On a vu que le module des U
u-familles de formes (v, w)-Igusa-surconvergentes est donné
par S
κu v,w(Γ
B(p)) =H
0T
I,v,O
κu v,w,!=H
0T
I,v∗,(Π
f I,v×Id
Uf u)
∗O
κu v,w,!.
Proposition 9.7.1. Le A(U
u, K)-module de Banach S
κuv,w
(Γ
B(p))est projectif.
On va utiliser une variante de [AIP, Th.A.1.2.2] :
Lemme 9.7.2. Soit X un schéma formel sur Z
padmissible normal quasi-projectif de fibre
générique X affinoïde ; soit Fun faisceau formel de Banach surXqui définit un faisceau fibre
générique rigideF surX. SoitF
metX
m=X⊗Z/p
mZles réductions modulop
mde FetX.
On suppose que F
m= lim−→
s
F
s,moù les F
s,msont cohérents et commutent au changement de
base : siℓ < m,i
∗ℓ,m
F
s,m=F
s,ℓ. Soit(U
fi
) un recouvrement affine formel de X. Alors, la suite
0→H
0(X,F)[1/p]→M
iH
0(U
if,F)[1/p]→M
ijH
0(U
ijf,F)[1/p]→. . .
est exacte.
Démonstration. Comme dans la démonstration du Th.A.1.2.2 de [AIP], on peut supposer qu’il
existe un morphisme formel projectif X→Zet un faisceau inversible ample L surXrelatif à
ce morphisme. Par le théorème d’annulation de Kodaira, il existe une suite croissante d’entiers
(b
s)
stelle que pour touts>1et pour tout i >0, on ait
H
i(X
1,F
s,1⊗L
⊗bs1
) = 0.
Si la suite(b
s)peut être prise stationnaire, il suffit de recopier la démonstration du th. A.1.2.2.
On suppose donc la suite strictement croissante. Par dévissage on voit qu’on a pour tout
m>1:
H
i(X
m,F
s,m⊗L
⊗bsm
) = 0
Il s’ensuit que pour chaque m>1 et chaques>1le complexe de Cech
C
s,m:
0→H
0(X
m,F
s,m⊗L
⊗bs m)→M
iH
0(U
i,m,F
s,m⊗L
⊗bs m)→M
ijH
0(U
ij,m,F
s,m⊗L
⊗bs m)→. . .
est exact. On peut supposer queLest engendré par ses sections globales. Soittune telle section.
On a des morphismes − ⊗t
⊗(bs+1−bs): L
⊗bs→ L
⊗bs+1. D’où un morphisme de complexes
t
⊗(bs+1−bs):C
s,m→ C
s+1,m. Pour tout m>1, soitL
⊗∞tm
= lim−→
s
L
⊗bsm
pourt
′7→ t
′⊗t
bs+1−bs.
Cette limite ne dépend pas du choix de la suite strictement croissante desb
s. La limite inductive
C
∞,m= lim
−→
sC
s,mde ces résolutions est une résolution de
H
0(X
m,F
s,m⊗L
⊗∞tPar Nakayama topologique, le complexe
C
∞,∞: M
iH
0(U
if,F⊗\L
⊗∞t)→M
ijH
0(U
ijf,F⊗\L
⊗∞t)→. . .
est une résolution de H
0(X,F⊗L\
⊗∞t) où
\
L
⊗∞t= lim
←−
mL
⊗∞t m.
En passant à la fibre générique et en utilisant le fait que le faisceau inversible L[1/p] est
donné sur l’affinoïde X = SpmB par un B-module L projectif de rang 1, on a pour tout
ouvert affineV
fdeX :
H
0(V
f,F⊗\L
⊗∞t)[1/p] =H
0(V
f,F)[1/p]⊗b
BLh1/ti
oùLh1/ti =H
0(X,L\
⊗∞t) désigne la complétion p-adique duB-module des sections surX de
L
⊗∞, qui s’identifie donc à la complétion p-adique delim
−→
sL
⊗(bs+1−bs). SiL =B,t=b∈B,
on aLh1/ti=Bh1/bi. On peut maintenant montrer que
C(U
•rig,F) : M
i
H
0(U
irig,F)→M
ij
H
0(U
ijrig,F)→. . .
