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Le rayonnement cosmique est un phénomène très bien connu et étudié depuis le début du XXesiècle. Il se compose en majorité de protons (85%) mais aussi de noyaux d’Hélium (14%), d’électrons (1%) et d’autres noyaux atomiques. Le spectre du rayonnement cosmique s’étend sur au moins 12 ordres de grandeur en énergie comme on peut le voir sur la figure 10.13.

Figure 10.13 – Distribution de l’énergie des rayons cosmiques. Abscisse : energie en eV, échelle logarith-mique. Ordonnée : Flux de rayons cosmiques observés hors de l’atmosphère terrestre, échelle logarithlogarith-mique. [Lafebre 2001]

Les particules qui interagissent le plus efficacement avec les détecteurs de HFI sont celles qui d’une part déposent suffisamment peu d’énergie dans les matériaux qui compose le satellite pour pouvoir les traverser, et qui d’autre part sont suffisamment nombreuses pour avoir un taux d’interaction élevé.

– La première condition pose une limite inférieure à la gamme d’énergie : la figure 10.14 montre qu’en deça de 100 MeV le dépôt d’énergie dans les matériaux métalliques (ici le cuivre ; la forme de la courbe est la même pour les autre matériaux) augmente rapidement par conséquent les particules sont arrêtées avant d’atteindre les détecteurs.

– La seconde condition nécessite un flux suffisant de particules, elle pose une limite supérieure à la gamme d’énergie. Les figures 10.13 et 10.18 montrent qu’au delà de 5 GeV le flux de particules décroît très rapidement. Le taux d’interaction entre les particules et les détecteurs devient donc très faible (les calculs de la section 10.4.3 confirment que le nombre d’interactions directes détectées entre les rayons cosmiques et les détecteurs est cohérent avec le flux de particules dont l’énergie est de l’ordre du GeV). Les modélisations numériques effectuées par Chloé Feron en 2005 [Feron 2005] ont également montré que

Figure 10.14 – Dépot d’énergie des protons dans le cuivre. Abscisse : energie en MeV. Ordonnée : dépôt d’énergie en MeV . cm2 / g. Source : http ://physics.nist.gov/PhysRefData/Star/Text/PSTAR.html.

Le rayonnement cosmique a plusieurs origines. La composante dominante est différente selon la gamme d’énergie : le vent solaire domine dans la gamme des faible énergie (jusqu’à quelques keV, sauf en cas d’érup-tion solaire où il peut atteindre le MeV voire le GeV) ; les rayons cosmiques galactiques dominent la plus grande partie du spectre (de la centaine de MeV à 1015GeV) ; les particules extragalactiques sont dominantes aux énergies les plus hautes (au delà de 1015 GeV). Les rayons cosmiques qui interagissent le plus effica-cement avec les détecteurs de HFI sont donc probablement les rayons cosmiques galactiques de basse énergie.

Les particules solaires : Le flux de particules solaires est corrélé à l’activité du soleil. Aux énergies qui nous intéressent, elles représentent la queue de distribution des particules émises par le soleil et sont peu nombreuses ; elles sont noyés par les particules galactiques (qui expliquent la quasi-totalité des glitches observés dans les données). Cependant en cas d’éruption solaire, celui-ci émet un grand nombre particules dont l’énergie est plus élevée que pendant les périodes calmes et cette composante peut devenir dominante pendant une courte période.

La figure 10.15 montre l’activité solaire au cours du temps. On voit clairement le cycle solaire de 11 ans. Le nombre de tâches solaires qui caractérise l’activité du Soleil est fortement corrélé avec l’irradiance, le flux radio et la fréquence des éruptions solaires [Rohde].

Les rayons cosmiques galactiques : Ils font apparaître deux composantes.

– La composante dite normale a une énergie supérieure à la centaine de MeV environ ; elle est due aux particules chargées (protons en majorité) qui proviennent des sources galactiques (les particules chargées de plus faible énergie rebondissent sur le champ magnétique solaire et n’entrent pas dans le système solaire). A basse énergie (∼ 50 MeV - 5GeV ), le flux de particules de cette composante est anticorrélée à l’activité du Soleil (voir la figure 10.17) car les particules chargées sont diffusées par

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Figure 10.15 – Le cycle solaire : Irradiance, nombre de tâches solaires, fréquence des éruptions solaires, flux radio en fonction du temps. Abscisse : année. Ordonnée : irradiance (W/m2), échelle arbitraire pour les autres quantités. [Rohde]

le champ magnétique solaire.

– La composante dite anormale proviendrait essentiellement de particules galactiques neutres (atomes) de plus faible énergie (typiquement quelques MeV). Lorsque ces particules s’approchent du Soleil elles seraient ionisées par l’interaction avec le vent solaire puis accélérées par un mécanisme encore mal compris qui fait intervenir des rebonds sur l’onde de choc terminale du vent solaire pour être finale-ment réfléchies vers l’intérieur du système solaire. La figure 10.16 illustre ce phénomène [Pesses 1981] [Fahr 1991].

Figure 10.16 – Schéma montrant l’origine et l’accélération de la composante anormale du rayonnement cosmique galactique [Helios].

