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Chapitre I : Pseudomonas aeruginosa : contexte biologique et stratégies thérapeutiques

I. Pseudomonas aeruginosa

A. Généralités

a) Historique et découverte

Pseudomonas aeruginosa (PA) est une bactérie du genre Pseudomonas, également connue sous le nom de bacille pyocyanique ou bacillus pyocyaneus. Elle tire son nom

Pseudomonas du grec « pseudo » : ressemblance avec un « monas » : corps unicellulaire possédant un flagelle. Avec l’émergence de la microbiologie, le terme « monas » fut utilisé pour désigner un germe. Quant à aeruginosa, il vient du latin « vert de gris » pour désigner la coloration particulière de la bactérie, qui ressemble énormément à celle obtenue lors de la corrosion du cuivre. Cette couleur est issue de la sécrétion, par la bactérie de nombreux pigments, dont la pyocyanine (Figure 1, gauche) qui est une toxine possédant une coloration bleue-verte (Figure 1, droite).

Figure 1 : Structure de la pyocyanine (gauche) et culture de PA sur le milieu cétrimide agar (droite) Ce fût courant 1850 que Charles-Emmanuel Sédillot, médecin militaire et chirurgien français d’époque, observa pour la première fois ce microbe et fit le lien entre les infections des plaies chirurgicales et la formation d’un écoulement bleu-vert présent sur les pansements.1

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Il faudra attendre 1882, pour que la bactérie soit isolée et caractérisée par le pharmacien et

médecin militaire français Carle Gessard au cours de ces études doctorales en médecine.2

b) Caractéristiques

Une bactérie ubiquitaire et omniprésente

PA est une bactérie appartenant à la famille des Pseudomonadaceace, qui est capable

de se développer dans des milieux environnementaux très variés. Les travaux menés en 1973 par Van Hartingsveldt et Stouthamer, ont montré que PA avait la capacité de se développer dans des systèmes aussi bien aérobie qu’anaérobie selon la source d’azote

présente dans le milieu.3 Cette bactérie est retrouvée sur des organismes vivants tel que les

plantes, 4 les animaux 5 et l’Homme ;6 mais également sur des surfaces inertes comme les

sols ou les milieux humides.1

De part ces propriétés spectaculaires et son caractère saprophyte et parasitaire, PA fait l’objet d’une grande vigilance dans le milieu hospitalier, car elle est omniprésente sur les dispositifs médicaux allant du respirateur aux cathéters en passant par les systèmes de climatisation, de plomberie etc… et est véhiculé par l’intermédiaire des personnels médicaux, des visiteurs et autres.

Génome

Le bagage génétique de PA est composé d’un chromosome circulaire double brin et

d’un nombre variable de plasmide selon les souches.

Ce génome est l’un des génomes bactériens les plus grands avec 6,3 millions de paires de

bases (Mpb) codant pour 5570 gènes (soit 89 % du génome, Figure 2).7 Grâce aux outils

de génomique, 22 génomes bactériens ont pu être comparés à celui de PA et ont permis d’établir une phylogénie entre PA et Escherichia coli (E. Coli) mais également de mettre

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Figure 2 : Génome de PA 7 Les cercles multicolores représentent le chromosome double brin, les gènes sont représentés par des couleurs différentes selon leur fonction (la correspondance couleur-fonction peut

être retrouvée dans la base de donnée www.pseudomonas.com), les flèches rouges désignent les points de départ et le sens de la transcription, les flèches vertes désignent les régions inv ersées à la suite de recombinaison, les flèches bleues indiquent la positions de régions comportant des bactériophages, le

cercle ainsi que les barres jaunes représentent la teneur en guanine et cytidine.

Cette complexité est mise en évidence par la présence de nombreux fragments d’ADN

exogènes mettant ainsi en évidence la grande plasticité du génome de PA (Regions of Genome Plasticity RGPs).

Aujourd’hui, les fonctions de seulement 54,2 % des gènes de PA ont été identifiées. Plus

de 500 gènes codent pour des facteurs de régulation de l’expression des gènes et 372 pour

la synthèse d’enzymes impliquées dans la biosynthèse de lipopolysaccharides, la synthèse de facteurs de virulence tel que les exoenzymes, les systèmes protéiques permettant leur

excrétion, les protéines impliquées dans la motilité et l’adhésion.

