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3 enfants décédés

L A VIE AU QUOTIDIEN

Au quotidien, Thérèse m’explique qu’elle prépare ses repas elle-même: « Je les fais moi-même

pour l’instant ; je fais ce qui me plait et puis le jour où je ne pourrai plus… » Elle a, par ailleurs,

déjà songé à utiliser le service de portage de repas : « J’ai demandé d’ailleurs, il y a une

société qui fait les repas à domicile. Oui, j’essaierai peut être… ce n’est pas trop cher d’ailleurs. Ça me revient moins cher que si je fais moi-même (rires) ! Mais pour l’instant ça va, parce que je suis assez difficile disons, pour les goûts… etc… Voilà, autrement c’est tout simple, ma vie est simple».

Récit d’une journée type :

« Ah le matin je traine un petit peu dans le lit et puis je prends mon déjeuner… et puis la matinée passe vite. Je me lève vers 8h45, j’écoute les nouvelles, oui j’ai la radio dans mon lit. Et le soir je ne m’endors pas avant 22h30. M’enfin c’est comme ça. Le matin, ça passe assez vite, le voisin m’apporte le journal. Non, je suis bien là. Je ne me plains pas. On vient, on vient… on ne vient pas, on ne vient pas… c’est tout. »

« Oui, j’ai de la lecture, le journal, mais c’est vite fait et puis j’ai des livres et aussi on fait des échanges avec la voisine. Des romans, de l’histoire. Oui, je regarde la télé, il y a des jeux qui sont intéressants, je choisis mes programmes. Des choses pour faire travailler la mémoire, des fois on oublie quand même. Des fois, ça ne sort pas ! C’est comme à la belotte, voyez je fais des bêtises aussi».

L’ACCOMPAGNEMENT BENEVOLE

Thérèse ne sait plus vraiment dater sa première venue aux après-midis de convivialité, cela lui a été proposé par une personne qui participait déjà, une voisine du quartier :

« Autrement j’ai une vie toute simple. Oui, ça fait longtemps que je viens ici… faudrait demander à Marie-Antoinette, c’est elle qui m’avait signalé. Et puis j’avais dit, si c’est bien, si l’atmosphère me plait peut être que je resterais, autrement… Et puis ça m’a plu et puis c’est vrai qu’il y a une très

bonne ambiance, on ne dit pas du mal des uns et des autres… très, très bien. Oui, ça fait

plusieurs années, et puis les petits repas qu’on nous fait, c’est bien. Il y a une bonne ambiance».

« C’est ma récréation » :

« Et puis là, avec ces activités-là, c’est bien aussi. C’est mieux que rien, comme je dis, c’est ma récréation. Non, je suis seule, je ne fais que ça, parce qu’il faut venir me chercher. Oui, c’est Gilberte qui vient, autrement je ne peux pas m’en aller loin. Quand c’est un peu autour de chez moi, et s’il fait beau».

Thérèse n’évoquera pas plus la nature des relations avec les bénévoles, elles se connaissent bien mais je sens qu’il n’y a pas de lien de proximité très rapproché. Plus que la personnalité des bénévoles, c’est sa présence au milieu des autres pour vivre un temps ensemble qui convient à Thérèse. Elle est par ailleurs très reconnaissante qu’on puisse venir la chercher chez-elle, sans quoi elle serait exclue de cette sortie bimensuelle.

Six mois plus tard, Thérèse dit toujours continuer d’aller assidûment et avec plaisir aux après-midis de convivialité, tous les 15 jours : « Oui, c’est très bien. J’y vais tout le temps, sauf quand je ne

suis pas là, comme maintenant, je ne peux pas être partout ! Et puis c’est bientôt l’été, alors ça va s’arrêter, c’est normal tout le monde part en vacances». Lorsque je lui demande si elle aimerait

une visite en plus chez elle, elle me parle tout de suite de sa voisine qui vient tous les jours et me dira : « non, je n’en éprouve pas trop le besoin».

OPINION DE LA PERSONNE SUR SA SITUATION D’ISOLEMENT

Même si Thérèse semble vivre sa solitude sans se plaindre, le sentiment de dépendre des autres pèse malgré tout : « Non, non, je ne vais pas chez eux. C’est ma voisine qui vient me

voir. Non, si j’ai besoin vraiment, mais autrement non. J’aime autant qu’elle vienne à la maison, c’est plus simple. Et puis elle a quand même son mari, ils sortent pas mal… il a des occupations, non je n’aime pas… non, j’aime mieux qu’elle vienne. On est plus libre. Je n’aime pas

déranger. Et puis vous savez, quand j’étais en activité ou n’importe, je faisais tout moi-même, je

ne prenais personne. Je ne disais pas ce qui m’ennuyais ou pas, tandis que maintenant je ne peux plus le faire. C’est l’âge».

La solitude est très peu exprimée chez Thérèse : « Ah oui, vous savez quand on est seule, ça

arrive de se sentir seule m’enfin ce n’est pas… je m’occupe quand même». L’ennui n’est pas

exprimé directement : « Autrement j’ai une vie toute simple parce que je ne peux pas sortir». On sent que le lien journalier avec ses voisins est très important pour elle, mais il est non-garanti sur la durée et elle en a conscience : « Tant que j’ai des personnes comme ça c’est bien» « Non,

y a mon frère et mes voisins, autrement j’ai personne».

La voisine est la personne sur qui elle peut compter : « Et puis s’il y a quelque chose de

grave, la voisine a le numéro de téléphone de mon fils et elle peut l’appeler. Oui, s’il y a quelque chose j’appelle mes voisins, non, non je n’ai pas de problème».

Six mois plus tard, Thérèse continue de voir « la vie du bon côté, l’âge est là, faut accepter.

Aujourd’hui, je ne suis pas seule, je ne me sens pas isolée, ça va. Si y a un « bonjour » : tant mieux, si y a personne c’est pas grave. Je prends les choses comme elles viennent».

Sa petite fille interviendra en fin d’entretien, en disant qu’elle imagine que s’il y avait plus de sorties organisées, cela pourrait lui plaire. « Elle a toujours été une femme autonome, et elle ne va

jamais aller demander mais je pense qu’elle aimerait ! ».

On sent dans la situation de Thérèse que la proximité et le lien social à l’intérieur du quartier sont particulièrement forts. La solidarité de voisinage semble très présente. De plus, les personnes qui fréquentent ces lieux de convivialité sont des personnes sociables qui aiment partager un peu d’elles-mêmes en société. Lorsqu’elles ne peuvent plus se déplacer seules, l’association propose aux personnes de venir les chercher chez elle. L’isolement est ainsi déjà rompu.

Thérèse