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fonctionnalisé par un fluorophore sur cette position ont pu démontrer que la

Chapitre I : Pseudomonas aeruginosa : contexte biologique et stratégies thérapeutiques

dérivé 52 fonctionnalisé par un fluorophore sur cette position ont pu démontrer que la

modification de l’amine n’altérait pas la reconnaissance du sidérophore par son

transporteur.235 Ainsi, la synthèse de plusieurs conjugués fluoroquinolone-PCH a pu être

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53b ciprofloxacine et norfloxacine possédant un lien hydrolysable ont présenté une activité

antibactérienne, toute fois leur concentration d’inhibition reste supérieur à celle de l’antibiotique libre.

Figure 37 : Structure des conjugués antibiotique-PCH apparu dans la littérature

D’autres part, des travaux plus récents réalisés par cette même équipe, ont abouti à la synthèse de trois conjugués oxazolidinone-PCH 54, présentant des espaceurs différents,

ciblant l’inhibition de la synthèse protéique.224 Malheureusement, ces derniers ont montré

aucune activité. Les auteurs de ces travaux expliquent cette absence d’activité par la faible

solubilité de leurs composés et l’instabilité de la liaison amide dans le milieu bactérien

empêchant ainsi la bonne délivrance de l’agent thérapeutique.224

En conclusion, plusieurs points essentiels ont pu être relevés pour concevoir des molécules « Cheval de Troie » : la connaissance de la localisation des cibles biologiques

détermine le choix du sidérophore à utiliser afin de mieux vectoriser l’agent antibiotique

dans la bactérie ; la connaissance du devenir du sidérophore une fois le conjugué internalisé permet d’envisager la synthèse de conjugués possédant des liens potentiellement clivables dans le but de libérer l’agent thérapeutique et la compréhension du mode d’interaction des

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différentes composantes du conjugués avec leurs cibles afin de prévoir leur efficacité de reconnaissance.

c) Les conjugués antibiotique-(pseudo)sidérophores

Conjugués antibiotique-(pseudo)sidérophores décrit dans la littérature

En parallèle de la synthèse des composés « Cheval de Troie » comportant des sidérophores endogènes de PA, d’autres équipes de recherche se sont penchées sur la synthèse de conjugués alliant des xénosidérophores de la bactérie ou des composés synthétiques pseudo-sidérophores dont leur structure est apparentée aux molécules naturelles.

Facile d’accès par voie synthétique c’est l’archétype entérobactine qui a été très souvent sollicité pour l’élaboration de ces conjugués (Figure 38).236 À ce titre, on peut

relever les excellents résultats de microbiologie obtenus pour les composés 55 et 56.221 En

effet, ces deux conjugués tri-catécholate-aminopenicilline ont montré une activité antibactérienne sur une collection de souche de PA avec des valeurs de concentrations

minimales pour obtenir λ0 % d’inhibition (MIC90) comprises entre 0,05 et 0,39 µM

(meilleure que les aminopenicillines seuls, MIC90 > 200 µM). De plus, dans ces mêmes

travaux, les auteurs ont montré que l’activité de leurs conjugués pouvait être augmentée

lorsque le taux de fer dans le milieu était diminué.221

S’inspirant de ce même squelette tri-catécholate de nombreux groupes de recherche se sont lancer dans la conjugaison d’autres familles d’antibiotiques. Dans les études menées par Fardeau et al.237, la ciprofloxacine a été choisie comme agent antibiotique pour être conjugué au bloc tri-catéchol. Les composés 57, 58 et 59 ont été préparés et testés sur deux souches de PA (une résistante et une susceptible aux antibiotiques). Afin de facilité la libération de la ciprofloxamine, un linker comportant une fonction ester a été utilisé pour

construire 57.237 Les résultats de cette étude, ont montré que les composés 57a, 57c avaient

une activité seulement sur la souche susceptible aux antibiotiques avec des valeurs MIC respectives de 8 µg/mL et 64 µg/mL dans le milieu appauvri en fer. Lorsque 1 µM de chlorure de fer (FeCl3) est ajoutée dans ce même milieu les valeurs MIC diminuent de moitié. Seul le conjugué mono catéchol 59 a montré une activité inhibitrice chez les deux

souches de PA. Cependant cette activité n’était visible que dans les milieux appauvris en

