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5.1 Campagne 2008

5.1.2 Qualité du ciel

Première approche : nombre d’étoiles détectées

Les données ASTEP Sud acquises en continu permettent d’évaluer la fraction de temps photométrique pendant l’hiver au Dôme C. On utilise pour cela le nombre d’étoiles détectées dans le champ N∗,det, qui varie selon la couverture nuageuse. Une première approche consiste à utiliser directement l’histogramme de N∗,detsur toutes les observations. N∗,det est normalisé par le nombre d’étoiles maximum mesuré (correpon- dant aux images prises dans des conditions excellentes), et l’histogramme est normalisé par le nombre d’images pour obtenir une fraction du temps total. On sépare les diffé- rents FWHM pour distinguer la présence de nuages de l’effet d’un élargissement de la PSF. L’histogramme obtenu est représenté de manière cumulative figure 5.2. On montre ainsi qu’on a plus de 80 % des étoiles pendant 50 % du temps, et moins de 50 % des étoiles pendant 15 % du temps.

L’évaluation de la fraction de temps photométrique nécessite alors l’utilisation d’un critère ad hoc : on considère que le temps est photométrique si plus de la moitié des étoiles attendues sont détectées. On obtient 85 % de temps photométrique. Cette esti- mation est effectuée sur les données obtenues, donc sur le temps effectif d’observation ; en particulier elle ne tient pas compte des périodes de white-out, durant lesquelles les acquisitions sont arrêtées. La fraction de white-out s’élevant à 13.7 %, on obtient au final 73.4 % de temps photométrique pour l’hiver 2008 au Dôme C.

Pour valider l’utilisation du nombre d’étoiles, on réalise le même travail en considé- rant cette fois l’intensité totale des 10 étoiles les plus brillantes, qui diminue également avec la présence de nuages. On normalise cette intensité par l’intensité totale maximale mesurée. Les histogrammes sont en bon accord.

Figure 5.2 – Histogramme cumulatif du nombre d’étoiles détectées sur les images ASTEP Sud pour un FWHM compris entre 1.5 et 2 px (bleu), 2 et 2.5 px (vert), 2.5 et 3 px (jaune), et 3 et 3.5 px (rouge), et de l’intensité des 10 étoiles les plus brillantes (noir). Les histogrammes sont en bon accord. Cette 1ère

approche permet de déduire la fraction de temps photométrique pour l’hiver 2008 au Dôme C à l’aide d’un critère ad hoc.

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Seconde approche : prise en compte du fond de ciel

Le nombre d’étoiles varie avec le niveau de fond de ciel : pour un fond de ciel élevé, les étoiles faibles sont moins bien détectées. De même que pour l’élargissement des PSF, cet effet est à distinguer de la présence de nuages. Cela est fait dans une seconde approche, en traçant le nombre d’étoiles en fonction du fond de ciel, toujours en séparant les différents FWHM (figure 5.3). La structure principale est celle attendue : on a une décroissance du nombre d’étoiles de 400 (resp. 200) à 150 (resp. 50) pour un FWHM entre 1.5 et 2 px (resp. entre 3 et 3.5 px), lorsque l’intensité varie de 2500 à 4000 ADU. Cela correspond à l’augmentation quotidienne du fond de ciel, lorsque le Soleil passe au-dessus de -13◦

. Mais on observe également des zones où le nombre d’étoiles est plus faible, qui révèlent la présence de nuages. Pour établir une limite entre ces régions, on modélise le nombre d’étoiles attendues en fonction du fond de ciel.

Modélisation du nombre d’étoiles

Pour connaître le nombre d’étoiles théorique N∗,th, on évalue le rapport signal sur bruit photométrique théorique de chaque étoile du champ. On calcule d’abord le nombre de photons reçus pour les ∼8000 étoiles cibles tirées du catalogue GSC2.2, à partir de leur magnitude et de la courbe de transmission de l’instrument. On en déduit le flux de chaque étoile F∗. On calcule ensuite le bruit dans une ouverture photométrique de rayon r, exprimé en pixel. r dépend du FWHM ω. Le bruit est calculé sur le nombre de pixels dans l’ouverture Npx = πr2. On prend en compte :

— le bruit de photons de l’étoile : Bphot= √

F∗;

— le bruit de photons du fond de ciel : Bsky =!Fsky,1pxNpxoù Fsky,1pxest l’intensité de fond de ciel sur 1 px ;

— le bruit de lecture : Blec = Blec,1px!Npx où Blec,1px est le bruit de lecture sur 1 pixel.

