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CHAPITRE II : ADAPTATION METABOLIQUE DE LA BREBIS DURANT LE

2. Etude du profil métabolique des brebis au cours du cycle reproductif et au cours

2.2.2.1. Les protéines totales (g/l)

Avant l’incorporation des rebuts de dattes dans la ration des brebis, la protéinémie est stable variant d’une manière non significative (70±1,21 à 75,00±2,01 g/l ; p>0,05). En parallèle, en fin de gestation et après un mois et demi de consommation de cet aliment énergétique (P2), toutes les brebis enregistrent une teneur plasmatique plus basse que le prélèvement contrôle (P1). Une diminution hautement significative est notée pour le lot ingérant 50% de rebuts de dattes (35,60±5,64 g/l ; p<0,0001) comparativement aux autres lots (0% (61,40±2,27 g/l), 25% (60,40± 2,01 g/l) et 100% (59,50±2,48 g/l)).

Les valeurs des protéines totales circulantes observées lors de l’épreuve de supplémentation en rebuts de dattes sont situées dans les limites des intervalles de référence de la plupart des auteurs (Ramos et al., 1994 (53,8 - 80,9g/l); Baumgartner et Pernthaner, 1994 (53 - 80 g/l) ; Dimauro et al., 2008 (58 - 96 g/l) ; Kaneko et al., 2008 (60-79 g/l) ; Simpraga et al., 2013 (66,8-87,4 g/l)). Cependant, les brebis ingérant plus de 25% de rebuts de dattes ont enregistré une protéinémie inferieure aux intervalles de références rapportés par Dubreuil et al. (2005) (61,0-71,2 g/l) et Deghnouche et al. (2011) (58,80 -73,03 g/l).

Dans notre étude, les brebis du lot 50% complémentées en fin de gestation en rebuts de dattes inscrivent la plus faible la protéinémie (35,60±5,64 g/l ; p<0,0001). Cette diminution pourrait être attribuée à l’augmentation du niveau du métabolisme basal de la brebis et des besoins nutritionnels du placenta et du fœtus (Jainudeen et Hafez, 2000 cité par Batavani et al., 2006). Le fœtus synthétise ses protéines à partir des acides aminés d’origine maternelle (ces acides aminés sont principalement utilisés pour la synthèse que pour l’oxydation ou pour la néoglucogenèse fœtales). Par conséquent, cette diminution pourrait être le résultat de la

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croissance exponentielle du fœtus, surtout au niveau musculaire qui atteigne son maximum durant la fin de gestation (Jainudeen et Hafez, 2000 cité par Gürgöze et al., 2009). Et parallèlement, avec le transfert des acides aminés, d’albumine et des immunoglobulines de la circulation maternelle vers la glande mammaire pour la synthèse du colostrum (Jainudeen et Hafez, 2000).

La baisse de la teneur des protéines totales est attribuée à la dilution des protéines du plasma et à la diminution de synthèse des protéines en raison d’une dépression anabolique liée à un bouleversement hormonal (une augmentation de la concentration de glucocorticoïdes est également vue pendant le péripartum dont la principale fonction est de favoriser le catabolisme protéique) (Gonzalez et al., 1994 ; El-Shérif et Assad, 2001 ; Sejian et al., 2010) Une augmentation significative est notée au 2ème prélèvement (P2) pour les brebis du lot témoin (61,40±2,27 g/l ; p<0,05) et celles supplémentées à 25% de rebuts de dattes (60,40± 2,01 g/l ; p<0,05). Cette période de prélèvement correspond à la fin de la gestation coïncidant avec la pleine campagne de moisson et au pâturage sur chaume. Cette hyper-protéinémie est probablement due soit à une meilleure utilisation des nutriments par ces brebis ou soit à une hémoconcentration. Cette dernière serait due du fait d’un excès de sudation par temps chaud (mois d’Août), ou à cause d’un déficit d’abreuvement (Safsaf et al., 2012).

D’ailleurs, Aganga et al. (1989) ont obtenu des protéinémies de plus en plus élevées en soumettant des brebis Yankasa à différents stades physiologiques (vides, gestantes et en lactation) à des abreuvements quotidiens (chaque 24 heures, 48 heures et 72 heures) avec des valeurs plus élevées chez les femelles gestantes. Toutefois, lors d’une privation hydrique de 72 heures, la protéinémie est plus élevée chez les brebis en lactation que les gestantes et les non gestantes.

Il est important de noter l’effet notable de la nutrition énergétique sur le taux des protéines circulantes, où des niveaux énergétiques bas entraînent une réduction des taux protéiques (Mosaad and Derar, 2009), du fait de l’étroite relation entre les métabolismes énergétique et protéique.

