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1.2 La pratique du séchage du bois

1.2.1 Procédés de séchage courants

Le séchage naturel ou à l’air libre est le procédé de séchage le plus simple ne nécessitant aucun apport d’énergie artificielle. Ce procédé est encore très souvent employé dans l’industrie du bois, soit comme seul moyen de séchage, soit combiné avec un autre procédé de séchage artificiel. Cependant, vu que les conditions de température et de l’humidité relative de l’air ne sont pas maitrisées dans ce mode de séchage, la qualité du bois reste tributaire de conditions climatiques extérieures. Il en résulte, d’une part, des risques de dégradation du matériau (fentes de surface et en bout). D’autre part, des temps de séchage très longs qui engendrent des frais d’immobilisation importants (Aléon, 2012). Le choix des professionnels s’est orienté ainsi vers le séchage artificiel qui permet de maitriser les conditions de séchage pour avoir un produit fini de qualité. Les procédés de séchage existants sont :

- séchage convectif à basse et moyenne température (pré séchoirs, séchoirs à pompe à chaleur, séchoirs à air chaud climatisé). Le séchage par air chaud climatisé, appelé aussi séchage conventionnel, est le procédé le plus ancien et le plus répandu dans l’industrie du bois.

- séchage convectif à haute température : les bois les plus fréquemment séchés moyennant ce procédé sont les résineux et dans une moindre mesure le peuplier. Les sciages sont généralement de faible ou moyenne épaisseur, inférieure ou égale à 50 mm (Aléon, 2012).

- séchage sous vide (continue, discontinue et en vapeur surchauffée) : ce procédé de séchage est adapté aux essences les plus difficiles à sécher (feuillus et résineux épais) (Aléon, 2012).

- séchage par rayonnement électromagnétique haute fréquence : ce procédé de séchage peut être bénéfique énergétiquement dans la mesure où il propose un transfert direct d’énergie entre la source et le matériau à sécher et permet, en outre, de concentrer l’énergie sur les surfaces ou volumes à sécher.

- séchage mixte vide/haute fréquence. - séchage solaire ou par infra-rouge.

Une description détaillée des principaux procédés de séchage du bois se trouve dans les ouvrages de Joly et More-Chevalier, 1980 ; Aléon et al., 2001 et Aléon, 2012.

Nous allons dans ce qui suit comparer les procédés de séchage les plus utilisés en industrie selon la durée du séchage, l’efficience énergétique et la qualité du bois séché.

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1.2.1.1 Durée

La durée nécessaire pour le séchage du bois en tenant compte du critère qualité mécanique du produit fini est le résultat d’un équilibre subtil entre les caractéristiques du bois séché, l’épaisseur des avivés, les caractéristiques du séchoir et les priorités de production (Perré et al., 2012).

Le tableau 1.3 récapitule la durée du séchage observé en industrie pour deux catégories d’espèces (feuillus de haute densité et résineux) selon le procédé de séchage utilisé et la teneur en eau initiale et finale (Perré et al., 2012 adapté de Joly et More-Chevalier (1980) et Aléon et al., 2001).

Tableau 1.3. Comparaison de la durée de séchage (jours) du bois d’épaisseur 27 mm de résineux (R) et de feuillus de haute densité (F) selon différents procédés (Perré et al.,2012).

Procédé de séchage Etat vert à 18 % Etat vert à 10 % 30 % à 10 % Séchage à l’air R F 25 - 60 190 - 340 impossible Séchage conventionnel R F 2 15 - 20 3 20 - 30 1.5 10 - 15 Déshumidification R F 7 - 8 20 - 25 10 - 12 25 - 35 5 - 7 18 - 20 Vide continu R F 1.5 4 - 5 2 5 - 6 1 2.5 - 4 Nous pouvons constater, tout d’abord, qu’il est impossible d’atteindre certaines teneurs en eau finale en utilisant le séchage à l’air libre. Ceci est lié à l’impossibilité d’obtention d’une teneur en eau finale inférieure à l’équilibre hygroscopique extérieure.

Le temps de séchage le plus court est obtenu pour le procédé sous vide particulièrement dans le cas de séchage des feuillus. Ce gain en temps est obtenu grâce à une amélioration de la circulation de l’eau dans le bois par l’augmentation du coefficient de diffusion de la vapeur d’eau et par la création d’un gradient de pression dans le bois sous l’effet de la vaporisation de l’eau (Aléon, 2012).