— le bruit interpixel : Binter = Binter,1px!(Fsky,1px+ F∗,1px) Npx où Binter,1px est la valeur des variations interpixel et F∗,1pxle flux de l’étoile sur 1 pixel. (On suppose le flux de l’étoile uniformément réparti dans l’ouverture photométrique ; ce bruit n’étant pas dominant, cette approximation a une conséquence négligeable.) Le bruit total est alors Btot =

# B2

phot+ Bsky2 + Blec2 + Binter2 . Cette formule suppose que les différents bruits sont indépendants, ce qui n’est pas le cas en réalité. Elle donne néanmoins une bonne idée du bruit total dans ce modèle qui sera amélioré par la suite. Pour qu’une étoile soit détectée, on considère que le rapport signal sur bruit F∗/Btot doit être supérieur à un seuil α. On compte alors le nombre d’étoiles satisfaisant ce critère, et on obtient la courbe théorique N∗,th = f (Fsky). Cette fonction est calculée pour 4 valeurs de FWHM prises au milieu de chaque plage : 1.75, 2.25, 2.75 et 3.25 px.

Les paramètres sont les suivants :

— Blec,1px= 15 e−: le bruit de lecture est dominant pour les faibles niveaux de fond de ciel, et cette valeur est celle qui reproduit le mieux les courbes observées. De plus, les tests des caméras ont montré que Blec,1px vaut 9 e- en lecture lente et 19 e- en lecture rapide ; la valeur de 15 e- est donc plausible. Les observations sont faites en lecture rapide ; la valeur plus petite peut être expliquée par une température plus basse de la caméra.

— Binter,1px = 1 % : cette valeur est fournie par le constructeur.

— α = 5 : ce seuil est celui utilisé dans l’appel de la procédure de détection des points sources lors de l’analyse préliminaire (routine FIND de DAOPHOT).

— la fonction r = f (ω) est déterminée empiriquement à partir des courbes. On trouve r = 1.7 ω1.6. Cette formule n’est pas expliquée physiquement.

Figure 5.3 – Nombre d’étoiles détectées en fonction de l’intensité du fond de ciel, pour différentes plages de FWHM, dans la 2nde approche. Les courbes théoriques sont indiquées en noir. On tient compte d’un offset de 2470 ADU sur l’intensité.

Comparaison aux observations

Pour comparer le modèle aux observations, on interpole la courbe théorique à chaque valeur d’intensité mesurée, et on calcule la différence relative entre le nombre d’étoiles théorique et celui mesuré. On calcule ensuite la dispersion à 1 σ de l’ensemble des points. Cette limite ad hoc permet de séparer la dispersion due notamment à la largeur des plages de FWHM, d’une diminution réelle du nombre d’étoiles due à la présence de nuages (figure 5.4). On considère alors que la fraction de temps photométrique est la fraction de points au-dessus de cette limite. On obtient respectivement 88.1 %, 86.2 %, 80.3 % et 74.5 % pour les FWHM compris entre 1.5 et 2 px, 2 et 2.5 px, 2.5 et 3 px et 3 et 3.5 px. La moyenne de ces valeurs pondérées par le nombre de points dans chaque intervalle donne 83.5 %. En tenant compte des périodes de white-out, on obtient finalement 72 % de temps photométrique pour l’hiver 2008. Néanmoins, une dépendance de ce pourcentage avec le FWHM apparaît, et est confirmée en effectuant le calcul pour 8 valeurs de FWHM au lieu de 4 (figure 5.5). L’effet du FWHM n’est donc pas encore suffisamment découplé de l’effet des nuages.

On peut à présent s’affranchir de l’intensité du fond de ciel en traçant simplement l’histogramme du rapport N∗,det/N∗,th (figure 5.6). La fraction de temps photométrique qui pourrait être évaluée à partir de ce diagramme reste dépendante d’un critère ad hoc. Cette méthode n’est donc pas encore satisfaisante.

L’évaluation de la qualité photométrique du Dôme C par ces deux premières ap- proches est résumée dans Crouzet et al. [2010b].

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Figure 5.4 – Rapport du nombre d’étoiles détectées sur le nombre d’étoiles théorique en fonction de l’intensité pour les différentes plages de FWHM, dans la 2ndeapproche. La limite à 1 σ est indiquée en pointillés.

Figure5.5 – Fraction de temps photométrique en fonction du FWHM, dans la 2ndeapproche. On voit clairement une dépendance. (Les périodes de white-out ne sont ici pas prises en compte.)

