• Aucun résultat trouvé

5.5.1 Éviter les comportements à risque

Une façon simple de se prémunir des piqûres de tiques est d’éviter les contacts avec elles. Il faut donc éviter les zones infestées (ex. broussailles, sous-bois, sentiers forestiers) en restant sur les chemins, pique-niquer autant que possible en s’éloignant du sol (ex. sur des tables prévues à cette effet, sur une couverture à bien secouée et isoler après).

5.5.2 Protection vestimentaire

La couleur des tissus utilisés pour l’échantillonnage de tiques ne semble pas modifier significativement l’attractivité pour des tiques (Szczepańska, Kiewra & Lonc 2017). Porter des vêtements clairs ne réduit donc probablement pas la probabilité d’être attaqué par les tiques, mais permet certainement une meilleure détection de celles-ci sur le tissu (des tissus blancs sont utilisés pour les collectes de tiques en quête d’un hôte pour cette raison). Selon une méta-analyse, le port de vêtements couvrants est significativement associé à une réduction du risque de piqûre de tiques en Amérique du Nord (Fischhoff, Keesing & Ostfeld 2019). Porter des vêtements longs, mettre ses chaussettes dans le pantalon ou encore porter des bottes ou des guêtres pourrait retarder l’attachement des tiques car elles doivent alors trouver un passage pour atteindre la peau, facilitant ainsi leur détection avant qu’elles ne piquent. De plus, le port de vêtements longs protège aussi des moustiques, vecteurs eux aussi de nombreux agents infectieux pathogènes. Changer de vêtements après une exposition permet d'éliminer les tiques qui pourraient être présentes sur le tissus, mais pas encore fixées.

Aucune étude sur le port d’un couvre-chef (casquette, chapeau) n’a été trouvée. Cependant, le port d’un couvre-chef ne paraît pas pertinent pour les adultes pour se protéger contre les tiques, puisqu’elles sont en quête sur la végétation généralement à moins d’un mètre de hauteur, se laissent glisser sur leur hôte à son passage et se déplacent ensuite sur l’hôte pour trouver un site d’attachement (Mejlon & Jaensen 1997). Cela pourrait avoir un effet protecteur pour les enfants, même si rien n’indique que cela puisse réellement empêcher les tiques une fois sur le couvre-chef, ou sur une autre partie du corps, de se déplacer et de passer en dessous du tissu.

5.5.3 Répulsifs

Il existe des répulsifs contre les tiques dont l’efficacité est démontré, mais qui varie en fonction des espèces ciblées. Leur efficacité est limitée dans le temps et peut nécessiter de renouveler l’application régulièrement. Certains produits peuvent avoir des effets secondaires notables, comme des démangeaisons. Des études ont montré l’efficacité de l’application de répulsifs de synthèse, comme le DEET (N,N-diéthyl-3-méthylbenzamide) ou d’extraits de plantes, comme le para-menthane diol, extrait de l’eucalyptus citronné, Corymbia citriodora (Richardson, Khouja & Sutcliffe 2019). La courte durée des études ne permet pas d’évaluer les effets possibles d’une exposition prolongée. Pour plus de détail sur leur efficacité et les effets secondaires, voir Doréa et al. (2016).

Les vêtements peuvent aussi être imprégnés de répulsifs. Aux États-Unis, une étude menée en double aveugle a montré que le port de vêtements imprégnés de perméthrine permet de réduire le risque de piqûre de tiques de plus de 50 % sans effet secondaire constaté par les forestiers volontaires (Mitchell et al. 2020). Cependant, cette étude n’a duré que deux ans et les effets de l’exposition à plus long-terme doivent être évalués. Pour plus d’information sur l’usage de répulsifs, consulter la note d’appui scientifique et technique de l'ANSES de 2018 relative à l’efficacité des biocides répulsifs contre les tiques et aux modalités de leur utilisation12.

5.5.4 Éliminer les tiques présentes sur soi

Après une exposition, il est indispensable d’éliminer non seulement les tiques éventuellement fixées, mais aussi celles pouvant être présentes sur la peau ou les vêtements. Prendre une douche après une exposition permettrait de réduire le risque de piqûre de tique et de contracter une maladie transmise par les tiques (Connally et al. 2009 ; Fischhoff, Keesing et Ostfeld 2019). Le lavage, même s’il n’élimine pas les tiques déjà fixées, permettrait de mieux les repérer, soit visuellement, soit au toucher en se savonnant. Des études basées sur des réponses à des questionnaires suggèrent que l’inspection du corps montre des résultats mitigés, mais ces études sont basées sur des déclarations et la qualité de l’inspection peut varier d’une personne à une autre (Vázquez et al. 2008 ; Connally et al. 2009). Une inspection exhaustive est donc recommandée (aisselles, aines, arrière des genoux, dos, parties externes des organes génitaux : vulve, verge et scrotum, seins, sillon inter-fessier, derrière les oreilles et dans le cuir chevelu). Il peut être nécessaire de s’aider d’un miroir et porter assistance aux enfants parfois moins méticuleux.