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fer 32 µg/mL chez la souche sensible aux antibiotiques et 64 µg/mL chez la souche résistante) ont été largement supérieures à celles employées pour la ciprofloxacine seul (dans le milieu appauvri en fer 0,25 µg/mL chez la souche sensible aux antibiotiques et 16 µg/mL chez la souche résistante). Résultat le plus étonnant, bien que nous ayons constaté qu’un lien hydrolysable était nécessaire lorsque la cible biologique était cytoplasmique, l’utilisation du lien ester n’a pas augmenté l’activité du composé 57. Les auteurs expliquent l’absence d’activité par l’hydrolyse précoce du lien dans le milieu extracellulaire engendrant la perte de l’antibiotique dans ce milieu.

Face à cette problématique, quelques travaux de recherche ont porté l’attention sur

l’élaboration de « linkers intelligents ». On peut citer notamment les travaux du groupe de Nolan qui ont développé des linkers (acyloxy)alkyle ester (60).222 Dans leurs études de 2015, l’équipe a évalué la sensibilité enzymatique de ce lien en modulant l’apport stérique

du groupement alkyle R’.222 Les résultats ont montré que plus le groupement alkyle était

important plus la cinétique de libération de l’antibiotique était lente. Face à ces résultats,

il semblerait que le groupement alkyle joue un rôle protecteur en diminuant l’électrophilie

du carbonyle de l’ester limitant sa réactivité face aux estérases, ainsi grâce à ce linker il serait possible de moduler la cinétique de libération des antibiotiques.

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Plus récemment, Miller et ses co-équipiers ont mis au point une stratégie de libération de l’antibiotique des plus atypique mettant en jeu un antibiotique comme linker suicide pour tromper les enzymes de la bactérie et ainsi libérer le véritable agent thérapeutique (Figure

39).238 Grâce à cette méthode, le conjugué 61 développé à partir de cette stratégie a donné

d’excellent résultat d’activité face aux souches de PA (0,2 - 0,4 µM) et E.Coli ( < 0,025 µM).

Figure 39 : Mécanisme de libération de l’oxazolidinone proposé par Liu et al.238

Jusqu’à présent nous avons présenté essentiellement des conjugués comportant trois motifs

catéchols, or il semblerait que PA soit également capable d’utiliser des

pseudo-sidérophores comportant seulement deux ou un motif catéchol. Afin d’illustrer ce propos, nous avons l’exemple des composés présentés ci-dessous qui possède un squelette di-catéchol ou encore les composés imaginés par Heinisch et al construit à partir

d’échafaudage (pseudo)peptidique (Figure 40).239-240 Les études de relation

structure-activité ont permis de construire les deux meilleurs conjugués di-catéchols 62, 63, et mixtes

64, 65 de la série (deux motifs catéchols et un motif hydroxamate). Les études de microbiologie ont démontré que l’ensemble de ces conjugués inhibait un large spectre de bactérie dont PA. Chez PA, les valeurs de MIC obtenues pour ces composés ont été comprises entre 0,005 et 0,2 mg/L pour les conjugués di-catéchol 62 (< 0.005 - 0.5 mg/L),

63 (0.01 - 0.16 mg/L) et < 0,05 et 0,4 mg/L pour les conjugués mixtes 64 (0.01 - 0.2 mg/L),

65 (< 0.05 - 0.4 mg/L). De plus des études réalisées chez le modèle murin ont permis de

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Figure 40 : Structure des conjugués Ampicilline di catéchol et conjugués mixtes Ampicilline (di-catéchol-mono-hydroxamate) de Heinisch et al 239-240

Conjugués antibiotique-(pseudo)sidérophores développés par les Industries Pharmaceutiques

Parmi les nombreux conjugués qui existent aujourd’hui, nous pouvons citer les

conjugués β-lactames pseudo-sidérophore développés par les grands groupes

pharmaceutiques qui ont très souvent présenté un seul motif chélateur : BAL 30072 (Basilea Pharmaceutica),241 MC-1 (Pfizer)242 et Cefiderocol (Shionogi & Co)243 (Figure 41).

