• Aucun résultat trouvé

CHAPITRE 1 PROBLÉMATIQUE DE RECHEHRCHES ET OBJECTIFS

1.2 Problématique

La circulation sur une chaussée en mauvais état peut amplifier les dégradations de la chaussée, menacer la sécurité de ses usagers, augmenter le temps de transport et entrainer des frais élevés pour l’entretien des véhicules (consommation supplémentaire du carburant, usures des pneus…). L’accélération des dégradations est due entre autres aux conditions climatiques particulièrement rigoureuses dans certaines régions ainsi qu’au manque de suivi et d’entretien. Les conséquences d’une mauvaise qualité d’un réseau routier ne sont donc pas négligeables (LCPC, 1994b).

Il est indispensable de trouver une solution pour limiter la dégradation du réseau et assurer une maintenance de celui-ci à un coût plus faible. Une des solutions est l’entretien; il présente de nombreux avantages notamment sur le point économique qui est le facteur déterminant et permet de rallonger la durée de vie des chaussées s’il est effectué au bon moment (Infraguide, 2003).

Figure 1.1 Graphique représentant l’Indice de l'état des chaussées PCI (Pavement Condition Index) en fonction de la durée de vie de la chaussée

7

La figure 1.1 représente l’évolution d’une chaussée sur une durée de vie d'environ 20 ans. Si un entretien préventif de la chaussée est appliqué à temps, il devrait régénérer les capacités initiales de la route et allonger sa durée de vie. Dans ce cas, le coût du traitement de prévention est de 1$ CAN/ m² (soit environ 0,84€/m²). Cependant, si le traitement est retardé, il devrait appliquer un traitement de réhabilitation, ce qui coûte généralement de 6 à 10 fois plus (6$ à 10$/m² soit environ de 5 à 8,4€/m²) que le coût du traitement de la chaussée. Si la route est trop abimée, elle devra même être reconstruite. La maintenance préventive est donc une solution viable (Bony, 2000).

La technique des ECF semble apporter des solutions pour ces problèmes. En effet, cette technique prolonge la durée de vie utile des chaussées de 5 à 7 ans en ralentissant la dégradation (orniérage à faible rayon et début de fissuration…) et permet de conserver de bonnes propriétés d’adhérence dans le temps. La popularité des ECF s’est construite à travers ses performances telles que l’adhérence, le confort acoustique moyen (77.3 dB(A) et l’étanchéité (Lebec, 2014). La formulation des enrobés coulés à froid est un art qui relève directement du savoir-faire des concepteurs spécialisés dans ce type de mélange.

Les critères recherchés, lors de la mise en œuvre de cette technique, sont (Garfa, 2016; Lebec, 2014; Robati, 2014b):

• un délai court de remise sous circulation;

• une tenue au trafic et aux contraintes climatiques; • une durabilité de l’adhérence;

• une capacité à redonner un bon profil à une chaussée (remplissage des ornières, colmatage des fissures, etc.);

• une économie d’énergie et une réduction des coûts.

De plus, l’accroissement des contraintes lié à l’application du management du développement durable permet aux ECF de s’imposer techniquement et économiquement en valorisant plusieurs de leurs exigences comme la maîtrise des coûts et de l’impact environnemental.

Néanmoins, les performances et le comportement des ECF ne sont pas encore totalement maitrisés, malgré l’état de connaissance des matériaux bitumineux, notamment des matériaux de formulation (GBR, granulats vierges, émulsion de bitume, etc.).

