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La réalisation d’une rénovation a) Les conditions fondamentales à respecter

Dans le document Les rénovations d'immeubles (Page 91-95)

de construire et les droits des locataires (Art. 43 LDTR)

2. La réalisation d’une rénovation a) Les conditions fondamentales à respecter

(art. 260 al. 1 CO)

Sous l’empire de l’ancien droit du bail à loyer, le bailleur n’était pas auto-risé à transformer ou rénover la chose louée durant le bail. L’exécution de tels travaux nécessitait donc l’accord du locataire. A défaut, le bailleur n’avait d’autre solution que de résilier le contrat et d’attendre la restitution de l’objet loué s’il souhaitait le transformer ou le rénover.

L’un des buts poursuivis dans l’adoption du nouveau droit étant la protec-tion des locataires contre les congés, les principes qui précèdent ont été revus.

Désormais, le bailleur dispose d’un véritable droit de rénover la chose louée.

Sous réserve des éléments examinés ci-après, le locataire n’a donc pas la faculté de s’opposer à la rénovation de l’objet de son bail. Il ne peut pas non plus exiger la remise des locaux en leur état antérieur, ni consigner son loyer, ni résilier son bail41.

40 Cf. ci-après III/A.

41 LacHat (note 16), p. 297, n° 5.1.

L’art. 260 al. 1 CO accorde au bailleur un véritable droit de rénover la chose louée, mais toutefois à des conditions précises, qui sont les suivantes :

– Les travaux doivent pouvoir être raisonnablement imposés au locataire.

Aucune disposition légale ou règlementaire ne vient préciser cette notion.

C’est donc à la jurisprudence qu’il revient d’accomplir cette tâche. Or, à ce jour, les cas dans lesquels une contestation a surgi entre un bailleur et un locataire quant à la portée qu’il convient de donner à la notion de « travaux pouvant raisonnablement être imposés » ont été peu nombreux. La Chambre d’appel en matière de baux et loyers de Genève ne s’est prononcée qu’une seule fois à ce sujet en retenant que :

« In casu, la pose d’une gaine technique dans un appartement, qui n’occa-sionne qu’une modeste réduction de la surface d’une pièce, cependant néces-saire aux travaux à effectuer ailleurs dans l’immeuble, peut raisonnablement être imposée au locataire »42.

La doctrine estime qu’il revient au bailleur de faire la démonstration du caractère raisonnable des interventions envisagées43. Elle s’accorde également à considérer que pour statuer sur cette question, il convient de faire une pesée des intérêts respectifs du bailleur et du locataire, en prenant en considération

« l’intérêt du bailleur à conserver et à améliorer la substance de son bien » et celui du locataire « à avoir un usage non perturbé de la chose et à maintenir l’équivalence des prestations »44.

Plusieurs critères doivent être pris en considération, tels que notamment la nature, le but, l’ampleur, la durée, l’urgence, l’utilité des travaux, le moment de leur exécution, la durée du bail, les incidences du coût des travaux sur le loyer.

Dans un arrêt qu’il a rendu le 4 mars 2003, le Tribunal fédéral a admis que l’importance du trouble apporté à la jouissance des locaux est l’élément décisif pour déterminer le caractère « raisonnablement imposable » des travaux45.

A priori, des travaux ordonnés par l’autorité peuvent être imposés au locataire46.

42 ACJ n° 748 du 14.06.2004.

43 LacHat (note 16), n° 3.2, p. 293 ; CorBoz (note 1), p. 9.

44 corBoz (note 1), p. 9, se référant à l’ATF non publié en la cause 4C46/1998 consid. 3c.

45 CdB 1/05 p. 18 et ss, consid. 3.3.

46 corBoz (note 1), étant relevé que cet auteur se demande si l’intervention ordonnée ne constitue pas, en réalité, la correction d’un défaut affectant l’objet loué et relevant des prestations tombant sous le coup de l’art. 257h al. 1 CO.

– Le bail ne doit pas avoir été résilié.

Le bailleur ne peut rénover ou modifier la chose louée en cours de bail que si ce dernier n’a pas été résilié, l’idée du législateur étant qu’il n’est pas équitable que le locataire doive subir les travaux et leurs nuisances s’il devra quitter les locaux sans avoir pu, lui-même, profiter du résultat de la rénovation.

Peu importe que le bail ait été résilié par le bailleur ou par le locataire.

