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es trois molécules (C12D, C12S et C12G), que nous avons synthétisées (cf. 6-γ), sont prometteuses, a priori, pour concevoir des émulsions de gouttes de 5CB nématique dispersées dans de l’eau. Notons à titre anecdotique que ces surfactants, spécifiquement formulés pour l’interface eau/5CB, ont également été testés pour obtenir une extension et/ou de nouvelles mésophases intéressantes pour le système de microémulsion présenté dans la partie II. Cependant, l’utilisation de ces molécules, pour ces applications, n’a pas été probante et ne modifie donc pas nos conclusions (importance prédominante des interactions de Van der Waals). L’action de ces surfactants sur les interfaces a été testée de façon détaillée dans les systèmes mixtes colloïdaux 5CB/eau.

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7-α) Propriété générale des émulsions

7-α-a) Protocole expérimental

La préparation des échantillons se fait en pesant les surfactants (sous forme de poudre) avec une balance précise au centième de milligramme, et en introduisant à l'aide d'une micropipette, les quantités en eau et en 5CB. Les surfactants ont été formulés pour être à l’interface eau/5CB mais ils sont extrêmement peu solubles dans l’eau ou le 5CB (cf. tableau 1, chapitre 6). Les échantillons contenus dans des tubes à hémolyse sont centrifugés pour récupérer les traces éventuelles des constituants sur les parois du tube. Pour obtenir des émulsions de 5CB dans l’eau, nous agitons mécaniquement (vortex) les mélanges pendant trois minutes. Pour l'observation en microscopie, nous utilisons des capillaires rectangulaires de faible épaisseur (50µm) où les émulsions sont introduites par capillarité. Les extrémités de ces capillaires sont ensuite scellées à la flamme afin d'éviter les variations de composition des échantillons.

7-α-b) Observations macroscopiques et microscopiques

Les propriétés émulsifiantes des composés C12D, C12D et C12G ont été évaluées, dans un premier temps, par l’aspect macroscopique des émulsions obtenues. Une solution blanchâtre sera le signe d’une bonne émulsification, la taille des gouttes micrométriques obtenues étant alors comparable aux longueurs d’onde du visible. Dans un deuxième temps, les observations microscopiques se font à l’aide d’un microscope polarisant (cf. 3-δ) où l’échantillon est placé dans un four précis au dixième de Kelvin.

Figure 19 : Observation macroscopique des mélanges surfactants/5CB/Eau respectivement (0.5%)/(9.5%)/(90%) avec l’utilisation de différentes molécules : C12D (a), C12S (b), C12G (c), SDS (d) et sans surfactant (e). L’observation est au temps initial (1), au bout de 24H (2), au bout de 10 jours (3).

Nous avons choisi de préparer les émulsions en ajoutant une quantité de surfactants permettant de recouvrir du 5CB sous forme de gouttelettes, de quelques microns de diamètre. Pour comparaison, nous avons également utilisé du dodécylsulfate de sodium (SDS), un surfactant classique. Après un mélange sous vortex (3mn), l’évolution des échantillons est suivie visuellement. Nous illustrons un banc d’essai sur la figure 19, où nous examinons, à température ambiante, l’efficacité des surfactants synthétisés (cf. chapitre 6) sur la stabilisation d’émulsion de gouttes de 5CB (10%) nématique dans l’eau (90%), pour une

Chap.7 – Comportements et propriétés en émulsion

quantité de surfactant correspondant à la couverture de surface de sphères de 2µm de diamètre (soit entre 0.2% et 0.5% en masse des différents surfactants).

Seule l’utilisation du C12S ou du C12G permet d’obtenir des émulsions stables (cf. figure 19). Le 5CB se sépare rapidement de l’eau dans le cas du C12D, même si l’absence de ménisque bien marqué entre l’eau et le 5CB (contrairement aux cas du SDS et du tube témoin sans surfactant) permet de penser que la tension interfaciale eau/5CB est fortement abaissée. L’action émulsifiante du SDS n’est pas efficace dans le cadre de notre protocole expérimental, mais elle peut l’être si l’on rajoute une petite quantité d’alcane à l’émulsion [12].

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Figure 20 : Observation en microscopie optique, en condition de polariseurs croisés, de l’émulsion 5CB dans l’eau avec l’utilisation du surfactant C12S.

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Figure 21 : Observation en microscopie optique, en condition de polariseurs croisés, de l’émulsion 5CB dans l’eau avec l’utilisation du surfactant C12G.

Notons que les émulsions obtenues avec les surfactants C12S ou C12G sont stables sur plusieurs mois et que même en l’absence d’agitation violente, la phase riche en 5CB disparaît

lentement, ce qui dénote un effet très efficace des surfactants pour stabiliser le cristal liquide sous forme de gouttelettes dans l’eau. Les observations en microscopie optique montrent un ancrage homéotrope fort (cf. figure 20 et figure 21) puisque la croix de Malte caractéristique est observée jusqu’à la limite de résolution (diamètre de l’ordre de 0.5µm).

Ces observations montrent que les surfactants C12S et C12G se localisent bien à l’interface eau/5CB, et ce d’autant plus que leur solubilité dans chacun des deux solvants est faible (cf. tableau 1). Enfin, notons qu’aux temps très longs (échantillons conservés plusieurs semaines à température ambiante), on observe une homogénéisation de la taille des gouttes avec l’apparition de nombreuses gouttes, de tailles très petites correspondant relativement aux tailles théoriques attendues dans le cas d’une couverture complète des gouttes par le surfactant.

7-α-c) Effet de la température

Les gouttes de 5CB nématique, en présence des surfactants C12S ou C12G, sont sphériques et présentent de forts ancrages homéotropes. On se peut se demander si des effets sont susceptibles d’intervenir, lorsque ces gouttes de 5CB en émulsion subissent une transition de phase nématique-isotrope (TNI=35.3°C). Nous avons donc observé, sous microscopie optique, à différentes températures (contrôlée à 0.1°C près) les gouttes de ces émulsions. En ce qui concerne les émulsions avec le C12S ou le C12G, nous ne relevons rien de particulier sur la température de transition nématique-isotrope du 5CB qui s’effectue à une température proche de la température de transition de phase du 5CB pur, pour des concentrations en surfactant faibles.

Figure 22 : Observation à température ambiante, en microscopie optique en condition de polarisateurs décroisés (gauche) et croisés (droite), d’une émulsion C12G/eau/5CB, (0.5%)/(9.5%)/(90%), ayant subie une histoire thermique de 60°C (pendant 1h) jusqu’au refroidissement à l’ambiante. On remarque une morphologie inhabituelle de gouttes allongées de 5CB nématique.

Chap.7 – Comportements et propriétés en émulsion

En revanche, nous avons remarqué un effet surprenant sur les échantillons contenant le C12G lors de leur refroidissement à partir de T=60°C (5CB isotrope) jusqu’à la température ambiante (5CB nématique). Les observations microscopiques à température ambiante, après chauffage et refroidissement des échantillons, révèlent la présence de gouttes allongées de 5CB en forme d’ellipsoïdes ou de poires (cf. figure 22), au lieu de gouttes plus ou moins sphériques observées habituellement dans les émulsions de cristal liquide nématique [4]. Ces premières observations montrent que le surfactant C12G, de type gémini, a bien une action directe sur l’interface eau/cristal liquide. Nous allons préciser ce phénomène par la suite.