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3.2 Modèles sociaux dans les systèmes à agents

3.2.3 Processus d’organisation

Réorganisation

Pourrait-on établir une organisation idéale pour un problème ? C’est peu probable : l’en- vironnement, le contexte des agents n’est jamais complètement maîtrisé, et l’adaptation est obligatoire. De fait, la dynamique des organisations est quasiment toujours évoquée dans les modèles sociaux d’agents. Ce qui varie par contre beaucoup plus, c’est l’importance des changements que l’on autorise dans une organisation : certains travaux présentent même cette capacité de restructuration comme essentielle, à travers l’émergence de structures so- ciales ou des réorganisations permanentes.

Dynamique et émergence

La structure sociale influence les comportements de chaque agent vers un possible "équi- libre social". La stabilité ou simplement la convergence vers cet équilibre peut varier selon les modèles, entre les sociétés figées fixées par le concepteur, et les approches entièrement émergentistes. Il ne faudrait donc pas voir une dichotomie absolue dans ces approches : une action individu-centrée peut être une une action influencée par le contexte social (voir fi- gure3.3. Il suffit pour cela que la structure sociale impose des contraintes (les institutions ou normes sociales) sur les agents. Cette relation double entre interaction et structure sociale a notamment été modélisée par [Ossowski, 1999]. L’auteur remarque d’ailleurs avec justesse que cette liaison est fonction de la complexité de l’individu mais aussi de la société :

The influence of socialisation on the self-interested behaviour of individuals decreases with the complexity of society. By contrast, within simpler societies the socially conditio- ned sphere of individual consciousness is predominant.

Fonction collective

Agent Agent Agent

Structure sociale

Institution sociale / Normes

Interaction sociale Interaction sociale émergence immergence (micro-émergence)

Buts Buts Buts

FIG. 3.3 – Coordination émergente, d’après [Ossowski, 1999]

Plus qu’une simple coordination des comportements des agents permettant d’identifier une “fonction” pour l’ensemble de l’organisation, cela peut également permettre également un ajustement (par rétroaction) les comportements individuels [Haynes et al., 1995], et par conséquent l’efficacité de la coopération globale.

On peut comparer cette approche aux mécanismes de réorganisation beaucoup plus radi- caux définis par [Glance et Huberman, 1995], imaginés sur une métaphore de réorganisation

de matière, au sens physique.

Schémas d’organisation

Le modèle de “schémas d’organisation” de [Durand, 1996] est sans doute un des efforts les plus complets à ce niveau. Bien que définie initialement dans un cadre de simulation multi-agent (l’étude d’épizooties de fièvre aphteuse), le modèle proposé est en fait générique et ses conséquences dépassent le simple problème de la modélisation et mise en oeuvre de simulation multi-agent.

L’auteur remarque la complexité et la multitude de domaines à prendre en compte lors- qu’on envisage la modélisation de systèmes à large échelle. Se pose alors le problème de la synthèse des différents domaines de connaissance pour pouvoir mettre en oeuvre une entité de simulation suffisement complète (prenant en compte par exemple dans le cadre d’étude les points de vue économique, sanitaire, législatif, spatial, ...).

SystèmeProduction SystèmeMaladie Eleveurs GestionTroupeau Cheptels Production Cheptels SiteContaminant Maladie Anadémie

Classe associé au rôle

Nom du rôle

Schéma d'organisation

Eleveurs SuiviSanitaire

Rôle associé

FIG. 3.4 – Un exemple de réseau de liens d’accointances exprimé par des schémas d’organi- sation, d’après [Durand, 1996]

Le point de départ de la proposition est la simple question du rattachement des activités aux entités : faut-il définir le comportement comme faisant partie intégrante de l’entité (ou plutôt de sa classe, puisque B. Durand utilise la modélisation objet comme base de départ). Cette possibilité est rapidement écartée comme trop statique (pas de possibilité d’acquérir un nouveau comportement) et pénalisant pour les besoins de conception et simulation in- crémentale. L’autre approche envisagée est de rattacher les activités possibles aux entités concrètes elle-mêmes (et donc à leur instances), ce qui satisfait aux besoins d’adaptabilité mais complique singulièrement la conception à un niveau plus abstrait.

Le modèle finalement proposé associe (et non définit) les comportements et activités au sein des modèles d’entités (leur classes). Ces activités sont alors définies comme étant des rôles, et permettent d’agir à deux niveaux :

– En associant à chaque agent les tâches qu’il sait et veut faire.

– En associant à chaque définition d’agent les tâches que les instances peuvent faire. Les schémas d’organisations sont alors définis comme des points de vue aggrégeables, représentant chacun un ensemble de rôles conçus pour s’exécuter d’une façon coordonnée. On est bien en présence d’une modélisation structurelle et fonctionnelle d’un système.

Néanmoins, l’accent mis sur la simulation fait que d’autres parties du modèles proposé sont nettement moins génériques. Par exemple le rôle est défini avant tout comme un com- portement, via une classe, plutôt que comme un point d’interaction, et tout comportement est par principe rattaché à un rôle. Cela aboutit à une définition très complète du rôle (où les comportements peuvent être réactifs, proactifs) mais qui obligent parfois à transiger quand on veut définir des connaissances ou comportement de base au niveau de l’agent. Ainsi un comportement spécifique (appelé comportement fonctionnel) est défini que pour per- mettre l’exécution d’autres comportements selon l’activité du système. On est a ce niveau très proche d’un niveau implémentatoire du système (et particulièrement de l’architecture de simulation) ce qui pose problème si l’on veut adapter le modèle à d’autres domaines.

Un autre aspect notable de la proposition est le modèle d’exécution réflexif d’un système de simulation conçu selon la proposition. Les agents, schémas d’organisation, système ou rôles sont réifiés et décris dans le même modèle. Par exemple, le rôle “agent” est capable de réagir aux perturbations ou notifications pour activer des comportements, d’établir un lien d’accointance vers le schéma d’organisation concerné. De même, le rôle “simulation” contrôle les transitions et l’état d’un cycle d’exécution. Même si l’action au meta-niveau n’est pas possible de façon générique, le contrôle de l’exécution d’un système simulé est tout à fait intégré au modèle.