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Chapitre III : La production de monomères furaniques

III. 2.2. …du xylose au furfural

III.4. Procédés pour la production du furfural

La biomasse lignocellulosique

Toutes les biomasses végétales sont susceptibles d’être utilisées pour fournir du furfural, néanmoins certaines matières premières ne contiennent pas suffisamment de pentoses pour rendre leur usage économiquement intéressant. Mansilla et al cite le rapport de l’UNCTAD/Gatt sur la teneur minimum requise en pentosanes, afin d’être rentable au niveau industriel, à 18-20%151,152.

Cette teneur en pentose (xylose et arabinose) est donc ce qui oriente le choix de la matière première. L’industrie et la littérature se sont particulièrement concentrées sur: les épis de maïs153,154, la bagasse de canne à sucre154,155 ou encore les coques de riz154,156 qui, comme le montre le graphe 1, est riche en sucres pentosiques 7,157.

Graphe 1 : Teneur en pentose de quelques biomasse végétales7,157

Procédés industriels

La production industrielle a été lancée par l’entreprise américaine Quaker Oats en 1921. Depuis la demande n’a cessé d’augmenter et de nouveaux procédés ont vu le jour, afin de produire une quantité de plus en plus importante.

Le marché mondial du furfural était de 582 millions de dollars en 2015, ce qui représente en volume 300 000 tonnes, et pourrait atteindre à l’horizon 2021 1,1 milliard de dollars,

0 5 10 15 20 25 30 35 Epi de maïs Bagasse Coque d'avoine Coque de riz Paille de sorgho Paille de tricale Paille de blé Anas de lin Canne de maïs Eucalyptus globulus Teneur en pentose (% de MS) Ma tière p re m re

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soit 488 000 tonnes, ce qui correspondrait à une croissance de 11% par an158. La Chine est l’acteur majeur sur le marché mondial du furfural en produisant 80% du monomère et en consommant 75%159. Le coût de production du furfural impacte son prix et va dépendre de la demande, du lieu de production, ainsi que du coût de la matière première (principalement des rafles de maïs). Par exemple en 2005, le prix s’élevait à $1700/t de furfural pour un coût de production estimait à $900160.

Quelques procédés commercialisés ou à l’échelle pilote sont regroupés dans le tableau 13 et quatre exemples sont développés ci-dessous.

Tableau 13: Procédés industriels pour la production de furfural 138,161

Procédé Type réacteur Catalyseur Température

Durée Rendement molairel Quaker Oats Fermé H2SO4 150°C/ 5h ≈ 45% Chinois H2SO4 160°C/ 4-5h 50% Agrifurane* H2SO4 177-161°C/ND ND Quaker Oats* Continu H2SO4 184°C/ 1h 55%

EscherWyss* H2SO4 170°C/ 45 min ND

Rosenlew Auto-catalyse (formation acide acétique, formique) ND/ 2h ND * : Procédé abandonné ND : Non disponible

 Procédé Quaker Oats

Il s’agit du procédé historique d’obtention, au niveau industriel, du furfural. Cette méthode mise en place dès 1921 et toujours en cours. Il s’agissait de valoriser des co-produits céréaliers (coques d’avoine, bagasse, maïs) impropres à la consommation et présents en quantité en produisant du furfural dans un réacteur fermé. La biomasse est mise en contact avec de l’acide sulfurique (de 3 à 12%) pendant une durée de 5h et une température moyenne de 150°C avant de finir par une distillation. Le rendement moyen est de 45%. En 1996, l’entreprise lance un procédé en réacteur continu permettant d’atteindre un rendement de 55% en utilisant l’acide sulfurique comme catalyseur. Cette méthode est interrompue dès 1997 à cause d’un coût de maintenance onéreux et d’une technologie peu sûre138.

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 Procédé Agrifurane

Ce procédé utilisait un système de réacteurs en série, afin de réduire la consommation de vapeur, dans lequel était injecté un mélange de matière première et d’un filtrat issu de résidus pressés des réactions précédentes. Cet ajout permettait de réduire la charge en acide sulfurique (1%) dans le premier réacteur. Cependant cette technique s’avéra extrêmement coûteuse (contrôle des soupapes, presse pour obtenir le filtrat) et fut abandonnée.

 Procédé Supra Yield

Le procédé Supra Yield, développé par Zeitsch, est une technique permettant de produire du furfural par un système en continu de chauffage court et de dépressurisation lente afin d’extraire le furfural rapidement et ainsi limiter les réactions secondaires. Cette technique permet d’obtenir un rendement de 50 à 70%138,162.

 Procédé Vedernikov

Le procédé Vedernikov est un pilote industriel au sein de l’institut letton sur la chimie du bois. Des copeaux de bois en présence d’acide sulfurique dilué sont utilisés pour produire le furfural, sans abîmer la fraction cellulosique, par un entraînement à la vapeur. Le rendement en furfural avoisine ici les 55-75%161,163.

