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Le récepteur au facteur de croissance épidermique : l’EGFR

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PARTIE I : LE CANCER DU POUMON

4. La résistance aux inhibiteurs de tyrosine kinase de l’EGFR (EGFR-TKI) dans les cancers

4.1. Le récepteur au facteur de croissance épidermique : l’EGFR

4.1.1. La famille des récepteurs ERRB et leurs ligands

L’EGFR est une glycoprotéine transmembranaire de 170 kDaltons à activité enzymatique de type tyrosine kinase faisant partie des récepteurs de la famille HER, encore appelé ERBB. Chez les mammifères, cette famille comprend quatre récepteurs: ERBB1/HER1 ou EGFR, ERBB2/HER2, ERBB3/HER3 et ERBB4/HER4.

L’EGFR fut le premier représentant de cette famille découvert [38]. Les récepteurs ERBB sont composés de trois domaines (Figure 5) :

Un domaine extracellulaire contenant le site de liaison pour le ligand [39]. Ce domaine

extracellulaire est composé de 4 sous-domaines (I à IV) répétés 2 à 2, se succédant en alternance. Les domaines I et III sont analogues à ceux de l’IGF1R (l’Insulin-like Growth Factor type-1 Receptor) et sont le siège de la fixation du ligand, d’où leur dénomination L1 et L3. Les domaines II et IV augmentent l’affinité de liaison entre deux récepteurs de la famille ERBB pour former un dimère stable.

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Un domaine transmembranaire hydrophobe de 24 acides aminés qui permet l’encrage dans

la membrane cellulaire [40].

Un domaine intracellulaire (ou cytoplasmique) qui contient le domaine catalytique tyrosine

kinase très conservé entre les différents récepteurs de la famille ERBB (59 à 81% d’homologie), un domaine juxta-membranaire et une longue queue C-terminale [41]. Le domaine juxta- membranaire joue un rôle prépondérant dans la régulation de l’activité des récepteurs ERBB [40]. La queue c-terminale possède cinq sites de phosphorylation liant spécifiquement les protéines contenant les domaines SH2 (Src Homology domain 2) ou PTB (Phospho Tyrosine Binding), au moins trois motifs d’internalisation, et également des sites pour l’activation protéolytique et la dégradation [40].

Figure 5 : Structure générale des récepteurs ERBB.

Les récepteurs ERBB comportent une partie extracellulaire composée de 4 domaines, homologues deux à deux, (les domaines L1 et L2 (I et III), sont le siège de la fixation du ligand). On retrouve ensuite un domaine transmembranaire, un domaine juxtamembranaire suivi du domaine tyrosine kinase et le domaine C-terminal qui peut être phosphorylé sur plusieurs résidus tyrosine (Y). Adaptée d’après (Burgess et al. 2003). [41].

40 L’activation des récepteurs de la famille ERBB se fait par fixation de ligands spécifiques sur le domaine extracellulaire. Ces ligands sont synthétisés sous forme de précurseurs membranaires, qui sont clivés par des métalloprotéases de la famille ADAM (A Disintegrin and Metalloproteinase domain) en réponse à divers stimuli [42]. Dix ligands partageant une séquence EGF-like de 55 acides aminés ont été recensés [43]. Ils sont regroupés en fonction de leur affinité pour les différents récepteurs de la famille ERBB [44, 45] (Figure 6):

Les ligands spécifiques de l’EGFR : l’EGF (Epidermal growth factor), le TGF-α (Transforming growth factor-alpha) et l’AREG (Amphiréguline)

Les ligands de l’EGFR et ERBB4 : la BTC (Betacelluline), le HB-EGF (l’Heparin- Binding Epidermal Growth Factor) et l’EPR (l’Epiréguline)

Les neurégulines (NRG) : divisées en deux sous-groupes o NRG-1 et NRG-2 qui lient ERBB3 et ERBB4 o NRG-3 et NRG-4 qui lient seulement ERBB4. A l’heure actuelle aucun ligand de ERBB2 n’a été identifié [46].

Figure 6 : Les différents récepteurs ERBB et leurs ligands.

Les récepteurs de la famille ERBB présentent des homologies de structure sur leur domaine extracellulaire et tyrosine kinase. Aucun ligand d’ERBB2 n’a été identifié et le domaine tyrosine kinase d’ERBB3n’est pas actif. Des exemples d’homodimères et d’hétérodimères sont également présentés. Adaptée d’après (Zhang et al. 2007).

41 4.1.2. Activation des récepteurs ERBB et signalisation cellulaire

En absence des ligands, les récepteurs ERBB sont sous forme de monomères inactifs repliés sur eux par liaison entre les domaines II et IV. La fixation des ligands sur les domaines I et III entraine une modification de conformation. Le domaine II se lie à un homologue d’un autre monomère et forme un dimère actif [48]( Figure 7).

On distingue plusieurs types de dimères : les homodimères composés de deux sous-unités ERBB identiques et les hétérodimères composés de deux monomères différents (Figure 6). Dix dimères différents, dont 8 hétérodimères, ont ainsi été recensés (Figure 8). L’hétérodimère EGFR/ERBB2 possède la plus grande capacité à induire la transformation cellulaire et la mitose [31]. L’EGFR peut aussi s’hétérodimeriser avec d’autres types de récepteurs. L’hétérodimère EGFR/IGF1-R a été décrit comme étant impliqué dans la résistance aux EGFR-TKI [49, 50].

