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Réactivité des argiles en milieu alcalin : activation des argiles pour la fabrication de matériaux alcali-activés

Conclusions et perspectives du Chapitres 3

4.1 Réactivité des argiles en milieu alcalin : activation des argiles pour la fabrication de matériaux alcali-activés

Dans la littérature, la réactivité des argiles en milieu alcalin est abordée pour mieux comprendre par exemple le comportement des matériaux de stockage des déchets nucléaires. Les matériaux de type bentonite ou argilite pressentis pour cette action peuvent en effet subir sur le long terme une perturbation alcaline à proximité d’un milieu cimentaire, soit l’enveloppe des colis de déchets (Sanchez 2006 ; Xie, 2020). Plus largement dans l’environnement, une variation de pH tant basique qu’acide (par exemple une pollution accidentelle) peut entraîner une altération/dissolution des sols en contact et le relargage ou la capture d’espèces polluantes. Des processus similaires peuvent se produire dans le milieu naturel si on considère une échelle de temps longue car nécessaire aux processus géologiques d’altération des roches et particules du sol. Parallèlement, le développement des géopolymères, et plus largement des matériaux alcali-activés (MAA), a permis la multiplication des études de la réactivité des argiles (brutes ou activées) au contact de solutions alcalines à fortes concentrations (pH >> 12 à des concentrations de plusieurs moles par litre). Ces matériaux développés et utilisés dans certains pays, restent assez peu présents en France compte tenu de la pression des cimentiers (les liants hydrauliques gardent le monopole), de la frilosité des maîtres d’ouvrage ou maîtres d’œuvre pour des matériaux nouveaux et les freins liées à la réglementation (normalisation). Ces nouveaux liants ont cependant montré des performances similaires aux liants hydrauliques avec des spécificités telles que la résistance au feu ou une excellente résistance chimique. Le coût généralement plus élevé d’un géopolymère par rapport à un liant hydraulique nécessite le plus souvent une optimisation ou la recherche d’additifs afin de réduire au minimum la quantité de solution alcaline (chère) contenue dans le mélange. Quoique plus onéreux à la fabrication, leur durée de vie plus étendue compte tenu de leurs propriétés remarquables rend ces matériaux intéressants sur le long terme si on met dans la balance le coût de la maintenance et des réparations sur les ouvrages où ils seraient mis en œuvre. Etendre la durée de vie des structures en bétons (notamment dans les centrales nucléaires par exemple) et lutter contre les pathologies classiquement rencontrées dans les bétons en présence d’armatures métalliques (soit la carbonatation et la diffusion des chlorures pouvant mener à la rupture de structures telles que des ponts) est un enjeu vital dans une société qui dépend de ses ressources en énergie et de la mobilité des personnes et marchandises. La prise en compte de la durabilité étendue de ces matériaux mais également de la dépense réduite en énergie et en émission de gaz à effet de serre (GES) lors de sa fabrication doit être mise en regard d’un coût légèrement plus élevé. Un changement de réglementation avec une obligation de réduction des GES devrait être le déclic permettant le développement de ces matériaux à plus large échelle.

Enfin, certains développements sont également réalisés dans le cadre des travaux du Grand Paris pour valoriser les terres excavées. Avec un objectif de 70% de valorisation des déchets du BTP imposé par la directive cadre déchet Européenne, la géopolymérisation à l’aide de précurseur de type terre excavées est en cours d’exploration (voir l’exemple du « Hoffman green cement » -

https://www.ciments-hoffmann.fr/technologies/solutions/). Une économie substantielle en ressources de type matière première est

alors réalisée.

Concernant le processus de dissolution des argiles, ces dernières en tant qu’aluminosilicates sont sensibles à la dissolution en milieu alcalin. On doit cependant distinguer les études menées sur la dissolution à faible rapport solide/liquide pour des concentrations en OH- ne dépassant pas pH 13 (milieu dilué dans le domaine des eaux polluées ou eaux industrielles) et la dissolution à fort rapport solide/liquide et éventuellement à forte concentration en OH- (comme rencontrée dans les solutions alcalines de 1 à 10 mol/L dans le domaine de la formulation des MAA ou rencontrée ‘localement’ dans les sols traités à la chaux et/ou au ciment). Dans le premier cas, les surfaces des argiles sont mises en jeu ainsi qu’une réadsorption des éléments dissous sur les surfaces comme montré par Duc et al. (2006). Une lixiviation post dissolution obtenue en batch à l’aide de lanthane ou de césium permet par réaction d’échange ou de complexation d’ions de forte affinité (ions trivalents, ions lourds) de chasser les éléments potentiellement ré-adsorbés en surface. En milieu dilué (dans le domaine des eaux) et loin de la saturation en éléments dissous, la précipitation de nouvelles phases est rare contrairement au processus de dissolution en milieu concentré en KOH ou NaOH (couplé ou non à la

