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Protection des plantes contre les stress abiotiques

Figure I-18 : Exemple d’effet biocontrôle des souches DSE (d'après Terhonen et al. 2016).

Les sous-figures A, B présentent l’inhibition de Heterobasidion parviporum par Cryptosporiopsis sp. (A) et par

Phialocephala sphaeroides. C : H. parviporum cultivé seul. Les sous-figures D et E représentent les hyphes de H. parviporum cultivé seul (E) ou en présence de métabolites sécrétés par Cryptosporiopsis sp. (D).

Il a également été suggéré par certains auteurs que les DSE pourraient avoir une action protectrice contre les attaques d’herbivores (Mandyam et Jumpponen 2005), cependant aucune étude, à ce jour, n’a été effectuée pour confirmer cette hypothèse chez les DSE. Néanmoins certains champignons endophytes racinaires tel que Beauveria bassiana et Trichoderma sp. ont prouvé leurs capacités à protéger leurs plantes hôtes contre des attaques de pucerons (Aphis gossypii) ou de criquets (Chortoicetes terminifera). Les mécanismes impliqués seraient la synthèse de métabolites secondaires toxiques ou inhibiteurs et le parasitisme de l’herbivore concerné (Porras-Alfaro et Bayman 2011).

5.1. Protection des plantes contre les stress abiotiques

Les DSE sont abondants au niveau des racines des plantes se développant dans des sols contaminés aux métaux (Čevnik et al. 2000; Vrålstad, Myrhe and Schumasher 2002; Ruotsalainen et al. 2007; Likar et Regvar 2009; Regvar et al. 2010). En général, les auteurs ont étudié l’effet de quelques espèces fongiques (Leptodontidium sp., Cadophora sp. et E.

pisciphila) sur la sensibilité aux ETM de quelques espèces végétales (e.g. saule et maïs - De

Maria et al. 2011; Ban et al. 2012; Likar et Regvar 2013) (Tableau I-8). L’effet général observé des DSE semble être une augmentation de la tolérance des plantes aux ETM et accroissement de la biomasse végétale. Dans certains cas, une diminution de la concentration en ETM des parties aériennes peut être notée (Li et al. 2011; Likar et Regvar 2013; Wang et al. 2016).

D’autre part, les DSE peuvent permettre un meilleur fonctionnement du métabolisme de l’hôte. Likar et Regvar (2013) ont observé une augmentation de la teneur en chlorophylles et des capacités de transpiration de plants de saules en présence de

Leohumicola sp.. Enfin, la stimulation de la biomasse des plantes peut aussi être liée à une

permet une augmentation de l’assimilation du phosphore par la plante (De Maria et al. 2011).

À ce jour, une seule étude est en mesure d’expliquer la diminution de la toxicité des ETM pour la plante par les DSE. Wang et al. (2016) ont inoculé des plantules de maïs par E.

pisciphila, et ont montré une tendance à la diminution de l’expression des transporteurs ZIP

(Zrt-Irt like protein), une augmentation des transporteurs MTP (Metal Transport Protein) et une induction de l’expression des gènes impliqués dans la séquestration vacuolaire des polluants. La présence du champignon pourrait ainsi conduire à une modification de la spéciation du Cd dans les cellules racinaires, avec une diminution de la fraction soluble au profit d’une augmentation de la fraction liée à l’oxalate. De ce fait la fraction de Cd toxique serait diminuée, tout comme sa toxicité. Enfin, ces auteurs rapportent que la colonisation par le DSE induisait une augmentation de l’activité des enzymes antioxydantes (e.g. SOD, POD, CAT) et de certaines molécules complexantes (e.g. glutathion) ce qui permettrait la diminution du stress oxydant généré par une exposition à de fortes concentrations d’ETM.

Le rôle des DSE dans la tolérance des plantes au stress hydrique et au stress NaCl a également été suggéré, cependant très peu d’études ont été menées pour confirmer ces hypothèses (Mandyam et Jumpponen 2005; Bois et al. 2006). Bois et al. 2006 ont observé une grande capacité, in vitro, de Phialocephala sp. à tolérer le NaCl. Cette aptitude serait due à la mélanine dans les hyphes du champignon.

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Tableau I-7 : Études récentes sur l'effet des champignons DSE sur la croissance de souches fongiques phytopathogènes

Souches pathogènes DSE étudiés Plante hôtes Type d’étude Effets Références

Heterobasidion parviporum Phialocephala fortinii - In vitro 19 isolats qui diminuent la croissance de H. parviporum (Terhonen et al. 2014)

Heterobasidion parviporum Phytophtora pini

Botrytis cinerea

Cryptosporiopsis sp. Phialocephala sphareoides

Picea abies In vitro, pots Diminution de la croissance des souches pathogènes in

vitro.

