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4. État de l’art dans le domaine de la bibliométrie appliquée à la

4.2 Des éléments à prendre en considération en matière d’évaluation

4.2.3 La qualité d’auteur

Les publications scientifiques sont rédigées par un ou plusieurs auteurs.

« L’auteur est la personne qui, par son travail scientifique personnel, a fourni une contribution essentielle à la planification, à la réalisation, à l’évaluation ou au contrôle du travail de recherche. » (Académies suisses des sciences 2008, p. 18) Nous observons une augmentation du nombre d’auteurs par publications35, ce qui peut avoir une incidence directe sur certains indicateurs bibliométriques. Ce fait participe aux critères qui permettent de définir qui doit être considéré comme qu’auteur. Les principes en matière d’intégrité de la recherche offrent des indications quant à la gestion de la qualité d’auteur. Il est évident que si le nom d’un auteur ne figure pas sur la publication ou n’est pas intégré dans les métadonnées des bases de données, ladite publication ne saurait être portée à son actif. Le fait est que la « collectivisation de la recherche » et le nombre d’auteurs par article n’a cessé de croître au XXe siècle (Gingras 2014a, p. 40). Il s’agit de savoir qui est considéré comme auteur et de qualifier la qualité de l’auteur. L’International Committee of Medical Journal Editors (ICMJE) (2020) dresse une liste de quatre conditions cumulatives permettant d’être légitimement considéré comme auteur ; le chercheur doit :

35 Lindsey et Brown (1977, cités dans Garfield 1979) relèvent que la proportion des

« [i.] Avoir contribué de manière substantielle à l’œuvre sinon avoir travaillé à l’acquisition, analyse ou interprétation des données puis [ii.] Avoir rédigé l’œuvre sinon avoir procédé à une revue critique du cœur du contenu intellectuel puis [iii.] Avoir approuvé la version finale destinée à la publication puis [iv.] Accepter d’assurer la responsabilité de tous les aspects de l’œuvre tout en s’assurant que l’exactitude et l’intégrité du travail soient convenablement examinées et résolues. (ICMJE 2020, §2) Comme le rappellent les Académies suisses des sciences (2013), s’ils sont plusieurs, les co-auteurs doivent être mentionnés selon les pratiques reconnues en matière d’élaboration des listes d’auteurs. L’ordre de citation ainsi que la notion de « qualité d’auteur » dans le cas de publications qui reflètent le fruit du travail d’un groupe de recherche ne sont pas toujours évidentes et peuvent amener à la discorde (Académies suisses des sciences 2013). Les principes en matière d’intégrité de la recherche renseignent sur la gestion de la qualité d’auteur. S’y trouvent, pour ne citer que ces exemples, la question de la responsabilité de la publication (Académies suisses des sciences 2008 et ALLEA 2018) ou la nécessaire entente sur l’ordre de citation (ALLEA 2018). Rousseau, Egghe et Guns (2018) confirment l’accroissement des imbroglios connexes à l’augmentation du nombre de co-auteurs : ils peuvent potentiellement rendre certains auteurs invisibles (nombre d’auteurs limité par la revue scientifique, recours à un nom de groupe…) ou encore soulever des problèmes éthiques (recours à des prête- plumes, paternité à titre honorifique…) (Moosa 2018).

Rousseau, Egghe et Guns (2018) rappellent qu’un chercheur qui publie en son nom propre sera considéré comme plus productif que ceux qui collaborent à la production du même nombre de publications sur une même période donnée. À l’opposé, Garfield (1979) stipule que la collaboration entre chercheurs augmente la productivité, ce qui peut influencer le nombre total de citations. Comment alors évaluer les publications signées de plusieurs plumes ? Pour Rousseau, Egghe et Guns (2018), les méthodes de comptage peuvent, sur la base de deux critères, être réparties en quatre groupes. Le premier critère est basé sur la décision d’accorder, ou non, crédit à chacun des auteurs. Le second consiste à attribuer un nombre entier naturel à chaque crédit ou de le fractionner de manière à ce leur addition s’élève à un crédit total de 1. Il existe plusieurs modes de comptage fractionné précisent enfin Rousseau, Egghe et Guns (2018) : i. attribuer à chaque auteur 1/x crédits, x étant le nombre d’auteurs ou ii. attribuer des crédits en fonction d’une progression dite harmonique qui permet d’octroyer un crédit équivalent aux auteurs considérés comme ayant contribué de manière significative à la publication. L’OCDE (1997) précise qu’une méthode analogue est utilisée lorsqu’une publication est rédigée par des chercheurs basés dans différents pays : i. chaque pays

Pour de nouveaux instruments d’évaluation des publications scientifiques : état des lieux théorique et scénarios se voit attribuer un crédit complet (soit 1) ; ii. une fraction du crédit est octroyée à chaque auteur en vue d’atteindre le 100%.

« Chaque manière de compter possède […] sa propre logique, mais encore faut-il que le fractionnement soit totalement maîtrisé par les bibliométriciens et compris

par les utilisateurs. » (OCDE 1997, p. 23)

Le comptage entier serait la meilleure des solutions selon Van Raan et Tijsen (1990, cités dans OCDE 1997). Au moment d’analyser les données, si les modes de calculs diffèrent, des manipulations seront nécessaires, augmentant par-là même le risque d’erreurs.

La question de la prise en considération de la paternité des publications est centrale. Elle a des répercussions directes sur le nombre de citations comptabilisé par auteur. Rousseau, Egghe et Guns (2018) citent les deux exemples suivants : i. sur la base du comptage normalisé, un écrit, rédigé par quatre auteurs et cité dix fois, verra attribué 2,5 citations à chacun d’entre eux. Toutefois ii. si seul le premier auteur est crédité, il se verra attribuer les dix citations. Les répercussions s’observent aussi dans les citations de la publication en question. Selon les pratiques, ce ne sont généralement que le premier ou les deux premiers auteurs qui se voient cités, ce qui a des répercussions directes sur le nombre de citations des autres co-auteurs. Comme disait Price (1986), à l’ère de la « Big Science »36 et de la recherche collaborative, il devient plus difficile d’évaluer individuellement le chercheur (Price 1986, p. 36).