présence de solution alcaline de type Na2SiO3 ou K2SiO4 ce qui modifie le rapport Si/Na ou Si/K). Dans ce second cas, la dissolution de l’argile plus ou moins complète et qui se caractérise par un rapport liquide/solide faible (soit L/S = 0,5 - 1,5), s’accompagne de la précipitation de nouvelles phases notamment

des zéolithes et des phases géopolymériques amorphes avec un réseau d’alumino-silicates imparfaitement arrangés (Figure 99).

(a) (b) (c)

(c) (d)

Figure 99. Analyse minéralogique des matériaux alcali-activés (MAA) formés à partir d’un kaolin Tunisien Kb calciné à 750°C (température optimale) pour donner le métakaolin Mk en présence de solution (a) NaOH ou (b) KOH (Nmiri et al, 2017), avec KOH +K2SiO3 (G1) et avec NaOH+K2SiO3 (G2) (Nmiri et al. 2016) et NaOH

(A-G), NaOH + Na2SiO3 (B-G) et NaOH+ fumée de silice (SFG2-G) (Nmiri et al, 2019). Présence à forte concentration en base d’une zéolite cristallisée de type Faujassite-Na ou –K mélangé à une phase amorphe

identifiée par une large bosse autour de 25°2 théta (Cu) et 35° 2 théta (Co)

Les matériaux alcali-activés MAA (ou les géopolymères qui représentent une classe de MAA) correspondent à un réseau d’unités sialate (pour silicon-oxo-aluminate) qui vont se condenser à la manière d’un polymère, tels que sur la Figure 100a, pour donner des structures poly(sialate) de type Mn{-(SiO2)z-AlO2}n, wH2O avec M = K ou Na, n le degré de condensation et «z» est égal à 1, 2, 3 (voir Figure 100b).

La structure est composée de tétraèdres de silice et d’octaèdres d’aluminium reliés de manière alternative en partageant tous leurs oxygènes pour obtenir au final une structure tridimensionnelle. Si les OH assurent l’hydrolyse (dissolution) du précurseur aluminosilicaté, les ions Na+ et K+ apportés par la solution alcaline activante sont présents dans le réseau de cavités formées par la structure néoformée, afin de compenser la charge négative des atomes Al3+ de coordination IV.

Or, les solutions activantes KOH ou NaOH agissent de manière différente sur la dissolution des argiles

https://www.elementschimiques.fr/?fr/proprietes/chimiques/rayon-ionique) affecte la morphologie et la porosité des matériaux alcali-activés. KOH produit généralement un matériau avec un degré de condensation n plus élevé par rapport à NaOH (on obtient des géopolymères avec une plus faible porosité et donc on devrait obtenir de meilleures performances mécaniques dans ce cas). D’un autre côté, la dissolution des aluminosilicates est favorisée par la présence des cations Na+. Généralement, ces solutions à concentration similaire présentent des viscosités variables ce qui peut limiter leur mise en œuvre. Aussi afin de rester dans la zone d’ouvrabilité des géopolymères, des solutions (MOH) de concentrations différentes sont généralement utilisées. Cet état de fait rend complexe la comparaison des performances obtenues par des géopolymères pour établir une formulation donnant les performances optimales une fois le matériau durci (impossibilité de ne faire varier qu’un seul paramètre à la fois).

Figure 100 a) Schéma de la polycondensation des unités sialate dans un géopolymère et appariation de cation Al (IV) chargé négativement, b) schématisation des structures polysialates pour différents rapport Si/Al correspondant à des valeurs de z variable dans la formule Mn{-(SiO2)z-AlO2}n, wH2O (Davidovits, 2008) En présence de calcium (ou plus largement de carbonates de calcium ou de magnésium), la précipitation de silicates hydratés de Ca et/ou Mg contenant potentiellement de l’Al peut se mêler aux précédentes phases. La précipitation de phases carbonatées au contact du CO2 de l’air est également possible lorsque les systèmes sont ouverts. Dans le cadre de notre étude sur la géopolymérisation à base d’argile verte de Romainville du bassin Parisien, dont la minéralogie est représentée sur la Figure 103b, les carbonates représentent moins