est une résolution deH
0(X,F) =H
0(X,F)[1/p]. On peut tensoriser le complexeC(U
•rig,F)par
L. Il suffit de montrer qu’en tout idéal maximalmde B,C(U
•rig,F)⊗
BL
mest une résolution
de H
0(X,F)⊗
BL
m. CommeLest engendré par ses sections globales surA,L
rigest engendré
par ses sections globales sur B; il existe donc une section globalet qui ne s’annule pas enm;
on a donc L
m= Lh1/ti
mcomme B
m-modules, et on est ramené à l’énoncé déjà démontré :
C(U
•rig,F)⊗
BLh1/ti est une résolution de H
0(X,F)⊗
BLh1/ti.
Démonstration. Soit G = O
κu,fv,w,!
et φ = Π
fI,v
×Id
Ufu
et F = φ
∗G. Par le Th.9.2.3, c’est
un faisceau de Banach formel sur le schéma formel admissible normal quasi-projectif X =
T
I,v∗,f× U
ufdont la fibre générique X est affinoïde. Ce faisceau définit un faisceau rigide sur
X=T
I,v∗,rig× U
urig.
Fixons un recouvrement admissibleU
f= (U
fα
)
α∈Afini deT
I,v∗,fpar des ouverts affines dont
les intersections sont affines. Le complexe de Cech augmenté sur K=W[1/p]:
H
0(T
I,v∗,f× U
uf,F)[1/p]→C
0(U
f× U
uf,F)[1/p]→C
1(U
f× U
uf,F)[1/p]→. . .
est exact par le lemme précédent. Soit α = (α
0, . . . , α
i)∈A
i+1et U
αf=T
ij=0
U
αfj. Montrons
que le A(U
u)-module H
0(U
αf× U
uf,F)[1/p]est orthonormalisable. La réduction modulo pde sa
boule unitéH
0(U
fα
× U
fu
,F) est leA(U
u,1)-moduleH
0(U
α,1× U
u,1,F
1). Ce module est libre sur
A(U
u,1). En effet,A(U
u,1) est un anneau de polynômes sur un corps finiF, donc son groupe
multiplicatif coïncide avec F
×; il s’ensuit que le caractère κ
u,1est à valeurs dans F
×et est
donc d’ordre premier àp. Ceci montre que le faisceau Ω
κu,11
est de la forme Ωe
κu,11
⊗ O
Uu,1où
e
Ω
κu,11
est le faisceau des sections de
T
N+ 0,1 T0,κu,1× A
1→T
N+ 0,1Formons
e
A
κu,1 1=π
B+ 0,I,1,∗Ωe
κu,1 1et
e
A
′1=Ae
κu,1 1(−D
1)×
C(N− 1 ,Aeκu,1 1 (−D1))O
N−(w)1⊗Ae
κu,1 1(−D
1))
.
On trouve
F
1=Ae
′ 1⊗FO
Uu,1Si l’on considère une base(e
j)
jsurFdeH
0(U
α,1,Ae
′1
), on voit que lese
j⊗1forment une base
sur A(U
u,1) de H
0(U
α,1⊗ U
u,1,F
1).
En relevant une base de ce module, on obtient une base orthonormée de H
0(U
fα
,×U
fu
,F)
(par Nakayama topologique).
On a donc une résolution du A(U
u)-module de Banach S
κuv,w
(Γ
BSp(p)) par des modules
de Banach orthonormalisables, avec morphismes continus. Ceci entraîne que ce module est
projectif grâce au lemme ci-dessous.
Lemme 9.7.3. Si0→M
′→M →M
′′→0 est une suite exacte deA(X)-modules et siM et
M
′′sont quasi-orthonormalisables, ou même seulement projectifs, alors M est projectif.
Démonstration. En effet, siM etM
′′sont quasi-orthonormalisables, soit (f
i) une base
ortho-normale deM
′′; fixons des antécédents ee
ides f
i. On a |ee
i| > C > 0. Si on forme e
i=
eei|eei|
,
on obtient une base orthonormée dont l’image est une base de norme bornée. On peut donc,
en changeant la norme de M
′′par une norme équivalente, trouver une base orthonormée de
M
′′qui se relève en un système libre orthonormé de M; il engendre topologiquement un
relèvement topologique deM
′′facteur direct de M
′dans M, donc M
′est projectif.
