• Aucun résultat trouvé

CHAPITRE 1 – Introduction

1.2 Problématique du projet de recherche

1.2.1 Le Rework : définition et importance

La complexité des modules microélectroniques actuels implique de s’assurer davantage de leur intégrité électrique et mécanique lors de l’assemblage. Une fois que les joints de brasure sont formés, une inspection est faite à travers différents tests pour évaluer la fiabilité du module assemblé. Malgré le fait que l’objectif ‘zéro défaut’ est souhaité dans tout procédé, il n’est quasiment jamais atteint dans des procédés d’assemblage de modules microélectroniques, en raison de la qualité des puces originales, de l’efficacité de la technique d’assemblage, du type et du niveau de productivité du module, etc.

Le procédé suivant lequel un dispositif défectueux est retiré et remplacé par un nouveau dispositif non-défectueux (sur le même site) est appelé le ‘’rework’’ [4], [6]. Le terme rework est un terme particulièrement adopté dans l’industrie microélectronique mais selon la norme ISO 9000 portant sur le management de la qualité, il peut être assimilé à un procédé de reprise1

qui se fait sur la ligne de production lors de la fabrication du produit, comparativement à une réparation2 qui se fait dans le cadre d’une opération de maintenance [13].

Le choix d’effectuer un procédé de rework suite à l’assemblage se fait toujours dans un contexte de production de module de meilleur qualité, d’amélioration de rendement, et de réduction des coûts. Par exemple, pour un module MCM complexe possédant des centaines de puces dont une ou quelques-unes seulement sont défectueuses après l’assemblage, le remplacement des puces défectueuses peut s’avérer plus avantageux économiquement comparé au rejet complet du module [4], [6]. Le choix d’effectuer un procédé de rework se fait généralement de façon stratégique. En effet, il existe plusieurs études établissant des modèles algorithmiques qui identifient les paramètres optimaux des opérations de tests, de diagnostiques et de rework, dans le but d’obtenir un rendement optimal et une réduction du coût total de production d’un module (Fig. 1.6(a) [14]). Dans ses travaux, Abadir démontre qu’une réduction de coûts variant de 10 à 20% peut survenir grâce à l’utilisation d’une bonne stratégie de test, c’est-à-dire en déterminant ‘’où’’ et ‘’comment’’ tester lors du procédé d’assemblage [15]. Driels démontre quant à lui les bénéfices de l’utilisation d’une bonne stratégie de rework sur la réduction des coûts de production d’assemblage de circuits imprimés [16]. Il montre en effet que pour les procédés d’assemblage ayant de faibles rendements (≤ 70%), une stratégie de rework ‘’distribué’’ (effectuée tout au long du procédé d’assemblage) est très utile comparé à une stratégie de rework ‘’terminal’’ (effectuée à la fin de toutes les opérations d’assemblage) [16]. Il demeure néanmoins important de mettre sur pied des procédés de rework faciles, peu coûteux et adaptés au type de module présent pour la réussite de ces stratégies.

1 Une reprise est une action que l’on pose sur un produit non conforme pour le rendre conforme aux exigences. 2 Une réparation est une action que l’on pose sur un produit non conforme pour le rendre acceptable pour

27

Figure 1.6: (a) Exemple d’un modèle de simulation de test pour un module MCM [14], et (b) exemples de modes de défaillances pour un module Flip-Chip [3].

Il existe plusieurs défectuosités ou modes de défaillances dans un module Flip-Chip pouvant le rendre non fonctionnel après l’assemblage (Fig. 1.6(b) [3]). Il peut s’agir de fissures dans la puce, de délaminations ou soulèvements aux interfaces, de joints malformés ou de mauvaise qualité (ponts, non-contact, fissuration) … Pour ces cas où la défaillance se situe uniquement dans la puce ou dans les joints de brasures mais avec un substrat fonctionnel, un procédé de rework local est possible pour le retrait et le remplacement de la puce défectueuse.

La Figure 1.7 montre les étapes de réalisation du procédé de rework traditionnel pour un module Flip-Chip MCM de 3 puces dont une est défectueuse. Pour les modules MCM en particulier, le défi est d’effectuer un rework local - uniquement sur la puce défectueuse - avec très peu (voir pas) d’effets sur les bonnes puces adjacentes et le substrat : après les tests, une température proche du point de fusion des brasures est appliquée sur la puce défectueuse et une force est ensuite appliquée pour arracher la puce vers le haut; les brasures excédentaires et manquantes sont ensuite corrigées grâce à un redressement et/ou un remplissage; enfin, la nouvelle puce est assemblée en respectant l’intégrité des brasures originales. Ce procédé de rework décrit est communément appelé ‘’rework thermique’’ avec méthode de retrait par thermo-traction.