de 6% du matériau argileux. Les processus secondaires de formation d’hydrates seront donc négligés lors de notre étude (même si leur présence est sans doute avérée mais en faible quantité). Ces processus secondaires deviennent par contre prédominants si on prend la marne bleue d’Argenteuil comme précurseur pour l’alcali-activation. En effet, cette seconde formation argileuse du bassin parisien possède une quantité variable de carbonates dans une gamme de teneur > 30%. Dans ce cas, une activation thermique autour de 850°C provoque la transformation des carbonates de Ca en chaux CaO autour de 850°C. La chaux est une phase fortement réactive en présence d’eau, formant de la portlandite soluble ce qui facilite la disponibilité du Ca pour former des hydrates. Une activation mécanochimique, telle que développée dans nos recherches, couplée à une température de calcination inférieure à 850°C, devrait permettre de conserver les carbonates sous leur forme première et ainsi réduire fortement les processus secondaires de précipitation d’hydrates tels que rencontrés dans les matériaux cimentaires. Un abaissement de la température jusqu’à l’élimination pure et simple de l’étape de calcination peut être envisagée mais cela mène à des matériaux utilisables, quoique de plus faibles performances.

Ainsi, les systèmes chimiques à étudier lors de l’élaboration de MAA sont complexes du point de vue thermodynamique, d’autant plus qu’il est possible de jouer sur de nombreux paramètres lors de la formulation. Cela explique la multiplicité des résultats obtenus dans la littérature et empêche souvent une comparaison directe des performances développées par les matériaux durcis. Il est possible de faire varier :

• la concentration et la composition de la solution alcaline (solution industrielle ou fabriquée en laboratoire avec des rapports Si/Na ou Si/K variables),

• le rapport liquide/solide (L/S), • la quantité d’eau dans la solution,

• les caractéristiques du précurseur soit sa surface spécifique, son degré d’amorphisation, la taille des particules qui le composent, la charge de surface des particules…

Ces paramètres se conjuguent avec le protocole d’élaboration (étape de fabrication avec une pré-activation chimique possible (ajout de solution alcaline), moule clos ou ouvert (gestion du CO2 et du séchage pendant la prise), température et durée de la cure…). La cinétique de dissolution de l’argile qui dépend de son activation (thermique, mécanique, chimique) de même que la congruence de la dissolution vont agir sur le processus de formation d’un géopolymère amorphe tri-dimensionnellement organisé ou de zéolite, On observe par exemple que le relargage de Al lors de l’attaque alcaline de l’argile est plus rapide dans certains cas par rapport à celui de Si. Cela dépend de conditions telles que la température de calcination de l’aluminosilicate (Garg et al. 2019). La congruence et la cinétique de dissolution vont ensuite impacter le processus de germination, nucléation et croissance des phases néoformées dans le matériau alcali activé

(Emmanuel, 2019). Dans le cadre de l’étude de la dissolution de la bentonite MX80, Duc et al. (2006) ont

montré également que le Mg est un élément très labile qui est relargé en ne respectant pas la stœchiométrie de la montmorillonite dont il est issu.

Par ailleurs, le mécanisme de dissolution des feuillets argileux se produit généralement à partir du bord des feuillets (surface latérale), zone à partir de laquelle se font la croissance et le développement des feuillets. La dissolution par attaque directe de la surface basale du feuillet n’est pas complètement démontrée. Cette dissolution ou plus exactement la fragilisation du feuillet pouvant entrainer sa fragmentation, entraîne dans ce cas la création de surface latérale supplémentaire. Or, rares sont les études par microscopie à force atomique (AFM) montrant une évolution de la morphologie des feuillets au cours de la dissolution. Dans le cas de la calcite ou du gypse (des matériaux massifs), ce type d’étude montre l’apparition de « marche » correspondant à une dissolution couche par couche avec la création d’un « cratère ». Une orientation préférentielle de la croissance cristalline peut également entrainer l’apparition de faces ou plans cristallins plus sensibles à la dissolution. Notez qu’une mesure de surface par adsorption de gaz sur les matériaux argileux post-dissolution est une autre solution à envisager pour montrer l’évolution des surfaces latérales.

Villieras et al. (1992) cité dans l’étude de Duc et al. (2004) ont utilisé cette technique pour évaluer la surface

spécifique latérale d’une montmorillonite. Cette méthode ne peut cependant être appliquée que sur des suspensions argileuses au contact d’une solution alcaline. En effet, il est nécessaire de récupérer les argiles après altération en milieu alcalin, ce qui est difficile au cours du processus de synthèse des géopolymères. En l’absence d’une mesure directe des modifications du précurseur argileux au cours de l’attaque alcaline lors de la géopolymérisation, l’approche consiste à relier les propriétés du précurseur et les propriétés du matériau à l’état durci, soit ses propriétés mécaniques. Ces dernières dépendent de la microstructure et de la minéralogie des phases présentes ou néoformées. Une analyse des matrices géopolymériques ou MAA par nano-indentation ou par micro-indentation devrait permettre de caractériser séparément les éléments qui composent le matériau (matrice géopolymère, phases secondaires du matériau non dissoutes, précurseurs partiellement dissous…). Cette analyse est en prospective dans le cadre de la thèse de Luzu B. (2017-2020).