SiMetM
′′sont seulement projectifs, on leur ajoute un facteur direct topologique commun
assez grand pour se ramener à une suite exacte de noyau M
′et où M et M
′′sont
quasi-orthonormalisables.
Corollaire 9.7.4. Soientv, w comme ci-dessus. Pour tout poids κ∈ U
w(L), le morphisme :
S
κwv,w
(Γ
BSp(p))⊗A
(Uu),κL→S
v,wκ(Γ
BSp(p), L)
est un isomorphisme.
Démonstration. suit la méthode de démonstration de [AIP, Cor.8.2.3.2]. Considérons l’idéal
maximal I
κde O
Uudes fonctions qui s’annulent au point κ, et I
κ=H
0(U
u,I
κ) A =A(U
u).
Formons la résolution de Koszul :
Kos(κ) : 0→A→A
g→ · · · →A
g→A→A/I
κ→0
On a une suite exacte de faisceaux sur T
rigI,v× U
u:
0→ I
κ· O
κuv,w,!
→ O
κuv,w,!
→ O
v,w,κ !→0
Par annulation de R
1(Π
I×Id
Uu)
∗O
κuv,w,!
sur T
I,v∗,rig, on a encore une suite exacte de faisceaux
surT
I,v∗,rig× U
u:
0→ I
κ·Π
I,∗O
κuv,w,!
→Π
I,∗O
κuv,w,!
→Π
I,∗O
v,w,κ !→0
Soit F
κu= (Π
I×Id
Uu)
∗O
κuv,w,!
et F
κ= Π
I,∗O
v,w,κ !. On a donc O
Uu/I
κ⊗
OUuF
κu∼= F
κ.
On forme le produit tensorielKos(κ)⊗
AH
0(T
I,v∗,rig× U
u,F
κu). On va montrer qu’il induit un
isomorphisme de L-espaces de Banach
On fixe un recouvrement affine U
f= (U
fi
)
idu modèle formel T
I,v∗,fde T
I,v∗,rig. On sait par le
lemme 9.7.2 qu’on a des résolutions de Cech
C
•(U
rig× U
u,F
κu) :
H
0(T
I,v∗,rig× U
u,F
κu)→M
iH
0(U
irig× U
u,F
κu)→M
ijH
0(U
ij× U
u,F
κu)→. . .
et
C
•(U
rig,F
κ) :H
0(T
I,v∗,rig,F
κ)→M
i
H
0(U
irig,F
κ)→M
ij
H
0(U
ij,F
κ)→. . .
On tensorise la première résolution par la résolution de Koszul et on obtient un complexe
double
Kos(κ)⊗
AC
•(U
rig× U
u,F
κu)
où l’on place verticalement les flèches de Kos(κ) et horizontalement celles du complexe de
Cech. Chaque ligne est exacte parce que les termes du complexe de Koszul sont A-libres.
Chaque colonne est exacte parce que pour chaque multi-indice α chaqueA-moduleH
0(U
αrig×
U
u,F
κu) est projectif, donc plat surA. De plus, comme U
αrigest affine, le morphisme
H
0(U
αrig× U
u,F
κu)→H
0(U
αrig,F
κ)
induit parA → A/I
κest surjectif et induit un isomorphisme d’espaces de Banach en
tenso-risant le terme de gauche par A/I
κ. On en déduit par chasse au diagramme que la première
colonne du complexe double est exacte. C’est-à-dire que le morphisme continu d’espaces de
Banach
A/I
κ⊗
AH
0(T
I,v∗,rig× U
u,F
κu)→H
0(T
I,v∗,rig,F
κ)
est un isomorphisme.
