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Chapitre 1 : Précurseurs de neuropeptides

1.2 Modifications post-traductionnelles

1.2.5 Protéolyse

Dans les derniers compartiments du trans-Golgi et dans les granules de sécrétion, tous les pro-neuropeptides sont sélectivement clivés par des endoprotéases désignées sous le terme de

prohormone convertases (PCs), également appelées subtilisin-like proprotein convertases

(SPCs) en raison de leur homologie avec la famille des subtilisines, sérines-protéases bactériennes, et les kexines de levure (Siezen and Leunissen, 1997). Au sein du précurseur, les séquences des peptides biologiquement actifs sont généralement flanquées par des aa basiques, le plus souvent présents sous forme de doublets, qui constituent des sites de clivage pour la plupart des PCs. Sept PCs ont été identifiées chez les mammifères : la PC1/PC3 (ou SPC3) (Seidah et al., 1990, 1991; Smeekens et al., 1991), la PC2 (ou SPC2) (Seidah et al., 1990; Smeekens and Steiner, 1990), la furine (ou PACE) (van den Ouweland et al., 1990; Roebroek

et al., 1986; van de Ven et al., 1990), la PACE4 (Kiefer et al., 1991; Seidah et al., 1991), la PC4 (Nakayama et al., 1992; Seidah et al., 1992), la PC5/PC6 (Lusson et al., 1993) et la PC7 (Seidah et al., 1996; Tsuji et al., 1994). Deux autres PCs découvertes plus récemment ne requièrent pas de résidus basiques au niveau du site de clivage : la subtilisin-kexin-isozyme (SKI-1) (Seidah et al., 1999), appelée également site-1 protease (S1P), et la neural apoptosis-regulated convertase (NARC-1) (Seidah et al., 2003), aussi nommée proprotein convertase subtilisin-kexin isozyme (PCSK9).

La comparaison des séquences des précurseurs au niveau des sites de protéolyse a permis de définir quelques règles relatives à la spécificité de clivage de ces enzymes (Bloomquist et al., 1991; Furuta et al., 1997; Seidah et al., 2008; Vishnuvardhan and Beinfeld, 2000). Dans la grande majorité des cas, les sept premières PCs clivent les précurseurs peptidiques à l’extrémité C-terminale du motif (Arg/Lys)-(aa)n-(Lys/Arg)-Arg, où n = 0, 2, 4 ou 6, et où aa peut être un résidu quelconque excepté une cystéine et dans de rares cas une proline (Seidah and Chrétien, 1999; Seidah et al., 2008). Outre les clivages au niveau de doublets basiques, les PCs peuvent également réaliser des coupures en position C-terminale d’une arginine isolée, comme dans le cas de la pro-SST (Galanopoulou et al., 1995a, 1995b), ou plus exceptionnellement au niveau d’une lysine seule pour la pro-CCK (Rehfeld, 2006). La convertase SKI-1/S1P clive ses

Figure 5 : Mécanisme réactionnel de la sulfatation. Cette réaction fait intervenir la tyrosylprotein

sulfotransferase (TPST) qui catalyse le transfert d’un SO3 sur le groupement phénolique d’une tyrosine

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substrats, notamment le précurseur du pro-brain-derived neurotrophic factor (BDNF), après la séquence consensus (Arg/Lys)-aa-(aa hydrophobe)-(Leu/Thr) (Elagoz et al., 2002).

