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C- La gouvernance

3. Questions de recherche et modèles conceptuels

Comme nous l’avons vu, nous souhaitons mieux comprendre le changement et la gouvernance impliqués dans la transformation des soins de première ligne visée par la politique GMF. Plus précisément, nous avons expliqué que nous poursuivons l’objectif de mieux comprendre :

o le changement, son contexte et les processus rattachés à son émergence et son

implantation;

o l’exercice de gouvernance déployé dans le cadre de ce changement; o l’interaction entre la gouvernance et le changement.

Deux modèles conceptuels ont été développés pour approfondir successivement le changement et la gouvernance. Ces modèles ont été développés à la lumière des éléments présentés dans l’état des connaissances et dans les articles #1 et #2.

Le modèle pour l’analyse du changement est présenté dans l’article #1. La figure 1 est extraite de cet article. Le changement organisationnel y est analysé à travers sa nature, son processus et son contexte (Pettigrew, 1985a). La nature du changement fait référence à l’écart entre deux situations. Elle est donc caractérisée tant par le point d’arrivée du changement que par son écart par rapport à la situation initiale. Les processus de changement correspondent à une série d’actions permettant d’expliquer comment le changement prend forme dans le temps (Pettigrew, 1985a). Les processus de changement sont caractérisés par leur progression temporelle et leurs types. La progression temporelle fait référence aux synchronismes, au rythme ainsi qu’à la durée des processus (Poole et al., 2004b; Weick et al., 1999). Les types de processus sont caractérisés par leur caractère construit ou prescrit, par le nombre d’acteurs impliqués et par la nature des interactions entre eux (Van de Ven et al., 1995). Le contexte du changement fait référence au contexte interne et externe des acteurs impliqués et est caractérisé par des aspects économique, politique et d’affaires (Pettigrew, 1987) ainsi que par le niveau de pluralisme (Denis, 2004; Greenwood et al., 1996; Hinings et al., 1991; McNulty et al., 2004). Le pluralisme fait référence à la présence d’acteurs en relation d’interdépendance poursuivant des objectifs

Figure 1: Cadre conceptuel pour l’analyse du changement2

différents et entretenant des relations de pouvoir ambigües dans un contexte de travail basé sur le savoir et l’expertise (Denis et al., 1999; Denis et al., 2007; Mintzberg et al., 1985a). Plusieurs considèrent que le pluralisme influence l’introduction de changements volontaires tant au niveau des organisations (Denis, 2004; Greenwood et al., 1996; Hinings et al., 1991; McNulty et al., 2004) que des systèmes (Klijn et al., 2000; Lindblom, 1968) en les rendant particulièrement résilients à l’introduction de changement imposés par l’extérieur (Brock, 2008; Randall et al., 2009). Si l’analyse de la nature du changement correspond à la question « quoi? » et celle du processus à expliquer « comment » le changement s’est produit, l’analyse du contexte permet d’approfondir la question « pourquoi? » (Pettigrew, 1987).

2 Inspired by Pettigrew (1985a), Van de Ven and Poole (1995) and Weick and Quinn (1999).

Contexte • interne

• externe

Nature • Point d’arrivée • Écart par rapport à la

situation initiale Processus

• Progression temporelle

35 La conceptualisation développée pour l’analyse de la gouvernance est illustrée par la figure 2, extraite de l’article #2. Ce modèle intègre des concepts développés par les auteurs adoptant une perspective tant instrumentale que démocratique. Cette conceptualisation est développée et présentée en détail dans le second article de la présente thèse qui s’intitule Integrative framework on governance – in search of conceptual clarification.

Elle conçoit la gouvernance comme un ensemble de processus formés d’instruments et d’actions réalisés par des acteurs détenant plus ou moins de capacités de gouvernance dans le but de réaliser les fonctions de gouvernance que sont la prospective, les décisions et la régulation. La gouvernance n’est pas associée à un contexte particulier, à une époque ou à une façon nouvelle de gouverner (Rhodes, 2007). Elle est considérée de façon pragmatique permettant l’analyse des différentes formes qu’elle peut prendre. En ce sens, la gouvernance est conçue comme un ensemble de processus liés à la réalisation des différentes fonctions de gouvernance : la prospective, les décisions et la régulation.

La prospective fait référence à la gestion des informations nécessaires à l’exercice de gouvernance (Hood, 1983) et au développement collectif des consensus nécessaires à l’action collective (Hatchuel, 2000). La prise de décisions fait référence aux choix à l’égard des instruments et des actions (Ostrom, 2007). La régulation est la fonction centrale de la gouvernance. Elle fait référence au contrôle externe ou autonome de l’action collective (Reynaud, 1988). Les processus sont révélés par la relation duelle entre les actions et les instruments de gouvernance qui sont associés aux structures (Giddens, 1984). Les fonctions de la gouvernance et les processus sont liés au contexte de gouvernance. Le contexte est composé des acteurs (croyances, ressources) et des caractéristiques de l’environnement (histoire, opportunités, contraintes). Les acteurs disposent de capacités de gouvernance variables selon leur distribution tant dans les organisations publiques (Lipsky, 1980) que privées (Mintzberg et al., 1985a; Molinsky, 1999). L’analyse des processus, des fonctions et du contexte de gouvernance ainsi que les interactions entre ces éléments permet de mieux comprendre comment la gouvernance s’exerce.

Figure 2: Cadre conceptuel pour l’analyse de la gouvernance

Nos objectifs à l’égard du changement et de la gouvernance soulèvent des questions qui leur sont propres. Pour mieux comprendre le changement nous traitons les questions suivantes :

o Quelle est la nature du ou des changements recherchés et implantés?

o Quels processus sont impliqués dans l’émergence et l’implantation de ces

changements?

o Quel est le contexte d’implantation du changement et comment évolue-t-il dans le

temps?

o Dans quelle mesure la nature, les processus et le contexte de changement ainsi que

les interactions entre ces éléments permettent de mieux comprendre l’émergence et l’implantation de la politique GMF?

Pour mieux comprendre l’exercice de gouvernance, nous nous attarderons aux questions suivantes :

o Quelles actions et interactions caractérisent les processus de gouvernance?

Contexte de gouvernance (qui gouverne)

Processus de gouvernance (comment la gouvernance prend place)

Actions et interactions Instruments

Fonctions de gouvernance (ce que fait la

gouvernance) -Prospective -Décisions -Régulation Acteurs: - Croyances - Ressources Environnement: - Histoire - Opportunités et contraintes

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o Quels instruments participent aux processus de gouvernance? o Quelles fonctions de gouvernance sont réalisées par ces processus?

o Quel est le contexte de gouvernance et comment évolue-t-il dans le temps?

o Dans quelle mesure les processus, les instruments, les fonctions et le contexte de

gouvernance ainsi que les interactions entre ces éléments permettent de mieux comprendre l’émergence et l’implantation de la politique GMF?

Comme nous l’avons vu, nous analysons le même phénomène en mobilisant ces deux perspectives de façon séquentielle. Les liens entre le changement et la gouvernance sont discutés suite aux trois articles qui constituent le cœur de la thèse. La prochaine section décrit la position épistémologique à partir de laquelle cette thèse est réalisée ainsi que la méthode employée.

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