10. Opérateurs de Hecke
10.1 Opérateurs de Hecke hors de N p
Soit ℓ un nombre premier, premier àN p. Considérons les matrices α
i= diag(I
g−i, ℓI
i) ∈
GL
g(Q) pouri= 0, . . . , g−1, et, pouri= 1, . . . , g−1,β
i= diag(α
i, ℓ
2·
tα
−i1)∈Sp
2g(Q), et
β
0= diag(I
g, ℓ·I
g) ∈Sp
2g(Q). Soit Γ
i= Γ∩β
i−1Γβ
i, et X
ila variété de Siegel de niveau Γ
isurZ
p. Si i= 0, cette variété classifie les quadruplets(A, λ, φ, H
0), où φest une structure de
niveauN moduloΓ, etH
0est un sous-groupe fini étale lagrangien deA[ℓ]; sii= 1, . . . , g−1,
X
iclassifie les quadruplets (A, λ, φ, H
i), où φ est une structure de niveau N modulo Γ, et
H
iest un sous-schéma en groupes fini étale d’ordre ℓ
2gde A[ℓ
2], totalement isotrope pour
l’accouplement de Weil V
2A[ℓ
2]7→ µ
ℓ2, et tel que son sous-groupe de ℓ-torsion H
i[ℓ]soit de
rangℓ
g+i; notons qu’alors K
i=ℓ·H
iest un sous-schéma en groupes fini et plat de rang ℓ
g−ide H
i; le schéma abélien A/H
i[ℓ] contient H
i′=H
i/H
i[ℓ], et l’isogénie A/H
i[ℓ]→A induite
par la multiplication par ℓ sur A induit un isomorphisme de schémas en groupes H
i′→ K
i.
Considérons le modèle canonique sur Z
pde la variété de Siegel de niveau parahoriqueX
Poi
(ℓ)
associée au parabolique maximal P
oi
, opposé au parabolique standard de Levi GL
g−i×Sp
2i.
Le morphisme (A, λ, φ, H
i)7→(A, λ, φ, H
i[ℓ]) induit un morphisme fini et platX
i→X
Poi
(ℓ).
Notons que le schéma abélienA/H
iest principalement polarisé. Pour touti= 0, . . . , g−1,
X
iest donc muni d’une isogénie universelle ϕ
i: A → A/H
ientre deux schémas abéliens
principalement polarisés, et le schéma X
iest donc muni de deux morphismes finis étales
p
j:X
i→X,j= 1,2, donnés par(A, λ, φ, H
i)7→(A, λ, φ), resp.(A, λ, φ, H
i)7→(A/H
i, λ
i, φ
i),
oùλ
ietφ
isont induits parλetφ. On voit que pour toutx∈X
irig(L),Hdg(p
j(x)) = Hdg(x),
de sorte qu’on obtient par restriction des morphismesp
j:X
irig(v)→X
rig(v).
On considère la tour d’Igusa v-surconvergente T
i,∞,vau-dessus de X
irig(v) associée au
faisceau lisse L(A/X
i) sur X
irig(v). L’isogénie étale ϕ
i: A → A/H
iinduit, par fonctorialité
covariante deL(voir [BM10, Section 6]) un isomorphismeL(ϕ
i) : L(A/X
i)→L((A/H
i)/X
i).
On prolonge alors les morphismes p
j, j = 1,2, en des morphismes p
j: T
i,∞,v→ T∞
,vqui
envoient un quintuplet(A, λ, φ, H
i, ψ)défini surS vers(A, λ, φ, ψ), resp.(A/H
i, λ
i, φ
i, ψ
i), où
ψ
i:µ
p∞→L((A/H
i)/S)est le composé deψ:µ
gp∞→L(A/S)et deL(ϕ
i). Les morphismesp
jainsi prolongés sont finis étales. On définit des endomorphismesT
ℓ,ides faisceauxO
v,wu,O
κuv,w
comme la composée (p
1)
∗◦p
∗2. Ils sont compatibles avec les opérateurs habituels T
ℓ,idéfinis
surX et sur la tour d’Igusa ordinaire par les mêmes formules (voir par exemple [Til12, 8.1]
pour g = 2). Ils respectent donc la cuspidalité et l’intégralité des modèles formels obtenus
par clôture intégrale du modèle formel d’Andreatta-Gasbarri X
f(v). Ils fournissent donc des
endomorphismes continusT
ℓ,i,i= 0, . . . , g−1, desA(U
u)-modules de BanachS
κuv,w
(Γ), appelés
opérateurs de Hecke enℓ.
Dans le document
Tours d'Igusa surconvergentes et familles p-adiques de formes de Siegel surconvergentes
(Page 51-55)