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Chapitre 4 : techniques d’enquête

3- Public de l’échantillon choisi

Les individus du groupe constituant l’échantillon de l’enquête sont tous enseignants dans les écoles primaires publiques de l’île Sainte-Marie. Leur particularité est qu’ils sont des enseignants FRAM, c'est-à-dire qu’ils n’ont pas reçu de formation initiale, mais bénéficient d’un plan de formation continue mis en place par différents prestataires (voir plus bas). Ils ont été recrutés des suites d’un vaste programme de renforcement du personnel enseignant, institué en 2008 par le Ministère de l’Education Nationale et de la Recherche Scientifique (MENRS)44. Pour répondre à ce besoin pressant, le recrutement a été effectué directement dans les faritany (communautés villageoises), parmi les habitants ayant un niveau d’étude considéré comme avancé (cet élément étant bien sûr relatif, compte tenu du niveau d’études relativement bas à Madagascar45). Pour pallier au besoin crucial de formation didactique de ces enseignants en devenir, l’Institut National de Formation Pédagogique (INFP) a mis en place une formation intensive pour assurer leur certification46. L’Etat ne prenant toutefois pas en charge le financement de cette formation, elle est financée par les cotisations de la FRAM,

44 Suite à une étude statistique commandée par le Ministère de l’Education Nationale et de la Recherche

Scientifique (MENRS) on constate un net recul des effectifs enseignants sur la période 2000-2005 (voir UNESCO 2010 : 22). Déjà initié par le recrutement de nouveaux enseignants permanents, la remobilisation du personnel déjà en place et le recours à des enseignants non-permanents (notamment pour les matières à caractère professionnel), le renforcement du personnel enseignant constitue ainsi un des objectifs prioritaires du secteur éducatif.

45 Voir supra p.35 et le rapport de l’UNESCO pour 2010, disponible à l’adresse :

http://www.ibe.unesco.org /fileadmin/user_ upload/Publications/WDE/2010/pdf-versions/Madagascar.pdf)

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Dès 2008 un vaste programme de formation intensive – prévu sur une période de deux à quatre ans- a été mis en place pour assurer la certification de l’ensemble des enseignants FRAM (s’élevant à 30.600 pour cette année). En plus des enseignants déjà en poste, il était prévu le recrutement de 2000 nouveaux enseignants FRAM par an, intégrés dans le dispositif de formation continue deux ans après leur prise de service (MENRS, février 2000).

36 acronyme malgache pour APEL, l’Association des Parents d’Elèves. Elle s’inscrit dans un plan national d’amélioration des compétences générales des enseigants et concerne différents domaines (français mais aussi mathématiques, histoire, etc.). Pour la session relative aux compétences en français, c’est la Délégation Générale des Alliances Françaises d’Antananarivo qui a été choisie comme prestataire de service. Mise en place le 3 décembre 2011 et répartie selon différents modules, la formation s’est étendue sur 80 heures au total. Elle a pris fin le 5 mai dernier.

Répartis géographiquement dans l’ensemble des écoles de l’île, les enseignant se réunissaient ainsi chaque semaine à l’Alliance française pour les besoins de cette formation. Avantage pratique non négligeable pour l’enquêteur47, cette soudaine proximité géographique ne demandait qu’à être mise à profit. Alors que l’école privée de l’Alliance n’offrait qu’une vision embellie de la réalité scolaire saint-marienne, travailler avec ces enseignants permettait en effet d’avoir un aperçu plus représentatif du contexte local, dans le sens où, pour des raisons principalement économiques, la majorité des enfants de l’île sont scolarisés dans les écoles du système public. Le niveau de français des professeurs de l’Alliance leur permettant de s’exprimer avec une aisance relative, choisir des professeurs au sein même de l’Alliance aurait sans doute permis une certaine fluidité dans la communication. Cependant, il apparaissait beaucoup trop orienté d’interroger des professeurs travaillant au sein d’une institution qui diffuse la langue et la culture française sur leurs rapports avec cette même langue. Dans un souci de représentativité et d’objectivité, les enseignants FRAM des écoles publiques de Sainte-Marie constituaient le public idéal.

Bien qu’ils ne se connaissent que depuis quelques mois, le groupe est particulièrement soudé. On sent globalement les enseignants motivés et intéressés par cette formation, espace qui leur permet notamment d’échanger avec leurs pairs au sujet des difficultés rencontrées sur le terrain. Il est également à noter que les conditions matérielles et financières sont relativement précaires48, ce qui valorise d’autant plus leur assiduité. Au sein du groupe, les membres ont pour point commun d’appartenir à la génération 1960 - 1983, touchée pour la majorité par le retour de l’enseignement « tout » en français dans les années 70. L’ensemble des sujets possède un répertoire langagier bi-plurilingue, et a un niveau de formation homogène (ils sont tous détenteurs du BEPC ou d’un diplôme équivalent ; aux tests de l’Institut National de Formation Pédagogique, leur niveau global oscille entre A2 et B1). Comme le fait remarquer Thamin (2007), ce bagage scolaire sensiblement identique favorise une observation plus fiables des divergences et des convergences au niveau des relations à la langue française, dans le sens où les processus cognitifs d’acquisition et d’apprentissage des langues sont plus approchants qu’en mélangeant des profils de niveaux de formation plus disparates, alors plus difficiles à comparer.

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Ce regroupement permettait ainsi de voir réunis les enseignants en un même lieu, réduisant de ce fait considérablement la démarche d’abord et les déplacements de l’enquêteur.

48 Ne pouvant compter sur les transports en commun, beaucoup d’entre eux se rendent à l’Alliance à

bicyclette, parcourant parfois plusieurs kilomètres sur des pistes en très mauvais état. De plus, le temps de formation est pris sur leurs congés, qui, faut-il le rappeler, ne sont pas payés.

37 De la même manière que les enquêtes de Py (1995 : 25), « la particularité du projet réside dans la composition du public (…) dans la mesure où même un énoncé unique peut être hautement significatif s’il fait avancer notre connaissance des faits ». Nous pensons en effet que les discours subséquemment analysés peuvent être considérés comme représentatifs d’une partie de cette population particulière. Par rapport à celles d’un questionnaire, les informations données ont ainsi une valeur d’argument, puisque révélées lors d’un entretien.