• Aucun résultat trouvé

B. INFLUENCE DE LA PRESSION DE DEPOT SUR LES PROPRIETES

III. PULVERISATION AVEC POLARISATION DU SUBSTRAT

Dans la partie précédente, nous avons associé la formation de l'oxyde ZnO (C) à l’appauvrissement en oxygène de la couche en croissance. Afin de confirmer cette hypothèse et d'étudier plus précisément cet oxyde de zinc, nous avons choisi d'accentuer la réaction de réduction en réalisant des dépôts par pulvérisation avec polarisation du substrat. Cette technique conduit à l’extraction d’ions positifs du plasma et donc à un bombardement ionique énergétique provoquant l’éjection des atomes dont les liaisons avec la surface de la couche sont relativement faibles comme c'est le cas pour l'oxygène.

a. Formation de l'oxyde de zinc ZnO (C)

Nous avons choisi de travailler dans des conditions où le bombardement des particules pulvérisées est le plus énergétique c'est-à-dire à basse pression de dépôt (0,5 Pa) et à faible distance cible–substrat (50 mm) . Des puissances de polarisation de 2,5; 5 et 10 W ont été appliquées au substrat, les couches minces obtenues ont été étudiées par diffraction des rayons X en incidence rasante (fig. 56).

Le diffractogramme de l’échantillon déposé avec une puissance de 2,5 W met en évidence la cristallisation de la phase spinelle avec un élargissement très prononcé des raies (222), (400) et (440) démontrant la formation en quantité importante de l'oxyde ZnO (C).

L'appauvrissement en oxygène de la couche favorise donc bien la précipitation de l'oxyde de zinc de structure cubique.

0 50 100 150 200 250 25 30 35 40 45 50 55 60 65 70 2θ (deg) Intensité (u.a) (311) (222) (220) (400) (422) (511) (440) (111) (200) (220) ZnFe2O4 ZnO (C) P=10W P=5W P=2,5W

Figure 56 : Diffractogrammes de rayons X des films élaborés à différentes puissances de polarisation appliquées au substrat.

Par ailleurs, la mise en oeuvre de puissances de polarisation du substrat plus élevées (5 et 10 W) mène à la disparition totale des raies caractéristiques de la phase spinelle au bénéfice du ZnO (C). Cette évolution est relativement intéressante et nous avons donc choisi d'étudier plus précisément les échantillons obtenus avec une puissance de polarisation de 5W.

b. Caractérisations des films déposés avec une puissance de polarisation de 5 W

L’observation au microscope à force atomique (AFM) des films, élaborés avec une puissance de polarisation de 5 W, met en évidence la présence de deux populations de grains, dont les tailles moyennes sont proches de 10 nm et 30 nm respectivement (fig. 57). D'après les diffractogrammes de rayons X, les grains de 30 nm correspondent au ZnO (C) alors que ceux de 10 nm sont composés d’une phase ferrite spinelle.

100 nm

Figure 57 : Observation au microscope à force atomique du film mince obtenu pour une puissance de polarisation appliquée au substrat de 5 W.

Figure 58 : Cycle d’hystérésis à 300 K du film déposé par pulvérisation avec polarisation du substrat (5 W) en champ parallèle.

Des mesures magnétiques à 300 K ont été réalisées sur ces couches minces. Nous observons un cycle d’hystérésis qui ne sature pas et dont le champ coercitif est de 40 Oe (fig. 58). Le signal magnétique est identique à champ parallèle et perpendiculaire au plan de la couche. L'aimantation à 16 kOe est dix fois plus faible que pour les échantillons déposés sans polarisation du substrat.

Le comportement ferrimagnétique démontre la présence au sein de ces couches minces d’une phase ferrite spinelle. En revanche, la non saturation du cycle d'hystérésis ne peut être associée à l'oxyde de zinc ZnO (C) qui est diamagnétique. En considérant la formation du ZnO (C) par appauvrissement en oxygène de la couche, nous pouvons aussi envisager la présence d'un composé paramagnétique soit:

9 Sous la forme d'un oxyde de fer Fe1-zO (wustite) dont les pics de diffraction sont très proches de ceux du ZnO (C). Certains auteurs, qui ont étudié des couches minces de ferrites mixtes comprenant du zinc, mentionnent un élargissement des raies (222), (400) et (440) de la phase spinelle84,86,125 qu'ils associent à la formation de la wustite Fe1-zO,

9 Sous la forme d'une solution solide (Zn,Fe)O (C)126 formée à partir du ZnO (C).

En effet, les solutions solides (Zn,Fe)O présentent une transition antiferro-paramagnétique comme la wustite (TN~200 K)127 et leur température de Néel décroît avec la teneur en zinc . Ainsi, à 300 K, les oxydes de type (Zn,Fe)O et Fe1-zO sont paramagnétiques et pourraient donc être responsables de la non saturation du cycle d'hystérésis.

c. Elaboration de l'oxyde de fer Fe1-zO

Nous avons voulu vérifier si la pulvérisation cathodique RF pouvait effectivement mener à l'obtention de la wustite (ou protoxyde de fer) Fe1-zO, qui a tendance à précipiter lors de traitements thermiques de la magnétite Fe3O4 sous pression réduite d'oxygène128 (fig. 59).

Figure 59: Diagramme de phase Fe-O . 0 20 40 60 80 100 120 140 160 25 30 35 40 45 50 55 60 65 70 75 2θ (deg) Intensité (u.a) P=0 W P=20 W (311) (222) (220) (400) (422) (511) (440) (111) (200) (220) Fe3O4 FeO

Figure 60 : Diffractogrammes de rayons X des films déposés avec une puissance de polarisation du substrat de 0 et 20 W à partir d’une cible de Fe3O4.

