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3. INNOVATION, RÉSEAUX SOCIAUX ET MOUVEMENTS SOCIAUX, CLUSTERS, DYNAMIQUE DES PROXIMITÉS ET

3.3. C LUSTERS , DYNAMIQUE DE PROXIMITÉ ET GOUVERNANCE COLLABORATIVE

3.3.2. Dynamique de proximité

3.3.2.1. Proximité géographique

Le concept de proximité géographique fait référence au positionnement spatial des agents et des ressources. Selon les propos d’innombrables auteurs, ce positionnement joue un rôle primordial, sur plusieurs points, dans le regroupement des entreprises à l’instar des clusters. Pour Loilier (2010) et Faustino et coll. (2016), la proximité géographique peut contribuer à l’adaptation locale, en apportant un sens de la communauté et en encourageant le partage des idées. Par elle, les entreprises acquièrent la capacité d’apprendre de leur partenaire, grâce à la circulation des connaissances entre les individus et les entreprises d’un même cluster. Dans la plupart des articles consultés, le terme proximité géographique est utilisé pour la colocalisation ou pour identifier la proximité géographique permanente, qui se distingue de la proximité géographique temporaire (PGT). La proximité temporaire appelle aux rencontres ponctuelles, à durées variables et limitées

dans le temps, pour des contacts face à face entre différentes localisations. Elle peut aussi être assimilée à la proximité organisée que l’on verra plus en détail un peu plus loin.

Bien que la proximité géographique ne renforce pas à elle seule l’avantage concurrentiel d’une entreprise, elle définit en grande partie les clusters (Graça et Camarinha Mattos 2017, Faustino et coll., 2016). Cela s’explique par la proximité des ressources et les conditions géographiques locales, ainsi que par la possibilité d’un meilleur accès à des ressources complémentaires qui pourraient encourager les entreprises à établir des relations basées sur la collaboration. Certes, ladite proximité n’entraîne pas à elle seule la collaboration, mais représente une fonctionnalité qui peut favoriser lesdites relations entre les entreprises du cluster (Niu, Miles et Lee 2008; Loilier, 2010). Dans ce sens, elle leur permet de créer une variété de relations qui aident chacune à établir d’autres relations. De la sorte, une implication plus étroite des entreprises dans le cluster peut également faciliter l’acquisition de connaissances, car les acteurs interagissent et apprennent les uns avec les autres en aidant à la résolution de problèmes (Faustino et coll., 2016). De plus, cela pourrait contribuer à la performance des membres du cluster, en leur permettant de bénéficier des ressources des partenaires, du partage et de l’échange d’informations, ainsi que du partage de connaissances non disponibles pour les concurrents.

Les approches réseaux et de clusters, qui plaident en faveur du regroupement des individus et de la colocalisation des activités d’innovation et de recherche dans des lieux géographiques données, justifient la proximité géographique permanente. Cette idée repose sur l’assertion qu’une proximité géographique permanente facilite le transfert de connaissances qui conditionne les activités d’innovation (Torre, 2008; Faustino et coll., 2016). Cette assertion est soutenue par l’hypothèse que les connaissances tacites ne peuvent être transmises qu’aux membres des communautés concentrées dans un espace donné. C’est pourquoi il apparaît judicieux d’organiser les activités d’innovation au niveau local, afin que les individus ou les groupes d’individus puissent travailler ensemble et échanger des connaissances. Le partage des connaissances tacites justifie l’utilité d’une proximité géographique dans les activités d’innovation.

Pour Torre (2008), la proximité géographique permanente n’est pas exclusive dans le transfert de connaissances ou dans les clusters, mais reste importante. En effet, l’auteur affirme que la conclusion sur la nécessité d’une colocalisation ou d’une proximité géographique permanente dans l’ensemble du processus d’innovation est un peu précoce. Dans une démarche de transfert

de connaissances relatives à l’innovation, elle affecte uniquement certaines étapes du processus de production, de la recherche ou de développement et ne nécessite pas forcément la colocalisation des acteurs. Cependant, la proximité géographique permanente est plus fondamentale pour les petites entreprises innovantes que les grandes, en raison des ressources humaines et financières que nécessite la prise en charge de la mobilité dans le cadre de la proximité temporaire (Torre, 2008). De plus en plus, lorsque la proximité géographique permanente n’est pas un impératif, la forme sollicitée est la proximité temporaire. Dans ce cas, les visites à court ou à moyen terme sont souvent suffisantes pour que les partenaires échangent, lors de réunions en face à face, les informations nécessaires à la coopération.

Par ailleurs, les auteurs Torre (2008, 2009, 2010), Loilier (2010) et Faustino et coll. (2016) remarquent que la proximité géographique permanente est de moins en moins nécessaire en raison de l’intérêt croissant pour les technologies de communication à longue distance. Les TIC permettent aux individus d’échanger des informations, d’exprimer leurs émotions et d’être présents avec un partenaire distant. Cependant, on ne peut nier que la collaboration face à face reste indispensable pour certains types d’interactions, en particulier pour résoudre les problèmes liés à l’hétérogénéité des modes de raisonnement ou ceux liés aux processus de délibération, de négociation et de résolution de conflit (Torre, 2008; Loilier, 2010; Cave et Doyle, 2014). L’intensité du besoin de relations face à face varie en fonction de la phase du processus et en cas de conflit grave (Torre, 2008). Elles le sont encore plus dans le partage ou la mise en commun des ressources matérielles, notamment.

Deux autres facteurs identifiés par Torre (2008) expliquent la contrainte de la proximité géographique. D’une part, il a remarqué que les relations économiques qui n’exigent pas une proximité géographique sont déjà intégrées dans des réseaux sociaux fortement territorialisés. Dans ce cas, les interactions entre les acteurs sont favorables du fait qu’ils appartiennent au même réseau ou partagent des représentations communes. D’autre part, afin de valoriser le local, le rôle des institutions conditionne désormais les interactions économiques régionales, la proximité géographique apparaissant comme un facteur de légitimation de ces institutions (Torre, 2008). Ainsi, dans le contexte des clusters, les politiques de développement économique favorisent l’essor des systèmes locaux et la concentration des activités d’innovation et de la connaissance. De la sorte, les politiques locales promeuvent institutionnellement la proximité

géographique en tant que mode privilégié d’interactions économiques. Malgré cela, Torre (2008) affirme que le besoin de proximité géographique est rarement permanent pour les innovateurs, à condition que les moments de PGT soient recherchés ou organisés.

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