Figure 7 : Modifications conformationelles des récepteurs ERBB conduisant à la formation des dimères actifs.

En l’abscence de ligand le domaine extracellulaire est replié sur lui-même par interaction entre les domaines II et IV (monomère inactif). Les ligands des récepteurs HER lient les domaines I et III entre eux conduisant à l’exposition du domaine II (monomère actif) qui pourra ainsi interagir avec son homolgue sur un autre monomère et provoquer la formation d’un dimère. Adaptée d’après (Sergina et al. 2007). [48].

42 Figure 8 : Représentation des différents hétérodimères de récepteurs ERBB.

La dimérisation des récepteurs entraine l’autophosphorylation des résidus tyrosine au niveau de leur extrémité C-terminale intracellulaire, qui permet le recrutement et l’activation de nombreux effecteurs protéiques [45, 51]. Ces effecteurs sont des protéines adaptatrices (SHC (Src homology 2 domain containing), CRK (v-crk sarcoma virus CT10 oncogene homolog), GRB2 (Growth factor receptor bound protein 2)) ou des kinases (SRC (Sarcoma, Rous sarcoma oncogene)) qui, grâce à leurs domaines SH2 ou PTB, se lient au site d’autophosphorylation des récepteurs ERBB, où elles seront à leur tour phosphorylées. Ceci est le point de départ de l’activation de voies de signalisation intracellulaires via des cascades de phosphorylation [51] (Figure 9). L’activation de ces voies de signalisation cellulaires induit des facteurs de transcription, régulant ainsi l’expression de gènes impliqués dans l’angiogenèse, la mobilité cellulaire, la différenciation, l’adhésion ou la prolifération [52]. La voie de signalisation engagée dépend de la durée d’activation du récepteur, du ligand et du dimère formé. Les principales voies mises en jeu par l’EGFR sont :

 La voie RAS/MAPK, impliquée dans la prolifération et différenciation cellulaire, et activée par le recrutement de la protéine adaptatrice GRB2 ou SHC

la voie PI3K qui joue un rôle dans la régulation de l’apoptose via AKT, activée par le recrutement de p85

43 Figure 9 : Représentation schématique de la distribution de l’information issue de l’activation de l'EGFR.

44 4.1.3. Rôles l’EGFR dans les cancers du poumon

4.1.3.1. Rôles physiologiques

Les voies de signalisation activées par l’EGFR jouent un rôle dans la différenciation, la croissance ou encore le contrôle du métabolisme cellulaire. Des effets anti-apoptotiques ont également pu être mis en évidence [53]. L’EGFR intervient également dans le renouvellement de cellules souches de tissus tels que le foie, la peau ou les intestins.

D’autre part, son rôle dans le développement embryonnaire a été mis en évidence. Une perte de l’EGFR entraine une mort embryonnaire ou périnatale avec des malformations dans divers organes comme le cerveau, la peau, les poumons, les intestins [51]. Des souris Knock Out (KO), pour le gène de l’EGFR présentent un retard du développement embryonnaire et un taux de mortalité élevé souvent dû à des problèmes respiratoires entre 8 et 21 jours après la naissance. Elles présentent également des signes de prématurité, des dysfonctionnements cérébraux, ainsi que de nombreuses anomalies épithéliales de la peau, des poumons, du tractus gastro-intestinal et des reins [54-56].

4.1.3.2. Rôles de l’EGFR dans les cancers du poumon

L’EGFR contribue au développement tumoral via ses effets sur la progression dans le cycle cellulaire, l’inhibition de l’apoptose et l’induction de l’angiogenèse [57]. Des dérégulations des voies de l’EGFR sont fréquemment retrouvées dans différentes formes de cancer humain [58, 59] et font intervenir plusieurs mécanismes :

La surexpression de l’EGFR : présente dans 60 à 80% des cas de CBNPC [60, 61], est le fait d’une amplification génique (dans 30 à 50% des cas) ou de phénomènes post- traductionnels, et est à l’origine d’une prolifération et une migration cellulaire incontrôlées. Dans les CBNPC, la surexpression de l’EGFR a été mise en relation avec l’agressivité tumorale [62, 63], une plus grande incidence des métastases ganglionnaires et un mauvais pronostic [64, 65].

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La surexpression autocrine des ligands de l’EGFR (le TGFα, l’EGF, l’AREG) par la tumeur, aboutit à une activation constitutive du récepteur [66]. Ce mécanisme est fréquemment retrouvé dans les tumeurs solides, y compris du poumon [67]

L’activation constitutive de l’EGFR indépendamment de ses ligands par l’intermédiaire de mutations de l’EGFR. Ces mutations, peuvent toucher indifféremment le domaine extracellulaire, le domaine intracellulaire ou encore le domaine tyrosine kinase. Comme nous l’avons vu, dans les CBNPC les deux mutations les plus fréquentes touchent le domaine tyrosine kinase (une délétion touchant la séquence conservée de 4 acides aminés LREA dans l’exon 19 et une mutation ponctuelle L858R de l’exon 21) [27-29] et sont responsables de son activation constitutive [24, 25]. Elles sont présentes chez 10 % des patients atteints d’adénocarcinome pulmonaire [19].

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