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PROPAGATION DES INHOMOGÉNÉITÉS COSMIQUES DANS UN FOND QUANTIQUE 95

Inhomogénéités cosmiques en cosmologie quantique à boucles

7.2. PROPAGATION DES INHOMOGÉNÉITÉS COSMIQUES DANS UN FOND QUANTIQUE 95

Ce choix de conditions initiales s’appliquent identiquement que l’on travaille dans une approche de métrique habillée ou bien dans une approche de clôture de l’algèbre.

Un autre choix possible, adopté dans la référence [56], consiste à fixer les conditions initiales au moment du rebond. Ce choix se justifie ainsi : pour que l’approche perturbative soit valide, il est nécessaire que la densité d’énergie des perturbations n’excède jamais celle du fond. Or cette densité d’énergie des perturbations est maximale au moment du rebond. Il va alors être exigé de fixer les conditions initiales au moment du rebond de telle sorte que la densité d’énergie des perturbations est proprement régularisée au moment du rebond. Puisque cela correspond à la situation maximale, c’est une condition suffisante pour la densité d’énergie des perturbations n’excède jamais celle du fond à tout les instants de l’histoire cosmique.

On notera toutefois que ce choix pose plusieurs problème. Pour les modes tels que k2 ≤ 8πGρc, les modes ne sont pas oscillants mais soit exponentiellement amplifiés, soit exponentiellement supprimés. Partant de technique de théorie quantique des champs, il n’est donc pas évident de donner une interprétation en terme de particule de ces modes. Par ailleurs, pour les modes proches de cette valeur critique de√

8πGρc, l’évolution n’est pas du tout adiabatique. Il est donc nécessaire de s’assurer que tel est le cas sans quoi le spectre de puissance en fin d’inflation deviendrait extrêmement sensible au choix des conditions initiales.

Conclusion II [63, 64]

Il est possible de qualitativement défricher la zone d’espace de paramètres de la modélisation de l’ère de Planck dans la LQC partant des derniers résultats publiés par planck quant au spectre de puissance angulaire des anisotropies de température. Comme déjà mentionné en conclusion de notre première partie (voir la figure A de

Part. I), le spectre de puissance angulaire tel que mesuré par le satellite planck montre deux choses3 : pour

≥ 50, un spectre de puissance primordial des modes scalaires en loi de puissance avec nS = 0.96 [1] s’ajuste

remarquablement bien aux données tandis que pour ℓ ≤ 50, des écarts, certes faibles, restent possible. Cette échelle angulaire caractéristique de ℓCMB≃ 50 se traduit par une échelle de longueur caractéristique (très grossière) dans

le spectre de puissance primordial : kCMB(today) = ℓCMB× kH(today). Cela signifie donc que pour que la LQC

soit en accord avec les données planck, le spectre de puissance primordial des modes scalaires doit être le spectre

inflationnaire standard pour k(today) ≥ k(today) alors que de faibles déviation sont autorisées pour des valeurs

plus faibles du nombre d’onde. Par ailleurs, la modélisation présentée ci-dessus montre qu’au moment du rebond, l’échelle caractéristique laissé par la LQC est de kLQC(tB) ≃8πGρc. Cette échelle est ensuite étirée par l’expansion cosmique. Enfin, si l’on suit par exemple la modélisation des Ref. [56], alors le spectre primordial prédit correspond au spectre inflationnaire standard pour k(tB) > kLQC(tB). En comparant cela à l’échelle caractéristique imposée

par planck, on peut d’ores et déjà déduire que √8πGρ

c× exp(−N) ≤ ℓCMB× kH(today) avec N le nombre de

e-fold depuis le rebond jusqu’à aujourd’hui. Evidemment l’échelle caractéristique inférée des mesures du CMB,

kCMB, est grossière. Mais cela souligne la stratégie future à adopter et le fait que les mesures CMB ont un fort

potentiel d’exclusion. Ce point est résumé dans la figure B où, supposant que la prédiction LQC conduit à un spectre inflationnaire pour k > kLQC (ce qui est en pratique le cas pour une des approches de la théorie des perturbations cosmologiques) : pour kLQC< kH, le paradigme des boucles avec rebond puis inflation et l’inflation pure ne sont

pas distinguables ; pour kLQC> kCMB, le paradigme LQC serait en désaccord avec les données planck ; entre ces

deux valeurs, une comparaison précise entre prédiction et observation est nécessaire. (Evidemment, l’impact des résultats de bicep2 seront aussi à prendre en compte. Toutefois, cette détection est encore trop récente, et des confirmations sont encore nécessaires, avant de pouvoir tirer des conclusions pertinentes.)