Il a été décrit récemment dans la littérature que bien que le génome de PA soit conservé

entre les différentes souches, les phénotypes eux varient,9 ce qui une fois de plus montre

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Structure

PA est un bacille à Gram négatif à flagellation monotriche polaire (Figure 3, gauche).

La particularité de ces bactéries est caractérisée par la présence d’une double paroi bactérienne mis en évidence par le test de Gram (Figure 3, droite).

Figure 3 : Photographie de PA en microscopie électronique à balayage (gauche, photo prise du site du Centers for Disease Control and Prevention) et du test de Gram (droite, © Institut Pasteur/J.-F. Vieu)

L’enveloppe d’une bactérie Gram négative peut être divisée en trois parties (Figure 4) :

• La membrane externe composée d’une bi-couche phospholipidique dans laquelle sont enchâssés des protéines, des porines et des lipopolysaccharides

• Le périplasme dans le lequel se trouve une fine couche de peptidoglycane

• La membrane interne composée également d’une bi-couche lipidique permettant de délimiter le périplasme du cytoplasme

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La structure de cette enveloppe permet une protection renforcée de la bactérie face aux agents antibiotiques, cette protection est d’autant plus augmentée lors de la formation d’un biofilm (Faible diffusion des antibiotiques dans la matrice du biofilm et

ralentissement du métabolisme des bactéries qui y sont présentes, Figure 5).

Figure 5 : Photographie de microscopie électronique à balayage du biofilm de PA dans une sonde endotrachéale (gauche),10 et Photographie de biofilm de PA dans un cathéter sanguin (droite) en rouge

sont colorés les globules rouges, en jaune la bactérie et en bleu le biofilm ( © Institut Pasteur/A. Chauhan, JM Ghigo, C. Beloin. Photo réalisée par Laboratoire de Biologie Cellulaire - Microscopie

Electronique, Faculté de Médecine de Tours. Colorisation JM Panaud)

B. PA et les infections nosocomiales

a) Données actuelles

Bien que PA ne présente pas de dangers majeurs chez les personnes saines (capable de se défendre efficacement de ce pathogène), cette bactérie devient un pathogène sévère voire mortel lorsqu’elle se développe chez des personnes immunodéprimées comme les personnes atteintes du VIH ou encore de la mucoviscidose ou sous chimiothérapie. Elle est multirésistante aux traitements thérapeutiques actuels et est impliquée dans diverses infections nosocomiales.

Les infections nosocomiales sont l’ensemble des infections contractées à la suite d’une hospitalisation, elles se déclarent généralement 48 h après l’admission. Les personnes directement concernées sont donc les patients ayant subis des interventions chirurgicales, les grands brûlés, les patients du service obstétrique, de gériatrie, de réanimation et

psychiatrique. D’autre part, il faut savoir que dans la majorité des cas ces infections sont

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Dans un communiqué de presse datant de février 2017, l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) cite la liste des bactéries pour lesquelles il est urgent d’avoir de nouveaux antibiotiques. En tête de liste, PA est classé au seuil priorité 1 : critique au côté des pathogènes Acinetobacter baumannii et des bactéries de la famille des Enterobacteriaceae. C’est pourquoi elle représente une menace particulière pour les hôpitaux et les maisons de retraite imposant des dispositifs médicaux tels que les respirateurs ou les cathéters.

Afin de suivre aux mieux l’émergence de la multirésistance aux antibiotiques et de mieux

prévenir les risques qui y sont liés, en France depuis 1λλ6, l’Institut national de Veille

Sanitaire (InVS) lance des enquêtes nationales de prévalence des infections nosocomiales et des traitements anti-infectieux tous les cinq ans dans les établissements de santé. La dernière en date (Mai-Juin 2017) a impliqué 403 établissements soit 80 988 patients et a démontré qu’un patient sur vingt a présenté au moins une infection nosocomiale et qu’un patient sur sept a reçu un traitement antibiotique. Dans 50 % des cas les bactéries E. coli,

Staphylococcus aureus, Enterococcus faecalis et PA ont été responsables de ces infections,

PA représentant 6,3 % des cas. On estime que les infections nosocomiales sont le troisième

risque de décès liés aux soins.

À ces enjeux majeurs de santé publique, une question économique est également mise en avant. En effet, des travaux menés en collaboration par une équipe de chercheurs de l’université de Versailles Saint Quentin-en-Yveline, de l’Inserm et de l’Institut Pasteur ont estimé le surcoût annuel des infections à bactérie résistante en France à 290 millions

d’euros pour les années 2015 et 2016.11-12

b) Pro essus d’i fe tio de PA et les facteurs de virulence

Les infections causées par PA peuvent engendrer deux types d’infections : les

infections aigües et les infections chroniques, et selon la pathogénicité de la bactérie divers facteurs de virulence sont mis en jeu.

