• Aucun résultat trouvé

Company Confidential

PHENOMENE DE RURBANISATION EN ALGERIE

I- 1-Qu'en est-il exactement des villes algériennes ?

Le constat qui peut se faire aujourd’hui est qu’on assiste à un glissement quasi généralisé de l’évolution de nos villes vers des formes de croissance anarchiques qui mettent en danger l’harmonie de leur fonctionnement économique et social, cette situation trouve son explication dans les attitudes occultes qui favorisent la constitution de rentes informelles au détriment de la création de richesses durables pour la collectivité.

Force est de constater que, malgré les efforts colossaux déployés par les pouvoirs publics, en terme de reformes institutionnelles, d’encadrement, d’élaboration et d’adaptation des instruments de gestion, les initiatives prises non malheureusement pas réussi à juguler le phénomène de fonctionnement et de reproduction des sphères informelles. Cette situation a pris une ampleur telle que la majorité de nos collectivités accusent, aujourd’hui, un déficit chronique dans leur gestion et n’assurent de ce fait, le minimum de fonctionnement de services publics, que grâce aux subventions allouées par l’Etat. L’utilisation irrationnelle et/ou le détournement du potentiel foncier, autrement dit des richesses communautaires par des sphères informelles, prend aujourd’hui la signification d’une dépendance de la collectivité, vis-à-vis des trésors publics et, par conséquent, de l’Etat.

Il est bien évident que dans cette situation, cela réduit considérablement les chances des collectivités locales à assurer leur auto développement sur ressources propres. Dans la mesure où déjà leur dette est évaluée à 18 milliards de dinars (79). Dans cette situation, il est à craindre que l’évasion fiscale et les difficultés qu’éprouvent les services publics dans le recouvrement des créances ne puissent conduire à une situation inextricable, dont les effets pervers seraient une plus large détérioration des conditions de vie et d’environnement et par conséquent, une menace durable sur l’effritement de la cohésion sociale.

Or, il faut faire remarquer que le dynamisme des villes de demain se mesurera à la qualification des managers au renouvellement de cette qualification, à la qualité du milieu de la recherche et, plus généralement, du milieu intellectuel, ainsi la qualité et les conditions de vie offertes par les villes deviennent des atouts importants d’attractivité des cadres, «ressources

79

Chekir, M. journal le "matin" N°3209, 8 Septembre 2002

stratégiques» des entreprises de demain. Les inégalités entre territoire et les déséquilibres entre groupes sociaux sont des difficultés à surmonter pour les grandes agglomérations urbaines.

L’harmonie du développement urbain et la prospérité ne peut en aucune manière se concevoir dans le contexte occulte qui phagocyte les sphères décisionnelles et détourne les richesses de la collectivité.

La clé d’un développement urbain réussi réside dans notre capacité à résoudre les problèmes ainsi posés. Seule la conjugaison du développement des quartiers et tout particulièrement les plus défavorisés, avec le développement économique peut permettre à l’ensemble de la ville et de ses habitants, d’aborder autrement l’avenir, qu’avec l’angoisse du chômage, de la marginalisation et de l’exclusion.

I.2 Caractéristiques de l’évolution de l’ensemble de nos agglomérations

L’anarchie qui caractérise l’ensemble de nos agglomérations trouve tout d’abord son origine dans l’absence d’une stratégie d’aménagement du territoire, préservatrice des équilibres entre ville et campagnes et par conséquent, d’une organisation cohérente et transparente aux plans économique et social, en conformité avec les principes de solidarité et de complémentarité entre les espaces ruraux et urbains. Il est bien évident qu’a défaut de tout cela, la dévitalisation et parfois la dérive des espaces ruraux ne pouvaient conduire qu ’ont des exodes massifs de populations vers les villes qui sont devenues au fil du temps, des réceptacles et centres revendicatifs d’une demande sociale, que l’on n’a pas su satisfaire ni contenir dans ses territoires d’origine.

Face à cette évolution démesurée des besoins générés par la croissance des villes, les pouvoirs publics se sont laissés déborder, n’ont pas été en mesure d’apporter les solutions appropriées. Ils ont perdu de ce fait, leur crédibilité et leur autorité morale, c’est parce que l’on n’a pas su imaginer les approches prospectives et su prévenir cette demande induite par l’effritement des solidarités et le délaissement du monde rural que les pouvoirs publics ont été mis dans l’incapacité de répondre au défis créer par l’évolution spontanée des villes. C’est ainsi qu’est né chez le citoyen un sentiment de délaissement et de frustration dont la conséquence a été, la remise en cause de l’autorité d’une administration, qu’il estime incapable d’accéder à sa demande.

S’établissent alors, des approches de groupes des attitudes individuelles et de nouveaux rapport de force, dont la conséquence a été la recherche d ’appropriation de rentes, par les

moyens occultes et illicites attachées au clanisme, au népotisme, pour aboutir à une économie de bazar.

Le laisser faire et par conséquent, le peu d’intérêt accorder à la chose publique, s’est tout particulièrement manifesté, durant les décennies 80 et 90, qui se caractérisent par l'affaiblissement de plus en plus marqué des institutions de l’Etat.

C’est durant cette période qu’on assiste à la prolifération de l’habitat illicite, aux atteintes multiples aux règles d’urbanisme, au potentiel agricole et à la détérioration des équipements collectifs qui furent détournées de leurs vocations premières, aux profit de constructions illicites destinées au commerce informel, qui forgent aujourd’hui la laideur des boulevards et espaces piétonniers de nos villes.

A cette perturbation de l’harmonie urbaine et du patrimoine de la collectivité, s’ajoute la frénésie de développement des lotissements qui donnent naissance à des constructions individuelles, sans âme ni références techniques et typologiques et forcément, au détriment du potentiel agricole, de la composante paysagère et de l’environnement. Cette consommation exagérée de l’espace au demeurant non justifiée est largement illustrée à travers des surconsommations au niveau de toutes les agglomérations urbaines, par rapport au ratio (densité/habitants) de 1987. C’est ainsi que ces surconsommations foncières sont évaluées aujourd’hui a plus de 1210 ha à Tébessa, à 737 ha à Tlemcen, 604 ha à Maghnia, à 575 ha à mascara, à 489 ha à Mostaganem, à497 ha à Batna, à 317à Annaba, à 203 ha à Saida, à 206 ha à Tiaret, à 823 ha à Biskra, à 271 ha à El-oued, à 264 ha à Bouira, à 415 ha à Ain Edefla. Cette course effrénée à l’appropriation du foncier artificiellement entretenue équivaut plus à une forme de détournement de richesse qu’à une volonté de satisfaction des besoins de la population (80).

Et pourtant les questions liées à la crise du logement et à l’emploi demeurent encore posées avec la même acuité en même temps qu’elles se conjuguent à la détérioration du cadre de vie et de l’environnement. Il faut également faire remarquer, que cette croissance démesurée, sans logique d’organisation spatiale, est génératrice de surcoûts de viabilisation et de fonctionnement que ni l’Etat, et encore moins la collectivité n’ont été en mesure de prendre en charge. Cela ne pouvait conduire qu’a la parution de formes de précarité, de disfonctionnement dans la gestion des espaces bâtis et dans tous les cas de figures, à des situations conflictuelles qui portent atteinte à la crédibilité de l’Etat, que le citoyen estime être incapable d’apporter des solutions à ses

80

Chekir, M. journal le "matin" N°3209, 8 Septembre 2002.

problèmes, alors qu’il est censé garantir la justice sociale et les chances d’épanouissement de tous les citoyens.