1.2.2 Les défis actuels du rework

Dans les années 1980, les premiers modules MCM étaient généralement fabriqués avec des substrats en céramique ou MCM-C (Multi Chip Module Ceramic) [6] (Fig. 1.8(a) [17]). Mais les améliorations continues qu’ils subissent d’années en années sont aussi passées par le changement des matériaux utilisés, par exemple les substrats organiques (plus minces et plus souples que la céramique) qui sont majoritairement utilisés aujourd’hui. Ces substrats organiques sont généralement constitués d’empilements de couches d’isolants polymériques alternées avec des couches métalliques conductrices en cuivre [4]. Les substrats organiques sont habituellement reconnaissables par leur couleur verte (carte mère, PCB) et sont communément appelés les laminés organiques (organic laminate substrates) (Fig. 1.8(b) [17]).

Dans la recherche d’amélioration continue des performances, les modules microélectroniques actuels sont constitués d’une large variété de familles de matériaux assemblés ensemble : métaux (ex. brasures et métallisations), semi-conducteurs (ex. puces en silicium), céramiques (ex. substrats et isolants), polymères (ex. substrats laminés et résines), verres (ex. isolants) et matériaux composites (ex. underfill) [9]. L’effet de la combinaison de tous ces différents matériaux sur l’intégrité du module se manifeste majoritairement sur sa résistance aux sollicitations thermomécaniques. En effet, chaque famille de matériaux présente un comportement différent face à une variation de température. Ce comportement se définit par le coefficient de dilatation thermique ou CTE (coefficient of thermal expansion) qui traduit l’augmentation des dimensions d’un matériau face à une hausse de température donnée. Le CTE peut varier de 3×10-6°C-1 (puce) à 80×10-6°C-1 (substrat laminé) d’un point à l’autre dans un

même module microélectronique soumis à une hausse de température [9].

Les températures utilisées pour le rework des puces d’un module MCM avec substrat laminé doivent alors être les plus basses possibles pour éviter de grandes dilatations inhomogènes, pouvant causer des dommages irréversibles (fissuration, gauchissement) dans le module, et donc l’échec du procédé de rework thermique.

Figure 1.8: Modules Flip-Chip MCM (a) à 7 puces avec substrat en céramique et (b) à 4 puces avec substrat laminé [17].

29

Hormis la réduction de taille des composants et puces, la réduction de la taille des interconnexions est certainement un autre grand changement dans les modules actuels. La technologie Flip-Chip avec des interconnexions C4 standards a démontré son importance car elle favorise la miniaturisation des modules en garantissant une grande densité d’intégration des composants. Mais son évolution conduit de nos jours à la technologie ‘’Puce retournée à pas fins’’ ou FPFC (Fine Pitch Flip-Chip) où les joints de brasures ont des dimensions plus petites et des pas d’interconnexions inférieurs à 60 µm (espace entre deux brasures), comparé aux pas d’environ 150 µm pour les brasures C4 standards [18]. Ces interconnexions à pas fins sont généralement formées à partir de microbilles en Sn-Ag sur des piliers de cuivre afin d’assurer une bonne tenue mécanique du joint (Fig. 1.9(a) [19]). Des études ont montré que la variation du volume des brasures n’affectait pas le taux de croissance des couches d’IMC lors de la formation des joints [20], [21]. Ceci implique que pour de très faibles volumes de brasures, l’épaisseur des couches d’IMC peut devenir égale à celle de la brasure comme le montre la Fig. 1.9(b) [21].

La forte présence de ces IMC est problématique pour la technique de rework thermique traditionnelle car le retrait de la puce par la thermo-traction impliquera des températures d’opérations très élevées (~400 °C [19], [22]), due au point de fusion des IMC qui est largement supérieur à celui d’une brasure SAC (~217 °C). Ceci pourra également causer l’échec du procédé de rework thermique à cause des dommages de la température élevée sur le substrat laminé sensible.

Figure 1.9: Images MEB en coupe de brasures Sn-Ag à pas fins avec pilier en cuivre. Références (a) [19] et (b) [21].