Dans l’état actuel des développements théoriques en LQG et en LQC, il est important de saisir proprement la portée d’une possible exclusion (ou corroboration) de l’espace des paramètres de la modélisation LQC de l’Univers primordial. Deux niveaux sont à considérer. Le premier niveau se situe à l’intérieur strict de la cosmologie quantique à boucle. Dans ce cadre restreint, une possible exclusion ne signifierai pas nécessairement une exclusion du rebond quantique mais en premier lieu une exclusion de la formulation de la théorie des perturbations cosmologiques se propageant dans un fond quantique. Imaginons que toutes ces formulations soient en pratique exclues. Cela ne signifierai pas pour autant que la LQG est exclue. Au niveau de la LQG cette fois-ci, il faut se rappeler que la LQC n’est pas une déduction mathématique de la LQG mais bien une modélisation inspirée de la LQG. Si la LQC peut servir d’horizon phénoménologique à la LQG, cela signifierai simplement que cette formulation spécifique de la dynamique quantique de l’Univers ne peut plus servir d’horizon phénoménologique, une phénoménologie sur le terrain de la cosmologie, à la LQG.

La gravité quantique à boucles et la cosmologie quantique à boucles ont toute deux énormément évolué durant les dix dernières années. Evidemment, ces approches sont loin d’être complètes et exemptes de toute faiblesse et difficulté. Toutefois, un véritable programme de recherche est maintenant mis en place, convoquant physique de la gravitation quantique et cosmologie théorique et observationnelle. Ce programme de recherche se présente comme

3. On se rappellera ici que les spectre de puissance angulaire des anisotropies du CMB est fonction, entre autre, du spectre de puissance primordial. En ce sens, il permet de placer des contraintes soit sur ce spectre primordial, soit sur les paramètres d’une forme paramétrique de ce spectre.

Figure B – Valeur de l’échelle caractéristique au moment du rebond quantique « autorisée » en principe par les données planck en fonction du nombre de e-fold depuis le rebond jusqu’à aujourd’hui. On notera qu’il s’agit ici

d’une estimation grossière. La quantité k correspond à kLQC et nous prenons kCMB≃ 50 × kH.

un tout cohérent, la cosmologie quantique à boucles et les questions qu’elle suscite débordant dans le champ de la gravité quantique à boucles, et inversement.

La cosmologie quantique à boucles s’est déployée comme une modélisation inspirée de la gravitation quantique à boucles mais elle n’est pas encore une déduction de la théorie mère. En ce sens, la cosmologie quantique à boucles demande de nouveaux développements dans le cadre de la théorie complète qu’est la gravité quantique à boucles, en développant des modèles de l’Univers dans lesquels la quantification est effectuée avant la réduction de l’espace de phase par symétrie. La question qui se pose ici est de savoir si la LQC, comme quantification après réduction par symétrie, correspond bien au secteur cosmologique de la LQG ? Ainsi, les développements futurs en LQC seront de fait en dialogue avec les développements en LQG et en gravitation quantique non-perturbative. Une première modélisation partant de la gravité quantique formulée suivant l’approche des mousses de spin a été proposée en Ref. [60]. Outre les développements mathématiques en terme de calcul des amplitudes de transition que permet une telle question, il a été montré que partant d’un réseau de spin simple, le dipôle, l’amplitude de transition d’un tel état quantique, dans la limite des grands volumes (ou encore des grands spins), se ramène à l’équation de Friedmann classique. Cela offre un point de départ pour une modélisation de l’Univers partant de la théorie complète mais aussi, un point de départ pour le développement des méthodes de calcul des amplitudes de transition et, plus particulièrement, des schémas d’approximation (par exemple prendre la limite des grands spins) nécessaire à l’implémentation de tels calculs. Parallélement à cela, des développement similaire ont été développé dans le cadre la LQG réduite [61] ou encore dans les cadres des théories de champ à valeur dans un groupe [62].

Inversement, la phénoménologie partant de la théorie mère est encore à ce stade hors de porter. Ainsi, la cosmologie quantique à boucles offre, avec possiblement la physique des trous noirs [63], un des rares moyen d’accès

observable à des effets de gravité quantique [64]. Les résultats que nous avons résumés dans ce manuscrit en

sont une illustration particulièrement aboutie. Durant les trois dernières années, deux approche alternatives de la théorie des perturbations se propageant dans un fond quantique ont été établies, et puisque les prédictions sur les observables cosmologiques diffèrent d’une approche à l’autre, il semble possible en principe de pouvoir discriminer entre ces deux approches. L’issue d’une telle confrontation aux observables que sont les anisotropies (en particulier en température) du fond diffus cosmologique n’est pas encore connu. Il est cependant évident que les observations limiteront une partie de l’espace des paramètres et peut-être même exclurons l’une ou l’autre de ces approches. Cela constituera un guide précieux pour les développements futurs en LQG puisque ces régions de la théorie qui sont sur la mauvaise piste seront en partie connues.

Finalement, ce programme de recherche possède une forte dimension cosmologique. A proprement parler, la modélisation en LQC de l’Univers proposée ci-dessus n’est pas un scenario alternatif au paradigme cosmologique standard mais plutôt une extension de ce paradigme à l’ère de Planck : tout le paradigme standard, c’est-à-dire classique (par opposition à quantique), y est inclus. Cela signifie que ce programme de recherche incorpore des

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