Figure 41 : Structure des conjugués antibiotique pseudo-sidérophores développé par les industries Pharmaceutiques

BAL 30072 est un conjugué β-lactame sidérophore développé par la compagnie Basilea

Pharmaceutica International Ltd. C’est un antibiotique constitué d’un monocycle β-lactame lié à un noyau sulfactame. Le groupement pyridone est un isostère du motif catéchol et est

reconnu comme sidérophore par les récepteurs PirA et PiuA.244 Ce composé présente un

très large spectre antibactérien qui inclue même certaines souches multirésistantes dont

PA. Face à cette bactérie, BAL30072 présente le MIC90 (8 µg/mL) le plus bas comparé à

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le méropénème (> 32 µg/mL). D’autre part, il a présenté une grande stabilité face aux

β-lactamases.245

MC-1 est un conjugué monocarbame-sidérophore synthétisé par le groupe pharmaceutique Pfizer Global Research and Development. Cette molécule est un homologue structural de BAL30072. Face à PA cette molécule possède un MIC90 de 0,5 µg/mL.242 Bien que ce

composé soit actuellement en phase clinique, le groupe continue d’élaborer des

homologues de celui-ci à la recherche d’une activité encore plus importante.244

Cefiderocol (anciennement nommée S-649266) est une molécule antibiotique récemment élaborée par le groupe japonais Shionogi & Co. Elle est constituée d’un noyau céphalosporine conjugué à un motif catéchol jouant le rôle de sidérophore. Elle possède un

large spectre d’action comprenant les souches virulentes de PA (MIC90 = 1 µg/mL comparé

au méropénème >16 µg/mL).243Aujourd’hui encore cette molécule fait l’objet d’évaluation

de son activité sur diverses souches cliniques in vitro 246 et fait l’objet d’études en phase

clinique.247

Face à l’espoir émanant de ces conjugués qui ont réussi à se retrouver en phases cliniques,

d’autres Big Pharma se sont mises à designer des conjugués apparentés aux leads actuels (Figure 42). À ce titre, on peut évoquer les résultats in vitro encourageants observés pour

la molécule développée par LegoChem Biosciences (LCB10-0200).248 De son côté,

AstraZeneca a élaboré des molécules apparentées à MC-1 de Pfizer (SMC-3176).249

Figure 42 : Structure des conjugués antibiotique-sidérophores développés par les Big Pharma LegoChem Biosciences et AstraZeneca

L’engouement apporté par les grandes entreprises pharmaceutiques sur ces molécules montre que le concept est assez mature pour être envisagé comme complément ou alternative aux antibiotiques traditionnels. Néanmoins, il est à rappeler que la bactérie est un organisme vivant qui a été capable durant des millions d’année de s’adapter à son milieu quel que soit le stress auquel elle a été exposée. La preuve en est, les études récentes réalisées sur les leads des Big Pharma ont déjà révélé l’apparition de résistances.250 Il est

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donc important de ne pas s’endormir sur ses lauriers et de minutieusement évaluer et étudier la nature de ces résistances afin de mieux anticiper l’inactivation de cette nouvelle classe d’antibiotique.

En conclusion de cette partie, l’élaboration de conjugués antibiotique-sidérophores peut être réalisée à partir de sidérophores naturels (endogène, exogène) ou synthétiques. La conception de ces molécules passe par l’étude du choix du sidérophore, de la cible thérapeutique et de la nature du lien qui uni ces deux entités. Dans l’ensemble, les études de microbiologies obtenues sur les conjugués antibiotique-sidérophores ont donné des résultats mitigés. Une réflexion plus poussée doit être réalisée sur la relation structure-activité entre le fragment sidérophore et son transporteur, mais également sur la connaissance exacte du mécanisme d’action des antibiotiques avec leur cible biologique. Au-delà de ces constatations, au travers de ce chapitre nous avons pu montrer que le concept de « Cheval de Troie » avec des conjugués antibiotique-(pseudo)sidérophores était possible. En effet, trois de ces molécules antibiotique-sidérophores sont actuellement en phase clinique et représentent un espoir pour contre balancer la tendance actuelle de résistance.

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Chapitre II : Synthèse des