A priori, cette disposition s’applique à toutes les résiliations de bail, autant ordinaires qu’extraordinaires. Une controverse existe toutefois dans la doctrine à ce sujet, certains auteurs estimant que le locataire ne peut pas s’opposer aux travaux si le bail a fait l’objet d’une résiliation extraordinaire pour un motif qui lui est imputable47.

A vrai dire, la solution qu’il convient de donner à cette problématique doit probablement être nuancée et tenir compte du genre d’objet loué : si le bâtiment à rénover comporte plus d’une cinquantaine de logements et que les travaux nécessitent une intervention importante dans chaque appartement, le bailleur devrait pouvoir les réaliser même si, au cours de leur exécution – qui risque de s’étaler sur plusieurs mois – un ou deux contrats de bail à loyer portant sur ces logements sont résiliés. En revanche, si l’objet loué est une villa occupée par un seul locataire, les travaux de rénovation ne pourront pas avoir lieu si le contrat de bail a été résilié et leur exécution devra être reportée au jour où cette villa aura été restituée. La doctrine n’assimile pas le bail de durée déterminée à un bail résilié48 ; en revanche, elle estime qu’il convient de tenir compte de cet élément dans la pesée des intérêts permettant de déterminer si les travaux peuvent ou non raisonnablement être imposés au locataire.

La doctrine est, en revanche, hésitante quant à la question de savoir si un bail prolongé doit être ou non considéré comme un bail résilié, pendant la durée de la prolongation. David lachat49 estime que le bail prolongé judi-ciairement doit être assimilé à un contrat de durée déterminée de sorte que le bailleur peut, le cas échéant, imposer au locataire une rénovation de l’objet loué. Bernard corBoz50 préconise la solution opposée en considérant que si le bail a été prolongé, c’est qu’il a d’abord été résilié et donc que la condition posée par l’art. 260 al. 1 CO est remplie.

47 corBoz (note 1), p. 12, note 43.

48 LacHat (note 16), n° 3.3, p. 294-295 ; corBoz (note 1), p. 12.

49 Op.cit., n° 3.3., p. 295.

50 Op.cit., p. 12.

Le bailleur n’a pas le droit de résilier le bail avant d’engager des travaux de rénovation, il peut toutefois le faire ultérieurement, à la date du début des travaux51.

b) L’avis au locataire (art. 260 al. 2 CO)

Comme pour ce qui concerne l’exécution de travaux d’entretien, le bailleur est tenu d’informer le locataire suffisamment à l’avance de la nature, de l’am-pleur et de la durée des travaux de rénovation52. Concrètement, les parties doivent s’entendre sur les modalités d’exécution des travaux, notamment pour permettre au locataire de prendre des dispositions pour protéger ou déplacer ses biens, etc.

Lorsque les travaux de rénovation portent sur un logement situé en Suisse romande, l’art. 7.2 de l’accord cadre-romand prescrit que :

« Lorsque le bailleur veut rénover la chose, il doit en aviser suffisam-ment à l’avance et aussitôt que possible le locataire, sauf cas urgent, et lui donner l’occasion de donner son avis et/ou de solliciter des renseignements complémentaires »53.

Il convient de rappeler ici qu’à Genève, cette obligation est renforcée par l’art. 43 LDTR, lorsque l’objet loué est un appartement54.

c) La prise en compte des intérêts du locataire (art. 260 al. 2 CO)

Pour l’exécution des travaux, le bailleur doit choisir les solutions les moins déran-geantes pour le locataire. Cette obligation ne permet toutefois pas au locataire d’exiger du bailleur des efforts disproportionnés sur le plan technique ou financier55.

Le bailleur doit donc prendre les mesures possibles pour éviter le bruit et la poussière excessive, l’interruption du chauffage ou la suppression des fenêtres en hiver, et tenir compte, dans la mesure du possible, de la situa-tion particulière du locataire (état de santé, horaires de travail et périodes de vacances, etc.).

Lors de rénovations lourdes, l’attribution d’un logement provisoire de remplacement constitue souvent une mesure jugée d’adéquate.

51 CdB 4/05 p. 104 et ss.

52 LacHat (note 16), p. 296, n° 4.2.

53 L’art. 26 al. 2 RULV possède un contenu identique.

54 Cf. ci-avant II/A.2.

55 corBoz (note 1), p. 12.

Comme l’explique David lachat, ces éléments relèvent avant tout d’une correcte organisation du chantier, d’une part, et de l’instauration d’un dialogue permanent, d’autre part56.

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