Pendant que la glycémie des lots respectifs 25% et 100% est significativement faible (0,31±0,04 g/l et 0,23±0,02 g/l ; p<0,001), les paramètres du métabolisme azoté sont significativement élevés (hyper-protéinémie 60,40±2,01 g/l et 59,50±2,48 g/l ; p<0,0001), hyper-albuminémie (30,08±0,94 g/l et 26,29±0,81 g/l ; p<0,0001) et hyper-urémie (0,17±0,03g/l et 0,13±0,02 g/l ; p<0,005)). Ce résultat serait due au fait que le déficit en

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glucose peut être compensé par une augmentation du catabolisme protéique (Bell, 1995). Ce qui signifie que, dans les situations de déficit énergétique prolongé où la prise alimentaire est limitée, les ruminants vont utiliser majoritairement les acides aminés, mobilisés des protéines corporelles, pour augmenter leur production nette de glucose (Danfaer et al., 1995).

Chez les brebis ingérant 50% de rebuts de dattes, lorsque les paramètres du métabolisme azoté (protéinémie 35,60±5,64 g/l ; albuminémie 18,76±3,10 g/l ; créatinémie 5,25±0,89 mg/l et bilirubinémie 0,10±0,02 mg/l ; p<0,001) et du métabolisme lipidique (cholestérolémie 0,41±0,04 g/l et triglycéridémie 0,09±0,02 g/l ; p<0,001) ont significativement chuté, la glycémie été significativement élevée (0,43±0,03 g/l ; p<0,0001). L'analyse de corrélation de Spearman et de Pearson a révélé un rapport important entre la protéinémie et tous les paramètres du métabolisme énergétique et protéique. Chez les brebis consommant 50% de rebuts de dattes, une corrélation positive est notée entre les protéines totales et l’albumine (p<0,001 ; r= 0,9790), la créatinine (p<0,01 ; r=0,8428), l’urée (p<0,01 ; r=0,8126) ainsi que pour les triglycérides (p<0,05 ; r=0,7236) et le cholestérol (p<0,001 ; r=0,9288). De plus, pour les mêmes femelles (lot 50%), il existe une corrélation négative entre glucose et les triglycérides (p<0,01 ; r= -0,686).

Toutefois, les animaux adaptés à une faible disponibilité de l’énergie digestible dans leur ration possèdent une capacité considérable leur permettant de modifier leurs exigences énergétiques (Blanc et al., 2004). Et ce, du fait que l'effet de la prise de nourriture sur le niveau de glucose, chez les ruminants, est négligeable à cause de la fermentation qui a lieu dans le rumen. Bien que la gluconéogenèse chez les ruminants diminue lors de sous-nutrition à cause de la réduction du taux d’entrée de propionate, il peut y avoir un effet compensatoire associant d'autres précurseurs (glycérol, acides aminés) (Sosa et al., 2009). Ce qui explique la corrélation positive des paramètres du métabolisme protéique et lipidique et non du glucose plasmatique de ces brebis gestantes (lot 50 % de rebuts de dattes). Par ailleurs, Boudechiche (2009) émet l’hypothèse qu’une partie des glucides des dattes soit protégée, arrivant ainsi intacte au niveau de l'intestin et augmentant ainsi la glycémie et l'anabolisme musculaire.

Des résultats contradictoires ont été rapportés en relation avec le statut physiologique et nutritionnel. C’est ainsi que Gürgöze et al. (2009) en étudiant le profil biochimique et minéral des brebis en gestation et durant le post partum, ont trouvé que la teneur plasmatique en protéines totales est plus élevée durant la gestation. Cependant, Yokus et al. (2006) n’ont pas signalé d’effet notable de la saison donc du type d’aliment sur la concentration sérique de ce

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métabolite. De plus, Rekik et al. (2010) en additionnant le figuier de Barbarie dans la ration des brebis en fin de gestation, n’ont montré aucune différence significative de l’albuminémie chez les animaux supplémentés avec du cactus ou ceux témoins ne consommant que de l’orge.

Dans le même contexte, Aboud et Boumella (2012), Lakhdara (2014) et Benatallah (2015) en supplémentant la ration des brebis gestantes avec des noyaux de dattes, n’ont noté aucune variation significative de la protéinémie entre les deux lots (témoin vs. noyaux de dattes). Par contre, Chachoua (2015) a enregistré une protéinémie élevée chez les brebis ingérant de la paille traitée à l’urée par rapport au lot témoin. Il conclut que ce taux élevé serait due au fait que les animaux ont à leur disposition une quantité plus importante d’azote fermentescible dans leur régime alimentaire. Sachant que la ration témoin (0%R) contenant 100% d’orge enregistre un taux en MAT le plus élevé comparativement aux rations contenant des rebuts de dattes (12,51 vs. 4,96 % de MS); ce qui justifierait la protéinémie élevée du lot témoin 0% (61,40±2,27 g/l ; p<0,001).

