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6.1 La chymase

6.1.3 Les protéases mastocytaires

Les mastocytes exercent un grand nombre de leurs effets par leurs protéases, qui peuvent constituer jusqu’à 35 % de tout leur contenu protéique (WERNERSSON & PEJLER, 2014). Cette section présente principalement les protéases spécifiques aux mastocytes qui donnent à ces cellules des caractéristiques particulières.

6.1.3.1 Entreposage des protéases

Une différence majeure entre les CTMC et les MMC se situe au niveau de leur synthèse de glycosaminoglycane (GAG), larges molécules glucidiques sulfatées, qui se fixent à la serglycine, protéine comprenant des répétitions de duos sérine-glycine et qui sert de squelette aux GAGs pour former un large protéoglycan impliqué dans l’entreposage et le repliement des protéases mastocytaires actives dans les granules (KOLSET & PEJLER, 2011). Pour se fixer à la serglycine, les MMC synthétisent le sulfate de chondroïtine (CS) sursulfaté, chaîne de N-acétylgalactosamine alternée avec l’acide glucoronique (ENERBACK et al., 1985), alors que les CTMC synthétisent de l’héparine, chaîne de N-acétylglucosamine alternée avec des acides iduronique ou glucoronique (KOLSET & PEJLER, 2011). L’héparine des CTMC est nettement plus sulfatée que le CS des MMC peut l’être, lui conférant une densité de charge extrêmement négative et des propriétés

uniques dans l’entreposage et la régulation de l’activité des protéases des mastocytes. Celles-ci ont des régions à charge positive denses qui leur permettent de lier l’héparine par interaction électrostatique. Cela dit, le CS est aussi important pour l’entreposage de protéases, son absence réduisant l’activité tryptase et carboxypeptidase de mastocytes dérivés de la moelle osseuse (BMMC, bone marrow derived mast cells), des mastocytes relativement immatures (OHTAKE- NIIMI et al., 2010, KOLSET & PEJLER, 2011).

6.1.3.2 La carboxypeptidase A3

La CPA3 est une métalloexopeptidase au zinc clivant en C-terminal de son substrat. Contrairement aux tryptases et chymases, un seul gène de la CPA3 est trouvé dans l’ensemble des espèces étudiées, principalement dans les CTMC (PEJLER et al., 2009). L’entreposage de la CPA3 chez la souris requiert la serglycine-héparine (FORSBERG et al., 1999, BRAGA et al., 2007) ainsi que la liaison avec une autre protéase mastocytaire, mMCP-5. La nécessité de cette interaction est réciproque, car la délétion de l’une ou l’autre de ces enzymes résulte en l’élimination de l’activité des deux protéases chez la souris (FEYERABEND et al., 2005). Supportant un rôle des mastocytes dans l’immunité innée, les nématodes du genre Ascaris produisent un inhibiteur de CPA pour augmenter leur survie durant l’infection (SANGLAS et al., 2009). La CPA3 peut aussi être grandement impliquée dans la dégradation de toxines peptidiques (METZ et al., 2006, SCHNEIDER et al., 2007).

6.1.3.3 La tryptase

La tryptase est une protéase à sérine avec une activité de type trypsine. Elle clive donc de préférence après un acide aminé basique (principalement arginine ou lysine). L’humain exprime 4 tryptases, α et β (I à III), qui sont tétramériques avec leur site catalytique au milieu du tétramère, limitant l’accès aux gros substrats même si la tryptase peut quand même inactiver le fibrinogène,

la fibronectine et le kininogène à haut poids moléculaire, par exemple (PEREIRA et al., 1998). L’α-tryptase, faiblement active, et la βI-tryptase sont deux allèles du même gène ((TPSAB1) et les tryptases βII et βIII sont deux allèles d’un autre gène (TPSB2) (TRIVEDI et al., 2007, TRIVEDI

et al., 2009).

La conformation tétramérique et liée à l’héparine rend aussi la tryptase résistante aux inhibiteurs de protéases à sérine endogènes (serpines) qui sont généralement des macromolécules (PEREIRA et al., 1998). La forme monomérique de la tryptase est en revanche rapidement inactivée par les serpines endogènes (SCHECHTER et al., 1993a). Cette structure est conservée chez la souris, alors que les tryptases sont les protéases mastocytaires de souris 6 et 7 (mMCP-6 et -7, mouse mast cell protease). De plus, une γ-tryptase monomérique et liée à la membrane est aussi présente. Une δ-tryptase est tronquée et probablement inactive chez l’humain mais son orthologue chez la souris, déterminé phylogénétiquement, serait mMCP-7 (CAUGHEY, 2016). Les souris et les chiens expriment aussi une autre enzyme de type tryptase, la mastine (mMCP-11 chez la souris), principalement dans les basophiles (UGAJIN et al., 2009). La mMCP-7 est cependant active de façon inégale dans différentes souches de souris, la souris C57BL/6 présentant naturellement une mMCP-7 tronquée et inactive (GHILDYAL et al., 1994, HUNT et al., 1996). Contrairement à l’humain où tous les mastocytes en expriment, les tryptases de souris sont préférentiellement exprimées dans les CTMC. La tryptase peut cliver PAR-2, lui permettant d’exercer un rôle de signalisation sur plusieurs types cellulaires et dans de multiples systèmes, comme la perméabilité de l’épithélium intestinal, les myocytes coloniques et les cellules endothéliales cardiaques (CORVERA et al., 1997, JACOB et al., 2005, SOMASUNDARAM et

6.1.3.4 Les cathepsines lysosomales et autres protéases non-spécifiques

Les mastocytes conservent leurs protéases spécifiques sous forme activée dans leurs granules. Par contre, le pH de ces granules étant acide, l’activité des protéases neutres est restreinte. L’activité des enzymes les activant, toutefois, est favorisée. Ainsi, le pH acide est favorable à l’activité des cathepsines B et L (activation de la tryptase) (LE et al., 2011), C/DPPI (activation de la chymase, cathepsine G et potentiellement la tryptase) (WOLTERS et al., 2001, ADKISON et

al., 2002) et E (activation de la CPA3) (HENNINGSSON et al., 2005). La cathepsine L peut aussi

activer la DPPI (DAHL et al., 2001). La cathepsine G, une protéase à sérine neutre, est aussi exprimée par les mastocytes en plus d’autres cellules inflammatoires. Elle possède une activité à large spectre chez l’humain (chymotrypsine, trypsine, leu-ase, met-ase, etc.) et peut activer l’Ang-I. Son spectre d’activité chez la souris est cependant plus restreint et ressemble plus aux β-chymases de rongeur (RAYMOND et al., 2010, CAUGHEY, 2016). Granzyme B, la rénine, la caspase 3 active, les métalloprotéases ADAMTS5 (a disintegrin and metalloproteinase with

thrombospondin motifs 5) et MMP-9 (métalloprotéase de la matrice-9, matrix metalloproteinase-9) sont aussi présentes dans les granules mastocytaires (WERNERSSON &

PEJLER, 2014). La MMP-9 y est présente sous forme inactive, mais peut être activée par la chymase lors de la dégranulation (FANG et al., 1996).

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