Diminution de la croissance de la plante in situ (Crytosporiopsis sp.) mais pas d’effet sur les souches pathogènes (P. sphareoides)

(Terhonen et al. 2016)

Verticillium dahliae Leptodontidium orchidicola Solanum lycopersicum

pots Diminution de l’effet négatif de V. dahliae sur la croissance

de la plante

(Andrade-Linares et al. 2011)

Magnaporthe oryzae Harpophora oryzae Oryza sativa pots Diminution de l’effet négatif de M. oryzae sur la croissance de la plante

(Su et al. 2013)

Phytophthora citricola Phialocephala fortinii Phialocephala subalpina

- In vitro Synthèse de métabolites secondaires à effet antipathogène Diminution de la croissance de P. citricola

(Tellenbach et al. 2013)

Fusarium oxysporum Cadophora sp. Cucumis melo pots Diminution de l’effet négatif de F. oxysporum sur la croissance de la plante

(Khastini et al. 2014)

Phytophthora citricola Pythium undulatum

Phialocephala subalpina Picea abies pots Effet souche dépendant, avec certaines souches qui diminuent l’effet négatif des souches pathogènes

(Tellenbach et Sieber 2012)

Verticillium dahliae Heteroconium chaetospira Phialocoephala fortinii

Solanum melongena

pots Effet souche dépendant, avec certaines souches qui

diminuent l’effet négatif de V. dahliae

(Narisawa et al. 2002)

Plasodiophora brassicacea Verticillium sp.

Heteroconium chaetospira Brassica campestris

pots Diminution de l’effet négatif des deux pathogènes sur la

croissance de la plante

(Narisawa et al. 2000)

In vitro : conditions axéniques en l’absence de plantes; pots : tests en pots. La couleur rouge traduit l’absence d’effet et/ou la stimulation de la croissance des souches pathogènes

Tableau I-8. Etudes de l’effet d’une inoculation par des champignons DSE sur la tolérance des plantes aux ETM

Pots : tests en pots ; CA : contamination artificielle en ETM ; SP : substrat issu de site pollué ; En vert sont représentées les capacités intéressantes pour une utilisation en

phytomanagement tandis qu’en rouge sont notés les aspects non favorables pour le phytomanagement.

ETM testés DSE étudiés Plantes hôtes Types d’étude Effets de l’inoculation du DSE sur la plante Références

Cd, Pb, Zn Leohumicola sp.

Leptodontidium sp.

Salix caprea Pots, SP Diminution du transfert de Cd et Zn vers les parties aériennes, augmente la teneur en chlorophylles, de la transpiration et de la production de biomasse

(Likar et Regvar 2013)

Cd, Pb, Zn Exophiala pisciphila Zea mays Pots, CA Diminution du transfert de Cd, Pb et Zn vers les parties aériennes et

augmentation de la production de biomasse

(Li et al. 2011)

Cd, Pb, Zn Cadophora

finlandica

Salix caprea Salix smithiana

Pots, SP Diminution de la biomasse racinaire et aérienne. Absence d’effet sur

le transfert des ETM

(Utmazian et al. 2007)

Cd, Zn Cadophora

finlandica

Salix caprea Pots, SP Augmentation de la concentration en Cd dans les racines, et de la concentration en P dans les parties aériennes

(De Maria et al. 2011)

Cd Exophiala pisciphila Zea mays Pots, CA Augmentation de la croissance et des activités d’enzymes anti-oxydantes, inactivation des formes solubles du Cd dans les cellules.

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6. Les mécanismes de tolérance aux ETM chez les DSE

Les DSE sont abondants dans les racines des plantes se développant dans des environnements pollués par les ETM. Cependant même si la tolérance des DSE aux ETM a été à plusieurs reprises étudiée en conditions in vitro (Zhang et al. 2008; Ban et al. 2012; Likar et Regvar 2013), les mécanismes moléculaires et cellulaires expliquant cette tolérance chez les DSE reste largement méconnus (Zhao et al. 2015).

Contrairement aux DSE, plusieurs études ont porté sur l’étude des mécanismes de tolérance chez la levure et chez les champignons mycorhiziens. Bellion et al. (2006) et Gube (2016) décrivent au travers de deux revues les différents mécanismes de tolérance mis en place (Figure I-19). La tolérance peut se faire par le biais d’une sécrétion d’agents chélateurs ou complexants, qui fixent les ETM dans le sol à proximité de l’hyphe (Figure I-19 ). Les champignons lient les ETM plus ou moins fortement à leur paroi fongique par biosorption aspécifique (Figure I-19 ). Il existe également des stratégies faisant intervenir des transporteurs d’ETM spécifiques et non spécifiques ainsi que des canaux permettant à ces ETM de traverser la membrane plasmique et d’entrer dans la cellule fongique. Une fois dans le cytosol, les ETM sont soit complexés par des métallothionéines ou du glutathion par exemple (Figure I-19 ,), soit exportés hors de la cellule fongique via des transporteurs spécifiques ou non spécifiques (Figure I-19 ). D’autres mécanismes de tolérance tels que la séquestration des ETM dans la vacuole de la cellule sont possibles (Figure I-19 ,). Plusieurs de ces mécanismes interviennent souvent simultanément et peuvent se cumuler afin d’accroître la tolérance. De plus, certains de ces mécanismes sont constitutifs alors que d’autres, sont activés uniquement en situation de stress (Zhao et al. 2015).

Figure I-19 : Mécanismes de tolérance aux ETM des champignons (d’après Bellion et al. 2006).

G-SH : Glutathion et MT : metallothionéines