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CHAPITRE III. LES DÉTECTEURS DU STRESS OXYDANT :

A. Récapitulation des deux modes d’activation de Yap1

1) Le modèle d’activation de Yap1 par les peroxydes

(a) Description du modèle

- Existence d’une homéostasie du peroxyde d’hydrogène

Nos données montrent que comme E. coli, S. cerevisiae possède un système détectant spécifiquement les peroxydes (Fig. 41). Ce système comprend un détecteur, Gpx3, et un régulateur Yap1. En absence de Gpx3, Yap1 n’est pas activé par les peroxydes. Gpx3 possède une activité thiol-oxydase capable de relayer l’oxydation de Yap1 par le H2O2. Une fois

oxydé, Yap1 s’accumule dans le noyau, où il active l’expression de ses gènes cibles. L’activité de Yap1 est soumise à un rétrocontrôle négatif, impliquant vraisemblablement une réduction par les thiorédoxines. L’identification du système Yap1/Gpx3 suggère que chez S.

cerevisiae, comme chez E. coli, la concentration intracellulaire en peroxydes est soumise à un

contrôle homéostatique.

- Gpx3, un récepteur des peroxydes

Le système Yap1/Gpx3 possède deux niveau de spécificité : une spécificité au niveau du mécanisme de détection (Gpx3 et non Yap1 est oxydé par le H2O2) et une spécificité au

niveau de la transduction du signal redox (seul Yap1, et peut être une autre protéine sont oxydés par Gpx3 ). Il peut ainsi être comparé aux systèmes ligand-récepteur-transducteur classiques. Ces données nous ont donc amené à proposer une nouveau nom pour Gpx3 : Orp1 pour « Oxidant Receptor Peroxidase 1 ». En outre, Gpx3/Orp1 peut réduire des peroxydes complexes tels que hydroperoxydes de lipides [68], permettant outre une spécificité et une efficacité de la réponse cellulaire au H2O2, une certaine diversification des inducteurs.

Figure 42. Deux modes d’activation de Yap1, l’un Gpx3-dépendant, l’autre Gpx3-indépendant. Le

H2O2 induit la formation d’un pont disulfure dans Yap1 alors que les électrophiles modifient, probablement

par liaison covalente, les cystéines du c-CRD. Ces deux modifications entraînent une inhibition de l’interaction entre Yap1 et Crm1 et permettent son accumulation nucléaire. Le pont disulfure intramoléculaire induit par l’exposition des cellules est probablement réduit, directement ou non, par les thiorédoxines. La voie permettant la desactivation de Yap1 après son activation par les électrophiles n’est pas connue.

(b) Questions posées par le modèle

L’étude du mécanisme de détection des peroxydes par Gpx3/Orp1 doit être affinée. Premièrement, des études biochimiques et structurales devront être menées afin de mieux comprendre comment Gpx3/Orp1 s’oxyde en réponse au H2O2. Deuxièmement, le mécanisme

de détection devra être replacé dans son contexte cellulaire. Nous ignorons en particulier si l’oxydation de Yap1 par Gpx3/Orp1 a lieu dans un compartiment cellulaire préférentiel. Le mécanisme de transduction du signal redox de Gpx3/Orp1 à Yap1 devra également être affiné. Dans le modèle actuel, la forme oxydée de Gpx3/Orp1, responsable de l’oxydation de Yap1 est l’acide sulfénique (Cys36-SOH) et l’oxydation de Yap1 en un pont disulfure intramoléculaire entraîne la réduction de Gpx3/Orp1. Nous ne savons pas si la réduction de Gpx3/Opr1 et l’oxydation de Yap1 entraîne une dissociation du complexe. Par ailleurs, l’exposition des cellules au H2O2 entraîne aussi la formation d’un pont disulfure

intramoléculaire Cys36-S-S-Cys82 dans Gpx3/Orp1. Ce pont pourrait oxyder Yap1 par un mécanisme d’échange de pont disulfure. Bien que les données génétiques indiquent que la formation de ce pont n’est pas nécessaire à l’oxydation de Yap1 par Gpx3/Orp1, il est important de savoir s’il existe un deuxième mode d’oxydation de Yap1 par Gpx3. Les essais préliminaires de reconstitution du système avec Yap1 et Orp1 purifiés permettent une oxydation de Yap1 dépendante de Gpx3/Orp1. Cependant, la relative inefficacité de cette oxydation indique qu’un autre composant du système est probablement manquant.

2) Comparaison du mode d’activation de Yap1 par le H2O2 et par

les électrophiles

Yap1 est activé par un nombre important de composés de natures chimiques variées. Ces différents inducteurs agissent tous au niveau de l’interaction entre Yap1 et Crm1, par deux mécanismes clairement distincts: la formation d’un pont disulfure intramoléculaire entre les cystéines 303 et 598 par les peroxydes et la modification des cystéines C-terminales, probablement par addition de molécules à caractère électrophile (Fig. 42). Chacune de ces modifications résulte en une altération du NES de Yap1 et dans les deux cas, les cystéines constituent la cible de la régulation. Comment les mêmes résidus sont-ils capables de détecter

des molécules aussi diverses que les peroxydes, le cadmium ou les électrophiles ? La réactivité des cystéines de Yap1 vis-à-vis de molécules électrophiles suppose que ces résidus présentent un caractère nucléophile (associé à leur présence sous forme thiolate). L’oxydation d’une cystéine en acide sulfénique par le H2O2 étant également une réaction de substitution

nucléophile, Yap1 devrait pouvoir être directement oxydé par le H2O2. Ce n’est pas le cas.

Pourquoi ? La présence d’une cystéine sous forme thiolate est nécessaire mais peut ne pas être suffisante à son oxydation par les peroxydes. L’environnement de la cystéine réactive doit aussi permettre la stabilisation de l’alcoolate (RO -), produit consécutivement à la réduction du peroxyde (Ellis et Poole, 1997). Il est possible que Yap1 ne possède pas un tel environnement favorable à proximité de ses cystéines réactives. Il est également possible que la formation d’un pont disulfure entre Yap1 et Gpx3/Orp1 permette le rapprochement structural des cystéines 303 et 598, sans lequel le pont disulfure intramoléculaire de Yap1 ne peut se faire. L’ensemble de ces hypothèses devra être testé par des études biochimiques et structurales et l’étude de la réactivité des cystéines de Yap1 vis-à-vis des électrophiles devra être poursuivie.

B. Comparaison des systèmes fongique et bactérien de détection du