Un calcul par la méthode d’homogénéisation telle que pratiquée sur les bétons pourrait alors être envisagé à partir des propriétés micromécaniques des phases qui composent le matériau : soit la matrice, les phases secondaires intactes du précurseur dont les particules/agrégats argileux qui n’ont pas réagi ou les feldspaths et le quartz. Les mesures pour caractériser la matrice s’avèrent cependant compliquées compte tenu de l’hétérogénéité nano/micrométrique des matériaux (difficulté à repérer des zones homogènes pour appliquer les mesures de nano-indentation comme on peut le voir par exemple sur la Figure 106).

Afin de favoriser la dissolution du précurseur aluminosilicaté avant polymérisation pour former un MAA (ou un géopolymère), plusieurs méthodes sont possibles pour amorphiser le matériau. En effet, en augmentant le désordre dans une structure cristalline, on abaisse l’énergie des liaisons dans le matériau ce qui facilite la dissolution (hydrolyse des liaisons). On rencontre couramment :

une activation thermique soit une calcination à une température particulière selon la minéralogie de

l’argile (Autef et al., 2013). Si l’amorphisation peut être suivie par diffraction de rayons X, la disparition des pics cristallins n’est cependant pas suffisante pour optimiser la température de calcination du précurseur à la géopolymérisation. Dans le cas des kaolins, si les pics de diffraction disparaissent classiquement à partir de 550°C, il faut atteindre 750°C environ pour obtenir des propriétés mécaniques optimales du géopolymère durci. En effet, la structure cristalline est désorganisée à 550°C par coalescence des OH pour former de l’H2O, cependant il faut atteindre 700-750°C pour permettre une complète élimination des molécules d’eau par diffusion hors de la structure

cristalline et obtenir des propriétés mécaniques élevées. Il faut donc attendre la fin de la perte de masse enregistrée sur les courbes d’analyse thermogravimétrique par ATD/ATG (Figure 101a). Dans le cas

des illites qui composent majoritairement l’argile verte de Romainville (qui sont des terres actuellement excavées dans les travaux du Grand Paris), la structure TOT de cette argile rend difficile l’élimination des molécules d’eau provenant de la couche octaédrique O, étant donné la nécessité de leur migration à travers les couches tétraédriques T de part et d’autre de la couche O. La température doit atteindre 850°C selon les analyses thermogravimétriques de la Figure 101d pour stabiliser la

perte de masse suite à la déshydroxylation de l’argile. Une température plus élevée mène à la recristallisation bien connue sous forme de mullite autour de 910-920 °C qui se traduit par un pic exothermique sur la courbe d’analyse thermique différentielle de la Figure 101d. Cette

recristallisation diminue alors la réactivité du précurseur. Notez que dans le cas de l’illite, si la déshydroxylation est achevée, la structure cristallographique de l’argile semble encore conservée compte tenu que la raie (001) de l’illite est toujours présente sur les diffractogrammes. Ce phénomène est lié à une modification des liaisons dans le matériau (ce n’est pas le cas dans la montmorillonite).

(a) (b)

(c) (d)

Decarbonation Recristallization

850°C

Dehydroxylation

Figure 101. (a) Courbe ATG/ATD d’un kaolin Tunisien (Nmiri, 2017), (b) Diffraction de rayons X (Anode Cu) d’un kaolin tunisien calciné à différentes températures, (c) Résistance à la compression simple uni-axiale Rc sur

les géopolymères formés à partir des kaolins calcinés à différentes températures et (d) courbe ATG/ATD d’un prélèvement d’argile verte de Romainville riche en illite déshydratée entre 550°C et 850°C avant recristallisation

en mullite vers 900°C avec la présence conjointe de kaolinite déshydratée à 550°C et de calcite décarbonatée à 850°C (Luzu, 2019).

une activation chimique. Il s’agit d’un prétraitement de l’argile à l’aide de solutions basiques

concentrées NaOH ou KOH (Emmanuel, 2019). Une attaque chimique avant ajout de silicate de K ou Na permet d’aider à libérer le Si et l’Al qui doivent se combiner avec les solutions alcalines. Le rapport Si/Al est alors calculé à partir de la composition chimique après dissolution totale du matériau. Or, il est possible que tout le Si ou Al ne soient pas libérés lors de la géopolymérisation. Il est difficile dans ce cas de donner un rapport Si/Al réel afin de le corréler avec la structure alcali-activée formée.

