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Chapitre I: Les tumeurs endocrines, un groupe de tumeurs rares présentant une

B. Le récepteur CCK2

B.6. Le récepteur CCK2 dans le cancer

Un nombre croissant de preuves indiquent que la CCK et la gastrine agissent en tant que facteurs de croissance et d'invasion via l‟activation de leurs récepteurs, favorisant ainsi le développement et la progression des cancers. Plusieurs études visant à la détermination des niveaux d‟expression de récepteurs CCK dans les tumeurs humaines ont été rapporté [43]. Clarifier le rôle des récepteurs CCK dans la croissance tumorale, pourrait ouvrir de nouvelles perspectives diagnostiques et thérapeutiques.

B.6.1. Rôle dans la carcinogenèse

L‟infection chronique par Helicobacter pylori est connue pour déclencher la carcinogenèse gastrique. Cette infection est accompagnée d‟une augmentation de la sécrétion plasmatique de gastrine par les cellules G. Cette hypergastrinémie stimule la prolifération des cellules ECL [72]–[75]. L‟hypergastrinémie peut également être induite par la sécrétion de gastrine par les tumeurs neuroendocrines (gastrinome, syndrome de Zollinger-Ellison), par une gastrite atrophique ou une anémie pernicieuse [48].

Plusieurs études ont contribué à montrer l‟implication du RCCK2 dans la carcinogenèse pancréatique exocrine, en mettant en évidence sa surexpression dans un contexte tumoral, d‟une part, et ses effets lorsqu‟il est surexprimé d‟autre part.

Des lignées cellulaires issues de carcinomes humains expriment ce récepteur d‟une manière endogène [76]. Une autre étude menée chez l‟homme a montré l‟expression du récepteur CCK2 chez la plupart des patients atteints d‟un cancer pancréatique, associée à l‟expression de la gastrine, suggérant l‟existence d‟une boucle autocrine in vivo [77].

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Par ailleurs, la gastrine et la CCK exercent des effets trophiques sur le pancréas, et sont des facteurs de croissance puissants pour les cancers pancréatiques humains [78]. La prolifération d‟une lignée cellulaire issue d‟un carcinome pancréatique chimio-induit chez le rat, qui exprime le RCCK2 et le RCCK1, est stimulée par la gastrine [76]. Un modèle de souris transgéniques ElasCCK2 exprimant le RCCK2 humain dans ses acini pancréatiques a été développé par notre équipe, 15% des animaux développent un adénocarcinome pancréatique et toutes les souris développent des lésions prénéoplasiques retrouvées en pathologie humaine [76], [79]. Toutes ses études indiquent que le RCCK2 pourrait jouer un rôle majeur dans l‟initiation des cancers pancréatiques.

Dans le cas des tumeurs colorectales, les précurseurs de la gastrine (Pro-G et G-Gly) sont les formes majeures sécrétées et impliquées dans le développement des tumeurs [80]. Plusieurs études menées in vitro et chez la souris ont montré que l‟action proliférative et invasive de ces précurseurs semble indépendante du récepteur CCK2 [81], [82],[83]–[85]. Par contre, une étude montre que la délétion ou l‟inactivation du RCCK2 dans le modèle murin est responsable de la réversion du phénotype induit par la surexpression de la pro-gastrine, ce qui met en question la présence d‟un récepteur spécifique de ces précurseurs différents du RCCK2 [86]. Enfin, de nombreuses études de la carcinogenèse du colon sur des lignés cellulaires et des animaux transgéniques, démontrent une implication du RCCK2 et de son ligand gastrine dans le processus d‟invasion cellulaire [87], [88], [89], [90].

De nombreuses études sur des modèles cellulaires et animaux ont montré la présence du RCCK2 dans les tumeurs neuroendocrines. La surexpression du RCCK2 a été détectée au niveau de l'ARNm et des protéines ; elle est retrouvée dans les cancers du poumon à petites cellules, les carcinomes médullaires de la thyroïde (MTC) [22], [91], les cancers ovariens du stroma, les astrocytomes, et les leiomyosarcomes [92]. Il est également surexprimé occasionnellement dans les adénocarcinomes du sein et de l‟endomètre [32]. Au niveau digestif, les études d‟autoradiographie montrent que le RCCK2 est souvent exprimé en très forte densité dans 63% des tumeurs neuroendocrines gastrointestinales (GIST), les insulinomes, et le carcinoïdes (figure 6) [93], [94], [20].

En raison de la très forte incidence et de la densité de RCCK2 dans les carcinomes médullaires de la thyroïde, ce type de tumeur a été choisi pour le développement de radioligands spécifiques visant à cibler in vivo et chez les patients ce récepteur dans les cancers qui le surexpriment [95], [96].