Afin de se développer et de garantir sa survie, PA a à sa disposition un arsenal de

facteurs pathogènes extracellulaires et membranaires (Figure 6). Dans le cas d’adhésion

sur l’épithélium, la bactérie est capable de moduler et de perturber le développement de

celle-ci et à terme provoquer la lésion tissulaire. L’expression de ces facteurs de virulence

est soumise à régulation par divers phosphorelais et dépendante de la densité cellulaire via le Quorum sensing.

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Facteurs de virulence Mécanisme de virulence impliqué Pathogénicité induite

Lipopolysaccharide (LPS) Activation de la réponse Immunitaire Réponse inflammatoire

Pili (type IV et Cup) Adhésion Adhésion à l’épithélium et formation

du biofilm

Flagelle Mobilité et modulation de la réponse inflammatoire

Dissémination dans les tissus et stimulation de la réponse

inflammatoire (TLR5)

Alginate Renforcement de l’adhésion aux cellules, formation du

ciment du biofilm, inhibition de la phagocytose

Protection contre le système immunitaire et résistance aux

antibiotiques

Exotoxine A Inhibition de la synthèse protéique Nécrose cellulaire

Exoenzyme (S, T, U et Y) Détérioration du cytosquelette et de la membrane cellulaire Nécrose cellulaire

Système de sécrétion (type III

(SSTT) et type IV (T6SS)) Dissémination des toxines dans la cellule hôte Nécrose cellulaire

Rhamnolipide (mono-RLs et di-RLs)

Inhibition de la phagocytose, pouvoir détergeant et

inducteur de la mobilité Invasion et dissémination

Elastase (LasA, LasB) Dégradation de l’élastine, de la fibrine et inactivation de

protéines de synthèse de la matrice extracellulaire Destruction des tissus

Protéase (Alcaline et IV) Protéolyse Destruction des tissus

Pyocyanine Formation de radicaux libres Apoptose des neutrophiles et nécrose

Lectine soluble (LecA et LecB) Adhérence, infection et cytotoxicité Formation du biofilm, Pathogénicité

respiratoire

Phospholipase C Effet cytolytique Lyse des cellules

Sidérophores (Pyoverdine,

Pyocheline) Captage du fer Survie et maintenance chez l’hôte

ADN extracellulaire Structuration du biofilm Maturation du biofilm

Figure 6 : Schéma de PA avec ses principaux facteurs de virulence 1 et tableau récapitulatifs de leurs rôles

28

Le mécanisme de développement d’un biofilm par PA peut être divisé en 5 phases (Figure

7) :

• Phase d’adhésion réversible de la bactérie sur la surface • Phase d’adhésion irréversible de la bactérie sur la surface • Phase de développement en micro-colonie

• Phase de formation et de maturation du biofilm • Phase de dispersion de l’agent pathogène

Figure 7 : Mécanisme d’infection de PA 13

On parle de bactéries planctoniques lorsque les microorganimes sont en suspension dans le milieu (phase I et phase V au sommet du biofilm), et de bactéries sessiles lorsque celles-ci sont fixées sur une surface (phase II-V).

Tout au long de cette partie, nous décrirons les différentes phases du développement de PA lors de l’infection et les facteurs de virulence qui y sont impliqués.

Phase d’adh sio et otilit de la a t rie

Le flagelle

PA possède un seul flagelle polaire qui est responsable de la motilité de type « swimming » et « swarming » de la bactérie.14 Il est constitué de trois parties : un filament constitué de polymère de flagelline FliC agencé en fibre et coiffé par plusieurs monomères de FliD, le tous connecté au corps basal (LPMS ring) présent dans l’enveloppe de la bactérie via un crochet FlgE (Figure 8).

29

Figure 8 : Structure du flagelle 15

La force motrice du flagelle est souvent fournie à l’aide de pompes à protons dont l’énergie

est transmise à un moteur constitué de deux complexes protéiques différents (MotAB et MotCD), ces derniers jouant des rôles distincts dans la motilité de PA.

