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Partie II – Exploration comportementale de la fonction olfactive

2. Analyse de la discrimination olfactive chez le lapin adulte

2.2. Procédure expérimentale

Les animaux ont été mutualisés par plusieurs équipes afin d’étudier les effets de la pollution indirecte dans différents tissus (Figure B2). Pour ma part, je me suis donc intéressée aux tissus olfactifs et cérébraux.

Les femelles F0 (n=5 contrôles et n=7 exposées) ont été euthanasiées au 28e jour de

Figure B3 : Procédure expérimentale et collecte des tissus d’intérêt. 16 lapines gestantes ont été exposées du 3ème jour de gestation (GD3) au 27ème jour de gestation (GD27) à l’atmosphère polluée, dont la concentration en particules de fumées de diesel a été ajustée et contrôlée à 1 mg/m3, deux fois 1h/ jour, cinq jours par semaine ; en parallèle, 14 lapines gestantes ont été exposées, dans les mêmes conditions, à une atmosphère non polluée (air ambiant filtré). A GD28, les femelles F0 ont été euthanasiées afin de prélever la muqueuse olfactive (MO), le bulbe olfactif (BO) et le cerveau sur les fœtus F1; ceci en vue de réaliser des expériences moléculaires, biochimiques et histologiques (encadrement en vert). Neuf femelles de chaque groupe ont été conservées pour donner naissance à des lapereaux de génération F1, dont le comportement olfactif a été exploré à PND2 (astérisque en violet) ; puis, ils ont été élevés jusqu’à l’âge adulte. A PND118 et à PND190, certains animaux mâles ont été évalués dans un test de discrimination olfactive (astérisques en bleu). A PND216, des lapins adultes F1 issus de femelles contrôles et issus de femelles exposées ont été euthanasiés afin de prélever les structures olfactives et diverses structures cérébrales pour les expériences moléculaires, biochimiques et histologiques (encadrement en orange). Une partie des femelles adultes F1 a été mise en reproduction avec des mâles témoins issus de la lapinerie afin de produire une génération F2. Les lapines F1 gestantes ont été euthanasiées à GD28 et les dissections des structures fœtales d’intérêt de la génération F2 réalisées dans les mêmes conditions que la génération F1. Adapté de Valentino et al, 2016a.

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cerveau sur les fœtus F1; ceci en vue de réaliser des expériences moléculaires, biochimiques et histologiques (Partie III) (Figure B3).

Neuf femelles de chaque groupe ont été conservées pour donner naissance à des lapereaux de génération F1 (n=62 contrôles, n=55 exposés), dont le comportement olfactif a été exploré au deuxième jour de vie postnatal (PND2, Partie II), puis, ils ont été élevés jusqu’à l’âge adulte.

Au moment du sevrage (PND35), une épidémie de diarrhées a décimé un grand nombre d’individus F1 des deux sexes et dans les deux groupes. Malgré les mesures de prise en charge des animaux qui ont été décidées, le taux de mortalité a été de 55% chez les témoins et 41% chez les exposés. Au final, seuls 72 lapereaux (tous sexe et groupes confondus) ont survécu et ont pu être retenus pour la suite de l’étude.

Peu après le sevrage (PND118) et à l’âge adulte (PND190), certains animaux mâles (n=7 contrôles et n=11 exposés) [2] ont été évalués dans un test de discrimination olfactive de manière à établir la persistance, à l’âge adulte, d’éventuelles modifications précoces (PND2) de la perception olfactive (Partie II).

A PND216, des lapins adultes F1 issus de femelles contrôles (n=9 mâles et n=6 femelles) et issus de femelles exposées (n=10 mâles et n=8 femelles) ont été euthanasiés afin de prélever les structures olfactives et diverses structures cérébrales pour les expériences moléculaires, biochimiques et histologiques. Les tissus ont été traités de façon différentielle selon les besoins des explorations et analyses envisagées (Partie III) (Figure B3).

Une partie des femelles adultes F1 a été mise en reproduction avec des mâles témoins issus de la lapinerie afin de produire une génération F2. Les lapines F1 gestantes (n=6 contrôles et n=10 exposées) ont été euthanasiées à GD28 et les dissections des structures fœtales d’intérêt de la génération F2 réalisées dans les mêmes conditions que la génération F1 (Figure B3).

Les femelles gestantes F1 sélectionnées pour l’étude intergénérationnelle des effets de l’exposition aux PFD (n=3 contrôle et n=3 exposées), ne pouvant être gérées au niveau de la lapinerie du centre INRA de Jouy en Josas, ont été transférées dans les installations de l’animalerie centrale de la faculté de Médecine de l’Université de Lorraine pour procéder à l’étude de la génération F2.

Cet aléa expérimental a mené à la perte du groupe des femelles contrôles ; seuls les animaux F2 du bras exposé ont été testés au plan du comportement olfactif (PND2 et PND216), puis sur les structures olfactives et les cerveaux prélevés. Les résultats ne sont pas présentés ici.