Nous avons alors réalisé des dépôts par pulvérisation avec polarisation du substrat à partir d'une cible de Fe3O4 utilisée en configuration magnétron et disponible sur un autre bâti de pulvérisation. Dans ces conditions, la puissance de polarisation du substrat a été fixée à 20 W. L’analyse par diffraction des rayons X en incidence rasante de telles couches montre effectivement la formation de l'oxyde Fe1-zO et la disparition de la phase spinelle Fe3O4 (fig. 60). Il est intéressant de noter la possibilité d'obtenir, par pulvérisation cathodique radiofréquence, des phases métastables telles que la wustite Fe1-zO.

Ces résultats permettent donc de confirmer que les couches minces de ferrites de zinc déposées avec polarisation du substrat sont susceptibles de présenter des composés de type Fe1-zO ou des solutions solides (Zn,Fe)O.

d. Recuits sous vide

Afin de valider une de ces deux hypothèses, nous avons réalisé des recuits sous vide des films de Fe1-zO provenant de la pulvérisation avec polarisation du substrat (20 W) de la cible Fe3O4 et des films déposés à partir de la cible Zn0,86Fe2,14O4±δ avec une puissance de polarisation de 5 W.

Le diffractogramme de rayons X, des couches minces de Fe1-zO traitées sous vide, met en évidence la cristallisation de la magnétite Fe3O4 et du fer métallique Fe-α (fig. 61). La formation de ces deux phases correspond à la dissociation du Fe1-zO, qui est un composé instable en température126,127 (fig. 59). Au contraire, le diffractogramme des couches minces, déposées à partir de la cible A Zn0,86Fe2,14O4±δ avec une puissance de polarisation de 5 W et traitées sous vide, met en évidence la présence d’une phase spinelle, de l'oxyde de zinc de structure hexagonale, ainsi que de l'oxyde de zinc de structure cubique. Nous rappelons que la formation de ZnO (H) lors des recuits sous vide peut être liée à des phénomènes de relaxation des contraintes et retour à l'équilibre de ZnO (C) ainsi qu'à la réduction des ferrites de zinc. Nous observons cette fois-ci la transformation partielle de ZnO (C) en ZnO (H). En revanche, nous ne constatons pas la formation de fer (fig. 62), et nous pouvons conclure que l'oxyde de fer Fe1-zO n'est pas présent au sein des films bruts de dépôt. La composante paramagnétique de la figure 58 est donc certainement liée à la formation de solutions solides (Zn,Fe)O (C).

0 50 100 150 200 250 25 30 35 40 45 50 55 60 65 70 2θ (deg) Intensité (u.a) (311) (222) (220) (400) (422) (511) (440) (111) (200) (220) Fe3O4 FeO Fe Brut Traité (110) (200)

Figure 61 : Diffractogrammes de rayons X du film brut et traité sous vide à 400°C, élaboré à partir de la cible de Fe3O4 avec une puissance de polarisation du substrat de 20 W.

0 50 100 150 200 250 300 350 25 30 35 40 45 50 55 60 65 70 2θ (deg) Intensité (u.a) (311) (222) (220) (400) (422) (511) (440) (111) (200) (220) ZnFe2O4 ZnO (C) ZnO (H) (100) (002) (101) (102) (110) Brut Traité

Figure 62 : Diffractogrammes de rayons X du film brut et traité sous vide à 400°C, élaboré à partir de la cible Zn0,86Fe2,14O4±δ avec une puissance de polarisation du substrat de 5 W.

Ces résultats permettent ainsi d'affirmer que les couches minces déposées avec une puissance de polarisation de 5 W présentent une phase spinelle très faiblement cristallisée et un oxyde de zinc de structure cubique comprenant du fer (Zn,Fe)O (C).

En étudiant le diagramme d'équilibre de la figure 63, nous constatons que la zincite provenant de la réduction des ferrites de zinc, contient du fer. Il apparaît donc normal que l'oxyde de zinc de structure cubique, obtenu par appauvrissement en oxygène des couches minces que nous avons élaborées, contienne également du fer. Nous pouvons alors écrire cet oxyde sous la forme (Zn1-xFex)O (C). Kim129 constate effectivement la formation d'un oxyde mixte (Zn,Fe)O de structure cubique lors d'un traitement thermique de réduction du ferrite de zinc à 1000°C sous faible pression d'oxygène.

Zincite (Zn,Fe)O Liquide Spinelle Hématite Spinelle + (Zn,Fe)O Zincite (Zn,Fe)O Liquide Spinelle Hématite Spinelle + (Zn,Fe)O

Figure 63: Diagramme de phase Zn-Fe-O sous air .

Au terme de cette partie, il apparaît donc que le bombardement ionique très énergétique des films en croissance conduit à la formation de l’oxyde (Zn1-xFex)O (C), par appauvrissement de la couche en oxygène. Ces conditions d'élaboration permettent aussi la formation d'une phase spinelle très mal cristallisée qui ne peut être détectée par diffraction des rayons X en l'absence de recuit.

IV. CONCLUSION

La pulvérisation de la cible A (Zn0,86Fe2,14O4±δ), à une distance cible–substrat de 50 mm et à des pressions de dépôt de 0,5 et 2,0 Pa, conduit à l'obtention de couches minces qui présentent un ferrite spinelle appauvri en zinc Zn0,86-zFe2,14+zO4±δ et un oxyde mixte de structure cubique (Zn1-xFex)O (C). La formation de cette deuxième phase peut être associée à une réduction du ferrite, liée au bombardement énergétique de la couche par différentes espèces présentes dans le plasma. Les températures de Curie qui sont très sensibles à la teneur en zinc des ferrites augmentent ainsi fortement.