Nos résultats sont en concordance avec ceux de Safsaf et al. (2012) qui affirment que la protéinémie la plus faible est observée chez les primipares en fin de gestation (p<0,05). Ceci serait dû à un épuisement en protéines alimentaires par des apports très faibles au cours de cette période. Une hypoprotéinémie peut être produite par un déficit d’apport protéique ou à une hyperhydratation (Lynch and Jackson, 1983), par une réduction de synthèse, à un catabolisme exagéré ou à une balance azotée négative pour une longue période (Moţ et al., 2011).

Les brebis des lots expérimentaux consommant 50, 75 et 100% de rebuts de dattes (aliment pauvre en MAT) en remplacement de l’orge concassée ont enregistrés respectivement des protéinémies faibles (35,60±5,64 g/l ; 46,20±2,74 et 59,50±2,48 g/l ; p<0,0001). Des taux faibles protéiques circulants sont du à des déficiences protéiques par réduction de la synthèse des protéines par l’organisme ou par suite d’apport insuffisant par l’alimentation (Van Saun, 2009). A cet effet, Braun et al. (2010), signalent qu’une protéinémie au-dessus de la limite de 65 g/l est considerée comme un indicateur d’une réaction inflammatoire chronique si elle est associée à une chute de l’index corporel. Cette observation est confirmée par la corrélation positive entre la protéinémie et l’ASAT (p<0,05 ; r=0,6968), l’ALAT (p<0,001 ; r=0,9242) et la GGT (p<0,01 ; r=0,8465) des femelles supplémentées à 50% de rebuts de dattes.

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A l’observation des tableaux 27 et 28 et la figure 16, il apparait qu’avant l’incorporation des rebuts de dattes dans le concentré (P1), l’albuminémie des brebis des cinq lots (0, 25, 50, 75 et 100%) n’a pas varié significativement, oscillant de 33,80 à 34,38 g/l (p>0,05). Par contre, après le remplacement du concentré (P2), les brebis consommant 50% de rebuts de dattes ont enregistré une hypo-albuminémie marquée (18,76±3,10 g/l ; p<0,001). De plus, les femelles ingérant 25% de dattes déclassées présentent un taux plasmatique plus élevé (30,08± 0,94 g/l ; p<0,05).

Les valeurs de l’albuminémie notée, avant l’introduction des rebuts de dattes, sont dans l’intervalle des normes physiologiques rapportées par Baumgartner et Pernthaner (1994) (21-38 g/l) et Simpraga et al. (2013) (28,5-44,7g/l). Or, après l’ingestion de cet aliment énergétique, les concentrations plasmatiques sont inferieures aux intervalles de références de plusieurs auteurs (Brugère-Picoux, 2002 (60-79 g/l); Dubreuil et al., 2005 (30,2-37,1 g/l) et Kaneko et al., 2008) (24-30g/l).

La relation directe entre l'état nutritionnel, ou plus spécifiquement l'apport en protéines brutes et la concentration d'albumine sérique est bien connue (Hoffman et al., 2001 cité par Caldeira et al., 2007). En plus du rôle oncotique important que joue l'albumine dans les capillaires artériels et veineux et l’importante fonction de transport en particulier des acides gras et des pigments biliaires, l’albumine possède un rôle majeur dans la couverture des besoins protéiques en tant que fournisseur d'acides aminés pour les tissus et les organes, entre autres son rôle comme précurseur dans la synthèse d’hormones. L’albumine est évaluée autant que les protéines totales comme un indicateur de la nutrition protéique (Sakkinen et al., 2005). Les brebis en fin de gestation consommant 50% de rebut de dattes présentent le taux le plus faible en albuminémie (18,76±3,10 g/l ; p<0,001). En accord avec nos résultats, Haffaf et al. (2012) attribuent cette diminution plasmatique durant la fin de la gestation à un dysfonctionnement hépatique ou par un manque de substrats (acides aminés exportés en grande quantité vers le fœtus). Antunović et al. (2004) notent que les concentrations plasmatiques en albumine sont significativement faibles chez les femelles en fin de gestation que chez celles allaitantes. Ces auteurs indiquent que l’albumine constitue une source très importante d’acides aminés pour le fœtus et sa mère. Chez la brebis l’albumine plasmatique diminue jusqu’à des valeurs minimales durant la moitié de la gestation et retrouve des valeurs normales en fin de gestation, alors que les protéines totales et les globulines diminuent progressivement le long de la gestation (Kaneko et al., 2008).