5.5.5 Retirer les tiques

D’autres gestes simples à mettre en place individuellement permettent de réduire le risque de contracter une maladie transmissible par les tiques ou de faciliter leur diagnostic. En cas de piqûre, il faut retirer la tique le plus tôt possible avec un tire-tique ou une pince fine, sans appliquer un quelconque produit dessus ni brûler la tique. En effet, manipuler la tique ou la soumettre à un traitement chimique peut favoriser la sécrétion de salive et faciliter la transmission d’agents infectieux. Il est conseillé de bien 12 https://www.anses.fr/fr/content/note-ast-de-lanses-relative-%C3%A0-l%E2%80%99efficacit%C3%A9-des-biocides- r

%C3%A9pulsifs-contre-les-tiques-et-aux

noter le lieu de piqûre (le marquer sur la peau ou prendre une photo si nécessaire) pour détecter d’éventuels signes d’infection, notamment un érythème migrant, signe d’une infection par B. burgdorferi, ou une escarre, signe d’une infection par une Rickettsia. En cas de symptômes dans les semaines suivant une piqûre de tique il est conseillé de consulter un médecin.

Le temps nécessaire pour passer de la tique à l’hôte lors de la piqûre varie d’un agent infectieux à l’autre. Voici ici quelques données sur les principaux agents infectieux transmis par les tiques :

- Pour les virus, la transmission peut se faire dès 15-60 minutes après la piqûre (Alekseev et al. 1996 ; Ebel & Kramer 2004).

- La transmission de B. burgdorferi s.l. de la tique I. ricinus à l’hôte peut avoir lieu dès 16 heures après la piqûre, probablement avec une certaine variation selon les géno-espèces (Crippa, Rais & Gern 2002 ; Eisen 2018).

- De l’ADN d’A. phagocytophilum peut être détecté dès 6 heures dans le sang après une piqûre de tiques I. scapularis porteuses sur membrane, mais à des doses infectieuses in vivo qu’après 24 h sur des chiens (pas d’anticorps ni d’ADN de la bactérie détectés dans le sang des chiens avant 48h) (Katavalos et al. 1998 ; Eisen 2018 ; Fourie et al. 2019)

- Pour les genres Babesia et Theileria avec I. ricinus, aucune donnée sur hôte n’a été trouvée.

Cependant, de l’ADN de B. venatorum a été détecté dans du sang après piqûre sur membrane de femelles adultes I. ricinus porteuses du parasite à partir de 96 heures (Bonnet et al. 2009). La transmission peut cependant se faire dès 8 heures pour certains couples d’espèces tique-Babesia/Theileria (Konnai et al. 2007 ; Varloud, Liebenberg & Fourie 2018 ; Eisen 2018).

- De l’ADN de B. henseale et B. birtlesii a été détecté à partir de 72h dans du sang après piqûre de nymphes et femelles adultes I. ricinus porteuses de la bactérie sur membrane (Cotté et al. 2008 ; Reis et al. 2011a).

Pour avoir une idée de l’ordre de grandeur des temps de transmission d’autre agents infectieux transmis par les tiques, voir Richards et al. (2017), bien que ne concernant que l’Amérique du Nord. Pour les virus, la transmission peut se produire en moins d’une heure, pour les bactéries plusieurs heures sont généralement nécessaires (quelques minutes chez les tiques molles), et pour les parasite eucaryotes unicellulaires plus d’un jour.

Retirer une tique le plus tôt possible permet donc de réduire le risque de transmission d’agents infectieux. Si la durée entre la piqûre et le retrait de la tique est connu, cela peut servir, en cas de symptômes d’indice pour faire un diagnostic. En cas de symptômes après une piqûre de tique ou une exposition (fréquentation d’un lieu à risque), il est conseillé de consulter un médecin et de suivre les recommandations officielles formulées par des professionnelles de santé selon l’état actuel des connaissances13.

5.5.6 Prévention et sensibilisation du public

La sensibilisation du public a un effet positif sur sa connaissance des tiques et des maladies à tiques, mais ces connaissances ne se traduisent pas nécessairement par des changements significatifs dans les comportements de protection dans les semaines qui suivent (Richardson, Khouja & Sutcliffe 2019). La communication en face-à-face semble plus efficace que par voie indirecte (postale, vidéos) (Richardson, Khouja & Sutcliffe 2019). Ces résultats suggèrent que les campagnes de prévention doivent être au plus proche des populations exposées dans le temps (du printemps à l’automne) et dans l’espace (aires de récréation, chemins forestiers, sentiers de randonnées). Cela peut passer par des panneaux de prévention dans les zones à risque et des alertes aux périodes d’activité des tiques (spots

13 https://www.has-sante.fr/jcms/c_2857558/fr/borreliose-de-lyme-et-autres-maladies-vectorielles-a-tiques

télévisés et radiophoniques, par exemple des messages d’alerte lors des émissions météo, de la sensibilisation dans les écoles). Des campagnes ciblées pour des personnes exposées fréquemment sont peut-être plus efficaces sur le long-terme (agriculteurs, chasseurs, forestiers, naturalistes). Cette sensibilisation devrait passer de préférence par des voies directes, telles que des conférences, des journées de sensibilisation ou par la médecine du travail par exemple, selon la population ciblée.

La sensibilisation et l'information du grand public aux risques et aux gestes simples de protection reste indispensables. En 2010, un groupe de travail de plusieurs sociétés savantes a élaboré un ouvrage de synthèse bibliographique sur la protection personnelle anti-vectorielle14. Boulanger & Stachurski (2016) ont aussi fait une synthèse sur les aspects vétérinaires et humains du contrôle des populations de tiques et la prévention des maladies à tiques. Sont présentée ici les mesures de prévention et de protection spécifiques aux tiques.

5.6 Dimensions sociales de la lutte et la prévention contre les piqûres