Les PC1/3 et PC2, principalement présentes dans les granules de sécrétion de la voie régulée dans les cellules neuronales et endocrines, sont impliquées dans le processus de maturation de nombreuses prohormones (Seidah, 2011). A l’inverse, la PC4, localisée uniquement dans les cellules germinales, est spécifique des protéines impliquées dans la fonction reproductrice. La furine et la PC7, exprimées de façon ubiquiste, assurent le clivage de nombreux précurseurs sécrétés par voie constitutive tels que les facteurs de croissance, les récepteurs, les protéases et les molécules d’adhésion. Les convertases PC5 et PACE4 sont impliquées dans de nombreux processus, notamment, par leur adhésion à la membrane plasmique via leur domaine C-terminal riche en Cys, dans le clivage de protéines de la matrice extracellulaire et de molécules d’adhésion. SKI-1 est responsable des premières étapes d’activation de certains facteurs de transcription, comme ceux qui régulent la synthèse des lipides, la réponse au stress et le repliement des protéines de la matrice extracellulaire du cartilage (Seidah, 2011). Les convertases sont initialement synthétisées sous forme de zymogène inactif qui subit une autocatalyse dans le RE (pour toutes les PCs excepté la PC2) ou dans les granules de sécrétion immatures (dans le cas de la PC2), donnant par un second clivage des enzymes actives (Seidah et al., 2008). La PCSK9 s’autocatalyse après la séquence Val-Phe-Ala-Gln152 située dans son prosegment. Cependant, la PCSK9 reste étroitement liée au prosegment, qui empêche le second clivage, et donc est sécrétée sous la forme d’un hétérodimère inactif. A ce jour, le récepteur au

low density lipoproteins (LDL) est la seule cible connue de PCSK9 qui induit une augmentation

de la dégradation de ce récepteur, augmentant ainsi les taux plasmatiques de LDL circulant. Des mutations naturelles du gène de PCSK9 ont été retrouvées dans des cas d’hypercholestérolémie familiale (Benjannet et al., 2004; Seidah, 2009, 2016).

Tous les sites potentiels de clivage d’un précurseur donné ne sont pas utilisés et seul un nombre limité d’entre-eux sera effectivement reconnu par les PCs dans un contexte cellulaire donné. L’exemple de la POMC, qui contient 8 sites potentiels de clivage, illustre bien ce processus de protéolyse différentielle (Bicknell, 2008) (Figure 6). Ainsi, dans les cellules corticotropes du lobe antérieur de l’hypophyse, qui expriment uniquement PC1, seuls 4 parmi les 8 sites sont utilisés, aboutissant essentiellement à la formation de l’ACTH et de la β-LPH. Dans les cellules mélanotropes du lobe intermédiaire, qui expriment PC1 et PC2, la maturation est complète : l’ACTH donne naissance à l’α-MSH ainsi qu’au CLIP ; la β-LPH est hydrolysée en γ-LPH et en β-endorphine ; et enfin le fragment N-terminal conduit à la γ-MSH.

Suite à l’action des PCs, les peptides néo­formés présentent des aa basiques (Arg ou Lys) à leur extrémité terminale. Deux carboxypeptidases peuvent exciser les résidus basiques C-terminaux des hormones et des neuropeptides : la carboxypeptidase E, aussi appelée carboxypeptidase H ou enkephalin-convertase (Fricker and Snyder, 1982) , et la carboxypeptidase D (Song and Fricker, 1995), deux métalloprotéases localisées respectivement dans les granules de sécrétion (Fricker, 1988) et dans le réseau trans-Golgien ou les granules de sécrétion immatures (Song and Fricker, 1996). A notre connaissance, seuls deux neuropeptides murins, l’octadécaneuropeptide (ODN) (Ferrero et al., 1986) et la cortistatine (de Lecea et al., 1996), présentent la particularité de conserver un résidu basique en position C-terminale, lysine en l’occurrence. La maturation de ces derniers peptides pourrait nécessiter l’intervention d’une endopeptidase de type trypsine, comme celle purifiée à partir de synaptosomes de rat qui clive la liaison Lys-Leu de la dynorphine (Satoh et al., 1988), ou d’une enzyme spécifique comme celle responsable de l’hydrolyse de la liaison Lys-Asn de la CCK et de son fragment 1-21 (Viereck and Beinfeld, 1992). Une fois la protéolyse achevée, certains neuropeptides doivent subir d’autres modifications post-traductionnelles pour acquérir leur pleine activité biologique (Figure 3).

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