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1.4. LES ACTEURS DE L’ÉCOSYSTÈME DE LA CRÉATION AUDIONUMÉRIQUE

1.4.3. Les producteurs

1.4.3.1. Émergence d’un tissu de producteurs indépendants :

La grande nouveauté observée depuis quelques années en France et qui contribue à l’émergence d’une création audionumérique est le développement d’une

véritable filière de la production de podcasts.

Alors que l’outil de production sonore était jusque-là concentré essentiellement entre les mains des éditeurs de services de radio, publics et privés, la création de véritables « studios » de production s’est développée et amplifiée depuis trois ans, structurant ainsi peu à peu la filière audionumérique et contribuant activement à l’enrichissement et à la diversification de l’offre de contenus natifs.

Les studios de production sont des entreprises qui financent le développement et la réalisation de contenus audio en faisant appel à des animateurs, à des auteurs et à des techniciens. Il n’existe pas aujourd’hui de définition spécifique du statut du producteur d’œuvres audio, mais la définition figurant à l’article L. 132-23 du code de la propriété intellectuelle, qui concerne le producteur d’œuvres audiovisuelles, pourrait pleinement s’appliquer aux studios produisant des podcasts natifs.

La création de nouvelles plateformes (agrégateurs) dédiées à l’audio à la demande, la progression du public et des écoutes, telles qu’exposées plus haut, n’aurait sans doute pas été possible sans une augmentation et une diversification sensible de l’offre de contenus audio d’un haut niveau de qualité éditoriale, liée à l’activité de ces studios, et la constitution de premiers catalogues de séries dans des genres extrêmement divers, qui désormais nourrissent ces plateformes (offre parfois complétée par des productions propres des plateformes, certaines s’étant dotées de moyens propres de production).

45 Entre 150 et 300 € la journée de travail pour une série de podcasts, la moyenne des rémunérations étant de 5

1.4.3.2. Les différents types de producteurs

En dépit du caractère très récent de l’apparition de structures de production de contenus audio, il est possible de dresser une typologie de la production actuelle qui permet de distinguer :

 les producteurs-créateurs : ce sont des créateurs de podcasts qui s’autoproduisent (podcasteurs), comme c’est déjà le cas dans le domaine de la vidéo (You tubeurs) ou de l’écrit (blogueurs) ; ce ne sont pas des entreprises de production au sens strict du terme, mais cette forme de production représente, comme indiqué plus haut, une part non négligeable des podcasts produits et mis en ligne sur certaines plateformes46;

 les producteurs, sont des structures qui réalisent des podcasts, notamment d’entreprise, à la demande de grandes marques, ou encore des studios qui assurent de la production exécutive pour des éditeurs, de presse par exemple, lorsque ces derniers n’ont pas de structure intégrée de production;  les producteurs-éditeurs, qui regroupent une bonne part des studios actuels, sont des producteurs qui assurent la production déléguée et exécutive de

podcasts d’auteurs ou de journalistes rémunérés par eux, ou de programmes

de commande ; ils financent donc le développement et la réalisation et aussi la distribution (mise en ligne) des contenus audio qu’ils produisent ; les éditeurs de radio, dotés d’une autonomie de production des programmes qu’ils diffusent ou mettent en ligne, appartiennent aussi à cette catégorie ;  les producteurs-éditeurs-agrégateurs : sont des entreprises intégrées, qui produisent et éditent une part des programmes qu’ils mettent en ligne, leur offre étant composée de programmes également commandées à des producteurs indépendants (ou coproduites avec eux) ou de productions externes, non exclusives, déjà mises en ligne et accessibles sur d’autres sites ou plateformes ; appartiennent à cette catégorie des plateformes comme Majelan et Sybel ou encore Spotify et Audible.

On remarque, c’est un fait récent, que des entreprises indépendantes à la fois des éditeurs de services de radio, des grandes plateformes internet, et même des agrégateurs commencent à prendre une place importante dans la structuration et le marché de l’offre de contenus audionumériques.