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Un variant d‟épissage ayant une activité constitutive a été mise en évidence dans les cellules tumorales du côlon humain, alors qu‟il est absent dans les tissus normaux. Ce variant intitulé CCK2Ri4sv (intron 4 containing splice variant) contient 69 acides aminés supplémentaires dans l‟ICL3 (3éme boucle intracellulaire) [97]. Il a également été identifié dans les tissus cancéreux pancréatiques [98] et les cellules mononuclées [99]. Le RCCK2i4sv induit des oscillations de calcium intracellulaire et augmente la prolifération cellulaire indépendamment de la présence de son ligand, ces résultats ont été montré par l‟équipe de Hallmich dans les cellules Balb3T3 mais ils n‟ont pas pu être confirmé dans d‟autres systèmes cellulaires [74]. Par contre, son expression était uniquement détectée dans les tumeurs gastrointestinales (GIST) et dans les cancers des poumons à petites cellules dans l‟étude menée par Korner, ce qui rend l‟expression du CCK2Ri4sv controversée dans le cancer digestif [100].

En 1995, un autre variant d‟épissage a été identifié présentant une extrémité N- terminale tronquée. Ce variant est capable de lier la gastrine et la CCK, mais avec une affinité dix fois inférieure à celle du récepteur sauvage et remplace la forme sauvage du récepteur dans la lignée cellulaire d‟adénocarcinome gastrique humain AGS, ce variant peut arbitrer les actions trophiques de ces peptides [101], [102].

De plus, la mutation ponctuelle transformant l‟acide aminé Valine en position 286 en Phénylalanine a été identifié dans un cancer colorectal humain. Cet acide aminé est localisé au niveau de la 3éme boucle intracellulaire, connue pour son rôle dans la transduction du signal des RCPG. Cette mutation est capable d‟inactiver toutes les voies de transduction du signal sans affecter la liaison du ligand à son récepteur [103].

B.6.2. Les radio-ligands développés pour des buts thérapeutiques et diagnostiques

La forte incidence et densité d‟expression du RCCK2 dans certains types tumoraux fait de ce récepteur une cible de choix pour le diagnostic et la thérapie ciblée de ces pathologies. Plusieurs équipes ont commencé à développer des radio-ligands spécifiques de ce récepteur. En 2000, Kwekkeboom DJ et ses collègues ont développé la première génération d‟analogues de la CCK non sulfatée couplée à des chélateurs tels que le DTPA ou le DOTA. Ces analogues marqués à l‟indium 111 ont été injectés chez des patients atteints de carcinome médullaire de la thyroïde (MTC). Les résultats semblent encourageants, mais l‟accumulation dans les tumeurs était insuffisante pour des applications cliniques [96].

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Figure 6: Incidence du RCCK2

Une représentation en histogramme de la densité moyenne de RCCK2 détecté dans les cancers par autoradiographie. La gamme de gris représente l‟intensité de RCCK2, de 0 à 5000 dpm/mg de tissu. L‟histogramme en noir représente une intensité supérieure à 5000. Ca : carcinome, Tu : tumeur [32].

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Behr et ses collègues ont développé des analogues à la gastrine [111In-DTPA0], ces analogues ont montré une forte accumulation dans l‟estomac et la tumeur chez les patients atteints de MTC [104]. Le marquage par Technétium99mTC a permis d‟améliorer le ciblage et la visualisation des MTC [105]. Cependant, l‟analogue de la gastrine radiomarqué présente une rétention rénale très élevée qui est liée à la présence de 5 acides glutamiques dans la séquence de la gastrine [32] [106]. Des nouveaux analogues dépourvue de cette séquence ont été développés, la minigastrine MG11 [107]. La rétention rénale est 20 fois moindre pour ces analogues MG11 radiomarqués, avec toutefois une baisse du marquage de la tumeur d‟un facteur 3 [107].

Le développement de peptides radio-marqués à des fins thérapeutiques et diagnostiques a beaucoup amélioré la radiothérapie qui peut alors devenir une alternative en complément ou lorsque la chimiothérapie conventionnelle ne fonctionne pas. Le ciblage de récepteurs à peptides par des radio-ligands, PRRT « peptide receptor radiotherapie », a été validé avec succès, l’exemple le plus connus étant l’utilisation d’analogue de la somatostatine radioactive pour la détection et la thérapie des tumeurs endocrines.

Parallèlement, la nanotechnologie est en plein essor dans le domaine de la cancérologie. Elle repose sur l’utilisation de nanoparticules magnétiques comme nouvelles plateformes polyvalentes diagnostiques et thérapeutiques. Ces nanoplateformes constituent des agents de contraste pour l’imagerie médicale. De plus, elles comportent des propriétés magnétiques utilisables en thérapie hyperthermique et peuvent être utilisés comme support pour délivrer des agents chimiothérapeutiques dans les cellules tumorales si elles sont vectorisées pour cibler ces cellules.

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Chapitre II: Une plateforme diagnostique et thérapeutique « les