[2]. Seuls les mâles ont été évalués dans ce test pour éviter l’influence du contexte hormonal propre aux femelles sur le comportement.

Partie II – Exploration comportementale de la fonction olfactive

1 Analyse de la sensibilité olfactive chez le lapereau ……….… 57

2 Analyse de la discrimination olfactive chez le lapin adulte ……… 59

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1. Analyse de la sensibilité olfactive chez le lapereau

A la naissance, l’olfaction joue un rôle déterminant dans la communication entre le nouveau-né et son environnement et plus particulièrement dans la communication mère-jeunes. En effet, les odeurs émises par la mère influencent le comportement de l’animal, qui utilisera ces stimuli pour s’adapter à l’environnement postnatal et survivre. En particulier, les odeurs présentes dans les fluides biologiques maternels, comme le liquide amniotique ou le lait, participent à la continuité chimique et facilitent la prise de la mamelle et l’initiation de la tétée chez la souris (Logan et al, 2012).

1.1. La réponse du lapereau à la phéromone mammaire

Chez le lapereau, la mère n’étant présente dans le nid que quelques minutes par jour, une mise en place rapide du comportement de tétée est primordiale pour sa survie. La production d’une phéromone mammaire (PM) au niveau de l’auréole a été décrite chez le lapin (Schaal et al, 2003) qui, présente dans le lait de la mère, déclenche de façon quasi-instantanée un comportement stéréotypé d’approche et de tétée chez des nouveau-nés qui la perçoivent (Coureaud et al, 2004) ; cette phéromone semble donc intervenir dans le guidage du lapereau vers les tétines et, in fine, dans le réflexe de tétée et de prise de lait.

Le lapin est donc une espèce très propice à l’étude des possibles perturbations du développement et du maintien des circuits neuronaux olfactifs. En effet, la reconnaissance de cette phéromone et la réponse qu’elle engendre chez le nouveau-né, plus le fait qu’une seule tétée par jour intervienne chez cette espèce, offrent la possibilité d’étudier la réactivité du lapereau à cette odeur et le développement des circuits olfactifs, et potentiellement de mettre en évidence des altérations de processus plastiques liés à une neurotoxicité (dans notre cas, induite par la fumée issue des moteurs diesel).

1.2. Test de reconnaissance à la phéromone mammaire 2MB2

Des lapereaux mâle et femelle (n = 62 témoins issus de 8 portées différentes et n = 55 exposés issus de 7 portées différentes) ont été étudiés au deuxième jour de développement post-natal (PND2) pour leur comportement en réponse à la présentation de la phéromone mammaire 2-Methyl-3-butyn-2-ol, (2MB2, catalogue # 136816; Sigma-Aldrich, Saint-Quentin Fallavier, France) dans les mêmes conditions décrites par Coureaud et collaborateurs (2004,2010).

Le deuxième jour de vie postnatale (PND2) a été choisi pour ne pas perturber la phase périnatale quelle que peu critique pour la survie des animaux et pour mettre en évidence de possibles modulations de la réponse à la phéromone, en évitant qu’interviennent des facteurs confondants de plasticité liée à l’apprentissage.

Afin d’essayer de normaliser la valeur de ce stimulus olfactif, l'accès de la mère au nid a été bloqué le soir précédant l'expérience à 17h.

Le test a été réalisé le lendemain matin (8h). Il a consisté à imprégner les gants de latex avec un peu de matière du nid (litière, poils de la mère), puis de prendre individuellement chaque lapereau entre les mains afin de faire un petit « nid », en laissant sa tête en dehors pour qu’il puisse la bouger librement.

Lorsque l’animal a atteint un état d'immobilité relative (1 à 3 min après la prise dans les mains), l'extrémité d'un bâton de verre (longueur × diamètre: 15 × 0.3 cm) a été trempée dans une solution de 2MB2 (concentration finale : 5,10-8g / ml dans l'eau), à une concentration choisie pour induire 60% de réponses positives chez des animaux témoins (Coureaud et al, 2004) et positionnée à 0,5 cm devant le museau de l’animal.

Le stimulus olfactif a été présenté pendant 10 secondes et la réponse de chaque animal a été enregistrée par caméra. Les films ont été ensuite visionnés par un expérimentateur en condition aveugle. Il a été considéré que l’animal répondait positivement s’il manifestait des mouvements de recherche, consistant en un balayage vigoureux horizontal et vertical de la tête et en un étirement du cou vers le stimulus odorant.

Une fois le test fini, l’animal a été immédiatement remis dans le nid avec le reste de la portée et identifié par un point. La totalité de la portée a été testée en moins de 15 minutes. La mère a été autorisée à accéder au nid dès la fin de l'expérience. Entre chaque animal, le bâton de verre a été rincé deux fois à l'éthanol absolu et à l'eau

distillée, puis séché avec un tissu (KIMTECH SCIENCE®, KIMWIPES™).