L’utilisation d’une seule des deux protéines permet à la bactérie de nager dans les liquides

(motilité de type swimming) alors que l’activation de ces deux systèmes est nécessaire dans

le cas où elle doit se déplacer sur des surfaces plus visqueuses (motilité de type

swarming).14

La motilité de type « swimming » permet à la bactérie planctonique de nager dans les fluides comme l’eau et les liquides biologiques, permettant ainsi la dissémination du pathogène.

Quant au mouvement de type « swarming », il est caractérisé par un mouvement rapide et

coordonnée d’un groupe de bactéries dans un milieu plus visqueux et sur les surfaces.16 Ce

mode de déplacement est rencontré durant les phases de colonisation rapide de la bactérie et au cours de la maturation du biofilm.17 Cette motilité est souvent associée à la production et la sécrétion de biosurfactants tel que les rhamnolipides afin de limiter les phénomènes de friction et de faciliter l’avancée du pathogène.16, 18

D’autre part, le flagelle de PA est capable d’interagir avec les récepteurs de reconnaissance de forme (interactions FliC-TLR5) qui active la réponse immunitaire et induit de sévères

inflammations tissulaires.19Afin d’éviter l’activation de ce système et d’échapper à

celui-ci, PA a développé un phénotype capable de se démunir de ce composant, celui-ci est notamment retrouvé dans le cas des infections chroniques chez les patients atteints de la

mucoviscidose.20Par ailleurs, le flagelle contribue également à l’adhésion de la bactérie à

la mucine par l’intermédiaire de la protéine FliD et joue un rôle primaire dans la

30 Pili de type IV et rhamnolipide

Les pili de type IV sont des protéines appartenant à la famille des adhésines qui permettent à la bactérie de se fixer aux tissues cellulaires en reconnaissant les glycosphingolipides exposés à la surface des cellules épithéliales (asialo GM1 et asialo GM2). L’interaction avec asialo GM1 permet l’internalisation de la bactérie dans la cellule hôte et l’activation de la réponse inflammatoire.

D’autre part, les pili de type IV permettent à la bactérie de réaliser un type de mobilité particulière qui est le mouvement de type « twitching ». Celui-ci permet à la bactérie de

« marcher » en réalisant des mouvement séquentiels d’éloignement et de rapprochement

de ces adhésines.22 Cette motilité est notamment sollicitée durant les phases de formation

de microcolonies et de maturation du biofilm.17

Protéine Cup ou fimbriae

Les fimbriae également appelées protéines Cup (Chaperon/usher pathway) sont des adhésines impliquées dans la fixation de la bactérie sur les surfaces abiotiques et dans la

formation du biofilm.23 Chez PA, il existe trois systèmes Cup : CupA, CupB, et CupC et

leur emploi permet une structuration des bactéries en fibres au cours de la colonisation. Des études récentes ont permis de mettre en avant une relation entre l’expression des protéines Cup et l’expression d’enzymes impliquées dans la synthèse de la paerucumarin. Cette coumarine active l’expression des gènes cup et favorise le développement du biofilm.24

Lipopolysaccharide (LPS)

Le lipopolysaccharide est le constituant le plus abondant de la membrane externe de

PA, il est composé de trois domaines : le lipide A (domaine hydrophobe) et de deux parties

oligosaccharidiques (domaine hydrophile μ le core et l’antigène O).

Le lipide A, également nommé endotoxine, est un glycophospholipide directement ancré dans la membrane. Lorsque la bactérie est en contact des cellules, le lipide A est capable

31

À ce lipide, un cœur oligosaccharidique, hautement phosphorylé, y est lié par

l’intermédiaire de l’acide 3-deoxy-D-manno-oct-2-ulosonique (Kdo), puis s’ajoute une

deuxième région polysaccharidique aussi nommée antigène O.26

Chez PA, il existe deux formes de LPS : LPS A et LPS B. Le phénotype de la bactérie est caractérisé par la présence ou par l’absence de l’antigène O (phénotype lisse et rugueux respectivement). Le phénotype lisse est généralement retrouvé dans le cas des infections aigües alors que le phénotype rugueux est plus souvent rencontré au cours des infections chroniques. De plus, la bactérie est capable de changer d’un phénotype à l’autre pour pouvoir passer du profil bactérie planctonique au profil bactérie sessile afin de mieux s’adapter à son environnement.

