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3. INNOVATION, RÉSEAUX SOCIAUX ET MOUVEMENTS SOCIAUX, CLUSTERS, DYNAMIQUE DES PROXIMITÉS ET

3.3. C LUSTERS , DYNAMIQUE DE PROXIMITÉ ET GOUVERNANCE COLLABORATIVE

3.3.2. Dynamique de proximité

3.3.2.2. Proximité organisée

D’après Torre (2008, 2009, 2010), les acteurs économiques et autres partenaires disposent de différentes options qui leur permettent d’être proches en dehors de l’espace géographique local. Il qualifie cette possibilité-là de proximité organisée ou recherchée, qui est une autre facette de la proximité géographique temporaire (PGT). La proximité organisée ou recherchée implique une relation forte à l’espace, mais de nature différente de celle décrite par les approches traditionnelles de la temporalité permanente. En effet, il est apparu que la proximité géographique entre les entreprises n’était pas le seul moyen de faciliter les échanges de connaissances (Faustino et coll., 2016). Les mécanismes misent alors sur la mobilité des individus. Ces échanges peuvent également avoir lieu entre partenaires distants dans le cadre d’une proximité organisée, notamment grâce au développement des TIC, certifient les auteurs. La proximité organisée joue un rôle extrêmement important dans l’organisation des activités économiques, et plus précisément dans les activités d’innovation et de diffusion du savoir. Elle est caractérisée par la mobilité et le développement de l’ubiquité des individus (Torre, 2008, 2009, 2010). À ce propos, l’auteur a fondé ses travaux sur plusieurs propositions. Quelques-unes ont été retenues pour enrichir ce paragraphe sur la proximité organisée (Torre, 2010 : 435) :

 Il est possible d’entretenir des relations de proximité organisée à distance (ubiquité).  Les rencontres ponctuelles entre les personnes distantes sont fondées sur la combinaison

de PGT et de proximité organisée.

 Les proximités géographique et organisée s’inscrivent dans des dynamiques longues et courtes, qui constituent un cadre au sein duquel se développent ces relations, la proximité géographique permanente se situant dans le temps long et la PGT dans le temps court. Selon Torre (2008), la proximité organisée est essentiellement relationnelle. C’est la capacité d’une entité à s’organiser pour faire interagir ses membres de la meilleure manière qu’il soit. Elle appelle à deux logiques fondamentales, soit la logique d’appartenance et la logique de similitude. Torre (2008) définit la logique d’appartenance dans la proximité organisée comme le fait que les

interactions qui existent entre les membres d’une organisation soient inscrites dans la culture (ou les gènes) organisationnelle, ou encore dans les routines comportementales implicites ou explicites de cette dernière. Par exemple, les interactions des employés dans une organisation sont facilitées par les règles, les normes et les croyances de celle-ci qui ont trait à la culture de ladite entité. Quant à la logique de similitude, elle fait référence au partage d’un noyau commun de croyances, entre autres, d’un même système de représentation et d’un certain nombre de valeurs à travers lesquelles les membres d’une organisation s’identifient collectivement. Torre (2008) illustre son propos par l’exemple des chercheurs qui collaborent parce qu’ils appartiennent au même domaine et partagent le même langage, ainsi que le même système d’interprétation des textes et des résultats. Pour cet auteur, ce sont ces deux logiques qui favorisent les échanges longue distance et garantissent l’efficacité de la diffusion des informations et des connaissances transférées dans le cadre d’une innovation. Il recommande, pour cela, différentes postures d’utilisation de la dynamique de proximité au cours des projets de groupes, ces projets pouvant être en lien ou non avec l’innovation.

Les phénomènes de mobilité et d’ubiquité qui sont le fait des proximités géographiques temporaires et organisées rythment les relations économiques et sociales contemporaines (Torre, 2009). Ils permettent de réaliser la dynamique des rapports de proximité telle que représentée avec les figures 12 et 13. Au vu de cela, Torre (2009, 2010) suggère trois postures dans la mise en œuvre d’un projet de groupe, correspondant à un découpage de phases. Sur ces figures, les phases 1 et 3 illustrent la mobilité des membres et la phase 2, les échanges à distance par l’utilisation des TIC établissant la relation d’ubiquité.