Dans la gamme d’énergie qui nous concerne pour l’interaction avec les détecteurs de Planck (quelques centaines de MeV à la dizaine de GeV), la composante galactique normale représente la grande majorité des rayons cosmiques. Elle est fortement anti-corrrélée avec l’activité du soleil dans cette gamme d’énergie comme l’illustre la figure 10.17 qui montre son flux (représenté par le flux de neutrons d’énergie de l’ordre du GeV) mesuré entre 1955 et 2010 comparé au nombre de taches solaires visibles (Source : http ://neu-tronm.bartol.udel.edu/).

Figure 10.17 – Evolution du flux de la composante normale du rayonnement cosmique galactique (représenté par le flux de neutrons d’énergie de l’ordre du GeV) et du nombre de taches solaires visibles, entre 1955 et 2010. Abscisse : année. Ordonnée : taux de comptage. Source : http ://neutronm.bartol.udel.edu/.

La figure 10.18 montre le flux de protons du rayonnement cosmique en fonction de l’énergie, mesuré par l’expérience BESS entre 1997 et 2002, ainsi qu’une estimation du flux de protons dans le milieu interstellaire. A une énergie supérieure à 5 GeV environ, le flux est stable (il ne dépend pas de l’année de mesure). En dessous, il varie dans le temps avec l’activité solaire [Shikaze 2002].

Dans la gamme d’énergie autour du GeV, où le flux est maximal et la probabilité que les particule traverse le satellite pour interagir avec les détecteurs est maximale (car le dépôt d’énergie dans les matériaux est minimal), on voit que flux de protons cosmiques atteint 300 à 400 particules/(m2.sr.s.GeV) au cours d’un maximum d’activité solaire (2002) et 1500 à 2000 particules/(m2.sr.s.GeV) au cours d’un minimum solaire "normal" (1997).

La figure 10.19 montre la variation du taux de glitches moyen dans les données de HFI. Elle est comparée à l’activité solaire et au nombre de rayons cosmiques détectés par deux des canaux du SREM de Planck. Le dépôt d’énergie des rayons cosmique dans le SREM de Planck est plus grande pour les particules de faible énergie (E < 1 GeV) que pour celles de grande énergie(E > 1 GeV). Par conséquent ces dernières se caractérisent par un faible dépôt d’énergie (Edep ≈ 0, 05 − 0, 5 MeV). Les particules de faible énergie, au contraire se caractérisent par un dépôt d’énergie plus important (Edep≈ 0, 5 − 5 MeV). Voir la figure 10.20. On constate d’une part que le canal de plus grande énergie déposée du SREM (Edep ≈ 3 MeV) est plus fortement corrélé à l’activité solaire que celui de plus faible énergie (Edep≈ 0, 1 MeV) : en effet les parti-cules de plus faible énergie sont celles qui déposent le plus d’énergie dans le SREM mais également dans les bolomètres de HFI, ce sont donc celles qui créent des glitches avec la plus grande efficacité.

Et d’autre part que le taux de glitches et le flux de rayons cosmiques sont effectivement anti-corrélés à l’activité solaire : plus le nombre de taches solaire est grand plus le taux de glitches est faible.

Le rayonnement cosmique galactique, modulé par l’activité solaire, est à l’origine des glitches qu’on observe dans les détecteurs de HFI. En effet son flux est maximal pour la gamme d’énergie permettant l’interaction la plus efficace avec les détecteurs et l’anti-corrélation avec l’activité solaire confirme qu’il s’agit bien de cette

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Figure 10.18 – Flux de protons du rayonnement cosmique en fonction de l’énergie. Mesures effectuées par BESS entre 1997 et 2002 [Shikaze 2002]. Abscisse : énergie (GeV). Ordonnée : flux de protons (protons par m2 par sr par GeV).

composante.

Le précédent minimum d’activité solaire a eu lieu en 1997, suivi par un maximum en 2000-2001 (les vols d’Archéops ont eu lieu à cette période et ont donc connu un minimum du flux de la composante normale du rayonnement cosmique galactique), le nouveau minimum d’activité solaire que nous connaissons actuellement est exceptionnellement faible : on estime que le flux de protons à quelques centaines de MeV est plus grand d’un facteur 2 à 3 que lors du minimum solaire de 1997 et d’un facteur supérieur à 10 par rapport à la période du vol d’Archeops (ces valeurs seront confirmées par les calculs de la section 10.4.3). On verra que c’est l’une des raisons qui expliquent l’excès de glitches observé par rapport aux prédictions basées sur les résultats d’Archéops et les mesures au sol.

Pour les calculs qui suivent on utilisera donc une valeur estimée de 5000 particules(m2.sr.GeV.s) pour le flux de rayons cosmiques aux énergies proches du GeV.

Figure 10.19 – Taux de glitches moyen des bolomètres en violet. Nombre de rayons cosmiques détectés par le SREM de Planck dans deux canaux d’énergie en rose. Activité solaire (nombre de taches solaires) en vert. Abscisse : numéro de ring (temps). Ordonnée : Taux de glitches (normalisé), nombre de rayons cosmiques (normalisé), nombre de taches solaire.

Figure 10.20 – Dépôt d’énergie des protons dans le germanium et le silicium en fonction de leur énergie. Abscisse : énergie (MeV). Ordonnée : Dépôt d’énergie (MeV.cm2/g). Source : http ://phy-sics.nist.gov/PhysRefData/Star/Text/PSTAR.html