Rappelons que pour équilibrer la structure, un rapport optimal M/Al (M= Na+ ou K+) égal à 1 est recherché. La composition chimique de l’argile précurseur et son taux de dissolution (y compris la congruence de la dissolution et la vitesse de la réaction) sont par conséquent des paramètres déterminants. En présence de phases secondaires (quartz, silice, feldspaths…) comme c’est le cas de l’argile verte dont la minéralogie est donnée sur la Figure 103a, plusieurs silicates ou

aluminosilicates sont également susceptibles de réagir le plus souvent partiellement.

une activation mécanochimique en utilisant le broyage (Tole et al. 2019 ; Hamzaoui et al. 2015).

Dans le cadre de l’activation des matériaux illitiques (Luzu, 2017-2020), une simple activation thermique n’est pas suffisante pour obtenir les performances les plus élevées au niveau des géopolymères formulés (quels que soient les paramètres de formulation). Une activation combinée, thermique et mécanochimique, est nécessaire. Le type de broyeur a alors un impact sur les performances atteintes (variation de l’énergie du broyage). Un broyage au broyeur giratoire G est apparemment à l’origine d’une fragmentation des particules (réduction de la taille) alors que le broyage planétaire P (avec un nombre de bille variable et une vitesse plus élevée) entraîne une modification profonde de la structure cristalline du matériau (Figure 102). Les illites peuvent dans ce cas être amorphisées par action mécanique de manière plus efficace que par action thermique (disparition de la raie (001) de l’illite sur les diffractogrammes). A contrario, ce processus d’amorphisation doit être évité lors de la préparation des échantillons pour une analyse classique par diffraction de rayons X. C’est pourquoi l’utilisation de certain broyeur comme le McCrone par exemple est recommandée.

Figure 102. Comparaison au MEB de la morphologie des particules d’argile contenue dans l’argile verte de Romainville AV calcinée à 850°C pendant 2h et broyée 4h avec (a) le broyeur giratoire (ration bille poudre b:P =

3,7) et (b) un broyeur planétaire avec b:p = 7,7 (Luzu, 2019)

20 31 47 42 49 48 49 10 11 8 11 11 11 11 40 28 15 16 11 11 9 25 24 24 23 23 22 22 0% 10% 20% 30% 40% 50% 60% 70% 80% 90% 100% 0 0,5 1 2 3 4 5 C o m p o si ti o n ( w t% )

Grinding time (hours)

Quartz Illite+Muscovite Feldspar Anatase Diopside Carbonates Hematite Amorphous

Figure 103. a) Minéralogie de l’argile verte de Romainville AV calcinée à 850°C pendant 2h et broyée pendant un temps croissant avec un broyeur planétaire avec b:p = 7,7, b) Corrélation entre la diminution de l’illite quantifiée par DRX et l’augmentation de l’amorphe avec l’évolution de la Rc des géopolymères obtenus à 48h.

Parmi les objectifs de recherche dans le cadre de la thèse de (Luzu, 2017-2020), l’activation de l’illite/muscovite contenue dans l’argile verte de Romainville a constitué un défi. L’utilisation d’un broyeur planétaire sur une durée croissante de 1 à 5 h montre une évolution de la minéralogie soit une augmentation de l’amorphe de 20 à 49% combinée à une diminution de l’illite/muscovite (de 40% à 9%) (Figure 103a).

Conjointement la taille des particules est modifiée avec une micronisation maximale au bout d’une heure alors que la poursuite du broyage semble ré-augmenter la taille des particules (réagrégation par effet électrostatique, frittage, réaction mécanochimique…) (Figure 104). On note que l’amorphe atteint un maximum alors que les particules se ré-agrègent. On s’attendrait alors à une augmentation de la réactivité puis une diminution, la surface spécifique des précurseurs étant un paramètre impactant. Or, les résistances en compression des géopolymères formulés et durcis obtenues par réaction des précurseurs activés mécanochimiquement (avec Na2SiO3 + NaOH (Na2O/SiO2 = 0.54), L/S = 1, cure à 40°C 24h + 70°C 24h) augmentent sur la Figure 103b pour se stabiliser à partir de 4h. La surface spécifique n’est donc pas le

paramètre le plus impactant alors que l’évolution du taux d’amorphe se stabilisant après 3h de broyage semble mieux expliquer les évolutions des Rc (les Rc sont mesurées sur des cylindres de 33x50 mm).