Or, ces entreprises contribuent potentiellement – hors des schémas économiques classiques de l’intégration des structures de production et de diffusion- à une dynamique qualitative (innovation, diversité, créativité) de l’offre de contenus,

comme cela a été observé dans d’autres secteurs des industries culturelles (cinéma, production audiovisuelle, édition phonographique) où le maintien d’un certain degré d’indépendance des entreprises de production de contenu à l’égard des structures de diffusion ou de distribution est devenu un objectif de politique culturelle, pour les gains de créativité qu’il procure.

Si la création de structures indépendantes s’est effectuée jusqu’à présent en dehors de toute incitation de l’État ou de mesures de protection particulières – ce qui en

46 en raison de leur statut, beaucoup d’auteurs travaillant pour le service public de la radio sont identifiés comme

soi est remarquable- il a paru à la mission indispensable d’apprécier le modèle économique sur lequel reposent ces entreprises et, partant, d’analyser leurs forces et leurs fragilités potentielles, en ce qu’elles sont certainement une des conditions du développement d’une offre de contenus audionumériques de qualité.

1.4.3.3. Modèle économique des entreprises de production

Le modèle économique du développement de ces entreprises de production est très variable, mais présente des constantes, qui diffèrent sensiblement des modèles observés dans d’autres secteurs de la production de contenus :

 c’est le marché, en croissance, du podcast d’entreprise et institutionnel (sous deux formes, professionnel - business to business, et grand public-

business to consumer) qui apporte la part majoritaire de leur chiffre

d’affaire aux studios de production indépendants; le brand content (c’est à dire la production d’un contenu, éventuellement sous forme scénarisée pour mettre en valeur une marque ou un produit) constitue une part de ces revenus;

 le marché publicitaire est une autre forme de revenus, soit sous la forme de parrainage de programmes ou d’insertions publicitaires en début (« pré-

roll »), en cours (« mid-roll »), ou en fin (« post-roll ») de programme;

 la commande de podcasts par des éditeurs de presse (production exécutive);  les produits de diversification (évènements et débats en public, livres

adaptés des podcasts);

 les commandes des plateformes, notamment de fictions, documentaires, ou programmes pour la jeunesse.

Pour ce qui concerne la production de programmes de stock, fictions et documentaires, le marché fonctionne selon des règles très proches de celle du marché des droits audiovisuels. Les plateformes commandent aux studios des séries qu’elles préachètent, avec un droit d’exploitation exclusif pendant une période donnée, qui peut être variable (plusieurs mois en général) après laquelle, le producteur peut éventuellement la proposer à une autre plateforme. Ce qui introduit des fenêtres d’exploitation successives, comportant des exclusivités liées au montant de cession des droits, à l’instar de la chronologie des médias. Dans ce domaine toutefois, les pratiques sont encore variables d’une plateforme à l’autre et aussi selon la nature du programme.

1.4.3.4. Les coûts de production

Les coûts de production des contenus audionumériques varient selon le genre du programme, sa durée, son degré d’élaboration, allant de quelques milliers d’euros (hors podcasts autoproduits et si l’on inclut les salaires des animateurs ou auteurs et ceux des techniciens et les frais de structure), à 200 000 euros pour des séries de fiction incluant un nombre important d’artistes-interprètes, une musique originale et une réalisation techniquement sophistiquée

Encadré n°7 : Budget-type d’une production de fiction47 Chronologie de la production

Budget (dessus de ligne)

Budget (dessous de ligne) :

Total : 201 000 € soit 2000€/minute

Source : mission

47 Coûts estimés à partir de données fournies par des producteurs privés et publics (Radio-France). •développement : neuf mois

•préproduction et casting : cinq mois

•tournage : un mois •post-production : un mois •62 000 € Casting •40 000 € Auteurs et réalisateur •22 000 € Sound designer et compositeurs •15 000 € Matériel et studios •10 000 € Mixage • 7000 € Divers •45 000 € Production

Tableau n° 2 : Les principaux producteurs de podcasts

Source : mission

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