L’antigène O est une séquence saccharidique constituée d’unités osidiques (supérieurs à 8 sucres) répétées. Le phénotype de la bactérie est gouverné par l’expression de cet antigène qui existe sous deux formes différentes. L’antigène O peut être composé soit de la chaîne

A (nommé antigène polysaccharidique commun (CPA)) qui est un homopolymère de D

-rhamnose (agencé en unité trisaccharidique) ; soit de la chaîne B correspondant à un hétéropolymère osidique composé d’unités de trois à cinq sucres différents, la nature du

sucre varie et dépend des gènes exprimés par la bactérie.27

À ce jour, 20 sérotypes ont été identifiés pour PA,28 et l’expression de l’une ou l’autre des

formes a un impact direct sur les propriétés infectieuses de la bactérie.29-30

Lors des étapes de maturation du biofilm, les LPS libres issus de la lyse bactérienne contribuent à la protection des bactéries face aux agents antibiotiques et à la virulence des

autres bactéries présentes dans le milieu.31-32

D’autre part, il a récemment été montré que les LPS pouvaient interagir avec d’autres protéines constituantes de la membrane externe pour renforcer l’imperméabilité de la membrane bactérienne et ainsi augmenter la résistance de ce pathogène face au traitement thérapeutique souscrit.33

Mise en place du quorum sensing et colonisatio de l’hôte

Le quorum-sensing

Le quorum-sensing (QS) correspond au principal mode de communication bactérien « cellule-cellule », il est gouverné par la synthèse et la diffusion de molécules

32

autoinductrices. C’est un mécanisme extrêmement contrôlé puisque plus de 300 gènes sont sous son contrôle.34

Chez PA, 3 principaux systèmes du QS sont décrits dans la littérature : le système LasR/LasI (ou LasIR) et le système RhlR/RhlI (ou RhlIR) qui sont dépendants de la

formation de N-acyl-homosérine lactone (AHL) 35-36 et le signal Pseudomonas quinolone

dépendant de la formation d’alkyl-quinolines (PQS et HHQ).37

Dans le cas des système QS LasR/LasI et RhlR/RhlI, les molécules produites sont des N-acyl-homosérine lactones propre à chaque système (3-oxo-C12-HSL et C4-HSL respectivement) synthétisées par des AHL-synthases distinctes (LasI et Rh1I respectivement). Dans l’environnement, la bactérie détecte la concentration de AHL environnantes ce qui lui donne une information sur la densité cellulaire afin de mieux s’adapter à son milieu. Une fois une concentration seuil dépassée, les AHL se lient à des régulateurs transcriptionnels (LasR et RhlR) et induisent la transcription des gènes

impliqués dans la virulence.38 Afin de consolider ce réseau, ces systèmes sont étroitement

liés avec le système dit « signal Pseudomonas quinolone » (PQS) responsable de la synthèse de quinolones spécifiques (2-heptyl-3-hydroxy-4(1H)-quinolone (PQS) et ses dérivés HHQ et HAQ) qui agissent comme un signal supplémentaire pour favoriser

l’expression de ces systèmes QS AHL dépendant.39 Entre autres, l’activation de la

régulation de la production d’autres facteurs de virulence tel que l’élastase, les rhamnolipides, les lectines LecA, ou encore la pyocyanine, le PQS est également impliqué

dans la régulation des protéines liées au maintien de l’homéostasie du fer.40

En 2013, J. Lee et ces collaborateurs ont découvert un quatrième système QS contrôlé par le QS Las dépendant qu’ils ont nommé Integrated Quorum sensing (IQS). Ce système est très actif en cas de manque de phosphate et est très fortement lié à la pathogénicité de la bactérie. La molécule clé de ce système est le 2-(2-hydroxyphényle)-thiazole-4-carbaldéhyde, une fois synthétisée son action se traduit par une augmentation drastique de

la mortalité des hôtes. Aujourd’hui des études supplémentaires sont encore nécessaires afin

de mieux comprendre ce nouveau réseau de communication.41-42

En plus des molécules diffusives propres à chaque système QS, s’ajoute également la

minutieuse régulation des gènes d’intérêt via de petits ARN nommés sARN.43-45 Ces sARN

sont généralement des oligonucléotides compris entre 50 à 300 nucléotides qui agissent comme activateurs ou répresseurs post-transcriptionnel de certains gènes. Deux

33

mécanismes sont employés au niveau post-transcriptionnel par les sARN : par appariement de 6 à 12 nucléotides avec l’ARM messager (ARNm, mécanisme antisense) ou en se liant

aux protéines de liaison à l’ARN bloquant ainsi le site de reconnaissance de l’ARNm.46-47