Procédés laboratoire à partir de biomasse lignocellulosique

Les procédés pour obtenir le furfural sont de plus en plus nombreux et en pleine évolution afin d’améliorer les techniques existantes.

Cette partie présente quelques procédés, d’obtention du furfural à partir de la biomasse végétale, retrouvés dans la littérature. La réaction permettant la formation du furfural se déroule dans un milieu aqueux où la température est souvent supérieure à 120°C. La réaction se déroulant le plus souvent dans un réacteur fermé, une pression peut être appliquée.

94 Les catalyseurs homogènes

L’utilisation d’acides homogènes comme l’acide sulfurique, chlorhydrique ou phosphorique est le procédé le plus retrouvé dans la littérature. L’acide sulfurique est particulièrement utilisé. Des études sur le rendement en furfural à partir d’épi de maïs153, des parties composants le riz151,156 ou encore des noyaux d’olive164. D’autres acides sont utilisés notamment l’acide chlorhydrique165,166 ou l’acide phosphorique167,168.

L’utilisation de ces acides que l’on pourrait qualifier de conventionnel présente un certain nombre de désavantages. Durant la réaction, une dégradation du furfural peut se produire (acide lévulinique, formique et les humines) abaissant la sélectivité et impliquant une étape de séparation supplémentaire, afin d’obtenir un produit pur. L’utilisation d’acide fort comme l’acide sulfurique peut provoquer des problèmes de corrosion nécessitant une maintenance ou un équipement adapté. Enfin la neutralisation de l’acide implique une quantité d’effluent aqueux importante.

Les catalyseurs hétérogènes

Les acides hétérogènes sont particulièrement recherchés afin de limiter les déchets en récupérant et en de recyclant l’acide afin de le réutiliser.

Parmi ces catalyseurs, les zéolithes sont particulièrement utilisées. Mu et son équipe ont converti des solutions hémicellulosiques, ainsi que des épis de maïs en furfural en utilisant dans le milieu réactionnel la zéolithe ZSM-5, les rendements étaient respectivement de 33% et de 46% 169,170. D’autres zéolithes (HMOR, H-β, HUSY), dont le ratio Si/Al était différent, ont été testées sur la conversion de la bagasse. Le meilleur rendement obtenu, en milieu aqueux, est de 20% avec le catalyseur HUSY 155.

D’autres catalyseurs ont été testés comme le TiO2 ou le ZnCl2 en complément d’un acide (H2SO4) 151 ou alors seul (TiO2, ZrO2)171. Ces derniers, en particulier le TiO2, permettent d’améliorer le rendement, ainsi que la sélectivité.

Cependant les conditions réactionnelles demeurent similaires à celles employées avec des acides homogènes (températures élevées, milieu aqueux, éventuellement pression), ce qui engendrent souvent la formation de co-produits. Par ailleurs, les acides hétérogènes

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sont aujourd’hui plus chers que les acides homogènes et certains nécessitent une préparation préalable avant utilisation.

Les systèmes biphasiques et liquides ioniques

La formation de co-produit et le manque de sélectivité sont deux problèmes majeurs lors de la réalisation d’hydrolyse acide pour obtenir du furfural. Le milieu aqueux pouvant avoir une incidence sur l’obtention du furfural car des réactions secondaires peuvent se produire comme la condensation (entre le furfural et des produits intermédiaires), la résinification (avec lui-même), la dégradation (formation de produits secondaires comme l’acide formique). L’utilisation d’un co-solvant organique ou d’un liquide ionique peut permettre de résoudre ces difficultés.

Les liquides ioniques sont par exemple décrits comme l’avenir de la chimie verte car présentés comme respectueux de l’environnement. Ils présentent d’autres avantages : une faible volatilité, ainsi qu’une stabilité thermique et chimique. Dans le cas de la production de furfural, ce liquide pourrait être récupéré et recyclé. Les liquides ioniques peuvent être utilisés seul 172, en présence d’un catalyseur173 ou avec un autre solvant174. L’utilisation d’un co-solvant permet lors de l’hydrolyse acide de récupérer le furfural dans la phase organique afin d’éviter sa dégradation. Ainsi le rendement est amélioré (entre 54% et 67% selon la biomasse de départ). Un système biphasique a ainsi été utilisé sur des épis de maïs170 ou de la bagasse 155. Le solvant présentant les rendements les plus intéressants s’avère être le toluène 155,170,175 malgré des restrictions de plus en plus importantes à cause de sa toxicité.

Ces procédés ne sont pas encore utilisés au niveau industriel, notamment à cause des coûts élevés que peuvent entraîner leur utilisation ou à cause de la toxicité de certains produits employés.