La durée du séchage est fortement influencée par l’espèce séchée et ce pour tous les procédés. En effet, le séchage des feuillus est beaucoup plus lent que le séchage des résineux. Ceci est expliqué par la difficulté de séchage de certaines essences nécessitant ainsi l’utilisation des conditions de séchage modérées. C’est le cas du chêne, par exemple. Cette essence est caractérisée par des transferts internes laborieux en plus des risques de discoloration, de collapse et de fissures dues à la présence des gros rayons ligneux (Perré, 1993).

Les durées de séchage par déshumidification sont plus longues que celles obtenues avec le séchage conventionnel et sous vide. Ceci est dû aux faibles températures de fonctionnement de ce procédé.

1.2.1.2 Qualité

Différents critères peuvent être utilisés pour évaluer la qualité du séchage à savoir l’homogénéité de la teneur en eau finale dans la pile de planches ainsi que dans l’épaisseur de chaque planche, l’importance des défauts observés à la fin du séchage (collapse, fentes, déformations et discolorations) et le niveau des contraintes internes. L’Institut Technologique Forêt Cellulose Bois-construction Ameublement (FCBA) a évalué la qualité du bois séché par les différents procédés de séchage existants (Aléon et al, 2001 ; Aléon, 2012). Dans ce paragraphe, nous présentons une synthèse des résultats obtenus.

 séchage à l’air libre : l’alternance du jour et de la nuit permet un séchage peu brutal. En effet, la diminution de la température de l’air et l’augmentation de son humidité relative pendant la nuit permettent l’élévation de l’équilibre hygroscopique du bois et ainsi sa teneur en eau. Il en résulte une diminution des contraintes de traction à la périphérie du bois pendant les deux premières phases de séchage, avant l’inversion des contraintes. En outre, le séchage naturel, par sa faible température d’air, est plus favorable que le séchage artificiel du point de vue des discolorations apparaissant sur le chêne. Néanmoins, comme nous l’avons mentionné auparavant, ce mode de séchage présente des risques de dégradation du bois.

 Séchage à haute température : permet une diminution, pouvant aller jusqu’à 30% selon l’espèce, des déformations du matériau par rapport au séchage à moyenne température. Ceci est conditionné par un empilage rigoureux et un chargement adéquat. Cependant, il est difficile d’obtenir une aussi bonne homogénéité de séchage qu’à moyenne température et les bois présentent à la fin du séchage une teinte plus foncée.

 Séchage par pompe à chaleur : moins de risque de dégradations du bois (type collapse, discoloration, etc.) en raison de l’utilisation de températures faibles. Cependant, ce niveau faible en température ne permet pas une activation de la viscoélasticité, caractéristique favorable à la qualité du matériau de point de vue des contraintes de séchage.

 Séchage sous vide : la qualité du séchage est comparable à celle obtenue à pression atmosphérique, sous réserve, pour les feuillus, que les bois aient été préalablement ressuyés jusqu’à une humidité inférieure ou égale à 40%.

1.2.1.3 Energie

Pour tous les types de séchoirs, deux formes d’énergie sont à fournir. L’énergie électrique pour le fonctionnement des ventilateurs et l’énergie thermique pour l’élévation et le maintien de la température de l’air dans la cellule de séchage.

L’énergie calorifique et même frigorifique pour les séchoirs par déshumidification, peut être fournie :

- soit par de l’électricité (résistances),

- soit par l’intermédiaire d’un fluide chauffant ou frigorifique. Celui-ci peut être chauffé ou refroidi grâce à une chaudière brûlant un combustible particulier (fuel, bois, gaz,

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25 charbon), soit par l’intermédiaire d’un compresseur à moteur électrique (séchage sous vide).

Chaque manière de sécher le bois implique une consommation spécifique d’énergie pouvant varier fortement. Nous reportons dans le tableau 1.4 la consommation énergétique des procédés de séchage les plus répandus. Ces données sont issues de différentes études réalisées par le FCBA sur des séchoirs industriels.