La fabrication des ECF consiste en un mélange proportionné de granulats (vierges et GBR), d’émulsion de bitume, de ciment et d’eau principalement. Étant donné que l’ECF est une technique à froid, l’interaction entre les GBR et l’émulsion de bitume est délicate, car les GBR, déjà enrobés d’un liant vieilli, se mélangent difficilement avec le liant d’apport neuf (température ambiante n’aide pas le processus). De plus, le bitume est un matériau viscoélastique sensible à la température et à la fréquence du chargement (Carter, 2002; Corté et Di Benedetto, 2004a). Il joue un rôle important dans l’interaction des matériaux de formulation. L’utilisation des GBR dans les ECF n’est pas encore bien maitrisée. Peu d’études scientifiques sur la formulation d’ECF avec du GBR ont été effectuées sur ce thème (Robati, 2014b). La technologie de formulation des ECF classiques est promue au sein de l’International Slurry Surfacing Association (ISSA) sous l’appellation de Microsurfacing. Les normes d’Amérique du Nord ISSA et ASTM sont les plus pratiquées dans le monde. L’ISSA a élaboré la spécification A143 pour la fabrication des mélanges d’ECF. Tandis que l’ASTM a développé un guide pratique D6372 pour la conception des Mix Design d’ECF (ASTM, 1999). En Europe, malgré l’utilisation des ECF depuis 20 ans, la profession manque de méthodologies normalisées de caractérisation et de formulation. Les entreprises spécialisées dans le domaine s’appuyaient sur les essais développés et publiés par l’ISSA. Elles ont développé des critères ou des méthodologies plus spécifiquement adaptées à leurs besoins (Cuelho, Mokwa et Akin, 2006) .

En France, la norme de référence sur les ECF est la NF EN 12273 (01-10-2008). Il s’agit d’une norme de spécification qui précise les exigences de performance sur les matériaux de formulation des ECF ainsi que les procédures de contrôle relatives à la mise en œuvre des ECF. Un guide pratique sur les matériaux bitumineux coulés à froid est récemment apparu en France en septembre 2017, basé sur la version provisoire réalisée en 10/01/2013) (Brosseaud et al., 2013).

9

Les travaux de Robati (2014b) sur la formulation des ECF destinés à résoudre les problèmes de dégradation engendrés par l’orniérage des couches supérieures de la chaussée ont démontré que les ECF répondent aux besoins des utilisateurs et permettent une résistance aux différentes déformations permanentes. Il a été également prouvé que les ECF fabriqués avec des matériaux recyclés peuvent être formulés tout en respectant les critères de l’International Slurry Surfacing Association (ISSA).

Cependant, en continuité de ces travaux, plusieurs autres défis restent à relever, à savoir comprendre l’interaction entre les GBR et l’émulsion du bitume (même si la fabrication des ECF recyclés est réalisable), suivre l’évolution des enrobés coulés à froid dans le temps (hautes et basses températures), évaluer le comportement mécanique des ECF et chiffrer l’impact environnemental de cette technique de revêtement.

L’ECF est un matériau hétérogène, complexe et contient beaucoup de phases (ISSA, 2005e; Robati, 2014b) : une matrice viscoélastique composée d’un mélange de bitume et de filler, un squelette granulaire rigide et un faible pourcentage de vide non considéré dans les propriétés des ECF. La prédiction du comportement d’un tel mélange nécessite donc une maitrise de la microstructure et du comportement mécanique des différentes phases. Un des premiers aspects à maitriser dans le comportement des ECF est le caractère évolutif du liant du bitume (vieillissement dans le temps). La faible épaisseur des ECF peut faire en sorte que son comportement vis-à-vis du vieillissement thermique et à l’UV, et du gel-dégel soit différent du comportement des enrobés standard.

De plus, son apport structurel est peu probable, vu sa faible épaisseur. Cependant une vérification de l’impact structural peut être effectuée par des essais de module d’élasticité et des simulations sur Alizé-LCPC. L’ajout des GBR, dans la formulation des ECF, peut influencer le comportement du liant bitumineux du mélange, vu les caractéristiques altérées du bitume issu de ces derniers.

Il est nécessaire de déterminer les propriétés de l’ECF et les proportions optimales des différents composants pour obtenir les meilleurs résultats du point de vue mécanique (améliorer l’adhérence, durée de vie de la chaussée et meilleur comportement face aux déformations), économique (une solution d’entretien pas chère) et environnemental (une technique à froid donc économie d’énergie).

Documents relatifs