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2. Analyse de la discrimination olfactive chez le lapin adulte

Afin de mettre en évidence d’éventuelles modifications de la perception olfactive à l’âge adulte, les animaux contrôles et exposés ont été évalués dans un test de discrimination olfactive nommé « test de la boule à thé ».

2.1. Principe du test

Le test de la boule à thé est un test comportemental de sensibilité et de discrimination olfactive utilisé au laboratoire « Neuro-Biologie de l’Olfaction » (NBO) de l’INRA de Jouy en Josas afin de mesurer l'activité locomotrice et le comportement de reniflage en réponse à un stimulus chez le rat (Badonnel et al, 2012 ; Prud'homme et al, 2009) et qui a été adapté pour le lapin.

Le but de ce test a été d’évaluer la fonction olfactive des lapins en mesurant 1) la capacité de l’animal à localiser et discriminer entre une boule métallique vide et une boule métallique remplie de foin (odeur alimentaire hédonique), et 2) l’effet du jeûne sur la discrimination et le temps passé au contact de chaque boule.

2.2. Procédure expérimentale

Des lapins mâles ont été testés juste après le sevrage (PND118 ; n=11 contrôles issus de 9 portées différentes et n=16 exposés issus de 7 portées différentes) et à l’âge adulte (PND190 ; n=7 contrôles issus de 7 portées différentes et n=10 exposés issus de 5 portées différentes).

Des séances d’habituation ont été réalisées pendant 3 jours comme suit : à 8H du matin, les lapins ont été sortis de leur pièce d'élevage pour être emmenés dans une salle « neutre » sans nourriture (pour être hors odeurs alimentaires) ; entre 10H et 12H, le lapin a été mis dans le dispositif d’expérimentation, une grande cage grillagée pour lapins (100 × 55 × 43cm) (où se trouvent les boules à thé vides suspendues à chaque extrémité) et a été laissé libre de se déplacer pendant 15 min, afin de s’adapter au nouvel environnement. Des brins de foin ont été alors donnés afin d’habituer les animaux à l’odeur et au goût du foin. Puis chaque animal a été replacé dans la pièce d'élevage avec sa nourriture.

Le jour du test (24H après la dernière phase d’habituation), selon le même calendrier horaire, chaque animal a été posé au centre du dispositif, où deux boules à thé étaient suspendues à chaque extrémité de la cage à une hauteur de 40 cm (l'une vide et l'autre remplie de foin). L’animal a été laissé libre de se déplacer pendant 10 min. Des observateurs ont noté le nombre de changements de côté (franchissement d’une ligne virtuelle séparant la cage en deux parties égales gauche et droite) comme indicateur de l’activité locomotrice générale, et le temps passé dans chacune des zones comme indicateur d’une préférence de place. Ils ont compté le nombre et le temps passé

Figure B4 : Schéma du dispositif utilisé pour le test de la boule à thé. Le lapin a été mis dans le dispositif d’expérimentation, une grande cage grillagée pour lapins (100 × 55 × 43cm), où deux boules à thé étaient suspendues à chaque extrémité de la cage à une hauteur de 40 cm (l'une vide et l'autre remplie de foin). Des observateurs ont noté le nombre de changements de côté (franchissement d’une ligne virtuelle séparant la cage en deux parties égales gauche et droite, ligne noire en pointillées) comme indicateur de l’activité locomotrice générale, et le temps passé dans chacune des zones comme indicateur d’une préférence de place. Ils ont compté le nombre et le temps passé à renifler chacune des boules comme indicateurs de la motivation et de l’aptitude à discriminer une odeur hédonique (le foin). Une fois l’expérience finie, ils ont été remis dans la pièce d'élevage dans les conditions standard d’hébergement. Le soir même, la mangeoire a été retirée et les animaux ont été testés à nouveau dans les mêmes conditions le lendemain matin, après une mise à jeun de 16-18h. Dès le test terminé, ils ont été replacés dans la pièce d'élevage et nourris.

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à renifler chacune des boules comme indicateurs de la motivation et de l’aptitude à discriminer une odeur hédonique (le foin).

Une fois l’expérience finie, ils ont été remis dans la pièce d'élevage dans les conditions standard d’hébergement. Une illustration schématique est présentée en Figure B4.

Le soir même, la mangeoire a été retirée et les animaux ont été testés à nouveau dans les mêmes conditions le lendemain matin, après une mise à jeun de 16-18h. Cette mise à jeun a pour but de motiver l’animal vis-à-vis du test de discrimination comme montré chez le rat (Prud'homme et al., 2009). Dès le test terminé, ils ont été replacés dans la pièce d'élevage et nourris.

Les animaux ont été testés par groupe de 3, par 3 expérimentateurs en condition aveugle. De plus, la position des boules était intervertie entre chaque série de lapins testés; ceci en vue de contrebalancer de possibles inconvénients techniques (une préférence de place, par exemple), ce qui aurait biaisé l’analyse ultérieure des résultats.