Figure 5.6 – Histogramme du rapport du nombre d’étoiles détectées sur le nombre d’étoiles théorique pour les différentes plages de FWHM, dans la 2ndeapproche. Un critère ad hoc serait là encore nécessaire pour déduire la fraction de temps photométrique, et une incertitude serait engendrée par les résultats différents pour chaque plage de FWHM.

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Troisième approche : modèle global

Une troisième approche permet de déterminer de manière robuste la fraction de temps photométrique. Ce travail est détaillé dans Crouzet et al. [2010a] ; on précise ici les modifications par rapport à la seconde approche.

On ne prend en compte que le bruit de lecture et le bruit de fond de ciel, qui sont dominants, et on utilise le pic de la PSF (i.e uniquement le pixel central). On déduit à partir du rapport signal sur bruit la magnitude limite m détectable, et non pas N∗,th directement. Cette magnitude limite dépend à la fois du FWHM et du fond de ciel. On ajuste ensuite le nombre d’étoiles en fonction de la magnitude instrumentale à partir d’une image correspondant à un temps excellent. Un ajustement par un polynôme d’ordre 3 donne les coefficients suivants : a3 = 0.013, a2 =−0.664, a1 = 11.326, a0 = −61.567, et on prend une pente de 0.2 pour m > 14 (figure 5.7). On a ainsi la relation N∗,th = g(m) = h(Fsky, ω), obtenue à partir d’une image réelle (et non du catalogue).

Ce modèle est alors testé. On compare pour cela N∗,th avec le nombre d’étoiles maximum détecté (plus exactement le nombre d’étoiles qui est excédé 1 % du temps) pour différentes valeurs de Fsky et de ω (figure 5.8). L’utilisation du nombre maximum permet de s’assurer que les images correspondent à des conditions excellentes. Les deux sont en bon accord, avec une erreur standard de 6.6 % et une erreur maximale de 15 %. Le modèle est donc validé. Ainsi, contrairement à la seconde approche, les valeurs du fond de ciel et du FWHM sont toutes deux bien découplées de la mesure du rapport N∗,det/N∗,th. On note également qu’ici le modèle est cohérent avec les observations sans avoir à ajuster arbitrairement certains paramètres.

La prise en compte des erreurs de mesure de Fsky et ω engendre naturellement une dispersion de l’histogramme de N∗,det/N∗,th. Cette dispersion est alors justifiée, contrai- rement à la seconde approche où elle était due principalement à la largeur arbitraire des plages de valeurs de ω. Les régions correspondant à la présence de nuages, s’écartant de cette dispersion naturelle, sont alors clairement identifiées, sans utiliser de critère ad hoc. Cette approche est donc beaucoup plus robuste.

On rappelle les statistiques finales obtenues pour l’hiver 2008 au Dôme C : entre 56.3 % et 68.4 % de temps excellent, 17.9 à 30 % de temps voilé durant lequel des étoiles sont toujours visibles, et 13.7 % de mauvais temps (figure 5.9).

Figure5.7 – Diagramme cumulatif du nombre d’étoiles en fonction de magnitude instrumen- tale sur une image prise lorsque le temps est excellent (noir), et ajustement par un polynôme d’ordre 3 (vert), utilisé dans la 3ème

approche, pour l’hiver 2008.

Figure 5.8 – Validation du modèle de la 3ème approche, pour les observations de 2008. La relation théorique N∗,th = f (Fsky, ω) (ligne pointillée) est comparée au nombre d’étoiles détec- tées sur les meilleures images, d’abord en faisant varier le fond de ciel Fsky de 40 à 500 ADU (à partir de l’offset de 2470 ADU), pour un FWHM ω fixé à 1.5 px (haut gauche) puis à 2.5 px (haut droite) ; ensuite en faisant varier le FWHM de 1.5 à 3.5 px, pour Fsky fixé à 40 ADU (bas gauche) puis à 500 ADU (bas droite). Ce test valide le modèle.

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Figure 5.9 – Haut : rapport du nombre d’étoiles mesuré sur le nombre d’étoiles théorique (ligne noire) pour l’hiver 2008, dans la 3ème

approche. Les histogrammes théoriques prenant en compte les erreurs de mesure permettent d’identifier 3 zones, correspondant au temps excellent (rouge), incertain (orange) et voilé (jaune). Bas : même histogramme représenté de manière cumulative. La zone blanche est la fraction de temps durant laquelle les acquisitions sont stoppées à cause du mauvais temps (white-out).