Tableau 1.4. Consommation d’énergie par kilogramme d’eau évaporée (Perré et al., 2012 adapté de Aléon et al., 2001 et Chanrion et Davesne, 1991) ; Aléon (2012).

Procédé Espèce Epaisseur (mm)

Teneur en eau (%) initiale finale Consommation énergétique (kWh.Kg-1)

Calorifique Electrique Totale

Séchage conventionnel Chêne3 27 30-10 2.65 0.49 3.14 Chêne3 27 60-10 2.10 0.36 2.46 Chêne3 54 40-14 2.73 1.27 4 Hêtre3 27 30-10 1.20 0.16 1.36 Hêtre3 27 60-10 1.00 0.15 1.15 Hêtre3 54 40-14 1.10 0.36 1.46 Pin3 27 90-10 1.35 0.06 1.41 Pompe à chaleur Chene4 27 60-10 - 0.78 0.78 Chene4 54 40-14 - 1.83 1.83 Hêtre4 27 60-10 - 0.56 0.56 Hêtre4 54 40-14 - 0.90 0.90 Résineux4 27 80-10 - 0.57-0.640.41-0.48*** 0.41-0.48* 0.57-0.64** Séchage sous vide Chene4 27 31-10 2.18 0.43 2.61 Hêtre4 27 25-9 1.02 0.18 1.20 Sapin-épicéa4 80 64-13 1.33 0.4 1.73

Dans ce tableau, la consommation énergétique est exprimée par des ratios qui donnent la quantité d’énergie consommée pour évacuer 1 kg d’eau. Le séchoir idéal devrait se rapprocher de l’enthalpie de la vapeur d’eau qui est de 620 Kcal/kg à 640 Kcal/kg soit un ratio de 0,720 kWh/kg à 0,744 kWh/kg.

La consommation énergétique varie, pour le même procédé, selon l’essence du bois séché, sa teneur en eau ainsi que son épaisseur. Elle est plus élevée pour les feuillus notamment le chêne ainsi que pour les sciages les plus épais. Ceci est dû d’une part à la durée du séchage plus longue. D’autre part, au fonctionnement des ventilateurs ainsi qu’aux pertes de chaleurs qui sont proportionnelles au temps du séchage.

3 Perré et al. (2012) (adapté de Aléon et al., 2001 et Chanrion et Davesne, 1991)

Dans le cas du séchage conventionnel, pour la même teneur en eau finale, la consommation d’énergie par kilogramme d’eau évaporée est plus élevée pour le bois ayant une teneur en eau initiale de 30% que celui de 60%. En effet, la migration de l’eau liée (en dessous du point de saturation des fibres) s’effectuant par diffusion, elle s’évacue très lentement, ce qui affecte les postes de consommation proportionnels au temps. En outre, une énergie supplémentaire est nécessaire pour vaincre les forces de liaisons des molécules d’eau liées aux chaines de cellulose et d’hémicellulose (ponts hydrogène) (chaleur différentielle de sorption).

La comparaison entre les trois procédés montre que la consommation énergétique est beaucoup plus faible pour le séchage par déshumidification. Par exemple pour le séchage des feuillus de 27 mm, la consommation énergétique varie entre 1.15 et 3.14 kWh/kg pour le séchage conventionnel, entre 0.56 et 0.78 kWh/kg pour le séchage par déshumidification et entre 1.20 et 2.61 kWh/kg pour le séchage sous vide. Ceci est lié au principe du fonctionnement de la pompe à chaleur. Cependant, la seule source énergétique de ce procédé est l’électricité dont le prix est plus élevé que les autres énergies (biomasse, gaz, fioul). La réduction de la durée pour le séchage sous vide tel que nous l’avons vu dans le paragraphe 1.2.1.1 s’est traduite par une réduction de la consommation énergétique notamment pour les bois de fortes épaisseurs.

Devant le coût croissant de l’énergie, l’efficacité énergétique du séchage gagne progressivement de l’importance parmi les préoccupations des industriels ainsi que des scientifiques. A cet égard, de nombreux travaux ayant pour objectif soit l’optimisation des procédés de séchage existants, soit l’étude de nouvelles stratégies de séchage plus performantes ou encore l’utilisation d’autres sources d’énergies renouvelables sont actuellement réalisés.