d’une difficulté à « trouver » son public français que l’on peut parler d’un échec de la communication littéraire. Ainsi, selon nous, la rencontre communicationnelle ne dépend pas uniquement d’un problème d’édition, mais également d’une difficulté à créer un accord sémantique avec le public de réception. Aussi la question que soulève ce sous-corpus est celle de la possibilité qu’a la littérature d’incarner une position de médiation culturelle. Cette position est-elle une opportunité pour être reconnue ou entraîne-t-elle le rejet de ces voix dans une périphérie littéraire ?

Enfin, un dernier paradigme de relation avec le public français doit être mis en évidence par notre corpus : il s’agit des auteurs du mouvement que nous nommerons à la suite de Iulian Toma96 « francophonie post-soviétique »97. Ces auteurs écrivent leurs premières œuvres en français alors que le régime soviétique a implosé, ainsi l’un des facteurs favorisant un partage-diffusion des œuvres d’auteurs originaires d’Europe médiane leur est ôté. Il convient pour ces auteurs de légitimer leurs œuvres selon un autre paradigme que celui de l’exil des régimes

95 La destinée de la revue qu’il lance en 1975 « Cahiers de l’Est » dispose, dans un premier temps, de forts soutiens dans le monde éditorial avant que de devoir s’interrompre devant le manque de soutien financier. Tsepeneag tentera en 1991 de relancer la publication avec la revue « Nouveaux Cahiers de l’Est » qui est également arrêtée devant le manque d’audience. Pour une histoire éditoriale de cette revue voir : BATAILLE Mathilde, SCUTARU, Béatrice « La guerre littéraire n’est pas terminée ». Faire connaître la littérature roumaine dans la France de la Guerre froide : l’exemple des Cahiers de l’est », in MARR, Judit, LEFEBVRE, Augustin (dir.), Exils et transferts

culturels dans l’Europe moderne, L’Harmattan, Paris, 2014, pp. 223-232.

96 TOMA, Iulian, « La francophonie post-soviétique. Sa littérature, son cinéma », Voix Plurielles, 2015, vol. 12, no 2, p. 212-221.

97 Voir à ce propos notre article, BOURSIER, Axel, « Peut-on parler d’une littérature post-soviétique ? », in TOMA, Iulian, Francophonie post-soviétique, Voix plurielles, vol 12, n°2, 2015.

31 soviétiques. En outre, comme nous le voyons se dessiner, ce maintien de l’exil dans une Europe réunifiée pose une question pour ce qui est du partage-compréhension : quelle légitimité donner à cette publication dans la langue non-maternelle ? Ce sous-corpus pose, de façon encore plus prégnante que ceux évoqués précédemment, la question de la mondialisation de la communication : est-il possible de parvenir à un accord sémantique sur le sens des œuvres au-delà de sa communauté de naissance ? Est-il possible d’atteindre la compréhension, si oui selon quels processus ?

Nous avons choisi de réunir ces quatre paradigmes dans la même étude. En effet, notre hypothèse de recherche consiste à prendre en compte le fait que le discours littéraire est toujours adressé et qu’il agit afin de tisser une relation avec le public de réception. Aussi, ces quatre paradigmes expriment une même situation communicationnelle –prise de parole littéraire après l’exil dans la langue du pays rejoint –, mais les différents aléas de réception nous permettent de mettre en lumière les différentes stratégies communicationnelles développées par les auteurs. Nous avons donc choisi un corpus large afin de pouvoir comprendre les différentes opérations mises en œuvre par les auteurs. Néanmoins, comme nous l’avons vu, deux pôles principaux peuvent intéresser les études de communication : celle de l’accès à la diffusion et des logiques

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