Figure 12 : Processus de collaboration entre entreprises et phases d’interactions entre

Figure 13 : Mobilités et ubiquité des acteurs durant le processus de collaboration (Torre, 2009 :

73). PGT pour proximité géographique temporaire et PO pour proximité organisée.

 Au début du processus, c’est-à-dire au démarrage de la collaboration, l’auteur prescrit des relations de PGT. Étant donné la forte incertitude que présente cette phase, l’étape initiale nécessite la co-présence des acteurs, de nouveaux partenaires qui peuvent appartenir ou non à la même organisation (Torre, 2009,2010; Loilier, 2010). Le contact face à face est important à ce premier stade du développement pour pouvoir répondre aux interrogations sur la personnalité et les méthodes de travail des différents acteurs participants au projet, ainsi qu’à la définition en commun des règles et des caractéristiques dudit projet. C’est ici que se réalisent les accords et les ajustements nécessaires relatifs au projet. C’est aussi la base de l’établissement de la confiance qui servira de catalyseur pour la suite de la collaboration (Torre, 2008).

 À la deuxième phase, le travail à distance peut commencer, dans le cadre de la proximité organisée. Les tâches ayant été réparties au cours de la première phase, il n’est plus besoin du contact face à face pour poursuivre le développement du projet qui est facilité à distance par les TIC; d’où le phénomène de l’ubiquité. L’ubiquité est le fait d’être présent à de différents lieux géographiques à la fois; c’est la caractéristique principale du travail à distance. Les échanges d’informations et de connaissances vont régulièrement se faire entre participants, ainsi que la résolution des problèmes en lien avec les opérations qui surviennent au quotidien. Tout en stimulant la coopération, les interactions à distance vont contribuer à faire progresser le processus.

 La troisième phase est le lieu des rencontres ponctuelles. Elle comporte des réunions programmées à l’avance ou non. Les réunions programmées figurent au calendrier de l’entente contractuelle établie au démarrage du projet et peuvent être formelles ou informelles. Ce sont des rencontres semestrielles ou trimestrielles, dépendamment de l’entente, pour s’assurer de la bonne marche du processus, valider les acquis, réviser l’agencement et planifier les nouvelles étapes. Elles favorisent la réduction des risques perçus par les parties prenantes, le renouvellement des bases de la confiance et des rencontres hors du cadre strictement professionnel. Les réunions non programmées sont les rencontres ad hoc, non prévues à l’agenda du projet, qui permettent de résoudre les problèmes et les conflits pouvant survenir durant le déroulement de celui-ci. Ici, la remobilisation des liens, qui s’avère très difficile à distance, nécessite des rencontres face à face avec la possibilité des communications verbales et non verbales. Caractérisées de PGT, ces rencontres sont également des opportunités pour les membres de raccorder leurs dissonances cognitives, de redéfinir ou de renégocier certains termes de l’entente.

Torre (2008) soutient de concert avec plusieurs auteurs qu’un district ou un cluster est à la fois fait de relations de proximité géographique et d’interactions distantes. Ainsi, selon l’auteur, la combinaison des deux proximités (géographique et organisée) est un facteur essentiel du succès des clusters, avec des moments de proximité temporaire indispensables suivant les étapes du processus. Cependant, jointe à la proximité organisée, la fonction de la proximité géographique diminue, voir même disparaît avec le temps, fait valoir l’auteur. Toutefois dans le cadre des activités économiques strictes, la distance peut affaiblir la dépendance mutuelle à l’égard des aspects généralement négociés par le biais de marchés et de contrats, car elle facilite simultanément l’accès aux mêmes informations aux fournisseurs et aux clients (Cave et Doyle, 2014). Néanmoins, cet élément de réseautage social spécifique qu’est le jeu de proximité dynamique aide à renforcer les interactions pour la collaboration aux niveaux horizontal et vertical. Seulement, comment s’organise la collaboration au sein des réseaux, des projets de groupes et des clusters ?

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